Cannabis : un an après, le Sativex® ne devrait plus trop tarder à être mis sur le marché

Bonjour

Dans l’ombre de la « cigarette-électronique-au-cannabis-qui–ne-contient-pas-de-cannabis»: le Sativex®. La polémique sur la  Kanavape déclenchée (puis vite amplifiée par Marisol Touraine, ministre de la Santé) a eu un effet paradoxal : refaire parler du premier médicament à base du principe actif du cannabis (le THC – sous la forme Delta-9-tétrahydrocannbinol/cannabidiol). Et rappeler à cette occasion que c’est Mme Touraine qui en avait permis l’arrivée sur le sol français.

9 janvier 2014

Nous étions alors le 9 janvier dernier. Ce communiqué de presse ministériel était alors diffusé :

« SATIVEX® : l’autorisation de mise sur le marché accordée au médicament

L’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) vient d’accorder au SATIVEX®, par décision de ce 8 janvier 2014, une autorisation de mise sur le marché (AMM).

Marisol Touraine, ministre des Affaires sociales et de la santé, avait ouvert la possibilité, par un décret du 5 juin dernier, que des médicaments dérivés du cannabis sollicitent une AMM en France.

Le SATIVEX®, commercialisé dans plusieurs pays européens, notamment en Allemagne et au Royaume-Uni, est un médicament utilisé chez certains patients atteints de sclérose en plaques, pour soulager les contractures sévères (spasticité), résistantes aux autres traitements. [1]

Le traitement devra être initié par un neurologue et un réeducateur hospitalier. L’AMM est une étape préalable à la commercialisation du produit, qui interviendra à l’initiative du laboratoire. »

Le « laboratoire » ? Sans soute aurait-il voulu que les choses aillent plus rapidement. Il s’agit ici de la société Almirral (société pharmaceutique fondée en 1943 et basée à Barcelone).

Mars 2014

Après avoir donné son AMM le 8 janvier 2014 l’ANSM est revenue sur la question du Sativex® en mars . Le compte-rendu de la réunion témoigne de l’inquiétude des autorités sanitaires quant au risque de détournement du produit. Extraits :

« L’indication de ce nouveau médicament était la même que celle de tous les autres pays européens : « spasticité dans la sclérose en plaques après échec des autres thérapeutiques. Il s’agit à présent d’aborder les étapes de fixation du prix et d’agréments aux collectivités, précisait-on à l’Agence.

La délivrance et la mise sur le marché de ce médicament ne sont pas de la responsabilité de l’ANSM, contrairement au plan de gestion des risques (PGR), aux conditions de surveillance et au programme de minimisation du risque. A ce jour, aucune date n’est fixée pour la commercialisation du médicament, annoncée pour début 2015 par le laboratoire.

Les conditions de prescription et de délivrance sont une primo-prescription réservée aux neurologues hospitaliers et aux médecins de rééducation hospitaliers, avec une délivrance en pharmacie de ville. Elle rappelle que sur la possible prescription initiale en médecine de ville, l’avis de la Commission n’a pas été suivi pour des questions de sécurité. En effet, la plupart des neurologues de ville exerçant également à l’hôpital, cela ne gêne pas l’accès des patients à ce traitement.

En outre, le Sativex® étant prescrit en seconde intention, ces patients sont fréquemment pris en charge et suivis à l’hôpital (…) le premier point de préoccupation est la prescription hors AMM du Sativex®. L’ANSM a reçu des demandes de médecins souhaitant le prescrire dans d’autres indications (cachexie du sida, douleurs…).

Or, ce produit n’a pas d’indication pour le traitement de la douleur, mais de la spasticité. (…) l’ANSM rencontrera le laboratoire sur différents problèmes pratiques dont le stockage. Le laboratoire a déjà assuré que la délivrance en pharmacie d’officine pourrait se faire le jour même de la prescription ou de la présentation de l’ordonnance. Elle rappelle aussi que la proposition de sécuriser un réfrigérateur ou d’y installer une boite fermant à clef a été prise en compte. »

Octobre 2014

Six mois plus tard le dossier du le Sativex® arrivait devant la Commission de transparence de la Haute Autorité de Santé. C’était le le 22 octobre dernier.

Le laboratoire Almirall contestait alors  les conclusions d’un avis du 25 juin 2014.  Il s’agissait d’une contestation assez pointilleuse sur le libellé de l’indication. Après une expertise externe les discussions ont notamment porté sur la gravité de la pathologie visée par le traitement, les conséquences de cette spasticité chez les patients atteints de SEP, les décisions de mise en route d’un traitement eu égard à la gravité de la pathologie et son impact sur la qualité de vie du patient, les données cliniques disponibles, dont les études pivot randomisées en double aveugle (réalisées sur la base d’une échelle numérique en termes de spasticité ressentie),  les échelles utilisées, subjectives, l’absence de critère clinique pour évaluer l’efficacité, la très faible quantité d’effet observée dans les études versus placebo, le fait que 50 % des patients n’aient pas été répondeurs au traitement, les améliorations observées sur des critères secondaires (sommeil, activités quotidiennes….) qui doivent être confirmés par d’autres études, l’absence d’impact du traitement en termes de qualité de vie malgré l’utilisation d’une échelle validée mais non spécifique, les réserves quant à la démonstration de la preuve d’efficacité de ce traitement en « add-on » sur la base des données disponibles, le problème posé par le fait que le bénéfice du traitement soit défini de manière différente dans les études, le profil de tolérance, avec notamment des sécheresses buccales et des trouble digestifs, la question du risque d’utilisation à titre récréatif et de dépendance, l’absence de démonstration de phénomènes d’accoutumance ou de syndromes de sevrage observés dans les études, (…) les inquiétudes de l’ANSM quant aux prescriptions hors AMM dans des maladies différentes de la SEP.

Au final la Commission de transparence a fixé le « Service médical rendu » (SMR) au rang de « faible » et classé l’Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR) au rang V.

Aujourd’hui le dossier Sativex® est en cours d’instruction auprès du Comité économique des produits de santé  – une instance dont les délibérations tiennent du secret-défense.

Année 2015

« Nous avons bon espoir de pouvoir commencer à commercialiser cette spécialité au cours du premier trimestre 2015, nous déclaré Christophe Vandeputte, directeur pour la France de la société Almirall. En moyenne en Europe, le prix hors taxe est de 440 euros par mois. Le Sativex® est déjà commercialisé  dans 22 pays, dont 17 pays européens, précise M.Vandeputte, citoyen belge. Nous sommes toujours surpris de voir à quel point, en France, tout ce qui touche au cannabis prend aussitôt une dimension politique. De ce pont de vue aussi il existe bien une exception française. »

Toxicomane ou pas le citoyen français aimerait  être éclairé sur les raisons de cette exception -ainsi,, plus généralement, que sur les rapports entre la France et les addictions.

A demain

 (1) Une autre spécialité pharmaceutique ayant cette indication est le Baclofène®    (« médicament est indiqué, chez l’adulte et l’enfant à partir de 6 ans, pour réduire les contractions musculaires involontaires et relâcher la tension excessive des muscles qui apparaissent au cours de maladies neurologiques comme certaines maladies de la moelle épinière ou des contractures d’origine cérébrale »).

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