Bonjour
Des pages politiques se tournent à très grande vitesse. On en oublie presque le reste, à commncer par le passé. Des satisfactions s’entendent, de nouveaux antagonismes se dessinent. Certains prient pour que de nouvelles énergies se libèrent. Mais des angoisses montent aussi – dans le monde hospitalier, chez les infirmiers – partout où la couverture médicale sociale est, aussi, une affaire de survie.
Six mois : c’est le temps qui, avant la présidentielle et dans le meilleur des cas, permettra de décrypter et de confronter les projets, de resituer les priorités. Qu’en sera-t-il des grands sujets de santé publique ? Quel avenir pour la lutte contre le tabagisme ? Le futur pouvoir prendra-t-il les armes citoyennes contre la première cause évitable de morts prématurées ? Traduira-t-il, en pratique, la philosophie générale de la politique de réduction des risques ?
Gardes champêtres
Un an et nous ne le savions pas : bientôt un an que la loi (« de modernisation de notre système de santé du 26 janvier 2016 ») impose aux vendeurs de tabac « l’obligation de contrôler systématiquement la majorité du client ». C’est vrai aussi pour les « produits du vapotage » qui, comme chacun sait, ne sont pas du tabac. Mais restons sur l’essentiel : la grande question est bel et bien celle de l’entrée dans le monde du tabac comme on dit le monde des enfers. Tout, politiquement, doit être mis en œuvre pour retarder au maximum l’âge du premier usage.
En pratique, l’obligation de la demande de preuve de majorité lors de l’achat de produits du tabac est entrée en vigueur, le 26 janvier. Cette loi dispose que de nouveaux agents peuvent faire respecter l’interdiction de fumer dans les lieux publics et l’interdiction de vente du tabac (et des produits de vapotage) à des mineurs de moins de dix-huit ans. Qui sont des nouveaux agents ?
« Il s’agit des agents de police municipale, gardes champêtres, agents de surveillance de Paris ainsi qu’agents de la ville de Paris chargés d’un service de police ».
Initiations ultra-précoces
Il suffit de lire les données officielles pour prendre la mesure de la béance entre la loi et la réalité :
« En France, l’initiation au tabac est précoce. Elle a lieu en moyenne à 14 ans. En 2014, 32,4 % des jeunes de 17 ans étaient des fumeurs quotidiens. Ainsi, la France se situe parmi les pays qui comptent le plus de jeunes fumeurs.
« La vente de produit du tabac aux mineurs, bien que complètement interdite dans notre pays depuis plus de six ans, n’est respectée que par une minorité de buralistes. Une étude du CNCT en 2011, a montré que deux buralistes sur trois ont vendu du tabac à un mineur et quatre sur dix à un jeune de moins de 12 ans. »
« Pour le tabac, cette interdiction est insuffisamment respectée (62 % des débitants ne la respectaient pas selon une étude de 2011), alors même que les vendeurs pouvaient exiger une preuve de majorité de leurs clients en cas de doute. »
Acheteurs-fumeurs avant 12 ans
Quelles conclusions en tirer ? Le pouvoir doit-il sanctionner les vendeurs de tabac qui, ne respectant pas la loi, ouvrent largement la porte d’entrée au tabac parfois avant l’âge de 12 ans ? Nullement. Voici ce que dit le « Programme national de réduction du tabagisme » :
« Ces données soulignent la difficulté pour les buralistes, alors qu’ils en ont la possibilité, de pouvoir exiger une preuve de majorité de la part de certains de leurs clients. En rendant cette preuve de majorité obligatoire pour tous les achats de produits du tabac ou des produits du vapotage, cela protège les mineurs et simplifie le travail des vendeurs. »
« Simplifier le travail des vendeurs ». La phrase, officielle, est tragiquement admirable. On attend la suivante.
A demain