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27/10/14. Ebola ou pas, les avocats sont toujours là. Aujourd’hui le dossier Kaci Hickox vs Etats-Unis. Kaci Hickox est une infirmière américaine qui a été mise en quarantaine dans le New Jersey après son retour d’Afrique de l’Ouest (Sierra Leone) où elle avait soigné des malades d’Ebola.
Aujourd’hui Mme Hickox estime avoir été traitée comme une criminelle. Son avocat affirme que cette affaire soulève « de graves questions de libertés constitutionnelles ». Un sujet avec lequel on ne plaisante pas aux USA. Une affaire symptomatique après la décision prise par plusieurs Etats imposant la mise en quarantaine sous la contrainte de personnes tenues pour potentiellement contagieuses – ce qui préoccupe bigrement la Maison Blanche et le maire de New York.
Du choc à la colère
Mme Hickox travaillait en Guinée pour Médecins Sans Frontières. Elle vient de raconter via de nombreux médias l’expérience traumatique qui a été la sienne : la mise en quarantaine à l’aéroport de Newark (New Jersey). « J’étais sous le choc, maintenant je suis en colère » dit-elle sur CNN. Son avocat, Me Norman Siegel estime que son isolement soulève notamment des questions de libertés civiles : sa cliente ne présentait aucun des symptômes d’Ebola et sa virémie était négative.
Me Siegel n’est pas un absolutiste. Il ne conteste pas au gouvernement américain le droit de placer des citoyens en quarantaine au nom de la santé publique. Mais ce droit ne saurait être ni sans limites ni contestable. L’affaire Kaci Hickox pose en somme la question éternelle de la liberté individuelle et de la santé publique. Une question vieille comme la peste. Une question qui se module selon les voies de contagion et la virulence de l’agent pathogène.
Ethique et droit comparé
Le virus Ebola aux USA renouvelle à merveille un sujet qui sera demain décortiqué par les chaires universitaires d’éthique, d’épidémiologie et de droit comparé. Peut-on mettre des héros en quarantaine ? Quels sont les formes américaines du respect dû aux héros américains ? La question est publiquement posée par Bill de Blasio, le maire de New York qui estime que Mme Hickox a été traitée avec irrespect lorsqu’elle a été placée à l’isolement. «Nous lui devons mieux que cela » a-t-il déclaré aux journalistes devant l’hôpital Bellevue de New York, où le Dr Craig Spencer est isolé et traité après avoir été contaminé par Ebola en Afrique.
A l’opposé Chris Christie, gouverneur du New Jersey Chris a défendu les mesures systématiques de quarantaine qu’il a décrétées expliquant sur Fox News que cette initiative deviendrait prochainement une « politique sanitaire nationale ». Ces mesures d’isolement (également prises par les Etats de l’Illinois et de New York) concernent tous les soignants rentrant aux Etats-Unis après avoir travaillé auprès de malades africains souffrant d’Ebola. Elles font suite après la découverte de la contamination du Dr Spencer plusieurs jours après son retour à New York.
Compensations financières
L’affaire Kaci Hickox conduit à bouleverser ce qui venait à peine d’être mis sur pied. Dimanche 26 octobre Andrew Cuomo, gouverneur de l’Etat de New York annonçait un assouplissement : les soignants concernés mais asymptomatiques pourront rentrer chez eux – c’est à leur domicile qu’ils seront placés sous surveillance. Des compensations financières seront prévues pour leurs pertes de revenus. Il s’agit ici de ne pas tarir la source des médecins et infirmières volontaires pour monter en première ligne sur le front africain.
Découragement
Or plusieurs experts redoutent que ces mesures ne découragent d’éventuels volontaires.
« Le meilleur moyen de nous protéger est de mettre fin à l’épidémie en Afrique, et le meilleur moyen de combattre la maladie là-bas est d’envoyer un maximum de personnels de santé sur place pour aider à soigner les malade a déclaré le Pr Anthony Fauci, directeur de l’Institut nationa américain des allergies et des maladies infectieuses sur CNN. Quand ils reviennent ils doivent être traités d’une manière qui ne les décourage pas d’aller là-bas. »
Cette analyse est partagée par la Maison Blanche, selon le New York Times, qui juge ces mesures « pas nécessaires et probablement contre-productives ». Le sujet est si important, et la fierté nationale si vive que Samantha Power, ambassadrice américaine à l’ONU, a déclaré que tous les travailleurs de la santé revenant aux États-Unis doivent être «traités comme des héros conquérants et non stigmatisés pour l’énorme travail qu’ils ont fait ». Mme Power s’exprimait lors de la première étape de sa tournée dans les trois pays les plus touchés par l’épidémie d’Ebola: la Guinée, le Libéria et la Sierra Leone.
Prières
« Je dirais que nous avons besoin de prières et de médicaments, de solidarité et d’argent » a aussi déclaré Mme Power. Elle n’a pas précisé les proportions respectives des livraisons espérées. Chacun donnera selon ses moyens. Et Dieu reconnaîtra sans doute les siens.
A demain