Bonjour
C’est, nous affirment quelques commentateurs catholiques, un discours historique que celui prononcé par Emmanuel Macron, président de la République française, le 9 avril 2018 au sein du collège des Bernardins, à Paris.
« Sous la voûte de la très belle nef cistercienne des Bernardins, un silence monacal s’était installé à l’arrivée du chef de l’Etat, accompagné de son épouse Brigitte Macron, qui a fait l’essentiel de sa carrière de professeur dans deux prestigieux établissements scolaires des jésuites » raconte Libération (Bernadette Sauvaget). Puis un discours d’une heure au terme duquel les représentants de l’Eglise ont longuement applaudi le chef de l’Etat.
« Emmanuel Macron s’est employé à ravauder les liens en voie de relâchement tissés entre les catholiques et la République, résume calmement, dans Le Monde, Cécile Chambraud. Ce discours demeurera comme fondateur pour une partie du catholicisme et comme provocateur pour une partie du laïcisme. » («Macron en plein délire métaphysique. Insupportable. On attend un président, on entend un sous-curé», a notamment tweeté Jean-Luc Mélenchon)
Il faudra relire, patiemment, le texte de ce discours luxuriant pour tenter de décrypter la pensée complexe d’un président omniprésent. Un texte étrangement disponible sur le site de La Croix avant de l’être sur celui de la Présidence de la République : « Discours du président de la République devant les évêques de France ».
Jouer à l’agenda caché
On retiendra, pour l’heure, comme symptomatique de la complexité de cette pensée présidentielle, ce passage relatif à la bioéthique :
« Sur la bioéthique, on nous soupçonne de jouer parfois un agenda caché. De connaître d’avance les résultats d’un débat qui ouvrira de nouvelles possibilités dans la procréation assistée, ouvrant la porte à des pratiques qui irrésistiblement s’imposeront ensuite, comme la Gestation Pour Autrui. Et certains se disent que l’introduction dans ces débats de représentants de l’Église catholique, comme de l’ensemble des représentants des cultes, comme je m’y suis engagé dès le début de mon mandat est un leurre, destiné à diluer la parole de l’Église ou à la prendre en otage.
« Vous le savez, j’ai décidé que l’avis du Conseil consultatif national d’éthique (CCNE), Monsieur le président, n’était pas suffisant et qu’il fallait l’enrichir d’avis de responsables religieux 1. Et j’ai souhaité aussi que ce travail sur les lois bioéthiques, que notre droit nous impose de revoir, puisse être nourri d’un débat organisé par le CCNE mais où toutes les familles – philosophique, religieuse, politique –, et notre société auront à s’exprimer de manière pleine et entière. C’est parce que je suis convaincu que nous ne sommes pas là face à un problème simple qui pourrait se trancher par une loi seule. Mais nous sommes parfois face à des débats moraux, éthiques profonds qui touchent au plus intime de chacun d’entre nous. »
S’exprimer « pleinement » et « entièrement » ? On attend, désormais et avec le plus grand intérêt, la suite.
A demain
1 On observera toutefois que depuis 1983, année de sa création, le CCNE comprend en son sein cinq personnalités désignées par le Président de la République appartenant aux «principales familles philosophiques et spirituelles».