Bonjour
Violences policières, médecine et publication scientifique. Une étude menée auprès des CHU de France vient d’être publiée dans The Lancet :« Blessures oculaires causées par des armes non létales en France. Résumée par l’AFP et citée dans de nombreux médias, elle dresse la liste des blessures oculaires suspectées d’avoir été causées par les lanceurs de balle de défense (LBD). Aucune véritable surprise pour qui suit l’actualité : leur nombre est en forte hausse depuis la crise des « gilets jaunes ».
C’est une étude dite « rétrospective ». Les auteurs ont contacté tous les CHU de France, là où sont traités les patients les plus gravement atteints. Objectif : recenser les cas suspectés de blessures oculaires par LBD entre février 2016 et août 2019. Deux cas sont recensés en 2016, un en 2017, mais vingt-cinq en 2018 – année du début de la crise des « gilets jaunes » – et quinze sur la période étudiée de 2019. L’âge moyen des victimes est de 26 ans. Il y a trente-huit hommes et cinq femmes. Vingt-cinq patients présentent des blessures ouvertes au globe oculaire et dix-huit d’autres traumatismes, notamment à la rétine (dix cas). Il y a vingt-cinq cas de fractures orbitales, douze de fractures de la face et deux de dommages au cerveau. Trente des quarante-trois patients ont dû être opérés, à une ou plusieurs reprises. Parmi eux, neuf ont dû être énucléés.
Les dix-huit auteurs, tous spécialistes réputés 1, soulignent que la législation française ne prévoit pas de collecte de données systématique sur les blessures causées par ces armes, utilisées notamment pour le maintien de l’ordre. Sur le total de quarante-trois cas étudiés, vingt ont été traités par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP). Est-ce qui explique que son directeur général, Martin Hirsch @MartinHirsch , a aussitôt relayé vendredi sur Twitter l’article du Lancet, qu’il a qualifié de « premier bilan publié dans une revue scientifique » ?
Depuis le début du mouvement des Gilets Jaunes, les méthodes d’intervention et les violences attribuées aux forces de l’ordre font l’objet de nombreux débats et polémiques. Depuis le 17 novembre 2018, 2 500 manifestants et 1 800 membres des forces de l’ordre ont été blessés, selon les chiffres de Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. The Lancet attend ses commentaires.
A demain @jynau
1 Aurore Chauvin, Jean-Louis Bourges, Jean-François Korobelnik, Michel Paques, Pierre Lebranchu, Frederic Villeroy, Christophe Chiquet, Carl Arndt, Pierre Fournier, Max Villain, Frederic Mouriaux, Gilles Thuret, Isabelle Cochereau, Carole Burillon, Laurent Kodjikian, José-Alain Sahel, Alain Gaudric, Bahram Bodaghi (bahram.bodaghi@gmail.com Department of Ophthalmology, Sorbonne Université, Pitié-Salpêtrière Hospital, Assistance Publique-Hôpitaux de Paris, Paris 75013)