Bonjour
29/03/2020. C’est un petit entretien qui nous en dit beaucoup. Celui accordé par le Pr François Bricaire et que l’on peut lire dans Le Parisien (Frédéric Mouchon). François Bricaire, ancien chef du prestigieux service d’infectiologie parisien de la Pitié-Salpêtrière. On lui demande son point de vue sur l’hydroxychloroquine et sur le Pr Didier Raoult – lui dont Olivier Véran, ministre de la Santé, dit dans le JDD qu’il « est haut en couleur, parle sans filtre et a des relais politiques forts » (sic).
François Bricaire, membre de l’Académie nationale de médecine et que Le Figaro présente comme le « médecin antipanique »
« Je n’ai pas encore pu analyser dans le détail le résultat de ses derniers essais menés sur 80 patients reconnaît-il Mais une chose d’abord : il ne faut pas faire le procès de Didier Raoult. On peut penser ce que l’on veut de ce monsieur, qui peut sans doute en heurter certains, mais c’est un médecin de qualité en termes de recherche au niveau international. »
Efficace contre le Covid-19, l’hydroxychloroquine ? « Je comprends que l’on ait essayé de l’utiliser comme l’ont fait en premier les Chinois. Car c’est une molécule ancienne qui a une activité in vitro contre un certain nombre de virus. Il était donc rationnel de le tester même si jusqu’à maintenant cela n’a jamais donné de résultats positifs in vivo sur l’Homme. »
Les vives, parfois violentes, critiques sur la méthodologie de son étude ? « Il a fait un travail scientifique mais dont la méthodologie peut être critiquée car elle comporte plusieurs biais, notamment la validité du groupe témoin et ses essais ne répondent pas aux critères parfaits qu’exige la science. D’après ces essais, la chloroquine permettrait d’abaisser la charge virale des patients mais cela ne démontre pas l’efficacité certaine de ce médicament ni que l’on guérit du covid-19 si on le prend.
Et Le Parisien de poser une question délicate :
« Si vous étiez encore chef d’un service d’infectiologie, vous le prescririez ? » Réponse :
« Je serais très embêté mais je crois que non, je ne le prescrirais pas en dehors de cas très particuliers. A titre personnel, j’ai plutôt le sentiment que la chloroquine se révélera inefficace en termes cliniques. Je crois que j’attendrais les résultats à plus grande échelle de l’étude lancée au niveau européen qui est en cours. Seule cette étude permettra de savoir si ce médicament a une action ou pas sur le covid-19. Le problème est qu’il y a tellement de bruit autour de ce médicament qu’il a aujourd’hui le vent en poupe dans l’opinion. Et il semblerait que certains patients n’acceptent de se prêter aux études en milieu hospitalier sur cette molécule qu’à la seule condition d’en recevoir. Or, si l’on veut faire une étude sérieuse, il faut bien comparer des gens qui en reçoivent et d’autres qui n’en reçoivent pas. »
Certes. Mais que pense-t-il de ceux qui, parmi ses confrères, la prescrivent déjà ?
« Puisqu’il n’existe actuellement aucun autre traitement efficace, je comprends que certains le proposent en milieu hospitalier en se disant : à la guerre comme à la guerre, soit c’est efficace et tant mieux pour mes patients, soit ça ne l’est pas et on aura au moins tenté d’améliorer le sort de ceux qui sont durement affectés. Mais que l’on soit bien clair : Je dis non à une utilisation large de la chloroquine au sein de la population. Car cela conduirait, comme on le voit déjà, à des usages dévoyés du médicament, hors d’un contrôle hospitalier strict. Et cela pourrait rapidement déraper. »
Nul ne sait encore quel jugement le Pr Didier Raoult portera sur ces propos le concernant ; propos émanant d’un représentant du monde hospitalo-universitaire parisien – monde dont il dénonce, depuis Marseille, la morgue qu’il afficherait vis-à-vis de ses confrères de province.
A demain @jynau
Dans le Figaro, un autre médecin avec une opinion différente, favorable:
https://www.lefigaro.fr/vox/politique/chloroquine-nous-n-avons-pas-le-temps-d-attendre-20200323
En ce qui concerne le risque de ne pas avoir assez de pilules, y-a-t-il des difficultés pour Sanofi (ou autres) pour accroître la production? L’entreprise ne le dit pas et les ‘journalistes’ ne posent pas la question.
Interviewé cette fin d’après-midi sur BFMTV William Dab a dit, un brin agacé – alors qu’il a tout l’air d’un homme posé- qu’il fallait arrêter avec cette polémique sur l’hydroxychloroquine.
Affirmant que tout médecin pouvait recourir à cette molécule s’il jugeait que cela pouvait être bénéfique à un patient , il a rappelé une raison de se montrer prudent (dans le cadre du traitement contre le chikungunya le recours à ce médicament s’était avéré nocif) et à signalé l’existence d’autres pistes thérapeutiques à l’étude.