Bonjour
Rebondissement dans l’affaire du dramatique accident de Millas : une collision survenue en décembre 2017, sur un passage à niveau de cette commune des Pyrénées-Orientales, entre un autocar transportant des collégiens et une rame automotrice TER. Autocar coupé en deux, six morts parmi les adolescents, de nombreux blessés. France Info (Delphine Gotchaux) révèle aujourd’hui de nouveaux éléments.
Où l’on apprend que la juge d’instruction du pôle « accidents collectifs » de Marseille a adressé, en novembre dernier, des réquisitions judiciaires au laboratoire pharmaceutique Sanofi. Sanofi fabricant d’une spécialité pharmaceutique à base de zopiclone, un hypnotique commercialisé par le géant français sous le nom d’Imovane®, un médicament pris par la conductrice.
Dans sa réponse (que France Info a pu consulter) Sanofi explique que ce médicament « comporte un pictogramme rouge de niveau 3 considéré comme le niveau le plus élevé et équivalent à une interdiction de conduire ». Le laboratoire joint également une photo de la boite d’Imovane® (telle qu’elle est commercialisée en pharmacie) et sur laquelle est visible un triangle avec une voiture à l’intérieur sur fond rouge, accompagnée d’une mise en garde : « Attention danger : ne pas conduire ! ».
Où l’on voit que Sanofi ne pourra pas être poursuivi. Sanofi qui précise que l’Imovane « peut influencer de façon conséquente l’aptitude à conduire, avec des risques possibles de somnolence, un allongement du temps de réaction et la diminution de la vigilance, particulièrement pendant les douze heures suivant la prise du médicament ». La prise du médicament risque également, toujours selon son fabricant, de provoquer « une conduite automatique avec amnésie post événementiel ».
Pas plus de quatre semaines
La conductrice du car a été mise en examen dans ce dossier pour « homicides et blessures involontaires ». La responsabilité de la SNCF dans cet accident a été exclue par plusieurs témoins et par les expertises techniques. On se souvient peut-être que l’enquête avait révélé que, pendant les 90 secondes précédant l’accident, la conductrice avait semblé en pilotage automatique. La question de la prise de somnifères avait été soulevée en octobre dernier.
Me Jehanne Collard, l’avocate des victimes de la collision expliquait alors que le comportement de la conductrice résultait su fait qu’à cause « des médicaments qu’elle prenait, elle a eu un moment d’absence ». « Elle sera probablement responsable pénalement. Mais elle ne portera pas l’entière responsabilité de cet accident assurait-elle. Ce sont les médecins qui ont fait leur travail avec irresponsabilité, incompétence, manque de conscience professionnelle, qui sont les plus responsables. »
« Face à ces nouveaux éléments, les avocats des familles de victimes envisagent de demander au parquet un réquisitoire supplétif afin de pouvoir interroger le médecin de la conductrice, et éventuellement le mettre en examen, souligné France Info. La quadragénaire se voyait prescrire le médicament depuis sept ans, dont deux années par le même médecin. Et ce alors que la notice destinée aux patients ainsi que l’Agence nationale de sécurité du médicament spécifient que le traitement ne doit jamais excéder quatre semaines 1. »
Jusqu’où la justice remontera-t-elle dans l’échelle des causalités et des responsabilités ? Evoquera-t-on le rôle des pharmaciens ? Quelle est la proportion, en France, des médecins qui respectent à la lettre les règles de la prescription des somnifères et autres hypnotiques ?
A demain
@jynau
1 Extraits des données officielles concernant l’Imovane® : « Dans tous les cas, le traitement sera initié à la dose efficace la plus faible et la dose maximale ne sera pas dépassée. d’Imovane® doit être pris en une seule prise le soir au coucher au lit, et ne doit pas être ré-administré durant la même nuit. Le dosage à 3,75 mg est plus particulièrement adapté au sujet âgé de plus de 65 ans et aux populations à risque. Dans tous les cas, la posologie ne doit pas dépasser 7,5 mg par jour.
« Le traitement doit être aussi bref que possible. Il ne doit pas excéder 4 semaines, y compris la période de réduction de la posologie. La durée du traitement doit être présentée au patient : 2 à 5 jours en cas d’insomnie occasionnelle (comme par exemple lors d’un voyage) ; 2 à 3 semaines en cas d’insomnie transitoire (comme lors de la survenue d’un événement grave).
« Dans certains cas, il pourra être nécessaire de prolonger le traitement au-delà des périodes préconisées ; cette prolongation au-delà des périodes préconisées ne doit pas avoir lieu sans une réévaluation de l’état du patient, puisque le risque d’abus et de dépendance augmente avec la durée du traitement.»