Bonjour
C’est une décision toujours bien difficile à accepter – elle deviendra sous peu impossible à justifier.
Le tribunal administratif de Rennes vient de rejeter la demande d’une femme qui souhaitait le transfert en Espagne d’embryons conçus de son vivant avec son époux décédé. Cette femme avait saisi le tribunal en référé pour obtenir la suspension d’une décision du CHU de Brest lui rappelant que «le transfert d’embryons post-mortem n’était pas autorisé» en France. La femme demandait que ce transfert soit effectué vers un centre de reproduction assistée à Barcelone.
Le couple avait eu un premier enfant en 2014, puis un deuxième, cette fois par PMA en 2018, après que l’époux soit tombé gravement malade en 2017. Le CHU de Brest conservait pour sa part quatre embryons par congélation. Le couple avait alors émis le souhait d’avoir «au moins» un troisième enfant, a fait valoir l’avocate de la requérante, mais l’homme est décédé en avril dernier.
Contrairement à la loi française, la loi espagnole autorise la procréation post-mortem dans les douze mois suivant le décès du mari – soit, dans ce cas, jusqu’en avril prochain. «Le projet de transfert d’embryon à l’étranger poursuivi» par l’épouse «a pour effet de contourner les dispositions législatives françaises qui font obstacle à sa réalisation», ont considéré les trois juges rennais qui ont statué sur cette affaire. «Cette décision de refus ne porte donc pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale», contrairement à ce qu’affirme la plaignante, peut-on lire dans la décision du tribunal dont l’AFP a eu connaissance.
«C’est une décision très dure», a commenté l’avocate de la plaignante, Me Catherine Logéat. Accepter la PMA pour les personnes seules implique de se poser la question sur le cas des couples dont l’époux est décédé». De fait l’Assemblée nationale a adopté en octobre un projet de loi bioéthique qui prévoit notamment l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, qu’il s’agisse de femmes célibataires ou de couples de lesbiennes – mais qui, à la demande d’Agnès Buzyn, refuse la PMA pratiquée post mortem.
Ici les quatre embryons conservés par le CHU de Brest ne peuvent plus, selon la loi en vigueur, qu’être donnés, utilisés à des fins de recherche ou détruits. C’est une décision qui, une fois la loi de bioéthique promulguée, sera difficile à justifier.
Le sujet avait été traité il y a un an par le Comité national d’éthique :
« Le Comité, dans l’avis 113, publié en février 2011, avait analysé ce type de demande, en distinguant clairement le transfert d’embryon après le décès du membre du couple de l’utilisation post mortem du sperme congelé. Concernant l’utilisation post mortem du sperme cryoconservé, il ne semblait pas opportun à la majorité des membres du CCNE de revenir sur son interdiction, notamment parce que le caractère du consentement du futur géniteur au moment même de la procréation est alors difficilement vérifiable.
« En revanche, le Comité considérait que les couples engagés dans une procédure d’assistance médicale à la procréation ayant donné lieu à la cryoconservation d’embryons dits ‘’surnuméraires’’ avaient seuls le pouvoir de décider du sort de ces embryons. Si l’homme décède, c’est à la femme qu’il revient de prendre toute décision sur le devenir de l’embryon cryoconservé sauf, paradoxalement, celle de demander son transfert in utero dans l’espoir de mener à bien une grossesse, la loi lui interdisant, en effet, de poursuivre le projet parental dans lequel elle s’était engagée avec son conjoint décédé. La majorité des membres du Comité avait considéré et considère toujours que le transfert in utero d’un embryon après le décès de l’homme faisant partie du couple devrait pouvoir être autorisé (…) ».
Le législateur entendra-t-il la voix de l’éthique ?
A demain @jynau
« Le législateur entendra-t-il la voix de l’éthique ? »
Vous y allez un peu fort même si vous ne mettez pas une majuscule à éthique.
Le comité national d’éthique n’a pas une nature divine ou quelconque qui lui conférerait une miraculeuse infaillibilité , encore moins représentatitivitén ou pouvoir détentionnaire de La Vérité.
On peut comprendre les souffrance des veuves dans cette situation et avec un désir d’enfant mais mettre sciemment au monde un orphelin en quoi est-ce plus éthique que s’en abstenir ?
Y aller un peu « fort » ? Et vous donc …
» (…) mettre sciemment au monde un orphelin (…) » L’argument pouvait certes être entendu. Mais que devient-il dès lors que l’on autorise la PMA pour des « femmes seules » ?
Et que dire à cette femme qui, après ce refus juridique, pourrait solliciter une IAD ou le transfert d’un embryon étranger …. ?
J’aimerais connaître ici vos réponses éclairantes .
Bien cordialement.
Si parler d’orphelin c’est y aller fort , oui moi aussi, donc.
L’orphelin artificiel n’est pas l’objet de ma remarque j’y reviens plus loin.
Je ne prétends pas avoir des propos « éclairants ».
Les faits sont simples ou du moins simplifiables sur le plan biologique et de la filiation (mot connoté « La manif pour tous » mais considérez s’il vous plaît qu’il ne l’est pas, ici) .
Il s’agit , de fait, de donner naissance à un orphelin et dans un contexte où le respect pour la mère s’impose, pas l’aquiescement que personne ne requiert par ailleurs.
Et bien sûr pas seulement donner naissance, mais aussi de lui porter tout l’amour d’une mère éventuellement de frères et soeurs, dans un contexte de fort désir de cet enfant.
La PMA pour femmes sans conjoint masculin c’est très différend puisque la mort sort du tableau.
Il n’y a pas dans cette PMA de père présent, père figure sociale, mais la mort n’est pas là sauf accident. Je ne discuterai pas du caractère nécessaire ou souhaitable ou pas indispensable du père, figure sociale.
Comparer la PMA pour femme sans conjoint masculin et la PMA avec sperme du conjoint défuntr c’est faire une fausse équivalence.
Peut-on comparer la souffrance de certaines personnes nées de père donneur inconnu (pour l’instant) et ce que ressentira l’enfant né d’un mort , d’un père que la mort l’a empêché de le connaitre autrement que par sa mère ? Vaste sujet?
Peut être madame Agacinsky a-t-elle pensé et écrit à ce sujet, j’ai encore oublié d’acheter son livre.
Voilà les pensées sans prétention d’un européen athée ou agnostique selon les jours.
Le « vous y allez fort » , cela concernait votre conclusion:
» Le législateur entendra-t-il la voix de l’éthique ? »
Ce qui sous-entend que la voix ou la voie de l’éthique c’est la voix du conseil national d’éthique qui sans doute ne revendique pas , connaissant la grande qualité de quelques membres, être LA voix de l’Ethique.
Mais peut-être que j’interprète mal votre pensée , parce que le sujet me trouble.
Quant à interdire le transport de l’embryon, peut être n’est-ce pas le transport qui pose problème mais la délicate question « qui est propriétaire » de l’embryon ?
Je crois qu’il vaut mieux ne pas parler d’orphelin « artificiel » c’est indélicat, je me suis mal relu.
Ma remarque « vous y allez fort » ne portait pas sur la PMA particulière demandée par une femme veuve .
Ils n’ont pas posé la bonne question. Le transfert n’est pas autorisé en France, mais c’est le transport qui nous intéresse ici pas le transfert.
Transport d’embryon de Paris à Barcelone. Est ce qu’il existe une loi qui interdit cela ? Je ne vois pas au nom de quoi.