Bonjour
Jeudi 23 octobre. Les chiffres officiels, comme une bouée du Tinanic : près de dix mille cas dont près de cinq mille morts. Chacun sait que c’est faux. La réalité est bien plus élevée mais ne brusquons pas une OMS déjà au banc des accusés pour n’avoir pas agi en temps et en heure. L’OMS qui court après la montre et la montre qui ne cesse de s’emballer. Genève et sa ouate onusienne aseptisée qui « signale le manque de personnel médical étranger pour faire fonctionner les centres africains ». Genève qui observe qu’en dépit de l’augmentation des moyens dans les trois pays touchés « seuls 25 % des quelque 4.700 lits nécessaires dans les centres de traitement pour parvenir à l’objectif de l’ONU d’isoler 70 % des malades d’ici le 1er décembre sont actuellement disponibles ».
Le 1er décembre prochain verra le retour de la « Journée mondiale contre le sida ». A-t-on songé à y associer la lutte contre l’Ebola ? On offre le slogan : « Deux virus, un même combat ». « Zéro discrimination ». « Demain l’éradication ». Dérangeant ?
Jeudi 23 octobre. Nous sommes mois après la publication princeps du New England Journal of Medicine (Sylvain Baize et al). Un semestre qui restera marqué par l’action de MSF et des soignants africains anonymes tombés au combat. Un semestre qui préfigure le pire à venir. Le pire à court terme : l’OMS annonce plusieurs milliers de cas supplémentaires par semaine à partir de décembre. « Demain l’éradication ? »
Précisément : à moyen terme c’est l’endémie qui menace. Trois pays pestiférés qui ne parviendront plus à éradiquer la circulation chronique du virus dans les populations urbaines. Et des bouffées de contaminations extérieures qui renforceront le blocus sanitaire. Air France qui ne desservira plus Conakry mais des flux d’avions sanitaires assurant des dessertes médicalisées sinon militarisées.
Jeudi 23 octobre. L’OMS et quelques représentants de Big Pharma continuent à évoquer les perspectives vaccinales. Les médias amplifient l’espoir sans trop insister sur les incompressibles délais « courant 2015…). Entretenir la flamme. Evoquer l’usage de sérothérapie passive qui pourra être fait du « sang des survivants ». La France avance un essai en Guinée : quelques comprimés d’un antiviral antigrippal japonais. Pourquoi pas ? Tout est possible est nécessité peut parfois faire loi.
« Faute de perspective d’endiguement rapide au Liberia, en Sierra Leone et en Guinée, les trois pays frappés de plein fouet, le virus exacerbe les tensions entre population et autorités, dégénérant en émeute mortelle dans l’est de la Sierra Leone, région en quarantaine depuis août » rapporte l’Agence France Presse. Les autorités sanitaires américaines annoncent que toutes les personnes en provenance des trois pays africains concernés seraient étroitement surveillées pendant 21 jours, période maximum d’incubation de la maladie. Que fait la France ? Le Rwanda a quant à lui étendu ses mesures de précaution à l’Espagne et aux Etats-Unis, exigeant que les voyageurs y ayant séjourné dans les trois semaines précédentes communiquent quotidiennement pendant 21 jours leur état de santé.
A Monrovia l’aéroport international du Liberia a connecté ses bases de données aux listes des proches de malades, afin de leur interdire l’embarquement. Et ce même s’ils ne présentent pas de symptômes (et ne sont donc pas contagieux). C’est ce que vient de déclarer à l’AFP Binyah Kessely, le président du conseil d’administration de l’Autorité aéroportuaire libérienne. «Nous voulons éviter d’être embarrassés à chaque fois que quelqu’un quittera le Liberia pour aller contaminer un autre pays», a-t-il expliqué, en allusion à deux citoyens libériens qui ont introduit le virus au Nigeria (en juillet) et aux Etats-Unis (en septembre) – avant d’y succomber. L’auto-enfermement préventif en somme.
Jeudi 23 octobre. En Sierra Leone la grande majorité des nouveaux cas sont désormais signalés dans l’Ouest du pays y compris la capitale Freetown. On fait états de heurts dans l’Est, épicentre initial de l’épidémie : Bilan : deux morts, âgés d’une vingtaine d’années, et une dizaine de blessés, dont plusieurs parmi les forces de sécurité. L’émeute aurait éclaté le mardi 21 octobre dans la ville minière de Koidu après qu’un groupe de jeunes s’est opposé à un prélèvement sanguin sur une femme de 90 ans, mère d’un de leurs chefs. « Cette femme, considérée par les autorités sanitaires comme un cas suspect d’Ebola, est finalement décédée d’hypertension artérielle » disent les agences de presse.
Jeudi 23 octobre. Cuba la socialiste, qui a déjà déployé 165 médecins et infirmiers en Sierra Leone, en a envoyé 83 vers la Guinée et le Liberia. , Nkosazana Dlamini-Zuma, présidente de la Commission de l’Union africaine est attendue à partir d’aujourd’hui dans les trois pays afin «que le continent mobilise en toute urgence les ressources humaines si elles sont nécessaires».
En Guinée, les autorités ont annoncé le versement de 10.000 dollars (plus de 7.800 euros) à la famille de chaque agent de santé mort d’Ebola, grâce à l’appui financier de la communauté internationale. A Roissy, chaque matin, on prend la température des passagers du vol Conakry-Paris.
A demain