Comment a-t-on pu imaginer pouvoir utiliser des drones pour mieux déconfiner Paris ?

Bonjour

C’est, d’une certaine manière, un événement démocratique par temps pandémique : le Conseil d’Etat a enjoint lundi 18 mai l’État de cesser «sans délai» d’utiliser des drones à Paris pour surveiller le respect des règles du déconfinement. On lira ici l’ordonnance de jugement.

C’est la « Quadrature du Net » et la « Ligue des droits de l’homme » qui avaient demandé au tribunal administratif de Paris d’ordonner l’arrêt de la surveillance par drones mis en place par la préfecture de police afin de faire respecter les mesures de confinement. Leur requête ayant été rejetée par le tribunal, ces associations avaient fait appel devant le Conseil d’État. La décision de ce dernier est limpide :

« Le juge des référés du Conseil d’État a ordonné à l’État de cesser immédiatement la surveillance par drone du respect des règles sanitaires en vigueur lors de la période de déconfinement. La préfecture de police de Paris avait indiqué que les drones n’étaient pas utilisés pour identifier des personnes, mais uniquement pour détecter des rassemblements du public à Paris contraires aux mesures sanitaires en vigueur et pouvoir ainsi procéder à la dispersion du rassemblement ou l’évacuation des lieux (les drones survolant la ville à une hauteur de 80 à 100 mètres, en utilisant un grand angle et sans capturer d’images en l’absence de carte mémoire).

« Le juge des référés a toutefois relevé que les drones utilisés sont dotés d’un zoom optique et peuvent voler en dessous de 80 mètres, ce qui permet de collecter des données identifiantes. Il a observé que les drones ne sont dotés d’aucun dispositif technique permettant de s’assurer que les informations collectées ne puissent conduire à identifier des personnes filmées, et ce, pour un autre usage que l’identification de rassemblements publics. »

Dès lors, le juge des référés a estimé que l’utilisation de ces drones relève bien « d’un traitement de données à caractère personnel » et, à ce titre, « doit respecter le cadre de la loi informatiques et libertés du 6 janvier 1978». Constatant que ce cadre n’avait pas été respecté, il a par conséquent ordonné à l’État de cesser sans délai la surveillance par drone. Et ce tant qu’un arrêté ou décret ministériel n’aura pas été pris sur le sujet après avis de la CNIL -ou tant que les drones ne seront pas dotés d’un dispositif de nature à rendre impossible l’identification des personnes filmées.

Me Patrice Spinosi, avocat de la LDH a déclaré à l’AFP saluer «la volonté du Conseil d’Etat de marquer son attachement aux libertés fondamentales». Selon lui «il n’y a aucune raison de penser que cette décision n’ait pas vocation à s’appliquer sur l’ensemble du territoire français». Les forces de l’ordre devront surveiller autrement la bonne marche du déconfinement.

A demain @jynau

3 réflexions sur “Comment a-t-on pu imaginer pouvoir utiliser des drones pour mieux déconfiner Paris ?

  1. On pourrait soumettre à une analyse par des collégiens la logique ce ce jugement .

    « Il a observé que les drones …
    – ne sont dotés d’aucun dispositif technique
    – permettant de s’assurer que les informations collectées
    – ne puissent conduire à identifier des personnes filmées,
    – et ce, pour un autre usage que l’identification de rassemblements publics »

    Pourquoi faudrait-il un dispositif pour détecter une collection de données ?
    Que pourrait être un tel dispositif ? Est-ce que seulement ça existe ?

    La question c’est : y – a -t’il ou non collection de données ? Possibilité de le faire ?

    Est-ce qu’on va s’assurer que les flics dans la rue ne filment pas en douce ?
    Et inspecter les hélicoptères ?

    Est-il illégitime ou souhaitable que les autorités puissent dépister rapidement des situations à risque sanitaire ?

    L’utilisation du mot « identifiication »…
    (  » l’identification de rassemblements publics »)
    … en dit long sur la parano du jugement parce qu’il ne s’agit pas d’identifier un rassemblement? Ca s’identifie un rassemblement ? Non.

  2. Je pensais à un autre titre:

    Démocratie : mais qui a pu imaginer pouvoir utiliser des drones pour mieux déconfiner ?

    Sécurité sanitaire: qui a pu imaginer ne pas utiliser de drones ?

    Je dois être un affreux réactionnaire à chemise brune.

    SARS-Cov-2 se tord de rire.

  3. Sage décision du Conseil d’État. (Le cave se rebiffe ?).
    Georges Moréas, Commissaire principal honoraire de la Police nationale et avocat nous alerte sur les dérives sécuritaires en cours ou …dans l’air.
    Si, dans son billet du 16 mai, il ne parle pas des drones, il signale un certain nombre de mesures dont la potentiellement scélérate « loi destinée à lutter contre les propos haineux sur l’Internet (mais qui va bien au-delà), votée en pleine pandémie, dans un Hémicycle quasi désert, va sans doute calmer l’ébullition numérique, puisqu’elle restreint la liberté d’expression sur la Toile : une censure administrative ou une autocensure des sites gérée par des algorithmes, en l’absence du contrôle du juge, pourtant seul garant des libertés individuelles. »
    https://www.lemonde.fr/blog/moreas/2020/05/16/la-peur-de-lautre/

    La quadrature du net est également montée en ligne – avec ou sans médaille- pour alerter l’opinion contre cette loi.

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