Bonjour
Qu’eût fait Desproges de notre actuelle séquence sur le harcèlement ? Et le Racine d’Andromaque ? Et le La Fontaine des Précieuses ? Sans parler du Rabelais de Gargamelle, femme de Grandgousier et mère de Gargantua. Où est passée la distance ?
« Homophobiol© ».Pour l’heure l’information n’est pas encore sur le site de l’ANSM. Elle n’a pas suscité l’ire de Prescrire. RAS du côté de la HAS, le Formindep semble consentant. Jusqu’aux Entreprises du Médicament qui ne semblent pas au courant.
Nous sommes le 17 mai. C’est la « Journée internationale de lutte contre l’homophobie et la transphobie ». Le jour choisi par AIDES et Ex Æquo pour lancer Homophobiol©, « Homophobiol© » : le premier traitement de fond contre l’homophobie. « Homophobiol© » : élaboré en partenariat avec Datakalab, Homophobiol© est le fruit de plusieurs années de recherches et d’essais cliniques menés dans le plus grand secret. 1
Traitement de choc
La firme assure, dans les médias, que ce traitement de choc « permettra enfin à des milliers de femmes et d’hommes de sortir de la spirale destructrice de l’homophobie ». Les vertus de la galénique moderne permettent aujourd’hui toutes les présentations. « Homophobiol© » est dès à présent disponible en pastille à sucer en cas de crise aiguë. Homophobiol© existe aussi en patch pour aider à lutter au quotidien contre les mille et un symptômes de l’homophobie latente – des signes qui ne trompent guère et réunis dans le syndrome du « Je-ne-suis-pas-homophobe-mais … », entité pathologique aujourd’hui bien connue mais qui fut longtemps tenue pour être orpheline.
Homophobiol© et à sa formule révolutionnaire laissent le fabricant affirmer qu’avec ses cachets (existera bientôt en onguent) la haine et le rejet ne seront bientôt plus une fatalité. Seule, toutefois, une étude de phase IV permettra de l’affirmer. Chaque consommateur doit impérativement lire la notice :
« Pour nous, associations européennes de lutte contre le sida, traiter l’homophobie est un enjeu majeur de santé publique. Depuis plus de 30 ans, la stigmatisation et la pénalisation de l’homosexualité font le lit de l’épidémie de VIH. L’homophobie vécue au quotidien, l’exclusion, les menaces verbales et physiques acculent de nombreux gays, bis et trans à la clandestinité et favorisent les prises de risques. S’attaquer aux discriminations individuelles et à la criminalisation de l’homosexualité encore en vigueur dans plus de 70 pays, c’est permettre à des millions de personnes de vivre pleinement leur identité. C’est aussi leur garantir un réel accès aux soins et à la prévention. »
Bouche à oreille
Les pouvoirs publics semblent, ici, étrangement absents. La firme parie ici sur l’effet de surprise, l’effet bouche à oreille et la contagion de la demande. Elle invite aussi les citoyens et les citoyennes à prescrire le médicament à leur entourage, et ce dès l’apparition des premiers symptômes. « Insultes, rejet, comportements agressifs ? » Un seul réflexe : Homophobiol ©.
Au cas où le bouche à oreille ne serait pas suffisant, le lancement d’Homophobiol© sera accompagné d’une campagne de communication print et digitale. Les deux visuels de la campagne seraient alors diffusés dans plusieurs grands titres de presse nationale. Des milliers de boîtes d’Homophobiol© seraient distribuées par les militants de AIDES partout en France. En Belgique, les militants d’Ex Æquo feraient d’Homophobiol© la star de la BelgianPride de Bruxelles.
Elu(e)s trié(e)s sur le volet
Chacun sait et depuis longtemps que l’homophobie (de même que le harcèlement) est, aussi, une maladie politique. C’est pourquoi « de nombreux-ses élu(e)s trié(e)s sur le volet » recevront dans les jours à venir leur cure d’Homophobiol©. Aucune information n’a encore filtré quant aux modalités du tri et à la nature du volet.Le fabricant évoque aussi l’idée d’une prescription à vie pour les cas les plus désespérés.
Point important : rien, en l’état actuel des données disponibles, n’interdit de tester Homophobiol© dans les cas, avérés ou soupçonnés, de harcèlement. Certains spécialistes tiennent en effet, paradoxalement ce comportement comme l’une des formes d’un mal aux dimensions beaucoup plus vastes ; un mal redoutable qui, depuis toujours, puise son énergie dans les vastes profondeurs de la peur de l’autre.
Ici des essais vaccinaux sont en cours, pour l’essentiel à base d’éducation – et ce dès le plus jeune âge chrz les garçons comme chez les filles. L’humour pourrait, semble-t-il être un adjuvant utile. Il faut malheureusement compter, dès aujourd’hui, avec les manifestations de rejet et le succès, considérable, des ligues anti-vaccinales.
A demain
1 Pour se procurer Homophobiol© : rendez vous sur aides.org ou sur exaequo.be (à partir du 17 mai).
A reblogué ceci sur Pour le moment, on ne sait pas. Mais cela devrait venir. Ou pas….