Bonjour
Il arrive que les politiques se saisissent de l’éthique à des fins politiciennes. Laissons dans l’ombre les marigots de l’ancien parti majoritaire. Ne retenons qu’une information, prise au vol dans le moulin médiatique à paroles qu’est redevenu celui qui fut président de la République française (2007-2012).
Marbre
Les radios déflorent aujourd’hui un entretien qui paraîtra demain sur l’éternel papier glacé du Figaro Magazine. Le nouveau candidat à la présidence de l’UMP s’y dit « favorable » à une nouvelle inscription dans la Constitution de la République française ( elle aura 56 ans le 4 octobre prochain) : graver dans son marbre que les techniques de procréation médicalement assistée sont réservées aux seuls « couples hétérosexuels infertiles ».
« Mon devoir sera de rassembler les Français sur une position conforme à nos valeurs, sans rouvrir les plaies. Pour le moins, je considère qu’il faudra inscrire dans la Constitution des verrous juridiques pour réserver la PMA aux couples hétérosexuels infertiles et interdire complètement la GPA (gestation pour autrui). C’est le seul moyen d’enrayer la jurisprudence dont la Cour de cassation, ainsi que c’était prévisible, pose les premiers jalons. »
Spécifique
« Réserver la PMA aux couples hétérosexuels infertiles et interdire complètement la GPA » sont deux objectifs déjà atteints. La pratique des mères porteuses par diverses dispositions pénales qui ne laissent place à aucune discussion. La PMA fait d’autre part l’objet d’une disposition spécifique depuis les premières lois de bioéthique de 1994 :
«L’assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité d’un couple ou d’éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité. Le caractère pathologique de l’infertilité doit être médicalement diagnostiqué. L’homme et la femme formant le couple doivent être vivants, en âge de procréer (…).» Article L. 2141-2 du Code de la santé publique.
L’épouse de la mère
Pourquoi vouloir inscrire dans la Constitution des dispositions qui figurent déjà dans le code pénal et celui de la santé publique. L’ancien président de la République invoque « la jurisprudence dont la Cour de cassation pose les premiers jalons ». Il fait référence ici à une toute récente décision sur l’adoption rendue par les magistrats de la plus haute juridiction de l’ordre judiciaire.
La Cour de cassation a estimé le 23 septembre, que le recours à la PMA (à l’étranger et par insémination artificielle avec donneur anonyme) « ne fait pas obstacle à ce que l’épouse de la mère puisse adopter l’enfant ainsi conçu ».
Fraude à la loi
Ces magistrats écartent ici toute « fraude à la loi ». C’est cet argument qui avait, ce printemps, été avancé pour refuser une adoption par le tribunal de grande instance de Versailles. La Cour de cassation estime en substance que le fait que des femmes aient recours, à l’étranger, à une pratique interdite en France « ne heurte aucun principe essentiel du droit français ».
Pour comprendre il faut rappeler que la loi sur le mariage pour tous a ouvert le droit à l’adoption aux couples de même sexe, mais sans se prononcer sur la question de la PMA. Le gouvernement socialiste n’a donné aucune instruction d’application de la loi aux parquets. Aussi les parquets naviguent-ils à vue –une forte majorité accordant l’adoption, souvent au nom de « l’intérêt supérieur de l’enfant ».
Appel solennel
Ce n’était pas le cas du tribunal de grande instance de Versailles qui, en avril dernier avait refusé une adoption, estimant que « le procédé qui consiste à bénéficier d’une assistance médicale à la procréation interdite en France, puis à demander l’adoption de l’enfant, conçu conformément à la loi étrangère mais en violation de la loi française, constitue une fraude (…) et interdit donc l’adoption de l’enfant illégalement conçu ».
Sans l’évoquer explicitement l’ancien président de la République tient compte ici de la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) –condamnation prononcée au motif que la France refuse de transcrire à l’état civil les actes de naissance d’enfants nés par mères porteuses aux Etats-Unis. En dépit d’un appel solennel à François Hollande (lancé en juillet dans les colonnes de Libération) par de nombreuses personnalités de gauche le gouvernement n’a pas fait appel de cette décision.
Marché de l’enfant
On peut voir là une forme d’acceptation a minima de pratiques condamnées en France au nom de l’éthique mais tolérées à l’étranger où elles alimentent de nouveaux marchés. On peut aussi y voir un pragmatisme qui anticipe une dépénalisation prochaine de ces pratiques dans l’Hexagone. Les silences ou les ambiguïtés de l’actuel président de la République sur ces questions expliquent le soudain intérêt que leur porte celui qui l’a précédé à ce poste. Il sait aussi ce qu’il en est des divisions schizophrénies socialistes quant à la la pratique des mères porteuses.
« Jamais je n’accepterai la marchandisation de l’enfant » affirme l’ancien président de la République dans le Figaro Magazine. C’est là une belle formule. « La marchandisation de la personne » en eût été une plus belle encore. Ce sera pour la prochaine fois.
A demain
Comme quoi, il n’a pas changé. Un fait divers, une loi. Inflation législative sans même utiliser ce qui existe déjà.
Quid de condamnations de la CEDH (peut-être pas possible du fait de la hiérarchie des normes) ?
Cela n’empêchera de toute façon pas les femmes de continuer à faire ce qu’elles font déjà, et ne répondra pas aux questions sur l’adoption.
Nous sommes entrés dans un monde dans lequel l’homme doué de raison peut faire plier la nature selon son vouloir… et dans lequel les riches (nous, occidentaux peut-être plus pour longtemps) pouvons exploiter les pauvres pour notre bon vouloir.
Plus aucune transcendance
A suivre