Violences conjugales : oser s’affranchir du secret médical contre l’avis de la victime ?

Bonjour

La grande misère sous le manteau de la colère. Le 23 novembre, à Paris la manifestation contre les violences faites aux femmes a réuni 49.000 manifestants. Le mouvement à l’origine de l’organisation de la marche parisienne revendique quant à lui 100.000 personnes, et 150.000 à travers tout le pays.

Le 24 novembre, dans une tribune au Parisien-Aujourd’hui en France, la secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes, Marlène Schiappa, et les ministres de la Justice et de l’Intérieur, Nicole Belloubet et Christophe Castaner, prédisent des «annonces fortes» – annonces qui seront faites lundi 25 novembre à la suite du Grenelle sur les violences conjugales. 

Dans leur tribune, les ministres évoquent une meilleure formation des policiers, gendarmes et magistrats, l’éventualité de «s’affranchir du secret médical afin de pouvoir signaler les violences et accompagner les victimes», et la mise en place d’un bracelet électronique «anti-rapprochement».

Ils estiment qu’en matière de lutte contre les violences et les féminicides, «le compte n’y est pas encore et la mobilisation de la société civile est là, aiguillon indispensable, pour le rappeler à chaque instant». Cependant le gouvernement «ne peut pas tout», soulignent les ministres, qui en appellent (une nouvelle fois) à une «société de vigilance».

Extrait :

« Chaque femme doit savoir que sa plainte ou son signalement sera écouté et pris au sérieux. Nous mettons tout en œuvre pour y parvenir, à commencer par un audit rigoureux de l’accueil des victimes dans les commissariats et les brigades de gendarmerie. Nous allons mieux former policiers, gendarmes et magistrats. Nous avons organisé le dépôt de plainte à l’hôpital et nous réfléchissons, avec la ministre de la Santé, à l’élaboration d’un cadre qui permette, dans certaines conditions, aux médecins de s’affranchir du secret médical afin de pouvoir signaler les violences et accompagner les victimes. »

« S’affranchir du secret médical » ?La ministre de la Justice s’est dite favorable à cette mesure qui permettrait à un soignant de signaler aux forces de l’ordre ou au procureur de la République des violences conjugales présumées. Même si la victime est contre. Mais la mesure est encore en cours de discussion. Elle fait partie des recommandations présentées à Marlène Schiappa et qui ont particulièrement retenu son attention.

Objectif : pouvoir donner l’alerte sur une situation de violences graves constatées, même si la victime ne veut pas porter plainte. De fait, certaines d’entre elles, sous l’emprise de leur conjoint ou trop fragiles psychologiquement, sont incapables de le faire. Certes, mais peut-on sans grand danger briser le lien complexe et fragile, confiance et conscience, qui tisse le lien entre un patient et son médecin ?

Rapelons, ici, les leçons tirées par la mission de l’inspection générale de la justice, à l’issue de l’examen minutieux de quatre-vingt homicides conjugaux de 2015 et 2016, définitivement jugés. » Et puis, aujourd’hui, vingt-quatre recommandations émises par le rapport de cette mission publié dimanche 17 novembre.

« Ce rapport permet d’établir des facteurs récurrents présents dans la majorité des dossiers : antécédents de violences et a fortiori de violences conjugales de l‘auteur ; alcoolisme et dépendance aux produits stupéfiants de l’auteur et/ou de la victime ; inactivité professionnelle de l’auteur et/ou de la victime ; isolement social ou familial de la victime ou du couple ; maladies psychiatriques, fragilités psychologiques et pathologies neurologiques de l’auteur ou de la victime. »

Où l’on voit la place considérable de la médecine, des addictions, de la pathologie, de la grande misère.

A demain @jynau

Une réflexion sur “Violences conjugales : oser s’affranchir du secret médical contre l’avis de la victime ?

  1. La loi française le permet déja mais il y a des zones d’interprétation:
    L’article 226-13 du code pénal

    « La révélation d’une information à caractère secret par une personne qui en est dépositaire soit par état ou par profession, soit en raison d’une fonction ou d’une mission temporaire, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » (article 226-13 du code pénal)

    MAIS

    « L’article 226-13 n’est pas applicable dans les cas où la loi impose ou autorise la révélation du secret. En outre, il n’est pas applicable :

    1° A celui qui informe les autorités judiciaires, médicales ou administratives de privations ou de sévices, y compris lorsqu’il s’agit d’atteintes ou mutilations sexuelles, dont il a eu connaissance et qui ont été infligées à un mineur ou à une personne qui n’est pas en mesure de se protéger en raison de son âge ou de son incapacité physique ou psychique ;

    2° Au médecin ou à tout autre professionnel de santé qui, avec l’accord de la victime, porte à la connaissance du procureur de la République ou de la cellule de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes relatives aux mineurs en danger ou qui risquent de l’être, mentionnée au deuxième alinéa de l’article L. 226-3 du code de l’action sociale et des familles, les sévices ou privations qu’il a constatés, sur le plan physique ou psychique, dans l’exercice de sa profession et qui lui permettent de présumer que des violences physiques, sexuelles ou psychiques de toute nature ont été commises. Lorsque la victime est un MINEUR OU une personne qui n’est PAS EN MESURE DE SE PROTEGER en raison de son âge ou de son INCAPACITE physique ou PSYCHIQUE, son accord n’est pas nécessaire ;

    3° Aux professionnels de la santé ou de l’action sociale qui informent le préfet et, à Paris, le préfet de police du caractère dangereux pour elles-mêmes ou pour autrui des personnes qui les consultent et dont ils savent qu’elles détiennent une arme ou qu’elles ont manifesté leur intention d’en acquérir une.

    Source :
    https://secretpro.fr/

    ON VOIT QUE ÇA LAISSE LA POSSIBILITÉ DE SIGNALER SANS obstacle de secret médical ou professionnel.

    MAIS MAIS MAIS :

    Il y a le risque des effets pervers (In English : the Law of Unintended Consequences, qui est plus explicite).
    C’est à dire que de peur que le soignant fasse une déclaration qui lui fait peur ou qu’lle ne veut pas, la victime ne consulte pas du tout.
    Difficile de trouver la bonne approche.

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