Bonjour
Un forme d’horreur au prétoire. Le gouffre d’un quotidien. Six heures d’audience rapportées au plus court, au plus juste par La Nouvelle République du Centre Ouest (Pascaline Mesnage). Un sorte d’impensable, un entrelacs résistant aux grilles psychiatriques, une impossible matière à roman noir.
C’était le 28 mai devant le tribunal correctionnel de Tours (Indre-et-Loire). Tout s’était passé à Saint-Pierre-des-Corps, cinq minutes de rails du Palais de Justice. Nous sommes en décembre 2011. Le futur prévenu se nomme Assogane Le Bonheur. La jeune fille a 13 ans et demi et, ici, restera anonyme.
Arbre de Noël
Six heures de prétoire pour quelle vérité, pour dire quoi ? Que l’homme a été conseiller municipal de la cité ouvrière, qu’il était « sans histoires ». On retrouve seulement la trace de cet enseignant quelques semaines auparavant dans une histoire incompréhensible de papier d’identité.
En décembre de 2011 il se rend « avec ses filles et son épouse à l’arbre de Noël de la ville ». Aujourd’hui l’homme a 56 ans, il est marié et ses deux filles ont 20 et 22 ans. Ce jour-là sa famille sympathise avec une autre et les deux découvrent qu’elles sont voisines, bavardent. « La soirée est gaie, on mange, on danse. Assogane invite même la jeune fille à faire quelques pas de danse avec lui, rapporte le quotidien régional. Il ne s’arrêtera pas là. Le prof d’anglais demande son numéro de portable à l’adolescente, qui lui donne avec facilité. »
De 3000 à 4000 SMS
Pas de romance acceptable, de consentement véritable. La très jeune fille est vulnérable. Atteinte d’une surdité décelée tardivement, elle est déficiente intellectuelle (elle a aujourd’hui le niveau d’une enfant de CE1) elle vit dans un environnement difficile, le père boit, l’insulte souvent, les relations avec la mère ne sont pas des plus faciles. Zola à Saint-Pierre-des-Corps ? Peut-être, mais un Zola des temps modernes. La Nouvelle République :
« C’est dans ce climat qu’ont lieu pendant plusieurs mois les échanges de SMS (de 3.000 à 4.000) entre elle et Assogane. « Cette jeune fille était dans la quête d’une reconnaissance de sécurité affective », souligne la procureure. Ce couple « interdit » se voit en cachette, s’envoie des messages parfois naïfs mais aussi « à la limite de la pornographie ». La relation que l’homme qualifie d’«épistolaire » et de « virtuelle » est jugée inadaptée par le juge du tribunal correctionnel.
Les parents de Sandra vont finir par découvrir les SMS et Assogane est placé sous contrôle judiciaire en juin 2013.Une décision qu’il ne va pas respecter. L’homme est aperçu au domicile de la jeune fille au début de l’été 2013. Son ADN est retrouvé sur les parties intimes de Sandra. »
« Tout n’a pas été dit »
L’ADN ne change rien à l’affaire : « Je n’ai eu aucune relation sexuelle », soutiendra, jusqu’à la fin, l’enseignant. Il verse dans le rocambolesque, se refuse à dire le réel, ne peut reconnaître les faits, dit que tout n’a pas été dit. Il est détenu à la maison d’arrêt de Tours depuis 18 mois, à équidistance de Saint-Pierre-des-Corps et du Palais de Justice.
Aujourd’hui la jeune fille a 17 ans. Elle reconnaît « avoir été charmé par cet homme de 42 ans son aîné », reconnaît quelle a été manipulée, tente désormais de se reconstruire.
L’homme, 56 ans, a été condamné hier à six ans de prison ferme pour agressions sexuelles. La peine comprend également un suivi socio-judiciaire, une obligation de soins, l’interdiction d’entrer en contact avec la victime, de résider à Saint-Pierre-des-Corps et de travailler en contact avec des mineurs.
A demain