Bonjour
Jusqu’où ne pas parler dans un établissement hospitalier ? C’est une note de service diffusée le 15 janvier auprès de 8.000 salariés du CHRU de Tours. Note n° 2018-012 a signée de la directrice générale Marie-Noëlle Gérain-Breuzard. Objet : le « rappel de l’obligation de réserve de tous les agents du service public sur les réseaux sociaux et dans les médias ». Après Le Canard Enchaîné cette missive a attiré l’attention de La Nouvelle République du Centre Ouest (Mariella Esvant). « Une invitation au silence » que les syndicats digèrent mal souligne le quotidien régional.
Que dit la directrice générale ? Elle rappelle, gentiment, que « les agents doivent éviter toute manifestation d’opinion de nature à porter atteinte aux supérieurs hiérarchiques, à dévaloriser l’institution et à nuire à la considération du service public », au risque de « faire l’objet d’une sanction disciplinaire ».
Cette note est motivée par « des constats récents ». « Vise-t-elle expressément un article sur les urgences parus trois jours plus tôt dans la Nouvelle République, comme le pense Le Canard enchaîné, qui a révélé le document ? Le témoignage d’une soignante de neurochirurgie le même jour sur TV Tours ? Le hashtag « Balance ton hosto », qui fleurit sur Twitter ? » demande le quotidien.
« Postures médiatisées »
Réponse de la direction de la communication (sic) : « La direction a souhaité rappeler chacun à ses responsabilités, le devoir de réserve n’empêchant pas les salariés de s’exprimer sur leurs conditions de travail ni la liberté d’expression ». Interdiction de parler tout en ayant, en même temps, le droit de s’exprimer.
Pour les syndicats, spécifiquement visés par un paragraphe qui les met en garde contre tout propos « qui excédent la vivacité de ton », ce message est plutôt le signe du climat de tension. « Il n’y a jamais eu autant de grèves, à Tours [dernière en date, le service de neurochirurgie], et ailleurs », rappelle Véronique Brisacier, de la CGT.
Et La Nouvelle République de se souvenir : lors de la cérémonie des vœux 2017, la directrice dénonçait déjà « des postures médiatisées véhiculent une image délétère de notre CHU ». Un « hôpital bashing » dont se défendent les deux syndicats, qui prennent d’ailleurs leurs distances avec ce qui circule sur les réseaux sociaux. En lançant la campagne « Fier de mon hôpital », « la direction veut nous emmener sur ce terrain d’opposition, mais nous aussi nous sommes fiers de notre hôpital, réagit Véronique Brisacier. Ce qui nous inquiète, c’est ce que les politiques qui sont menées actuellement vont faire de notre hôpital. »
« Nous ne sommes ni injurieux ni diffamatoires, nous témoignons des risques liés aux baisses d’effectifs, aux glissements de tâches, des difficultés rencontrées par les soignants, les personnels techniques et administratifs » confie un représentant de Sud. Le CHSCT a d’ailleurs mandaté quatre expertises pour évaluer les conséquences des restructurations dans les services. Face à la note n° 2018-012, Véronique Brisacier se demande : « Est-ce qu’il y a quelque chose à cacher ? » On pourrait presque, si l’on osait, le demander à la directrice générale. Sans savoir, à dire vrai, si elle a le droit de s’exprimer.
A demain
c’est sûr que si l’on n’étale pas ses problèmes ceux-ci finiront bien par disparaître…