Bonjour
Après Le Journal du Dimanche, Libération. Quatre jours après l’hebdomadaire dominical et le « lever de voile » d’Agnès Buzyn, le quotidien de Jean-Paul Sartre (Eric Favereau et Catherine Mallaval) s’est « procuré l’avant projet de loi » qui veut étendre l’accès à la PMA/IAD à « toutes les femmes ». Le texte est toujours en cours d’examen au Conseil d’Etat et devrait être présenté en Conseil des ministres fin juillet.
Surprise : là où le JDD voyait une loi qui allait « révolutionner la famille » l’ex quotidien révolutionnaire ne perçoit qu’une bien maigrelette avancée. Où l’on voit s’éloigner un peu plus – après l’excommunication d’Agnès Thill par les macronistes – le débat « apaisé » voulu par Emmanuel Macron.
« Sérieux, austère, pointilleux, et au final très réglementaire. Lourd de 32 articles, le projet de loi sur la bioéthique, manque un peu de… vie, commente Libé. Que reste-t-il du rapport du député Jean-Louis Touraine (LREM) destiné à servir de support au projet de loi bioéthique ? Le souffle de décrassage et de levée des interdits n’est plus franchement là. Qu’en est-il même de l’esprit qui se voulait ne pas être ‘’trop frileux’’, selon les mots de l’auteur du rapport. Voilà un projet certes important et utile, mais il reste d’inspiration très ‘’paternaliste’’.»
Certes « un grand pas va être franchi avec l’ouverture (remboursée) de la PMA/IAD à toutes les femmes, en couple (hétéro ou homo) ou célibataire » mais, ajoute Libé, le détail des articles de cette loi semble surtout obéir à un « désir d’apaisement » souhaité par le président de la République ainsi que par sa ministre des Solidarités et de la Santé… « Tant et tant qu’étrangement, l’Inter-LGBT, qui devait faire de la marche des fiertés prévue ce samedi une fiesta (enfin la PMA pour toutes quand même !), s’apprête à défiler sous le mot d’ordre : ‘’Filiation, PMA : marre des lois a minima !’’. »
Du corps charnel au corps en fabrication
Des sujets de déception, sinon de combat ? Pourquoi continuer à interdire de dépister la trisomie 21 sur les embryons conçus en éprouvette pour de futurs parents souffrant de maladies génétiques ? Pourquoi diable l’Etat se sent-il obligé d’encadrer les « greffes fécales » ? Pourquoi ce silence pesant sur l’insémination post-mortem ? Quid « des assignations de sexes forcées auxquelles on procède sur les enfants nés intersexes » ? Va-t-on continuer, demande Libé, à les «mutiler», pour reprendre le vocabulaire de nombreuses organisations de défense des droits de l’homme ? Pourquoi ne pas faciliter l’inscription à l’état civil français des enfants nés de GPA à l’étranger ? Pourquoi, en somme, ne pas plus entrouvrir la porte à une GPA toujours prohibée ?
Les attentes progressistes risquent fort d’être également décues au chapitre (encore en gestation) de « l’accès aux origines » la filiation entre les personnes qui ont eu recours à un don et les enfants ainsi nés. « Nombreux (hétéros ou homos) sont ceux qui craignent une forme de stigmatisation de ces enfants nés de don, prévient Libé. Quant à opter pour un mode d’établissement de la filiation ‘’à part’’ pour les couples de lesbiennes dans une loi destinée à promouvoir l’égalité de toutes face à la PMA, voilà qui tient un peu de l’oxymore. » Et encore :
« A moins qu’il ne s’agisse d’une tactique destinée à apaiser la Manif pour tous, qui sera forcément satisfaite que l’on crée un mode de filiation à part pour les couples de femmes, quitte à faire grincer la communauté LGBT. Cette dernière se demande aussi comment les couples de lesbiennes qui continueront à aller à l’étranger ou fabriqueront un bébé hors cadre médical avec un ami donneur pourront faire établir la filiation avec leur enfant dans ce cadre.
« Plusieurs associations auraient préféré que l’on étende aux homosexuels les règles aujourd’hui applicables aux couples hétérosexuels. Après consentement des deux femmes à une PMA devant notaire (comme c’est le cas pour les couples hétéros), celle qui n’a pas porté l’enfant aurait pu bénéficier d’une présomption de comaternité en cas de mariage ou de la possibilité d’une reconnaissance en dehors du mariage. Ce qui est peu ou prou le système en vigueur au Québec et en Belgique. »
L’honnête homme complétera cette lecture avec un remarquable opuscule :« L’Homme désincarné : du corps charnel au corps fabriqué »signé de Sylviane Agacinski (Gallimard. 48 pages. 3,90 euros). On espère que la maison Gallimard à prévu, avant l’été, une distribution de ce texte de combat, philosophique et politique, aux députés et aux sénateurs.
A demain @jynau