Bonjour
Les femmes en âge de procréer ont-elles le droit de faire conserver par congélation une partie de leurs cellules sexuelles ? Le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a rendu public, mardi 25 septembre, son avis relatif aux différents sujets de la prochaine révision de la loi de bioéthique (prévue en 2019). Il prononce de nouveau (comme en juin 2017) en faveur de l’accès à la PMA (à l’insémination artificielle avec sperme de donneur) aux couples de femmes et aux femmes seules. Et il réaffirme son opposition radicale à la gestation pour autrui (GPA). Il vire lof pour lof, en revanche, sur la question de l’auto-conservation des ovocytes.
En France la pratique de l’auto-conservation de gamètes (ovocytes et spermatozoïdes) n’est aujourd’hui autorisée qu’en cas de pathologies ou de traitements affectant la fertilité – ou en « contrepartie d’un don d’ovocytes » ce qui constitue une forme, officielle, de chantage. Le CCNE est désormais favorable à la possibilité de la « proposer, sans l’encourager » (sic) à toutes les femmes qui le souhaitent et après avis médical.
« Nous avons un peu évolué par rapport à notre avis rendu en juin 2017 a précisé au Monde le Pr Jean-François Delfraissy, président du CCNE. Nous étions partagés, mais l’écoute des sociétés savantes et des femmes elles-mêmes nous a fait nuancer notre position. L’un des arguments est que médicalement c’est un peu moins lourd qu’on ne l’avait imaginé. A partir du moment où les femmes l’ont décidé, au nom de quoi le leur refuserait-on ? »
« Un peu évolué » ? Le Pr Delfraissy euphémise. Dans son avis n° 126 de juin 2017 le CCNE soulignait le caractère très contraignant de la procédure de collecte des ovocytes, (lié notamment aux stimulations ovariennes répétées, à l’anesthésie générale, aux ponctions ovariennes). Il insistait sur les « risques cliniques et médicaux » induits, mais aussi sur les « risques de pressions sociales et professionnelles » émanant de l’entourage ou des employeurs.
Femmes responsables
La proposition d’une auto-conservation ovocytaire de «précaution » chez les femmes jeunes, soulevait selon lui les questions : de sa réelle utilité, dans la mesure où la grande majorité des femmes pourront avoir des enfants par des méthodes naturelles ; de l’absence de garantie de résultat pour celles qui y auraient finalement recours, puisque son taux de réussite ne dépasse pas 60% ; de la limite temporelle à l’utilisation des ovocytes ; du devenir des ovocytes non utilisés ; de ses coûts médicaux, techniques, médicamenteux, et financiers non négligeables (c’est peu dire que leur prise en charge par la collectivité « fait débat »).
Conclusion de l’an dernier : pour la plupart des membres du CCNE, proposer l’auto-conservation ovocytaire à toutes les femmes jeunes, en vue d’une éventuelle utilisation ultérieure, était difficilement défendable. On voyait alors le Comité national d’éthique s’opposer à la position récemment exprimée par l’Académie nationale de médecine. Cependant certains membres ne partageaient pas cet avis – fondant alors leur position sur l’autonomie et la responsabilité des femmes. Il s’agissait de Mmes et MM Abdennour Bida, Carine Camby, Monique Canto-Sperber, Hervé Chneiweiss, Anne-Marie Dickelé, Francis Puech et Bertrand Weil.
Un an plus tard force est de constater que ces membres ont, finalement, su convaincre et l’emporter. L’affaire n’est toutefois pas tranchée. Que décideront, désormais, le président Macron et son gouvernement ? Que votera le Parlement ?
A demain