Le cannabis à 150 euros : réquisitoire contre les mesures et la «posture» du gouvernement

Bonjour

28/07/2020. C’est peu dire que la majorité des soignants professionnels spécialisés en addictologie n’ont pas apprécié l’annonce par le premier ministre de la généralisation de l’amende forfaitaire à 200 euros pour les usagers de drogues illicites. Une mesure présentée comme « sécuritaire »….  A peine évoquée par le futur président de la République cette mesure avait  été très largement critiquée par les spécialistes  pour son incohérence et sa très probable inefficacité. Puis vinrent l’heure des auditions au Parlement. « Ces auditions se sont avérées être une consultation de façade puisque le projet présidentiel est resté identique » regrette aujourd’hui, amèrement, l’Association nationale de prévention en alcoologie et en addictologie (ANPAA).

Et de dénonce le fond, la forme et la méthode. « Alors qu’une expérimentation était en cours depuis peu à Marseille, Lille, Reims, Rennes et Créteil, le Premier ministre a décidé la généralisation à l’ensemble du territoire national sans attendre l’évaluation de cette expérimentation, dont nous ne connaitrons jamais les résultats ni les modalités de cadrage local » observe l’ANPAA.

Elle ajoute que l’amende forfaitaire a pour objectif initial d’alléger la charge de travail des policiers et gendarmes, alors même que Jean Castex annonce une intensification des contrôles. « Le Premier ministre considère que l’efficacité de cette politique dépend de la certitude de la sanction pour les contrevenants. Or aujourd’hui, les contrôles ne concernent qu’une faible proportion des consommateurs (175 000 selon l’OFDT en 2016) alors que les consommateurs réguliers sont estimés à 1,2 millions sans parler des consommateurs occasionnels (près de 5 millions). On voit mal comment la certitude de la sanction pourrait se concrétiser sans une mobilisation considérable des forces de police alors que l’objectif est d’alléger leur charge de travail en ce domaine. »

« Seule une légalisation encadrée du cannabis …. »

Comment le Premier ministre peut-il présenter cette mesure comme un moyen de lutter contre l’insécurité alors même que la prohibition est à la racine de l’économie souterraine et de l’enrichissement des réseaux mafieux ? Pourquoi développer une politique en apparence répressive alors que la logique sanitaire voudrait avant tout un effort accru de prévention – une prévention dont le candidat Emmanuel Macron avait fait l’une de ses priorités. Et ce réquisitoire de l’ANPAA :

« Mais c’est surtout la philosophie politique de la mesure qui parait de plus en plus anachronique. Alors que le constat de l’échec de la guerre à la drogue fait désormais consensus, que nous avons la politique la plus répressive d’Europe et que se multiplient les appels à dépénaliser l’usage de stupéfiants et réformer la politique des drogues, le gouvernement persiste dans une logique qui a démontré son absurdité.

« Traiter le problème de manière cohérente supposerait un courage politique qui aborderait les drogues de manière universelle, en particulier pour les plus consommées qu’elles soient légales (tabac, alcool) ou illégales (cannabis). Seule une légalisation encadrée du cannabis peut permettre une prévention cohérente, et un assèchement des réseaux mafieux qui en vivent et qui enferment des cités dans des ghettos de pauvreté. Ce courage pourrait trouver des arguments dans un grand débat citoyen sur le modèle de la convention pour le climat. »

« Mais le nouveau gouvernement démontre que l’heure n’est pas à l’ambition, ni au débat transparent sur des sujets difficiles, pas plus qu’à la recherche de solutions efficaces à un problème sociétal chronique. C’est pourquoi il faudra se contenter jusqu’aux présidentielles de postures et de coups de menton. »

On connaît les coups de menton en politique. Mais quelles différences entre « posture » 1 et « imposture » 2 ?  

A demain @jynau

1 « Attitude, position du corps, volontaire ou non, qui se remarque, soit par ce qu’elle a d’inhabituel, ou de peu naturel, de particulier à une personne ou à un groupe, soit par la volonté de l’exprimer avec insistance ».

2 « Acte, parole qui tend à tromper autrui dans le but d’en tirer profit ».

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