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27/10/2014. A Toulouse les médecins légistes ne vont pas encore aussi vite que leurs confrères des séries télévisées. Depuis vingt-quatre heures tous les médias étaient sous pression: la vérité allait être dite par Claude Dérens, procureur de la République d’Albi.
La vérité sur les causes exactes du décès de Rémi Fraisse, un manifestant âgé de 21 ans retrouvé mort la veille sur le site du futur barrage de Sivens dans le département du Tarn. Un projet contesté (1). Les conclusions des légistes étaient impatiemment attendues par les deux camps. Soit était la victime des agissements des forces de l’ordre dépêchées par la puissance publique, soit il en l’était pas. Dans un cas il devenait un martyr, dans l’autre il était la victime d’une forme de fatalité dans des circonstances qui resteraient à éclairer.
Procureur d’Albi
La température médiatique et politique montait. On attendait le « point presse » du procureur Dérens au Palais de justice de la vieille cité d’Albi. Ce « point presse » vient de s’achever. Et il faudra revenir pour connaître la vérité : Rémi Fraisse a été victime d’« une explosion ». Une explosion dont on ne sait pas encore si elle a pu être causée par une grenade lancée par les forces de l’ordre. «La plaie importante située en haut du dos de Rémi Fraisse a été causée, selon toute vraisemblance, par une explosion», a dit le procureur.
Des analyses « dont les résultats pourraient être connus mardi 28 octobre », doivent désormais établir si «une grenade, lancée depuis la zone où les gendarmes étaient retranchés» a pu être «à l’origine» de cette explosion.
Pas de particules dans la plaie
Ces éléments sont rendus publics alors que différents médias ont, ces dernières heures, rapporté qu’une grenade aurait pu atteindre le jeune homme (2). Ce dernier avait été « découvert mort au moment d’affrontements avec les forces de l’ordre ». Mais « aucun élément ne permet d’affirmer ni d’infirmer cette possibilité», a souligné le procureur. L’Agence France presse précise que ce dernier « a lu une déclaration et n’a accepté aucune question ». En réalité il les a précédées.
Le procureur a ainsi déclaré: « la déflagration a été forte puisque le jeune homme a été projeté au sol de façon violente». Il a encore dit que «selon le médecin légiste, la mort a été instantanée». «L’objet à l’origine de l’explosion n’a pas entraîné de flamme» et «aucune trace de particule métallique ou plastique n’a été retrouvée dans la plaie», a-t-il ajouté. Par conséquent, «le légiste ne peut ni affirmer ni infirmer, sur la base des lésions anatomiques relevées, que l’origine de la plaie proviendrait d’une grenade lancée depuis la zone où les gendarmes étaient retranchés».
Causalité et indépendance
Selon le magistrat, «il faut attendre les résultats d’analyses» effectuées au laboratoire de police scientifique de Toulouse pour connaître le rôle déterminant – ou pas – de la grenade qui aurait été lancée, pour expliquer si elle est à l’origine de l’explosion». Une plaie, une explosion, une grenade. Passer de l’observation anatomique à la balistique anatomo-pathologique, en somme. Etablir une relation de causalité.
C’est ainsi : il reviendra à la police scientifique de déterminer si les forces de l’ordre sont, ou non, à l’origine de la mort du jeune homme. Pour l’heure les parents de ce dernier viennent de faire savoir qu’ils déposeraient dès demain 28 octobre une plainte «pour homicide volontaire par une ou plusieurs personnes dépositaires de l’autorité publique». Cette plainte doit « permettre à un juge d’instruction indépendant de faire toute la lumière sur les circonstances du décès du jeune manifestant».
A demain
(1) Le rapport officiel du rapport d’expertise de ce barrage vient d’être publié sur le site de la préfecture du Tarn. On peut en prendre connaissance ici. Un jour viendra peut-être où il en sera de même des rapports d’autopsies médico-légales.
(2) Interrogé par i>Télé, le père de Rémi, Jean-Pierre Fraisse, a précisé que le jeune homme ne faisait pas partie des radicaux du mouvement et était allé sur le site Interrogé par i>Télé, le père de Rémi, Jean-Pierre Fraisse, a souligné que le jeune homme ne faisait pas partie des radicaux du mouvement et était allé sur le site «un peu en touriste», «avec sa copine». «Il y avait eu une manifestation très pacifique l’après-midi, puis il était resté le soir. Et là, il s’est excité», a déclaré M. Fraisse. Selon lui, Rémi «est allé à mains nues, apparemment, au milieu de tout ça, alors que les gens sont normalement casqués (…)».
Une réflexion sur “Barrage du Tarn : la police scientifique devra dire si une grenade policière a tué Rémi Fraisse”