Bonjour
C’était il y a un an. Personne ne songeait plus à François Fillon et François Hollande était le candidat naturel à sa reconduction. Le burn out, alors, écartelait la gauche plurielle.
C’était il y a un an. Février 2016. Tout, déjà, déchirait la gauche. Pas un jour sans une nouvelle fissure, une nouvelle fracture. On le voyait depuis peu sur le front du travail, ce mot-clef des forces de progrès. Confronté au chômage de masse et à ses innombrables pathologies, le gouvernement venait de mettre au feu avec un « assouplissement » du code du travail applaudi par la droite. Une toute jeune ministre fraîchement nommée (Myriam El Khomri), jouait avec des allumettes (article 49-3).
En marge de cette affaire naissante gonflait un autre abcès : celui du « burn-out »1. La collectivité devait-elle ou non le considérer comme une maladie professionnelle, l’indemniser comme tel ? Un abcès économique, politique, philosophique. Il prenait alors la forme d’une proposition de loi symptomatique signée de Benoît Hamon, longtemps ministre, ministre démissionnaire, ancien porte-parole du Parti socialiste, alors député (Parti socialiste, Yvelines). M. Hamon venait de déposer une proposition de loi « visant à faciliter la reconnaissancedu syndrome d’épuisement professionnel en tant quemaladie professionnelle ». Il le faisait avec un petit groupe d’élu(e)s socialistes et écologistes chaque jour un peu plus opposé(e)s au gouvernement de Manuel Valls et au président François Hollande. La liste n’est pas, aujourd’hui, sans intérêt 2. Et nous, naïvement, de postuler qu’il s’agissait peut-être, d’une manière d’exister médiatiquement dans un paysage de plus en plus mouvementé. Extrait de l’exposé des motifs de Benoît Hamon :
Vie colonisée
« En France 3,2 millions de Français sont exposés à un risque élevé de « burn-out » [Étude du cabinet Technologia, publiée en mai 2014] ou syndrome d’épuisement professionnel. Ce syndrome frappe sans distinction, cadres et simples employés, salariés du public comme du privé. Il est la conséquence d’un trop plein de travail, d’un trop plein de pression qui mènent des hommes et des femmes à l’effondrement.
La mondialisation économique a profondément bouleversé le fonctionnement des entreprises. Confrontées à une compétition désormais mondiale, les entreprises se sont adaptées. Très vite, de nouvelles formes de management et d’organisation du travail ont transformé en profondeur le quotidien de millions de salariés, soumettant ceux-ci à des évaluations de performance de plus en plus exigeantes. Les nouvelles technologies ont accéléré le mouvement, maintenant le lien entre les individus et leur travail bien au-delà du temps réel passé dans l’entreprise.
Ce travail, qui colonise la vie, est souvent la première étape d’un processus qui s’achève par des pathologies physiques et psychiques lourdes et durables. La souffrance au travail est le mal de notre temps, comme l’exploitation des femmes et des enfants ou les conditions d’hygiène et de sécurité des travailleurs ont été la face sombre de la révolution industrielle au XIXe siècle. »
Il y a un an on attendait, ministre en titre, Myriam El Khomri. Ce fut Marisol Touraine, ministre de la Santé depuis mai 2012 et invitée le 21 février du « Grand Jury » RTL- Le Figaro-LCI. « Il est temps de regarder les choses en face. La souffrance au travail, c’est une réalité que l’on ne peut plus escamoter a déclaré Mme Touraine. Benoît Hamon a raison d’alerter sur ce sujet, mais avant d’en faire une maladie professionnelle, il faut définir ce que c’est que cette maladie ».
Perturbateurs endocriniens
C’est pourquoi la ministre de la Santé souhaitait mettre en place « un groupe de travail » réunissant médecins, experts et chercheurs pour définir médicalement le burn-out. Ce n’était pas la première fois que Marisol Touraine et le gouvernement traitaient du burn out. Fin juin 2015 la ministre de la Santé expliquait souhaiter que cette entité, soit « réintroduite » dans la loi via le projet sur le dialogue social. Le Sénat venait alors de la retirer de la liste des maladies professionnelles. Peu avant les députés avaient adopté un amendement socialiste (identique à un autre du gouvernement) disposant que « les pathologies psychiques peuvent être reconnues comme maladies d’origine professionnelle » – et ce aux mêmes conditions que les autres affections.
Puis en juillet 2005 François Rebsamen (alors ministre du travail) concluait brutalement l’affaire : la « loi sur le dialogue social » comprendrait « un début de reconnaissance » du burn-out. Pour autant le « syndrome d’épuisement professionnel » ne figurerait pas « au tableau des maladies professionnelles ». En août 2015 cette loi tait promulguée. Six mois plus tard l’impossible ouvrage était remis sur le vieux métier par un certain Benoît Hamon.
Un an après le paysage a, on le sait, bien changé. François Rebsamen a disparu. Manuel Valls, Marisol Touraine et Myriam El Khomri ne seront bientôt plus ministres, ni François Hollande président. Quant à Benoît Hamon, frondeur modeste, il trône. Il reparle, régulièrement, du contenu de sa proposition de loi mais aussi des « perturbateurs endocriniens » 3. C’est le seul de sa catégorie à s’intéresser à ce sujet d’avenir. C’est le seul, aussi, à parler de futur désirable et désiré.
A demain
1 Une petite somme sur le sujet : « Le Burn Out » de Philippe Zawieja. (9 euros-Que sais-je ?)
2 Régis JUANICO, Cécile DUFLOT, Jean-Marc GERMAIN, Delphine BATHO, Laurence DUMONT, Christian PAUL, Carole DELGA, Olivier DUSSOPT, Michèle DELAUNAY, Alexis BACHELAY, Colette CAPDEVIELLE, Jean-Louis ROUMÉGAS, Kheira BOUZIANE-LAROUSSI, Sandrine DOUCET, Gwenegan BUI, Isabelle ATTARD, Jean-Jacques VLODY, Fanny DOMBRE-COSTE, Sergio CORONADO, Dominique CHAUVEL, Pascal CHERKI, Chaynesse KHIROUNI, Guy DELCOURT, Martine LIGNIÈRES-CASSOU, Guillaume GAROT, Audrey LINKENHELD, Jean-Pierre BLAZY, Barbara ROMAGNAN, Michel POUZOL, Danielle AUROI, Jacques CRESTA, Pascale GOT, Pierre-Yves LE BORGN’, Geneviève GOSSELIN-FLEURY, Pascal TERRASSE, Sandrine MAZETIER, Florence DELAUNAY, Arnaud LEROY, Christophe PREMAT, Serge BARDY, Chantal GUITTET, Michel FRANÇAIX, Jean-Pierre LE ROCH, Philippe BAUMEL, Jean-Luc BLEUNVEN, Jean-Pierre DUFAU, Philip CORDERY, Geneviève GAILLARD, Édith GUEUGNEAU, Frédéric ROIG, Jean-René MARSAC, Stéphane TRAVERT, Yves DANIEL, Mathieu HANOTIN, Robert OLIVE, Monique RABIN, Philippe NOGUÈS, Jean-Luc LAURENT, Fanélie CARREY-CONTE, Paul MOLAC, Michèle BONNETON, Jean-Pierre ALLOSSERY, Isabelle BRUNEAU, Linda GOURJADE, Christophe BORGEL, Jean-Michel VILLAUMÉ, Marie-Anne CHAPDELAINE, Sébastien DENAJA, Pouria AMIRSHAHI, Marie LE VERN, Sylviane ALAUX, Jean-Louis TOURAINE, Jean-Louis DESTANS, Brigitte ALLAIN, Laurent BAUMEL, Véronique MASSONNEAU, Michel LESAGE, Thomas THÉVENOUD, Lucette LOUSTEAU, Annie LE HOUEROU, Razzy HAMMADI, Laurent KALINOWSKI.
3 Sur ce thème, indispensable : « Le cerveau endommagé. Comment la pollution altère notre intelligence et notre santé mentale » de Barbara Demeneix (Odile Jacob, 2016)
Lors du colloque organisé à la Cour de Cassation le 27 octobre dernier représentants de la CNAM et avocats se sont accordés qu’il existait déjà une solution :la déclaration en accident du travail sous l’intitulé « état de stress aigu » …
Mais il faut bien reconnaître à Benoit Hamon le mérite d’avoir permis l’irruption du problème de santé publique qu’est le syndrome d’épuisement professionnel…qui concerne également les politiques d’après son intervention du 1 er octobre 2015 au colloque organisé à Saint-Gaudens par l’association Stop Burn-Out .
Quelles que soient les motivations politiques dans ce combat pour la reconnaissance du burn-out je me permets de préciser que monsieur Benoit Hamon a eu la courtoisie de citer mon intervention de médecin lors de ce colloque .Le respect mutuel dans le débat d’idées, les échanges entre citoyens de bonne volonté est incontestablement une excellente chose quelles que soient les convictions réciproques .Je tenais à lz souligner alors que des conflits de personnes indignes du corps médical se multiplient dans les hôpitaux publics …et explosent aux yeux des concitoyens…
Barbara Demeinex se bat pour la notion de pertubateur endocrinien soit très étendue : Sa start up conçois des test pour cela.