Elections municipales piégées : le Conseil scientifique donnera-t-il un feu vert avant l’été ?

Bonjour

12/05/2020. Surtout ne pas retomber dans le piège gouvernemental du 15 mars. Tout est en place : les conseils municipaux élus au complet dès le premier tour des municipales disposent désormais du feu vert du gouvernement. Dans 30.119 communes (où 431.739 élus avaient vu leur investiture reportée en raison de la crise sanitaire)  les nouveaux élus devraient entrer en fonction lundi 18 mai. Entre le 23 et le 28 mai, ils désigneront leur maire et leurs adjoints. Et le 28 mai, l’immense majorité (86%) des communes françaises auront à leur tête un maire et conseil municipal renouvelé pour la mandature 2020-2026.

N’y-a-t-il pas là une nouvelle prise de risque de contamination ? «Dès lors que nous avons commencé le déconfinement, il paraît possible d’installer les conseils municipaux», vient de déclarer Edouard Philippe lors de la séance de questions au gouvernement. Le Premier ministre fait valoir les petits effectifs des conseils concernés : 79% comptent moins de 20 membres, 95% moins de 30 élus, et seuls 34 en comptent plus de 50, selon un décompte du Conseil scientifique. Ce dernier vient précisément de rendre un avis spécifique (daté du 8 mai) que le gouvernement vient de rendre public.

On se souvient que l’exécutif avait expliqué que ce Conseil avait « autorisé » le premier tour des élections. Ou qu’il ne s’y était pas opposé. Sans que l’on connaisse ses écrits… Et on se souvient des polémiques qui suivirent, polémiques toujours d’actualité. Qui des « scientifiques » et des « politiques » était responsable de ce qui fut vite perçu comme une erreur ou comme une faute.

Aujourd’hui, une nouvelle fois soumis à la question, les membres du Conseil  scientifique 1 formulent une série de recommandations sanitaires – drastiques. Avec cet encadré :

« Le Conseil scientifique considère que la décision de l’installation des nouveaux conseils municipaux élus au premier tour revient aux autorités nationales. Si cette décision est prise, cette installation doit avoir lieu dans le strict respect de l’ensemble de conditions sanitaires exposées dans cet avis. »

Les élus municipaux concernés sont âgés de 18 à 99 ans avec une moyenne d’âge de 51 ans et une médiane de 52 ans. « Il incombe aux autorités nationales d’adapter les dispositions légales et réglementaires afin de permettre l’installation des conseils municipaux dans le respect des mesures de distanciations sociales et des gestes barrières, prend garde de souligner le Conseil. »

Exemples : respect de la distanciation physique (4m2 par personne), possibilité de se réunir dans un autre lieu (salle des fêtes, gymnase) que la mairie si celle-ci est trop petite, limitation du nombre de participants et de la durée de la réunion. Des gels hydro-alcooliques devront être mis à dispositions des conseillers municipaux à l’entrée du bâtiment et dans le lieu de réunion. Une attention particulière doit être portée à son usage lors du vote et du dépouillement. Le Conseil scientifique recommande « le port du masque individuel pour l’ensemble des conseillers municipaux présents pour l’ensemble de la réunion car il s’agit d’un lieu public ».

De même, afin d’éviter tout risque de transmission du virus SARS-CoV-2 lors du vote, le Conseil scientifique propose aux conseillers municipaux de respecter un protocole strict : lavage des mains avec une solution hydro alcoolique avant de remplir le bulletin de vote et utilisation d’un stylo personnel ; une seule personne doit être en charge de la manipulation des bulletins au moment du dépouillement et du comptage des votes. Le comptage devra pouvoir être validé par une autre personne sans qu’elle n’ait à toucher le bulletin.

Rappelons que cet avis ne concerne que les conseils municipaux déjà élus. Le Conseil est d’ores et déjà saisi de la question suivante : là où il doit se tenir, dans les grandes villes, le deuxième tour pourra-t-il être organisé en juin ? « Si on est capable d’ouvrir les écoles, les collèges, les lycées, les commerces, je ne vois pas au nom de quoi le deuxième tour ne pourrait pas se tenir en juin, si les conditions sanitaires le permettent » plaide le patron des députés LR, Christian Jacob. Idem pour Stéphane Le Foll, maire PS du Mans.

Et, déjà, le Conseil scientifique doit rendre sa copie sur le sujet avant le 23 mai. Un travail à temps plein.

A demain @jynau

1 Jean-François Delfraissy, Président Laetitia Atlani-Duault, Anthropologue Daniel Benamouzig, Sociologue Lila Bouadma, Réanimatrice Simon Cauchemez, Modélisateur Franck Chauvin, Médecin de santé publique Pierre Louis Druais, Médecine de Ville Arnaud Fontanet, Epidémiologiste Aymeril Hoang, Spécialiste des nouvelles technologies Marie-Aleth Grard, Milieu associatif Bruno Lina, Virologue Denis Malvy, Infectiologue Yazdan Yazdanpanah, Infectiologue Correspondant Santé Publique France : Jean-Claude Desenclos

Une réflexion sur “Elections municipales piégées : le Conseil scientifique donnera-t-il un feu vert avant l’été ?

  1. En tout cas les avis du CS du 12 mars (1) puis du 14 mars (2) sont en ligne, j’ignore depuis quand :

    (1) « Elections : Le conseil scientifique a été questionné sur un éventuel report des élections. Il a souligné que cette décision, éminemment politique, ne pouvait lui incomber. Il a considéré que si les élections se tenaient elles devaient être organisées dans des conditions sanitaires appropriées (notamment respect des distances entre votants, désinfection des surfaces, mise à disposition de gels hydro-alcooliques, étalement des votes sur la journée, absence de meeting post-électoraux, etc. …). Dans ces conditions, il n’identifiait pas d’argument scientifique indiquant que l’exposition des personnes serait plus importante que celle liée aux activités essentielles (faire ses courses). Le conseil scientifique a alerté le gouvernement sur le fait que d’un point de vue de santé publique, il était important pour la crédibilité de l’ensemble des mesures proposées qu’elles apparaissent dénuées de tout calcul politique. ».

    (2) « Tenue du premier tour des élections municipales le 15 mars 2020
    Questionné par le Ministre de la santé à propos de la tenue du premier tour des élections
    municipales, le Conseil scientifique a réexaminé l’avis qu’il avait formulé à ce dernier et au
    Premier ministre après un échange avec le Président de la République le jeudi 12 mars.

    D’un point de vue de santé publique, il avait considéré que si les pouvoirs publics décidaient
    de maintenir le premier tour des élections, elles devraient être organisées dans des conditions
    d’hygiène renforcées (notamment respect des distances entre votants, désinfection des
    surfaces, mise à disposition de gels hydro-alcooliques, étalement des votes sur la journée,
    absence de meeting post-électoraux, etc…). Dans ces conditions, il n’identifiait pas
    d’argument scientifique permettant d’associer une annulation du premier tour des élections
    à la réduction de la progression prévisible de l’épidémie, ni à une réduction du risque
    infectieux auquel sont exposées les personnes, notamment par comparaison avec, d’une part,
    les activités quotidiennes essentielles auxquelles elles participent, comme faire ses courses,
    et d’autre part les conséquences sanitaires délétères de possibles débordements,
    imprévisibles après une annulation impromptue du processus électoral, potentiellement mal
    comprise par une partie de la population. Le conseil scientifique avait néanmoins informé les
    autorités publiques que son avis était susceptible d’être différent face à la progression
    prévisible de l’épidémie avant le second tour.

    Samedi 14 mars, le conseil scientifique a de nouveau alerté le Ministre de la santé sur le fait que d’un point de vue de santé publique, il était important pour la crédibilité des mesures proposées qu’elles apparaissent dénuées de calcul politique. Il a considéré qu’au-delà de l’urgence, qui est absolue, les mesures de protection envisagées étaient non seulement susceptibles d’être mises en œuvre de manière immédiate mais aussi de rester nécessaires pour une durée indéterminée, ou d’être de nouveau recommandées en fonction de l’évolution de l’épidémie.

    Dans ces conditions sanitaires exceptionnelles, et dans l’urgence, le conseil scientifique a
    formulé son avis en son âme et conscience, avec humilité et gravité, et dans les limites de ses responsabilités scientifiques de conseil, qui n’ont pas vocation à se substituer aux avis et
    décisions des institutions publiques compétentes en matière de libertés fondamentales. Il a
    considéré que l’exercice de la démocratie, garanti par la sécurité sanitaire du vote, gagnaient
    à être préservé afin que la population conserve dans la durée une confiance indispensable au
    respect de mesures extrêmement contraignantes qui lui seraient exigées par les autorités
    démocratiques du pays pour garantir sa protection sanitaire. »

    Cela, certes, ne nous dit pas le détail du débat entre les membres.

    https://solidarites-sante.gouv.fr/actualites/presse/dossiers-de-presse/article/covid-19-conseil-scientifique-covid-19

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s