Bonjour
02/07/2020. On attendait la réaction des membres du Conseil scientifique du gouvernement après les accusations du Pr Didier Raoult. Une semaine plus tard elle est connue – au lendemain des accusations de « faux témoignage » exprimée par Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP.
Rappel des propos tenus le 24 juin par le Pr Didier Raoult s’exprimant, sous serment, devant les députés de la commission d’enquête sur la gestion politique de la lutte contre l’épidémie de Covid-19 :
« Vous me demandez pourquoi je ne suis pas resté dans ce conseil scientifique. C’est parce que je considérais que ce n’était pas un conseil scientifique et que je ne fais pas. Je ne fais pas de la présence, j’ai pas de temps. Je sais ce que c’est un conseil scientifique. Moi, j’ai un conseil scientifique qui fait rêver le monde entier de qualité. Ce n’était que des stars de leur domaine. Là ce n’était pas ça. Il n’y avait aucun de ceux qui connaissaient le coronavirus dans le conseil scientifique.
Interrogé par le rapporteur Eric Ciotti sur les personnes qui influenceraient de façon néfaste le ministre de la Santé, Olivier Véran, le Pr Raoult donnait des noms; ceux du directeur de l’ANSM (l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé), Dominique Martin, et le président de la Haute Autorité de santé, Dominique Le Guludec. « C’est eux qui ont pris les décisions » a-t-il dit.
« Le problème n’est pas résolu. Le problème reviendra. Donc, si vous refaites un groupe en disant (…) ‘pour faire la recherche médicale, on va prendre les gens de l’Inserm, des gens de Pasteur, qui vont se partager les manières de réfléchir et qui vont gérer des hôpitaux, plus deux ou trois personnes qui travaillent avec l’industrie pharmaceutique, je vous le dis, vous retomberez dans la même crise.
« Quand j’ai commencé à parler pour la première fois de la chloroquine. Il y a quelqu’un qui m’a menacé à plusieurs reprises de manière anonyme. Je vous recommande de faire une véritable enquête sur Gilead [un laboratoire pharmaceutique américain producteur d’un médicament expérimenté contre la Covid-19], j’ai porté plainte et j’ai fini par découvrir qu’il s’agissait de la personne qui avait reçu le plus d’argent de Gilead depuis 6 ans ».
Calomnie
Aujourd’hui, révèle l’AFP, le Conseil scientifique juge que ces propos sont « infamants et dépourvus de fondements » et relèvent de la « calomnie ». « La lettre, datée du 30 juin, est adressée à la présidente de la commission, Brigitte Bourguignon, son rapporteur, Eric Ciotti, et au président de l’Assemblée, Richard Ferrand, précise l’AFP. « A la suite des déclarations du Pr Raoult devant la commission d’enquête le 24 juin 2020, les membres du conseil scientifique Covid-19 considèrent ses propos et insinuations comme infamants et dépourvus de fondements », écrit le président du conseil scientifique, Jean-François Delfraissy, dans une lettre datée du 30 juin. Douze des treize membres du conseil scientifique y sont associés.
Selon le Pr Delfraissy, le Pr Raoult – qui avait brièvement fait partie du conseil scientifique créé début mars, avant de le quitter – a fait preuve d’une « certaine forme “d’intention de tromper” » les députés de la commission en « [entretenant] de manière répétée une confusion entre les notions pourtant bien distinctes de liens et de conflits d’intérêts ».
« Les membres du conseil scientifique souhaitent vous faire part de leur vive réprobation à l’endroit d’allégations sans fondement tenues par le Pr Raoult pourtant sous serment, ainsi que de propos manifestement outranciers dont les intentions et les prétentions ne lui semblent plus guère relever du registre de la science », conclut la lettre.
Ce n’est pas tout. Dans un courrier distinct daté du 1er juillet et adressé à Richard Ferrand, la présidente de la HAS, Dominique Le Guludec, conteste aussi des propos du Pr Raoult sur les conflits d’intérêts. « Affirmer devant la représentation nationale, de manière vague et non étayée, que la HAS est soumise à “des conflits d’intérêts très sérieux” relève de la calomnie, écrit Mme Le Guludec. Je ne saurais accepter que la réputation de la Haute Autorité de santé, son sérieux et son intégrité soient remis en cause avec une telle légèreté à l’occasion d’un moment aussi important qu’une audition par les parlementaires. »
Et maintenant ? Que peut le Parlement contre de telles accusations ? La justice sera-t-elle saisie pour infamie et calomnie ?
A demain @jynau