Bonjour
Quelle est la juste place des décisions de justice ? Une invraisemblable campagne présidentielle vient, quotidiennement ou presque, soulever cette question surréaliste dans les espaces démocratiques. Et l’on en viendrait presque, par contagion, à commenter chaque décision rendue par des magistrats. Ainsi cette affaire qui, au terme de onze années de procédures vient de voir un médecin généraliste condamné par un tribunal correctionnel, celui de Tours (Indre-et-Loire).
Nous avions rapporté les éléments de ce dossier en janvier dernier. Au printemps 2005 le Dr X. est appelé (par un tiers) à se rendre au chevet d’un malade qui se plaint de maux de ventre et de vomissements. Le généraliste pose un diagnostic : gastro-entérite. Le lendemain, nouvel appel : le beau-frère de son patient se dit totalement alarmé par l’évolution de la situation. Mais, cette fois, le Dr L… refuse de se déplacer. Il argue d’un emploi du temps surchargé. Il estime que l’état de santé du malade n’inspire pas d’inquiétude majeure. Le beau-frère appelle un confrère du Dr X. qui accepte, lui, de se déplacer. Il ne peut alors que constater le décès. Une enquête préliminaire ouverte par le parquet conduit à une autopsie. Pas de gastro-entérite mais une dissection aortique ayant entraîné une « hémorragie intra-abdominale fatale ».
« Obnubilation de conviction »
Quelques semaines plus tard, l’affaire est classée sans suite. Mais en novembre 2007 la famille du défunt décide de porter plainte pour « homicide involontaire ». Une expertise médicale va alors établir que l’hypothèse de gastro-entérite pouvait paraître « plausible ». Une ordonnance de non-lieu est délivrée mais la famille décide de faire appel. A son tour, la juridiction supérieure écarte l’homicide involontaire. Le dossier est néanmoins renvoyé devant le tribunal correctionnel pour juger de la non-assistance à personne en danger. Devant les juges l’avocat de la famille soutiendra que le médecin a fait preuve d’une « obnubilation de conviction », doublée d’une « candeur sidérante ».
Au terme de ces onze années de procédures ce généraliste a, lundi 13 mars, été condamné par le tribunal à quatre mois de prison pour non-assistance à personne en danger. Avec sursis. Il devra par ailleurs verser 1 € à chaque partie civile en réparation du préjudice moral et 2.500 € au titre des frais d’avocat.
A demain
« condamné par le tribunal à quatre mois de prison pour non-assistance à personne en danger. Avec sursis. Il devra par ailleurs verser 1 € à chaque partie civile en réparation du préjudice moral et 2.500 € au titre des frais d’avocat. »
Qu’est-ce que ce jugement à la …. ?
C’est trop s’il n’y a rien de condamnable et trop peu s’il y a . Il n’y en a ni pour la chèvre ni pour le choux.
Encore une décision qui fait que non je n’ai pas « confiance en la justice de mon pays ».
Commentaire général. De l’oeil du publuic informé par les media, de l’oeil des média on voit par le petit bout de la lorgnette (le bon : http://www.expressio.fr/expressions/voir-quelque-chose-par-le-petit-bout-de-la-lorgnette.php ).
On voit la « faute » éventuelle.
On ne voit pas toutes les non-fautes.
Et pourtant un homme se juge sur la globalité de son action non ?
Un medecin qui fait 99 décisions non fautives et une fautive , si on ne voit que la fautive on le juge mal. Désolé mais c’est c…
Comme disait Hippocrate l’art (au sens artisan, métier, savoir-faire) est long (à aquérir), l’occasion fugace , l’expérimentation trompeuse l’examen clinique (1) trompeur et le jugement difficile. Un génie celui-là.
Il en va de même du diagnostic de l’infarctus du myocarde ou de ses variantes, ça n’est facile que pour ceux qui ne s’y frottent pas ou les ignorantus les ignoranta et les ignorantum.
Lorsqu’une étude (plusieurs en fait il me semble) avaient montré vcers 2000 que le diagnostic était raté aux urgences dans 2% des cas (aux USA un groupe d’hôpitaux) la presse avait titré, mécontente à la Coluche: « Quoâââ ? On rate 2% des infarctuuuuuuus ! C’est un scandale ! C’était en fait un excellentissime résultat parce que le métier est difficile, les examens ne sont pas magiques .
De plus si l’on déploie un tir de barrage d’examens (scanners, coronarographies, tests biologiques et plus ) pour ratatiner le pourcentage de diagnostics ratés on fait du tort:
– surdiagnostic
– effets néfastes des examens : oui le scanner irradie, les produits injectés peuvent faire du mal, des diagnostics sont trouvés ou suspectés qui n’ont rien à voir qui font faire d’autres tests plus dangereux qui peuvent aussi tuer ou faire du surdiagnostic de choses qui n’auraient pas fait de mal si on n’y avait pas touché.
– de plus cela allonge les files d’attente pour les examens en ville et dans les services d’urgence ce qui n’est pas gratuit: des choses urgentes pour d’autres malades sont retardées et ça peut aussi tuer.
– et le coût entraîne un rationnement par l’état ou les compagnies d’assurance (ailleurs et bientôt dans cette salle …)
– bref: pensez aux dominos.
C’est très compliqué à expliquer, beaucoup de médecins le négligent quant au grand public dont les journalistes, sauf très versés il ne peuvent comprendre parce que c’est anti-intuitif et que de toutes façons il est plus simple de voir un méchant et de le punir, de voir son méfait par le petit bout de la lorgnette ou l’arbre calciné dans une forêt rutilante de fruits.
Cf le Bouc Emissaire de René Girard. C’est humain et éternel.
Think out of the box !
1- Ὁ μὲν βίος βραχύς, ἡ δὲ τέχνη μακρή, ὁ δὲ καιρὸς ὀξύς, ἡ δὲ πεῖρα σφαλερή, ἡ δὲ κρίσις χαλεπή avait écrit Hippo.
Le mot πεῖρα (peira) me trouble. Certains disent « l’expérience » d’autre l’expérimentation .
Le mot veut dire essai, tentative, experience au sens d’expérimenter.
http://www.perseus.tufts.edu/hopper/text?doc=Perseus%3Atext%3A1999.04.0058%3Aentry%3Dpei%3Dra
http://www.tabularium.be/bailly/
A mon avis si Hippo. parlait du métier de médecin il a peut être voulu dire l’examen (clinique).
Si un expert lit cela qu’il s’en mêl !