Bonjour
Marseille est un roman qui reste à écrire. Signée de Marisol Touraine, ministre de la Santé, la « lettre de mission » était datée du 11 mars 2013. Il s’agissait d’aller faire le ménage au sein de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Marseille (AP-HM) – le troisième CHU de France, 11 000 agents. Ce travail de Titans fut confié à Huguette Mauss et au Dr. Sylvain Picard, membres de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) ainsi qu’à Jean-Claude Delnatte et Jean-Yves Laffont, « conseillers généraux des établissements de santé ».
Le rapport en un clic
En janvier 2014 ces quatre spécialistes remettaient leur premier rapport (115 pages). On dispose aujourd’hui du rapport définitif « trois colonnes » (observations de l’AP-HM et réponses des quatre auteurs à ces observations).
Ce rapport définitif (150 pages) est une bombe marseillaise. La transparence étant parfois ce qu’elle est ce précieux document est accessible à tous, marseillais ou pas. Il suffit pour cela de cliquer ici. L’Agence France Presse y a été incitée qui révèle ce 29 octobre quelques extraits symptomatiques de l’ensemble :
« Gestion « archaïque », « système clientéliste », finances « inquiétantes », « privilèges » accordés au syndicat majoritaire (…) « L’inertie qui a caractérisé l’établissement pendant des années et la prégnance du poids politique et d’organisations syndicales fortes sont des freins réels à la restauration d’un fonctionnement normal de l’établissement », résument les auteurs.
Proximité de la mairie
« La bonne distance entre la mairie et les instances de l’AP-HM n’est toujours pas trouvée »,
« Il doit être mis un terme au système clientéliste qui a longtemps prévalu », intime l’Igas, qui développe : « Un grand nombre de recrutements de personnels non qualifiés est intervenu pendant de nombreuses années sur recommandations d’élus. »
La mission de l’Igas s’étonne, en outre, que les réunions du conseil de surveillance aient « toujours lieu à la mairie de Marseille et non dans les locaux l’établissement ».
Force ouvrière trop majoritaire
L’Igas cible également les « privilèges » accordés au syndicat majoritaire Force ouvrière : « Il convient de mettre fin à la situation réservée à une organisation syndicale, fût-elle majoritaire, et de la considérer comme les autres, sans privilège d’information et en évitant de lui laisser son rôle traditionnel de conseil en recrutement. »
L’Igas juge « inquiétante » la situation financière de l’AP-HM, « très fortement endettée » à cause notamment d’une « politique d’investissement ambitieuse et coûteuse ».
Un milliard d’euros
La dette de l’AP-HM a atteint un milliard d’euros fin 2012 et « l’objectif de retour à l’équilibre est toujours repoussé » et « n’est actuellement prévu qu’en 2014 », déplore l’Igas. « Les efforts pour y parvenir sont encore insuffisants », estime l’Inspection, alors que c’est un enjeu « fondamental pour assurer l’avenir de l’AP-HM ».
Le rapport est aussi cinglant concernant l’organisation de l’établissement. « Des activités sont gérées de manière archaïque », assène l’Igas, qui cite notamment la gestion « sous forme papier » des archives « sans cohérence entre les différents sites » de l’AP-HM. ».
Autrement dit
Tout ceci peut se dire autrement. C’est ainsi qu’au chapitre des recommandations (formulées depuis Paris et le ministère de la Santé) on peut lire :
« Les réunions du conseil de surveillance doivent se tenir au sein de l’établissement. »
« La maitrise des effectifs, la fiabilité des chiffres et le retour à la légalité la plus stricte sont des objectifs prioritaires. Il doit être mis fin aux procédures de recrutement ou de reclassement atypiques gérées au détriment des intérêts de l’AP-HM. »
« Recentrer la direction informatique sur le champ informatique et rattacher les autres activités (archives, standard et organisation) à d’autres directions en centrale »
« Mettre en œuvre sans délai un plan d’actions pour assurer la fiabilité et la sincérité des comptes DG AP-HM »
« Réduire le montant de la dette et la désensibiliser ».
Quelles seront, demain, les conséquences marseillaises de cette bombe hospitalière ? Paris a-t-il un pouvoir sur ce vieux port ? Notre talentueux confrère Jean Contrucci a beaucoup fait pour raconter l’histoire, la beauté et la vérité de Marseille. Il lui reste encore quelques thèmes à traiter.
A demain