Cigarette électronique, médias et manquements à l’éthique: questions à propos d’une «rétractation »

Bonjour

Tout n’est pas toujours glorieux en matière de science et de publications scientifiques. Dans ce monde la faute, le manquement à l’éthique a un méchant nom, celui de « rétractation ». En voici un exemple éclairant, parfaitement résumé sur le site vapolitique.blogspot par Philippe Poirson.  

Ainsi donc il aura fallu huit mois pour que le Journal of American Heart Association (JAHA) rétracte une publication centrée sur « le vapotage et les crises cardiaques ». « Le manuscrit de Bhatta et Glantz a fait l’objet d’un examen approfondi et complet au cours des 7 derniers mois et le processus est désormais terminé. Au 18/02/20, JAHA a rétracté le document », a déclaré Michelle Kirkwood, porte-parole de l’American Heart Association (AHA), l’association de cardiologie américaine qui édite la revue JAHA, au site Reason

« Très médiatisée à sa sortie, l’étude 1 affirmait de manière erronée un lien de causalité entre vapotage et crise cardiaque, résume Philippe Poirson. Les chercheurs Stanton Glantz et Dharma Bhatta, de l’Université de San Francisco, avaient comptabilisé dans leurs calculs les crises cardiaques survenues chez des vapoteurs avant qu’ils ne se mettent à vapoter pour incriminer le vapotage. Une violation du principe basique selon lequel la cause précède l’effet. 

Dans un premier temps, Brad Rodu et Nantaporn Plurphanswat, de l’Université de Louisville, avaient mis en évidence l’incohérence. « Les principales conclusions de l’étude Bhatta-Glantz sont fausses et invalides », avaient écrit Rodu et Plurphanswat le 11 juillet au JAHA. La revue avait répondu mollement fin octobre. Le statisticien Pr Andrew Gelman avait ensuite confirmé l’erreur méthodologique. Enfin, début janvier, seize chercheurs de renoms avaient à leur tour écrit à la revue pour demander des clarifications sur cette publication. La plupart des commentaires d’experts se trouvent sur le site PubPeer. »

Aujourd’hui, JAHA rétracte enfin la publication frauduleuse. L’explication des éditeurs est, pour Philippe Poirson,  « confondante » :

« Lors de l’examen par les pairs, les examinateurs ont identifié la question importante de savoir si les infarctus du myocarde se sont produits avant ou après que les répondants ont commencé à utiliser la cigarette électronique et ont demandé aux auteurs d’utiliser des données supplémentaires dans le livre de codes PATH (âge du premier IM et âge de la première utilisation de vapotage) pour répondre à cette préoccupation », explique la revue JAHA

« En d’autres termes, même avant la publication, les  éditeurs et les examinateurs du JAHA ont reconnu qu’il y avait un problème logique à affirmer un lien de causalité entre l’utilisation du vapotage et les crises cardiaques sur la base de cas antérieurs à l’utilisation du vapotage, commente Jacob Sullum sur le site ReasonIls ont demandé à Bhatta et Glantz de résoudre ce problème crucial, et les auteurs n’ont pas réussi à le faire, bien que la base de données PATH contenait les informations nécessaires ».

Et Philippe Poirson de soulever une question bien délicate, celle de la responsabilité des nombreux organes de presse et des organisations qui ont repris les conclusions frauduleuses de cette étude. En premier lieu, dit-il, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS), notamment lors du 146e Conseil exécutif devant les délégués à Genève le 4 février.  Et, d’autre part, le « pool santé » de l’Agence France Presse ainsi que « les nombreux médias » qui ont répandu cette désinformation durant ses huit derniers mois, sans tenir compte des critiques fondées contre cette fraude. 

« Que vont-ils faire, demande-t-il, pour réparer les torts causés au public, en particulier aux millions de fumeurs abusés par cette désinformation et qui ont renoncé à arrêter de fumer avec le vapotage ? » C’est une bonne question. Qui y répondra ?

A demain @jynau

1. Bhatta DN, Glantz SA. Electronic Cigarette Use and Myocardial Infarction Among Adults in the US Population Assessment of Tobacco and Health. J Am Heart Assoc. 2019;8:e012317. DOI: 10.1161/JAHA.119.012317.

2 réflexions sur “Cigarette électronique, médias et manquements à l’éthique: questions à propos d’une «rétractation »

  1. Retraction : rétractation ou encore : désaveu, reniement.

    Ce que vous rapportez est une preuve supplémentaire de la qualité extrèmement douteuse, allez, je vais dire variable pour être gentil, du « peer review » ou vérification par les pairs (Pear review , revue pour les poires? Pire review ? ) .

    Et ce dans les « plus prestigieux journaux médicaux ».

    Peer review dont on nous rebat les ouïes.

    Car cette étude a été VALIDEE par les (im-) pairs avant d’être démasquée par des « pairs sauvages » auto-saisis dans PubPeer. https://pubpeer.com

    Il y a aussi parfois le Predator Review : les pairs en question se livrant à l’impair de retarder une publication pour la voler (en voler l’idée et les méthodes) le temps pour leur propre équipe de refaire les « manips » et publier en premier. Prestige voire fric à la clef.

    Et qui est complice de cela si ce n’est les « journaux médicaux les plus prestigieux » journaux qui tolèrent (au moins) d’autres manquements à l’Ethique comme la modification des critères de jugements après que l’étude ait été faite ?

    Comprenez qu’il s’agit d’études ne donnant pas le résultat espéré (convoité), et qu’on essaie de tordre a posteriori en changeant ce que l’on juge (totalement interdit par la méthode scientifique) , pour qu’elle dise enfin ce que souhaitent les auteurs ou , horresco referens, les parrains ou commanditaires (le mot italien c’est « sponsor », mais en français c’est « commanditaire »).

    Goldacre and Co l’avaient bien montré et les grands Niou Innglande et autres , pris la main dans la boite à cookies (ce sont des américains) n’avaient pas pour autant agit comme il se devait (retraction , c-à-d « retrait » en français), allant jusquç refuser de publier les lettres déconçant ces pratiques contraires à la méthode scientifique et à l’Ethique.

    Appelons les choses par leur nom , ce que ces grands journaux font en routine c’est publier des études frauduleuses:

    67 études vérifiées. ====> 9 SEULEMENT sont parfaites ( comme dirait Trump)

    354 cas de critères prévus non publiés ( comprenez que le résultat est contraire à l’idée préconçue ou à l’intérêt commercial )

    357 cas de publication subreptice de critères de jugements non prévus donc non scientifiquement valides, pour rattraper le coup de l’idée choyée (mais a priori fausse) ou de l’intérêt commercial.

    Pas joli-joli hein ? C’est de la triche. De la fraude. C’est tous les jours.

    C’est là :
    https://trialsjournal.biomedcentral.com/articles/10.1186/s13063-019-3173-2
    https://www.cebm.net/2016/03/compare-trials-project/
    https://compare-trials.org/

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