Bonjour
On savait la Sarthe touchée dans ses profondeurs 1, voici que le mal atteint la belle Touraine voisine. Le diagnostic et porté par La Nouvelle République (Mariella Esvant) qui ose un pronostic doublé d’une cartographie. La Sarthe est atteinte, la Touraine l’est aussi, la lèpre des déserts médicaux avance en zone rurale. Mais elle touche déjà le vieux bastion communiste de Saint-Pierre-de-Corps (quinze mille âmes) qui n’aura bientôt plus un seul spécialiste.
« En Indre-et-Loire, près de la moitié des généralistes libéraux sont âgés de plus de 55 ans, un quart à plus de 60 ans. Des chiffres légèrement en dessous de la moyenne nationale et surtout de la moyenne régionale mais qui recouvrent de grandes disparités. Dans le département, qui affiche une densité médicale moyenne plutôt bonne (94,46 pour 100.000 habitants – contre 91,71 à l’échelon national), « le dépeuplement est très partiel », mais les zones les moins bien dotées sont aussi celles où le nombre de médecins proches de la retraite est le plus important, souligne le Dr Claude Neveur, président du conseil de l’ordre régional et spécialiste de la démographie médicale. »
Digues anti-déserts
Des exemples ? Neuvy-le-Roi, à l’extrême au nord du département, a fait dernièrement la une de l’actualité avec le départ précipité de son unique médecin, arrivé quatre ans plus tôt. Cette commune de 1.200 habitants a mis trois mois à retrouver un praticien. Moins spectaculaire, la lente érosion de la démographie médicale est aussi à l’œuvre aux frontières du département, à Château-Renault, Savigné-sur-Lathan et dans l’un des plus anciens villages de Touraine : Yzeures-sur-Creuse. Aux antipodes du terrain (à Orléans) l’ARS serait (dit-on) sur les dents.
« Dès les années 2000, le conseil de l’Ordre départemental alertait les pouvoirs publics sur les conséquences combinées de la baisse du numerus clausus en 1995 et la pyramide des âges de médecins, rapporte Mariella Esavant. Las. Depuis deux ans, le nombre des inscriptions au conseil de l’ordre ne suffit plus à compenser les départs : seulement 14 arrivées en 2015 et 2016 dans le département pour dix-neuf, puis vingt cessations d’activité. Il aura fallu que la tension devienne palpable, relayée par des maires désemparés, pour que des mesures concrètes soient mises en œuvre. Pour endiguer la désertification qui s’annonce, l’ARS, la faculté de médecine et le conseil de l’Ordre s’activent. »
Praticiens ubérisés
Mais endigue-t-on une désertification ? Lutte-t-on contre le sable ? Apparus en 2013, les contrats « Praticien territorial de médecine générale » appuient financièrement les jeunes médecins qui s’installent dans les zones sous-dotées. Cette herbe verte peine à prendre : huit contrats ont été signés en Indre-et-Loire, dont deux en 2016. Il y a bien, aussi, le « maillage » de la puissante faculté de médecine de Tours. Ou encore, sorties de terre, la dizaine de maisons de santé pluridisciplinaire. On compte même, vaillants comme jamais, des médecins retraités (7% dans le département) qui assurent parfois la continuité en attendant l’arrivée d’un jeune confrère.
Pour autant le sable avance. A quoi rêver qui le ferait reculer ? La fin du paiement à l’acte ? Des praticiens ubérisés ? Des dispensaires pluridisciplinaires comme s’il en pleuvait ?
A demain
1 « Mercato sauvage : les surprenants transferts de médecins roumains dans la Sarthe profonde », Journalisme et santé publique, 4 décembre 2016.