Bonjour
Les rapports n’ont jamais été simples entre les journalistes et l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). Ils ne l’étaient pas plus avec les agences déconcentrées qui la précédèrent. Rappelons que bien après les affaires du sang contaminé l’ANSM s’est substituée le 1er mai 2012 à l’Agence française de sécurité sanitaire et des produits de santé (Afssaps) – et ce en application de la loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire des médicaments et des produits de santé, adoptée par le législateur à la suite de la crise du Mediator®.
Tatouages et cosmétiques à l’abandon
Aujourd’hui ses missions législatives répondent à un double objectif : garantir la sécurité des produits de santé tout au long de leur cycle de vie (avant et après la mise sur le marché) et favoriser l’accès des patients aux traitements innovants. Sa compétence s’étend aux médicaments, aux dispositifs médicaux (c’est-à-dire une gamme de produits d’une grande variété, qui s’étend des dispositifs les moins intrusifs, tels que pansements ou préservatifs, aux dispositifs implantables, comme les prothèses) et aux produits du corps humain. Ce champ d’intervention lui permet, à la différence de l’Allemagne par exemple, d’embrasser la quasi-totalité du champ des produits de santé – et même au-delà de ce champ, les produits cosmétiques et de tatouage.
L’agence dispose d’un budget total (2018) de 126,3 M€, d’un plafond d’emplois de 935 ETP. Elle prend 84 000 décisions annuelles diverses (dont 22 000 autorisations ou recommandations temporaires d’utilisation, 21 000 autorisations ou modifications d’autorisations de mise sur le marché, 4 000 autorisations d’essais cliniques, 11 000 visas de publicité, etc.)
Vaste domaine. Et voici aujourd’hui une radiographie sans concession de l’ANSM par la Cour des Comptes . Un travail repris et développé par le Sénat. Deux documents essentiels qui expliquent notamment les fréquentes relations de défiance entre la presse et l’Agence. Les citoyens, spécialisés ou pas dans la jungle médicamenteuse, les liront avec profit. Nous y reviendrons pour notre part autant que de besoin.
« Pour maintenir la confiance des citoyens, l’ANSM doit poursuivre son effort de transparence et renforcer ses contrôles en interne » soulignent les magistrats de la Cour. Et la commission des affaires sociales du Sénat invite « le Gouvernement à trouver un pilote à une mission en déshérence faute de moyens : le contrôle des tatouages et des cosmétiques ». Pour le président de cette commission, Alain Milon, « il ne faut pas attendre le prochain scandale sanitaire pour agir. »
Attendons.
A demain @jynau
À l’époque de l’AFSSAPS, la direction de l’inspection s’appelait « Direction de l’inspection des établissements pharmaceutiques et cosmétiques ». Ces établissements étaient couverts par les mêmes inspecteurs BPF/GMP.
Dans le compte-rendu du conseil d’administration de l’AFSSAPS du 19 octobre 2011, il était fait mention d’une « direction en charge des dispositifs médicaux à visée thérapeutique, des produits cosmétiques ou esthétiques, des biocides et des produits de tatouage ».
Hormis le fait que l’assemblage des thématiques me semble quelque peu douteux, il est à noter que les produits cosmétiques restaient dans le domaine de compétence de l’Agence.
Au de-là de la seule question des produits cosmétiques, il y a, à mon sens un problème beaucoup plus grave en France et dans la plupart des pays de l’Union Européenne :
le manque d’inspecteurs BPF/GMP (compétents et expérimentés) !!!
Les causes de cette pénurie sont relativement simples à comprendre :
1/ Un pharmacien responsable dans l’industrie est beaucoup mieux payé qu’un inspecteur BPF/GMP, pourtant ils portent des responsabilités quasiment équivalentes.
2/ Le manque de moyens alloués aux inspecteurs : prise en charge ridicule des frais de déplacement, impossibilité (entre autre pour raisons financières) de se faire assister par des experts techniques compétents.
3/ Manque d’expérience industrielle chez de nombreux inspecteurs qui n’ont que peu voire jamais travaillé en « conditions réelles » (production, distribution) dans l’industrie. Au nom du sacro-saint principe d’indépendance et de « non-compromission », on décourage toute expérience industrielle solide de la part des inspecteurs.
Pour le point 3, les médias portent une large part de responsabilité. En effet, sans aucune connaissance du métier, il est reproché à des membres de l’Agence, du ministère, voire au ministre lui-même, d’avoir travaillé ou « eu des contacts » avec l’industrie.
La culture et l’expérience BPF/GMP ne s’acquièrent pas dans les livres mais sur le terrain. Un inspecteur BPF/GMP devrait avoir au moins travaillé dans l’industrie (en PRODUCTION, pas seulement en Assurance ou en Contrôle Qualité, ou en Affaires Réglementaires) pendant 5 à 10 ans avant de pouvoir candidater à l’Agence.