Cannabis et post-vérité : passé l’été les usagers feront l’objet de simples contraventions

 

Bonjour

Qui, hier, aurait parié que Gérard Collomb, bientôt soixante-dix ans, maire de Lyon depuis seize ans ouvrirait un jour la voie à la dépénalisation de la consommation de cannabis en France ? C’est pourtant bel et bien ce que vient de faire le nouveau ministre de l’Intérieur – et ce au micro de RMC-BFM-TV. En pratique des contraventions pour réprimer l’usage de drogue seront mises en place « dans les trois-quatre mois », a déclaré, mercredi 24 mai, cet indéfectible soutien d’Emmanuel Macron, président de la République.

Lors de la campagne présidentielle ce dernier avait fait part de son souhait d’instaurer une simple « contravention » pour l’usage et la détention de cannabis ; contravention en lieu et place d’une (éventuelle) peine de prison et d’un (hypothétique) passage devant un tribunal. « Nous lançons sans attendre les mesures de réflexion et de concertation sur le sujet pour une mise en œuvre d’ici à la fin de l’année », a précisé l’entourage du ministre de l’Intérieur.

Chronophagie

 Comme on pouvait s’y attendre le syndicat de policiers, l’UNSA, s’est aussitôt félicité de cette annonce. « Le ministre, en [faisant sienne] cette revendication syndicale de longue date, répond à une demande forte de simplification et d’allégement du travail, sans sacrifier à l’efficacité », a déclaré Philippe Capon, secrétaire général de l’UNSA-Police, dans un communiqué. Favorable à « une simplification des procédures pénales », le syndicat estime que « les procédures habituelles concernant les usagers se révélaient jusqu’à présent trop lourdes, au vu des sanctions pénales, et trop chronophages pour les services de police » et n’avaient de plus « jamais démontré la moindre efficacité en matière de lutte contre les trafics ».

 

Ainsi donc tout sera bientôt plus simple sur le front de l’addiction et des drogues illicites ? Rien n’est moins sûr. Le ministre de l’Intérieur souligne que l’« on voit de plus en plus qu’il y a une articulation très forte entre trafic de stupéfiants, trafics divers d’ailleurs et terrorisme ». Quel impact aura, en pratique, la mesure voulue par M. Macron et mise en œuvre par M. Collomb ? Quel sera le montant de l’amende ? Une évaluation est-elle prévue qui donnerait une indication de l’impact sur l’évolution de la consommation ? Sur l’évolution des trafics illicites ? Quel usage sera fait des sommes ainsi récoltées ? Incitera-t-on les forces de l’ordre à faire du chiffre ?

Pour l’heure l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies évalue à 700 000 le nombre de personnes qui, en France, consomment quotidiennement du cannabis.

A demain

 

2 réflexions sur “Cannabis et post-vérité : passé l’été les usagers feront l’objet de simples contraventions

  1. Cher Jean-Yves, je voudrais faire un commentaire sur cette « contraventionnalisation » de l’usage et de la possession pour usage. Nicolas Sarkozy avait agité cette idée quand il était ministre de l’Intérieur. Et on peut penser que le premier objectif de cette mesure concerne le travail policier qui sera moins chronophage et surtout moins inutilement chronophage. Par les temps qui courent la police a des choses plus utiles à faire.
    Comment vont se passer les choses sur le terrain et en particulier sur les « spots » de deal où on peut penser que beaucoup de jeunes sont verbalisables ? L’avenir le dira.
    Quant aux conséquences que pourrait avoir cette décision sur la consommation, elle me semble très secondaire pour le ministère de l’Intérieur et, en tout état de cause difficilement mesurable.
    Par ailleurs, mais je ne suis pas juriste, je suis surpris qu’il soit si facile de s’exonérer d’une loi qui considère l’usage de drogues illicites comme un délit et c’est le cas de la loi de 70. C’est même une de ses spécificités les plus fortes. J’aimerais qu’un expert nous explique à quelles conditions il est possible d’abandonner le délit pour passer à la contravention.
    Enfin, la référence aux autres trafics et au terrorisme ne me semble pas très heureux de la part du ministre alors que l’enjeu central, encore une fois, est d’alléger le travail policier de tâches dont l’inutilité était avérée depuis longtemps.
    Amitié.
    Bertrand Lebeau

  2. « Quel usage sera fait des sommes ainsi récoltées ? Incitera-t-on les forces de l’ordre à faire du chiffre ?

    Pour l’heure l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies évalue à 700 000 le nombre de personnes qui, en France, consomment quotidiennement du cannabis. »
    =================
    Attention , les chauffards, les délinquants routiers aussi, qui sciemment enfreignent le code de la route se plaignent que l’on fait du chiffre sur leur dos.

    Or l’Etat ne fait pas du chiffre sur mon dos ni sur celui de millions de conducteurs un brin civiques. Nous respectons les règles. C’est simple. Pas d’excès pas de prune et pas besoin pour montrer notre testostérone (je ne vois pas souvent des femmes au delà de la limite de vitesse mais ce n’est qu’une observation anecdotique ) ou importance de foncer.

    Pour le cannabis c’est pareil. Comme la vitesse sur la route c’est mauvais pour la santé. Si on n’écoute que les survivants dire « je conduis à 200 sur autoroute, jamais eu d’accident, je fume du shit, même pas mal !  » on commet une erreur scientifique de niveau béotien-dégrossi 2ème année. On ne regarde qu’une partie de la population, biais énorme.

    Je suis pour qu’on fasse du chiffre sur le dos des délinquants. A condition d’en faire c’est à dire que les amendes soient payées.

    Pour la voiture il y a aussi l’incapacité des infracteurs à calculer que leur excès de vitesse ne fait gagner qu’un temps négligeable. Enfin dans des limites pas trop déraisonnables.

    Aussi: si les ingénieurs de l’équipement ou autres responsables qui pondent les limitations de vitesse décidaient de limitations crédibles, raisonnables, pas du style « je mets 60 pour qu’ils ne dépassent pas 80 », ça irait mieux; ce-faisant ces gros malins oublient que des conducteurs encore convenables se rendent bien compte que la limite est trop basse et l’outrepassent. Habitude prise d’outrepasser, on outrepasse encore plus jusqu’à brûler le rouge ou le stop.

    Il faut des limites raisonnables et une répression constante. Les limites idiotes sans répression poussent au crime. Bon d’accord, au délit.

    Je me suis égaré sur la route….

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