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Accaparés par le nouveau virus épidémique les médias les ont soudain oubliés. A l’exception, parfois, d’une solide dépêche de l’AFP. Ils sont désormais plus de six cents médecins hospitaliers français à avoir « renoncé » à leurs fonctions administratives et d’encadrement. Jeudi 6 février quatre-vingt médecins chefs hospitaliers de Seine-Saint-Denis ont démissionné, estimant « ne plus vouloir être complices de la gestion de la misère ».
« Manque de tout, soignants sous-payés et à bout, patients mal pris en charge, quand ils sont pris en charge » : lors d’une conférence de presse à Saint-Denis, cinq chefs de service membres du Collectif Inter-Hôpitaux (CIH) ont brossé un tableau « apocalyptique » de la situation dans ce département, le plus pauvre de métropole, qui devrait à leur yeux « constituer une zone sanitaire prioritaire ».
« Les soignants ne sont pas assez nombreux car les métiers ne sont plus attractifs. Comment une infirmière qui a Bac +3, travaille un week-end sur deux et en horaires décalés, passe son temps à absorber une misère sociale peut-elle être payée seulement 1,2 smic ? Même en Pologne et en Slovaquie elles sont mieux payées ! », s’est indigné le Dr Yacine Tandjaoui-Lambiotte, praticien en réanimation à l’hôpital Avicenne à Bobigny. « On tient nos patients à bout de bras mais nos bras vont flancher. Il faut perfuser de l’argent à l’hôpital public. Beaucoup d’argent », a-t-il argué.
« Plus rien ne tient, ça n’a plus aucun sens ce qu’on fait. C’est comme si on avait un torchon qui craquait et qu’on raccommodait dans tous les sens », a de son côté estimé le Dr Noël Pommepuy, pédopsychiatre à l’hôpital psychiatrique Ville-Evrard à Neuilly-sur-Marne, le deuxième plus important de France. Il a expliqué comment le manque de personnel conduisait à avoir recours à la contention et à l’isolement des malades – « une honte pour les équipes » – et à prioriser les patients : « Quand on reçoit trois enfants, on n’a le traitement que pour un seul. »
« Nous sommes physiquement et psychologiquement épuisés, nous avons l’impression de faire mal, trop vite, il y a une perte de sens de notre travail. On va dans le mur », a enchaîné le Dr Joëlle Laugier, de l’hôpital Delafontaine à Saint-Denis. Une nouvelle journée de grève et de manifestation est prévue le 14 février, à l’appel du Collectif Inter-Urgences et de tous les syndicats de la fonction publique hospitalière.
« Une médecine plus humaine centrée sur le patient »
On pourrait, ici, user de la métaphore épidémique : dix mois après le début de la grève des services d’urgences la crise et les colères ont gagné l’ensemble de la sphère hospitalière publique française. Pour calmer la tension, le gouvernement a promis des « primes » saupoudrées, une « rallonge budgétaire » et une reprise massive d’une « dette » dont nul ne connaît plus ni le montant ni les resposables
L’AFP : « En pleine vague de démissions, la ministre de la santé, Agnès Buzyn, a annoncé mercredi 5 février qu’elle recevrait leurs représentants ‘’mi-mars’’ après le versement de nouvelles primes, pour ‘’ voir s’il y a d’autres mesures nécessaires ». » On peut voir là une réponse du pouvoir exécutif difficilement supportable par les soignants hospitaliers. Et le risque, pour la ministre, de perdre sa légitimité aux uex des grévistes. Ainsi les médecins de Seine-Saint-Denis, réclament désormais d’être reçus par le Premier ministre (en lice pour les campagnes municipales au Havre) ou, mieux, par le chef de l’Etat qui, jadis, à dit tout le bien qu’il pensait du présent et de l’avenir de l’hôpital public français. Souvenons-nous, c’était dans la soirée du 31 décembre 2019 :
« Nous entamerons la revalorisation et la transformation des carrières des enseignants, des professeurs, des soignants. Nous mènerons une politique ambitieuse pour l’hôpital auquel je tiens tant et pour une médecine plus humaine centrée sur le patient. »
Le même jour Pékin annonçait à l’OMS l’existence, sur son sol, d’une bouffée épidémique d’origine virale et de pronostic inconnu.
A demain @jynau