Crise épidémique : l’exécutif accusé d’une gestion des masques «à la petite semaine»

Bonjour

17/06/2020. Le Dr François Bourdillon a été directeur général de Santé publique France depuis sa création en avril 2016 et jusqu’en juin 2019. Il vient d’être interrogé par la commission d’enquête de l’Assemblée nationale qui débute ses travaux sur la gestion de la crise du Covid-19. Coup de théâtre : il a dit regretter la «croyance» de nombreux responsables sanitaires dans la «non efficacité des masques» pour le grand public, contrairement à l’approche de réduction des risques prônée par cette agence sanitaire. Le Pr Jérôme Salomon, Directeur général de la santé, aura apprécié.

Selon le Dr Bourdillon c’est cette « croyance » qui est  «probablement une des explications du fait» que seuls 100 millions de masques chirurgicaux aient été commandés à l’été 2019 pour reconstituer le stock stratégique d’Etat – stock qui avait chuté de plus de 700 millions à une centaine de millions après la destruction de stocks en mauvais état.

Santé publique France avait alors recommandé de porter ce stock à 1 milliard pour se préparer à une éventuelle pandémie grippale. Un rapport de l’infectiologue Jean-Paul Stahl remis à Santé publique France en août 2018 préconisait en effet de prévoir une boîte de 50 masques par foyer comprenant une personne malade, soit 20 millions de foyers en cas d’atteinte de 30% de la population. François Bourdillon explique avoir transmis, en septembre 2018, cette préconisation à Jérôme Salomon, soulignant que l’état des stocks «ne permet(tait) pas une protection» du pays en cas d’épidémie.

Voltaire et Rousseau

Ce dernier lui a alors donné instruction de commander 100 millions de masques, ce qui a été fait, après lancement d’un appel d’offres, en juillet 2019: 32 millions ont été livrés courant 2019, le reste devant arriver début 2020, lorsque l’épidémie de Covid-19 a éclaté. Le Dr Bourdillon a également expliqué avoir demandé au responsable ministériel une «doctrine claire» sur la destination de ces masques. Officiellement depuis 2013, hôpitaux et cliniques devaient eux-mêmes déterminer la nécessité ou non de constituer des stocks de masques pour protéger leur personnel. Or rien ne permettait de dire, clairement, si les stocks stratégiques gérés par Santé publique France devaient couvrir les besoins du grand public ou également ceux des soignants.

« Auditionnée dans la foulée de François Bourdillon, l’actuelle directrice de Santé Publique France, Geneviève Chêne, a déroulé un exposé scolaire des missions de l’agence, avant de se faire rappeler à l’ordre par la présidente de la commission, la députée (La République en marche Brigitte Bourguignon Pas-de-Calais), rapporte Le Monde (Chloé Hecketsweiler et Solenn de Royer). Visiblement embarrassée par les questions des députés, elle s’est retranchée à plusieurs reprises derrière le récit circonstancié du travail de l’agence pendant la vague épidémique. Il a fallu attendre les toutes dernières minutes de l’audition pour apprendre qu’elle n’a découvert qu’en janvier n’avoir plus que 100 millions de masques conformes en réserve.» Comment est-ce possible ? Comment justifiera-t-on une telle incurie ?

«Pas de commandes, pas de masques et pas d’instructions… On a le sentiment d’une gestion un peu à la petite semaine» 1, a résumé le député, président du groupe LR, Damien Abad. « Avant de savoir, on ne sait pas »  avait, hier, doctement expliqué aux députés-enquêteurs le Pr Jérôme Salomon – référence faite à Voltaire. Se souvenant de la « faute » de ce dernier, on pourrait, aujourd’hui, citer Rousseau et le ruisseau.

A demain @jynau

1 De manière spontanée, sans réfléchir à l’avenir, à court terme. Cette expression peut également signifier : avec médiocrité, sans grande envergure.

2 réflexions sur “Crise épidémique : l’exécutif accusé d’une gestion des masques «à la petite semaine»

  1. «Pas de commandes, pas de masques et pas d’instructions… »

    😉 Ah oui, ROUSSEAU, décidément , … mais pas que le ruisseau :

     » Et tel est le néant des choses humaines, que hors l’être existant par lui-même, il n’y a rien de beau que ce qui n’est pas. »

    Jean-Jacques Rousseau – ‘Julie, ou la Nouvelle Héloïse’ (1761) …

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