Bonjour
Il faudra bien, après-demain, décrypter les fondements de cette passion-alcool que nourrit le baclofène. Tenter de comprendre la déraison de cette guerre à laquelle se livrent des personnalités que l’on imagine par ailleurs pleinement raisonnables. Pourquoi tant d’énergies flambées autour de la prise en charge de la maladie alcoolique ?
Mandé de Paris, le 27 avril 2018, ce communiqué de presse 1 :
« L’Agence nationale de sécurité de médicament (ANSM) a mis sur pied un comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) après la vague de contestation soulevée par sa décision de juillet 2017 limitant la dose maximale de baclofène à 80 mg au lieu des 300 mg jusqu’alors permis par la recommandation temporaire d’utilisation accordée à ce médicament dans l’addiction à l’alcool, au vu d’un rapport bénéfice/risque présumé favorable. »
On sait que ce CSST a rendu un avis publié sur le site de l’ANSM le 24 avril 2018. Avis a priori consensuel mais, en même temps, à haut potentiel polémique.
« Construit pour justifier l’ANSM dans sa décision de juillet 2017, ce comité n’a fait que reprendre l’opinion et les erreurs d’appréciation de l’agence du médicament. Composé d’experts dont aucun n’est en réalité spécialiste de l’addiction à l’alcool, il a rapidement effectué sa mission sans entendre ceux qui contestent avec des arguments scientifiques solides et plus d’une décennie de pratique professionnelle l’évaluation des risques mise en œuvre par la CNAMTS, l’ANSM et l’Inserm. Cette évaluation a été menée à partir de données massives médico-administratives non fiables et sans pertinence clinique, et selon une méthodologie qui ne permet en aucun cas de conclure à une quelconque relation de causalité.
Sur le banc des accusés
Pour le dire autrement, selon ses opposants, « l’évaluation de l’efficacité du baclofène dans l’addiction à l’alcool effectuée par le CSST n’a pas pris en compte l’ensemble de la littérature sur le sujet, globalement favorable au baclofène ». Plus encore, « les éléments communiqués dans l’avis du CSST à propos des études cliniques randomisées en double aveugle du baclofène contre placebo Alpadir et Bacloville sont truffés d’erreurs, qu’il s’agisse des données d’efficacité ou des données de sécurité ».
Ces opposants résument leur réquisitoire en ces termes, d’une particulière virulence :
« Ce travail téléguidé et superficiel discrédite une fois de plus l’agence du médicament française, qui, dans ce dossier comme dans d’autres, se distingue par sa légèreté scientifique, ses manipulations, sa désinvolture à l’égard de la recherche équitable et contradictoire de la vérité, son arrogance à l’égard des spécialistes de terrain, son mépris de la parole et de l’intérêt des patients ».
Au final, selon les auteurs, l’ANSM « se déconsidère ». « Se déconsidérer » : perdre l’estime de ses pairs. Etre discrédité. Avec cette menace : être, après-demain, au banc des accusés.
A demain
1 Communiqué signé Renaud de BEAUREPAIRE, psychiatre, chef de servi à l’hôpital Paul-Guiraud, Villejuif ; Amine BENYAMINA, professeur de psychiatrie et d’addictologie à l’Université Paris-Sud ; Samuel BLAISE, président de l’association Olivier-Ameisen ; Pascal GACHE, addictologue, Genève ; Bernard GRANGER, professeur de psychiatrie à l’Université Paris Descartes ; Sylvie IMBERT, présidente de l’association Baclofène ; Philippe JAURY, professeur de médecine générale à l’Université Paris Descartes ; Bernard JOUSSAUME, président de l’association Aubes ; Patrick de LA SELLE, président du Réseau Addiction Baclofène ; Jean-Roger LE GALL, membre de l’Académie nationale de médecine ; Thomas MAES-MARTIN, responsable du collectif Baclohelp ; Didier SICARD, professeur émérite de médecine interne à l’Université Paris Descartes, président honoraire du Comité consultatif français national d’éthique.
Au lieu de ce « au final » incorrect à la mode, pourquoi ne pas écrire « finalement », « en somme », « au bout du compte », « en conclusion », « in fine »… ? Merci.
En conclusion, vous avez raison.
Sur le fond, je suis d’accord avec vous. Cette affaire devient sidérante !
Beaucoup de passion mais peu de résultats tangibles. Si le baclofene était utile cela se saurait. Mon expérience clinique personnelle n’est pas positive. Les addictologues semblent le prescrire faute de mieux.
Et quid de l »importante cohorte de malades soignés avec succès par le baclofène alors que rien d’autre ne fonctionnait et qu’ils seraient morts sans ce traitement. Cela fait quand même un moment que de nombreux médecins et malades savent que ce médicament est utile, sinon pourquoi les médecins seraient-ils de plus en plus nombreux à accepter de le prescrire et les malades de plus en plus nombreux à réclamer ce traitement. Lorsque cela ne fonctionne pas bien, c’est plus souvent le prescripteur qui est en cause que le médicament (doses inadaptées, augmentation trop rapide ou mauvaise répartition dans la journée). Mais vous reconnaissez vous-même qu’il n’existe aucun autre traitement pour soigner les malades. La priorité est donc plutôt d’améliorer l’utilisation et la connaissance de ce médicament, au lieu de le rejeter au prétexte que certains n’ont pas encore bien compris comment s’en servir.
Attention à ne pas se tromper de cible, le baclofène ne présente aucun intérêt dans les régimes amaigrissants. Il traite par contre très bien la boulimie,qui a une composante compulsive, tout comme la consommation d’alcool.