Scandale : la gendarmerie le condamne à ne pas pouvoir dire adieu à son père mourant

Bonjour

15/04/2020. Après le scandale de l’Ehpad de Graulhet, la honte pour un gendarme zélé de l’île de Ré. Tout est parfaitement rapporté par France Inter (Ariane Griessel) après les révélations du Petit Solognot (F.R.) et La Nouvelle République. Résumons. Le vendredi 3 avril Patrice Dupas, vigneron dans le Loir-et-Cher reçoit un appel de sa belle-mère : le moment est venu de se rendre sur l’île de Ré, au chevet de son père, 82 ans, dont l’état vient brutalement de se dégrader. Trois cents kilomètres en période de confinement avec les restrictions de circulation ?  « Le confinement, je le comprends et je le respecte » , explique-t-il aujourd’hui à France Inter Il décide donc de se renseigner auprès de la gendarmerie de son départementavant de prendre la route : « Ils m’ont dit ‘oui, oui, c’est un motif familial impérieux, il n’y a aucun problème ».

Parti le lendemain matin en voiture, Patrice Dupas est contrôlé une première fois à la sortie de l’autoroute : « Je montre mon attestation classique de dérogation, ‘motif impérieux’. Le gendarme me pose la question de la raison de mon voyage, j’explique que mon père est en phase terminale d’un cancer, que je viens le voir. Il me répond ‘allez-y, pas de problème, bon courage’. »

Trois cents kilomètres. Franchissement du pont de l’île de Ré. Son père n’ est plus qu’à trois kilomètres. « J’arrive de l’autre côté, re-contrôle de gendarmerie. À la rigueur, je le conçois et je trouve que c’est normal, nous sommes là pour faire attention. Je me dis que ça va durer 30 secondes. Mais ça n’a pas duré 30 secondes : je suis tombé sur un maréchal des logis, tout à fait poli et courtois, comme moi je l’étais. » 

On peut être maréchal des logis, courtois et obtus – ce qui peut être traduit par « inflexible ». « En regardant mon attestation, il me dit ‘’vous ne passez pas, ce n’est pas impérieux, on n’a pas le droit d’aller visiter les anciens dans les EHPAD. Je réponds que mon père n’est pas dans un EHPAD, il est en hospitalisation à domicile et il est en phase terminale d’un cancer. Sa réponse : ‘Non, non, vous ne passez pas, je vous mets une amende. » »

Votre motif de déplacement sera pris en compte

La belle-mère de Patrice Dupas tentera d’expliquer la situation au gendarme, par téléphone. Le médecin de son père aussi, qui décline son identité et précise l’état de son patient. Sans succès, le militaire n’a « pas le temps et des contrôles à faire ».

« Des appels à la gendarmerie locale, aux élus et à la préfecture n’y changeront rien : nous sommes samedi, les administrations sont soit sourdes pour l’une d’elle, soit fonctionnent au ralenti pour les autres, rapporte France Inter. Après cinq heures de négociations et coups de téléphone, Patrice Dupas renonce aux adieux à son père. »

La gendarmerie rappelle que l’île de Ré fait l’objet d’une surveillance particulière de jour comme de nuit, en raison des nombreux propriétaires de résidences secondaires qui pourraient être tentés de s’y rendre malgré le confinement. « Or, si l’on s’en tient à une application stricte de la réglementation, un document écrit prouvant le motif impérieux de déplacement est nécessaire, en complément de l’attestation, ajoute encore France Inter. Etant donné le contexte particulier de l’île de Ré, le militaire aurait donc privilégié un suivi à la lettre des consignes. »

Son père décédera quatre jours plus tard. « On a toujours des choses à se dire. C’était le dernier jour où je pouvais le voir. C’est le dernier jour où l’on pouvait parler une dernière fois. On a plein de choses à dire à son père. Un père, c’est important ». Depuis, Patrice Dupas s’est à nouveau rendu sur l’île de Ré, cette fois à la chambre funéraire. « J’y suis allé avec l’attestation de décès, comme ça, ça passait plus facilement. Je n’ai pas vu de gendarmes. »

La gendarmerie reconnaît désormais une erreur d’appréciation. Elle invite Patrice Dupas à contester sa verbalisation (135 euros) – et assure que son motif de déplacement sera pris en compte. La honte.

A demain @jynau

Une réflexion sur “Scandale : la gendarmerie le condamne à ne pas pouvoir dire adieu à son père mourant

  1. Re-bonjour. Les mésaventures de Patrice Dupas me poussent à signaler cet article du Monde, qui date déjà du 03 avril, et qui indiquait comment contester une contravention abusive ( important : d’abord ne pas la payer ) https://www.lemonde.fr/societe/article/2020/04/03/coronavirus-peut-on-contester-une-contravention-pour-non-respect-du-confinement_6035426_3224.html
    Dommage que vous n’ayez pas intégré un lien vers ANTAI dans votre article.

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