Bonjour
16/03/2020. Nous voici donc au véritable centre du sujet : l’articulation entre l’analyse scientifique du risque épidémique et la gestion politique de ce même risque. Or force est de constater que rien, jusqu’ici, n’a été mené de façon pleinement cohérente, pleinement transparente, comme en témoigne désormais la multiplication des appels réclament la publication des avis du « Conseil scientifique ». Ces appels sont d’autant plus pressants que le pouvoir exécutif ne cesse d’expliquer que s’il a maintenu le premier tour des élections municipales c’est au vu de l’aval que lui aurait donné ce « Conseil scientifique » 1.
Nous voici au véritable cœur du sujet car, au vu de l’évolution de la situation épidémiologique, tout indique que le second tour des élections municipales sera annulé et reporté. Et ce alors que des rumeurs croissantes laissent entendre que le président de la République pourrait sous peu, décréter des mesures drastiques de confinement de tout ou partie du territoire national. Où l’on retrouve le « Conseil scientifique » qui sera chargé, une nouvelle fois en urgence, et sans plus de transparence, de « donner son avis ».
Or la situation le nombre de cas en France double désormais tous les trois jours vient de rappeler le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon, au micro de France Inter, parlant d’une situation qui se « détériore très vite ». Selon les derniers chiffres de Santé publique France le bilan de l’épidémie est de 127 morts et 5.423 cas confirmés – soit 36 morts et plus de 900 cas supplémentaires en 24 heures. Plus de 400 personnes sont aujourd’hui hospitalisées dans un état grave.
Le chef du gouvernement, Edouard Philippe, vient d’annoncer qu’il réunirait « à nouveau en début de semaine » les experts scientifiques et « les représentants des forces politiques » afin de prendre une décision sur le report des élections. « Sans doute mardi 17 mars», a précisé le ministre de la santé, Olivier Véran, sur France 2. « Mais les choses évoluent à une telle vitesse qu’il faut être prudent », nuance-t-on à Matignon. Et chacun comprend que la question est celle du confinement de la population, de ses modalités d’application, de sa possible durée. D’où les demandes croissantes pour faire la pleine et entière transparence sur les travaux d’un « Conseil scientifique » qui a été mis en place, à la demande du président de la République le 11 mars dernier – et ce dans des conditions mal précisées.
« (…) C’est pourquoi à la demande du Président de la République, le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran a installé un conseil scientifique pour éclairer la décision publique dans la gestion de la situation sanitaire liée au Coronavirus. Ce comité est présidé par le Professeur Jean François Delfraissy et compte dix autres experts 1 venant de champs disciplinaires complémentaires. Il est attendu un éclairage scientifique et réactif sur des questions précises et concrètes relatives à la gestion de la crise sanitaire ».
Rien n’est dit des modalités de nomination de ses membres, de leurs responsabilités, de l’articulation de cette structure avec les organismes de recherche, les institutions médicales et les sociétés savantes directement concernées par la gestion de cette crise sanitaire. Et rien n’a filtré non plus quant aux délibérations en son sein, aux avis divergents, aux arguments échangés, à la manière dont un consensus a pu se dégager quant au maintien du premier tour des élections municipales – rien sinon quelques éléments factuels donnés, sur Europe 1, par Olivier Véran, ministre de la Santé.
Chacun, au vu de l’évolution de la situation, comprend désormais qu’il faut améliorer ce mode de fonctionnement, ne serait-ce que pour prévenir l’apparition de nouvelles rumeurs et ne pas entamer la crédibilité de ce Conseil sur lequel l’exécutif a décidé, pour l’heure, de fonder son action sanitaire. Le cœur du sujet, désormais, c’est l’indispensable clarté sur l’articulation entre l’analyse scientifique du risque épidémique et la gestion politique de ce même risque.
A demain @jynau
1 Le conseil scientifique du gouvernement est composé de Jean Francois Delfraissy, président; Laetitia Atlani Duault, Anthropologue; Daniel Benamouzig, Sociologue; Lila Bouadma, Réanimatrice; Simon Cauchemez, Modélisateur; Pierre Louis Druais, Médecine de Ville; Arnaud Fontanet, Epidémiologiste; Bruno Lina, Virologue; Denis Malvy, Infectiologue; Didier Raoult, Infectiologue; Yazdan Yazdanapanah, Infectiologue