Politique :  le paquebot Tobacco  se lance à l’abordage des esquifs français du vapotage

Bonjour

Cinq ans après la Révolution des volutes est-elle en grand danger ? La création de « France Vapotage » pourrait le faire craindre. Il s’agit ici, nous dit le site des buralistes, d’une « fédération professionnelle » créée par « des fabricants de produits du vapotage opérant en France ». Objectif : « défendre leurs intérêts et faire la promotion de la cigarette électronique comme ‘’outil de sortie du tabac’’ ».

 Pour un peu on applaudirait à la naissance de ce lobby. Mais la vérité, comme souvent, est un peu plus compliquée. Surtout quand on découvre que parmi les six membres fondateurs on retrouve  les géants cigarettiers  British American Tobacco, Imperial Brands et Landewyck – accompagnés de deux fabricants de produits pour cigarettes électroniques et d’une boutique spécialisée.

C’est là un symptôme : les crocodiles ont saisi que le vent commençait sérieusement à tourner.  Aujourd’hui, plus de deux millions de Français vapotent – un  chiffre est en constante progression. « Forts de ce constat, des fabricants de produits du vapotage opérant en France ont souhaité́ s’unir pour organiser et structurer leur secteur d’activité » expliquent, ouvertement, France Vapotage. Et de se donner une mission : « instaurer, auprès de l’ensemble des parties prenantes, publiques et privées, françaises et européennes, tout échange constructif propre à̀ servir les intérêts du vapotage ». Voilà qui est clair. Et pour la France ?

« Les objectifs sont de permettre le développement responsable de la filière, de promouvoir le vapotage comme outil de sortie du tabac, d’informer et défendre les consommateurs actuels et futurs. Notre Fédération a vocation à̀ rassembler et organiser la filière en France car nous sommes pleinement conscients des enjeux économiques et sanitaires majeurs portés par notre secteur d’activité́. Avec cette structure, nous voulons créer les conditions optimales du dialogue entre nos membres comme auprès de toutes les autres parties prenantes : entreprises, pouvoirs publics, communauté́ scientifique et consommateurs.»

Un siège unique pour fumer et vapoter

On peut le dire autrement : France Vapotage entend faire entendre ses intérêts auprès des pouvoirs publics français qui ont toujours fermé leur porte aux militants novateurs et financièrement désintéressés de la Révolution des volutes. C’est bel et bien à cette aune qu’il faut décrypter le discours de France Vapotage qui s’attachera à « créer les conditions du dialogue entre la filière et les pouvoirs publics », à « développer une campagne de sensibilisation avec les pouvoirs publics » ou à « simplifier les règles relatives au vapotage dans les espaces à usage collectif ».

Un France Vapotage muet, par définition, sur la lutte contre la consommation de tabac. Depuis leur Celtique les buralistes observent que les boutiques indépendantes de cigarettes électroniques se sont regroupées au sein du Syndicat interprofessionnel des indépendants de la Vape (Si2V). Il faut aussi compter avec la Fivape (Fédération Interprofessionnelle de la Vape) l’Aiduce  (Association Indépendante Des Utilisateurs de Cigarette Électronique) et l’historique et irremplaçable association Sovape.

Courageuse Sovape « qui  a pour but de développer, défendre et promouvoir une culture de réduction des risques et des dommages associés aux usages des produits fumés en général et du tabagisme en particulier ». « France Vapotage (dont le siège se trouve à la même adresse que British American Tobacco France) aura-t-elle de meilleures chances que nous d’obtenir des rendez-vous avec le gouvernement, en particulier avec Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la santé qui reçoit régulièrement les buralistes » interroge, amer, Sebatien Béziau, vice-président de Sovape.

M. Béziau, comme nombre des spécialistes de la réduction des risques (et donc, par définition, indépendants de l’industrie du tabac), dénonce une nouvelle fois la disparition, de fait, du « Groupe de travail vapotage » qu’était parvenu à mettre en place le Pr Benoît Vallet, ancien Directeur général de la Santé – et ce en dépit des allergies de Marisol Touraine vis-à-vis de la cigarette électronique. Agnès Buzyn n’a pas souhaité prolonger la survie de cette une structure originale entre deux mondes étrangers. Et le successeur de Benoît Vallet ne semble nullement intéressé par ce levier – un levier politique qui aiderait à la réduction de la première cause évitable de mortalité prématurée.

Découvrira-t-on, grâce à France Vapotage, les causes véritables de l’étrange désintérêt pour la e-cigarette du pouvoir exécutif français ?

A demain

4 réflexions sur “Politique :  le paquebot Tobacco  se lance à l’abordage des esquifs français du vapotage

  1. Merci docteur JY Nau de votre vigilance et de vos écrits, nous avons à faire !
    Le lobbying du tabac est un modèle du genre. Pour ceux qui auraient encore des doutes, rappelons que la fumée n’a aucune vertu contre la dépression ou l’anxiété. La vaporette est une solution que les patients trouvent tout seul et que nous pouvons encourager. Rappelons aussi que les meilleurs soins contre les addictions, contre les angoisses et la dépression passent par l’écoute, l’attention, la rencontre avec le soin. Les paquebots de Bigpharma scintillent de solutions illusoires… confrères et soeurs méditez avant de prescrire. Pour rappel, un événement de la rentrée : les substituts nicotiniques sont remboursés ! (pour certains). Nous pouvons couvrir nos prescriptions de nicotine et encourager les patients qui toussent, ceux qui respirent encore à changer leurs comportements à risques.

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