Trente-deux viols minimum : le docteur condamné à dix ans de réclusion. Une étrange fatalité.

 

Bonjour

On ne commente pas une décision de justice mais on peut s’intéresser à l’émergence de l’étrange dans un univers connecté. Après un jour et demi de délibéré la cour d’assises du Cher a, le 29 juin, condamné le Dr Thierry Dassas à dix ans de réclusion criminelle. Le ministère public avait requis 18 ans et le maximum encouru était de 20 ans. L’ancien généraliste d’Argent-sur-Sauldre (Cher) était accusé de viols commis par personne abusant de l’autorité que lui confère sa fonction et atteinte à l’intimité de la vie privée par fixation de l’image d’une personne, rappelle Le Berry Républicain (Geoffroy Jeay). Le ministère public avait requis 18 ans et le maximum encouru était de 20 ans. Le verdict est tombé à 14 heures, ce vendredi 29 juin, après un jour et demi de délibéré. »

Plus précisément la cour a déclaré le Dr Thierry Dassas coupable de viols sur trente-deux de ses patientes. Il a été acquitté pour quatre autres – patientes que le médecin n’avait pas « filmées ». La cour a noté que les faits de viols ne pouvaient pas être qualifiés pour ces quatre femmes. « Les trois magistrats professionnels et les six jurés populaires n’ont pas suivi l’avocat du Dr Dassas, qui leur avait demandé d’écarter les trente-six accusations de viols (digitaux et avec spéculum), des examens gynécologiques selon le médecin désormais retraité » précise Le Berry Républicain.

Aujourd’hui âgé de 68 ans, le Dr Dassas avait été arrêté fin 2014 après la plainte d’une patiente ayant subi une longue auscultation gynécologique et aperçu une caméra (mal dissimulée) au cabinet du médecin. Des vidéos montrant neuf femmes nues ou en partie dévêtues, subissant les actes que le Dr Dassas avait présenté comme médicaux, avaient alors été saisies. Au terme de l’instruction judiciaire, trente-six  victimes avaient été retenues.

« Je suis convaincu qu’il n’a jamais été dans une problématique de pénétration sexuelle, avait plaidé son avocat durant le procès. Un acte gynécologique n’est pas un acte de pénétration sexuelle. Croire bien faire n’est pas un viol. » Pour son client, la « multiplication des touchers vaginaux » chez certaines patientes n’était dû qu’à un « état de stress et de préoccupation», qui l’a « amené à pratiquer des gestes complémentaires parce qu’il voulait vérifier un certain nombre de choses  ».

La cité de Jacques Cœur

Le Dr Dassas a d’autre part été condamné à une interdiction définitive de pratiquer la médecine et à une interdiction de séjourner dans le département du Cher pendant dix ans. Il sera inscrit au Fichier judiciaire automatisé des auteurs d’infractions sexuelles (Fijais). Il dispose d’un délai de dix jours pour interjeter appel – de même que le ministère public. « Thierry Dassas a quitté le palais de justice dans un fourgon de police, rapporte enfin Le Berry Républicain. Ayant déjà effectué six mois et vingt jours de détention provisoire dans cette affaire, libéré il y a deux ans, il a été de nouveau incarcéré dès ce l’après-midi du 29 juin. »

On ne commente pas une décision de justice mais on peut s’intéresser à l’émergence de l’étrange. Au moment même où le condamné quittait, dans un fourgon, l’antique cité de Jacques Cœur 1, la Sauldre et la cathédrale  Saint-Etienne, le Haut Conseil à l’Egalité entre les femmes et les hommes rendait public son rapport intitulé « Les actes sexistes durant le suivi gynécologique et obstétrical des remarques aux violences, la nécessité de reconnaitre, prévenir et condamner le sexisme ». Un document remis à cet instant précis à Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes.

Où l’on voit s’éloigner, en noir et blanc, un fourgon berrichon au croisement de la coïncidence et de la fatalité.

A demain

 1 « Le Grand Cœur » du Dr Jean-Christophe Rufin (Gallimard, 2012)

 

 

2 réflexions sur “Trente-deux viols minimum : le docteur condamné à dix ans de réclusion. Une étrange fatalité.

  1. Comment ça, on ne commente pas une décision de justice ?

    Ah! Non ! c’est un peu cour(t) jeune homme !

    Mais si , lâchez-vous, en restant correct et au pire la cour européenne vous garantira un droit d’expression peu limité.

    Hum hum , connaissez-vous, heu…. « slate » par exemple hum hum kof kof …..

    doublevdoublevdoublev.slate.fr/story/31559/commenter-decision-justice-hortefeux

    « Est-ce interdit de commenter une décision de justice?

    Non. Sauf si, par ses critiques, on «cherche à jeter le discrédit, publiquement […] dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance», précise le Code Pénal. (Et cette condition ne s’applique pas aux commentaires techniques, laissant donc toute liberté aux étudiants et professeurs de droit –entre autres– de critiquer techniquement des décisions de justice.)

    Cet article 434-5 est très rarement utilisé dans la pratique, il faut que les paroles, écrits, actes ou images publics soient particulièrement extrêmes pour rentrer dans son champ d’application sans aller à l’encontre de la liberté d’expression.

    La rare jurisprudence qui existe (PDF) a ainsi affirmé que «les décisions des juges ne pouvaient pas et ne devaient pas échapper à la critique normale», mais a jugé que lorsque une critique est tellement violente qu’elle dépasse ces limites, elle ne peut être inspirée que par la volonté de jeter le discrédit sur la décision du juge, et porte donc atteinte à l’autorité de la justice.

    Et aussi
    doublevdoublevdoublev.liberation.fr/societe/2014/10/22/peut-on-critiquer-une-decision-de-justice_1127008

    « la Cour européenne contrebalance cette affirmation en soulignant que «la Convention européenne des droits de l’homme ne laisse guère de place pour des restrictions à la liberté d’expression dans le domaine du discours et du débat politique – dans lequel la liberté d’expression revêt la plus haute importance» (dans un arrêt concernant la France de 2006). »

    Et encore:
    doublevdoublevdoublev.maitre-eolas.fr/post/2005/12/16/252-pourquoi-on-peut-commenter-une-decision-de-justice

    « Il expose avoir tant entendu dans les médias la phrase « il est interdit de commenter une décision de justice » qu’il pensait que c’était effectivement prohibé.

    Ce thème revenant assez souvent dans la presse, voici l’occasion de lui faire un sort.

    Il n’est absolument pas interdit de commenter une décision de justice en France. Dieu merci, sinon je serais en prison depuis longtemps.

    Songez à l’absurdité d’une telle interdiction….
    …. Quant aux critiques entendues sur l’affaire d’Outreau, elles seraient donc hors la loi, et le procureur général de Paris devrait donc être jeté dans une cellule, idéalement sur la paillasse encore chaude laissée par un des accusés.
    ……
    Rien de sacrilège donc.
    Alors, sur quoi repose donc cette légende urbaine ?
    ……

    …. Notez que ce qui est interdit est de jeter le discrédit dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance.

    Pour être parfaitement clair, le législateur précise à l’alinéa suivant que ces dispositions ne s’appliquent pas aux commentaires techniques ni aux actes, paroles, écrits ou images de toute nature tendant à la réformation, la cassation ou la révision d’une décision.

    Donc quand un homme politique déclare, la main sur le cœur, qu’il ne peut commenter une décision de justice, vous saurez désormais que de deux choses l’une : soit cette décision le dérange tant, par exemple parce qu’il a totalement omis de s’informer de son contenu, qu’il préfère esquiver la question, soit le seul commentaire qu’il pourrait faire chercherait immanquablement à jeter le discrédit sur cette décision dans des conditions de nature à porter atteinte à l’autorité de la justice ou à son indépendance.

    Et s’il invoque la séparation des pouvoirs, exigez donc, au nom de ce même principe, la suppression du poste gouvernemental de ministre de la justice, qui en est alors une violation bien plus grave.

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