Bonjour
Nul ne sait (sauf Emmanuel Macron) si la politique est, par essence, un exercice mystique. Nous savons, en revanche, que la santé est un sujet politique. Un « collectif » vient, dans Le Monde, nous redire quelques vérités sur le sujet. Vérités régulièrement oubliées une fois le moment passé des promesses politiciennes.
« A chaque élection présidentielle depuis 1988, nous questionnons tous les candidats sur leur engagement à mettre en œuvre des mesures de santé publique simples et efficaces » écrit ce collectif 1 que nous aidâmes (dans sa première formation dite des « sages ») à s’exprimer dans les colonnes du dernier quotidien du soir. Un collectif aujourd’hui élargi qui n’a rien perdu de sa réjouissante tonicité. Extraits :
« Les intérêts financiers dictent encore à l’Etat sa politique en matière de santé. Concernant l’alcool, le tabac, la voiture et les médicaments, les candidats à la présidentielle doivent prendre position (…). Nous avons parfois réussi à convaincre en contribuant notamment à la suppression de la promotion du tabac, au droit à respirer sans fumée dans les lieux publics et au travail, au contrôle de la publicité pour l’alcool et à la réduction de la mortalité sur les routes. Malheureusement, les échecs deviennent plus fréquents que les succès et cette situation est insupportable.
Commedia dell’arte
Et le collectif de traiter du désastre de la lutte contre le tabagisme :
« La mortalité évitable reste très élevée dans notre pays. Sur les quatorze mesures que nous avions proposées en 2012, une seule, le paquet de cigarettes neutre, a été mise en place par François Hollande. L’absence d’augmentation significative du prix du tabac est une illustration de la soumission du gouvernement aux intérêts de l’industrie du tabac. Elle voue à l’échec le Programme national de réduction du tabagisme. La Grande-Bretagne et l’Australie ont prouvé l’efficacité de cette mesure et nous en avons bénéficié lors de la forte augmentation intervenue en 2003. L’industrie du tabac se cache derrière les buralistes pour s’opposer aux fortes augmentations du prix du tabac, alors qu’une augmentation de 10 % du prix des cigarettes, qui réduit de 4 % les ventes, augmente leur revenu comme celui de l’Etat. »
Pour l’alcool, voici sa lecture (Marisol Touraine appréciera) :
« La loi Evin proposait une position équilibrée en acceptant la publicité informative tout en préservant les enfants. Le projet a été affaibli en autorisant successivement la publicité à la radio, à l’affichage, la vente par Internet permettant les livraisons d’alcool à domicile. Pour finir, l’esprit du texte a été dénaturé par un amendement à la loi santé de 2015, établissant une distinction perverse entre marketing interdit et information autorisée. Celle-ci a été adoptée avec un processus digne de la commedia dell’arte, la ministre de la santé jouant le rôle d’opposante au projet pendant que le gouvernement manipulait l’Assemblée nationale pour obtenir une modification vidant de son sens le texte de la loi. »
Incompétences
Au chapitre de l’insécurité routière (la grande spécialité du Pr Claude Got) François Fillon est taxé d’incompétence notoire, au même rang que Bernard Cazeneuve.
« Nous ne sommes pas des lanceurs d’alerte, mais des promoteurs de décisions efficaces, privilégiant l’action sur les risques graves, accessibles à des mesures bien identifiées, conclut ce collectif. Notre but n’est pas d’interdire de consommer de l’alcool, de fumer, de manger des barres chocolatées, de conduire une voiture ou de commercialiser des médicaments, mais de refuser que la vie de nos concitoyens soit soumise à des intérêts purement financiers. Nous en avons assez de l’hypocrisie et des mensonges bafouant les connaissances les plus solides. Nous refusons le blocage politique et insidieux de décisions dont l’efficacité est assurée. En limitant notre questionnement au tabac, à l’alcool, à l’automobile, à l’alimentation et au marketing du médicament, nous dénonçons les agissements de puissants lobbys, porteurs d’intérêts considérables, qui causent chaque année au moins un quart des décès en France. »
La suite de cette action est connue : le collectif posera à tous les candidats à la présidentielle vingt questions précises, auxquelles il leur est demandé de répondre par oui ou par non, sans ambiguïté. Les réponses ou l’absence de réponses seront publiées et accessibles au plus grand nombre sur internet.
A demain
1 Gérard Dubois, Irène Frachon, Claude Got, Serge Hercberg, Catherine Hill, Albert Hirsch, Chantal Perrichon
Sans parler du cannabis thérapeutique, sujet sur lequel François Hollande et Marisol Touraine n’ont pas osé se mouiller…