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27/07/020. « Le grand projet sociétal du quinquennat » est de retour. Neuf mois (sic) après son adoption en première lecture à l’Assemblée nationale, bioéthique et PMA pour toutes sont aujourd’hui de retour dans l’Hémicycle. Idéologies, références à la religion catholique et noms d’oiseaux garantis.
On se souvient de la clef de voûte du projet de loi : l’ouverture des techniques de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes et aux femmes seules. Au choix, une dangereuse régression anthropologique ou, à l’inverse, le droit enfin offert aux femmes fécondes qui souhaitent pouvoir procréer sans devoir avoir recours à des relations sexuelles avec un homme. Jusqu’ici, en France, au nom de la médecine et de la thérapeutique seuls les couples hétérosexuels stériles (ou hypofertiles) pouvaient avoir accès à ces techniques.
A dire vrai « le grand projet sociétal du quinquennat » aurait pu attendre ; après la crise sanitaire liée au Covid-19, la mobilisation de plusieurs députés de la majorité et de la gauche aura été nécessaire pour que le projet de loi soit inscrit à l’agenda parlementaire avant l’été. Désormais, après le départ d’Agnès Buzyn vers d’autres cieux et le remaniement gouvernemental on retrouvera, pour défendre la position du gouvernement, les ministres de la Santé Olivier Véran, de la Justice Eric Dupond-Moretti et de l’Enseignement supérieur et de la recherche Frédérique Vidal.
Prise en charge intégrale des actes par la Sécurité sociale
Le texte a déjà bourlingué : voté par l’Assemblée nationale en première lecture le 15 octobre 2019, il a ensuite été discuté et nettement amendé par les sénateurs, qui l’ont adopté le 4 février. « Lors des travaux en commission qui ont eu lieu début juillet, les députés ont sans surprise rétabli dans les grandes lignes leur version, et ont ajouté quelques modifications, résume Le Monde (Solène Cordier). Ainsi, sur la PMA, ils ont réintroduit la prise en charge intégrale des actes par la Sécurité sociale, quel que soit le profil des patientes, contrairement aux sénateurs qui l’avaient limitée aux cas relevant d’une infertilité pathologique – ce qui excluait de fait les nouvelles candidates (femmes seules et couples de lesbiennes) (…) Au cours des trente-sept heures de discussion, l’examen d’amendements sur l’ouverture de la PMA aux personnes transgenres, et la PMA post-mortem, avec les gamètes d’un conjoint décédé, a aussi occasionné de vifs débats. Ils ont finalement été rejetés. »
Mais il y a aussi, plus troublant : les députés se sont montrés favorables (et ce contre l’avis du gouvernement) à l’acceptation de la méthode « ROPA » (réception d’ovocytes de la partenaire) ; ce procédé, autorisé notamment en Espagne, consiste à permettre qu’au sein d’un couple de femmes, l’une mène une grossesse en portant l’ovocyte fécondé de l’autre. La pratique croisée peut aussi être réalisée.
On sait que plusieurs associations LGBT voient là une manière de partager la conception de l’enfant. Le gouvernement, et notamment Olivier Véran, défavorable au procédé, devrait tenter de le faire supprimer en séance 1. Pour sa part le dérangeant Pr Israël Nisand, président du Collège national des gynécologues et obstétriciens, trouve que la « ROPA » est « légitime », comme il vient de le déclarer sur France Inter. Il sera du plus grand intérêt de savoir quelles sont les raisons de fond, idéologiques, de l’opposition du gouvernement ; et qui, finalement, l’emportera.
A demain @jynau
1 La précédente ministre « Agnès Buzyn était contre et le gouvernement est contre également cette question-là », déclarait début juillet Olivier Véran sur BFMTV/RMC. La technique implique « une stimulation hormonale et des ponctions d’ovocytes qui ne sont pas des gestes neutres, à une femme qui n’en relève pas forcément », c’est à dire, qui ne souffre pas elle-même de problèmes de fertilité, a-t-il dit. Sur un « sujet complexe, c’est la santé qui doit primer », a-t-il insisté.
« Il y a un acte invasif. Est-ce que la situation justifie d’aller faire un acte invasif ? D’un point de vue éthique la question est extrêmement complexe. La position du gouvernement restera défavorable, même si par ailleurs je peux être moi favorable à certaines évolutions dans le texte, parce qu’on peut avoir des désaccords sur des questions éthiques », a encore déclaré le ministre que l’on retrouve ici étrangement en phase avec les associations opposées à la PMA. La Manif pour tous voit notamment dans cette technique « l’antichambre de la GPA ».