Bonjour
Hasard, coïncidence ou fatalité, le premier code de déontologie des infirmiers français vient d’être promulgué. Au même moment voici que des nuages inconnus se lèvent sur cette profession – une profession qui se vit souvent (et assez étrangement) comme déconsidérée.
Un « code de déontologie » donc, pour les 600 000 infirmiers français, et ce près de 70 ans après les médecins ou les sages-femmes. On le trouvera ici : « Décret n° 2016-1605 du 25 novembre 2016 portant code de déontologie des infirmiers ». Il y est question de respect et d’indépendance, d’entraide et de probité sans oublier la publicité et la confraternité, cette haine vigilante.
Charlatanisme interdit
On y lit des choses comme celles-ci :
« Art. R. 4312-10. – L’infirmier agit en toutes circonstances dans l’intérêt du patient.
« Ses soins sont consciencieux, attentifs et fondés sur les données acquises de la science.
« Il y consacre le temps nécessaire en s’aidant, dans toute la mesure du possible, des méthodes scientifiques et professionnelles les mieux adaptées. Il sollicite, s’il y a lieu, les concours appropriés.
« Il ne doit pas, sauf circonstances exceptionnelles, entreprendre ou poursuivre des soins dans des domaines qui dépassent ses connaissances, son expérience, ses compétences ou les moyens dont il dispose.
« L’infirmier ne peut pas conseiller et proposer au patient ou à son entourage, comme salutaire ou sans danger, un remède ou un procédé illusoire ou insuffisamment éprouvé. Toute pratique de charlatanisme est interdite.
« Art. R. 4312-11. – L’infirmier doit écouter, examiner, conseiller, éduquer ou soigner avec la même conscience toutes les personnes quels que soient, notamment, leur origine, leurs mœurs, leur situation sociale ou de famille, leur croyance ou leur religion, leur handicap, leur état de santé, leur âge, leur sexe, leur réputation, les sentiments qu’il peut éprouver à leur égard ou leur situation vis-à-vis du système de protection sociale.
« Il leur apporte son concours en toutes circonstances.
« Il ne doit jamais se départir d’une attitude correcte et attentive envers la personne prise en charge.
Devoirs d’humanité
« Art. R. 4312-12. – Dès lors qu’il a accepté d’effectuer des soins, l’infirmier est tenu d’en assurer la continuité.
« Hors le cas d’urgence et celui où il manquerait à ses devoirs d’humanité, un infirmier a le droit de refuser ses soins pour une raison professionnelle ou personnelle.
« Si l’infirmier se trouve dans l’obligation d’interrompre ou décide de ne pas effectuer des soins, il doit, sous réserve de ne pas nuire au patient, lui en expliquer les raisons, l’orienter vers un confrère ou une structure adaptée et transmettre les informations utiles à la poursuite des soins.
Comment les infirmières, les infirmiers faisaient-ils avant la promulgation de ce code ? Ils étaient soumis aux « règles professionnelles » figurant depuis 1993 aux articles R.4312-1 et suivants du code de la santé publique. Et avant, dans les profondeurs du temps ? On ne sait plus.
Pour Didier Borniche, président de l’Ordre national des infirmiers, il s’agit là d’une modernisation et d’un enrichissement de ces règles déontologiques afin de mieux prendre en compte les évolutions majeures observées ces vingt dernières années, et notamment :
- le développement du droit des patients, ces derniers étant par ailleurs de plus en plus exigeants, de mieux en mieux informés, et désirant des relations de proximité ;
- l’explosion de la prise en charge des maladies chroniques, du très grand âge, la question de la fin de vie ;
- les restructurations hospitalières, le virage ambulatoire ;
- la recherche de productivité et ses conséquences en termes de rythme de travail (nombreux syndromes d’épuisement).
Suicides
« L’été 2016 a été particulièrement éprouvant avec les tragiques suicides de cinq professionnels, y compris sur leur lieu d’exercice, souligne Didier Borniche. L’épuisement professionnel se ressent de manière collective et dans tous les modes d’exercice. Les conditions de travail, la baisse des ratios de personnels au lit du malade, le déficit de reconnaissance constituent des sujets de préoccupation majeure. Le 8 novembre dernier, plusieurs milliers d’infirmiers et infirmières ont manifesté à l’appel des organisations représentant la profession. »
Il parle du primat des valeurs de sa profession « dans un contexte où la rentabilité financière a tendance à prendre le pas sur la qualité des soins et la sécurité des patients ». Il ajoute qu’en tant que corps professionnel les infirmiers ont besoin d’être « reconnus et respectés ». Sait-il qu’ils ne sont pas seuls ?
A demain