Autisme : enquête sur des pratiques prohibées. Le Pr Montagnier pourrait-il être inquiété ?

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18/09/2020. Huit ans plus tard, rebondissement dans une affaire que l’on pensait oubliée. Et ce sur une initiative de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM). L’ANSM vient ainsi d’annoncer avoir saisi le procureur de Paris quant à des pratiques de prescriptions médicamenteuses dangereuses chez des personnes autistes. L’agence en avait elle-même été informée fin 2019, via sa procédure de lancement d’alerte, par la présidente de l’association SOS Autisme, Olivia Cattan, et a, depuis, notamment recueilli des témoignages de parents et des ordonnances faisant état de ces prescriptions.

Pour la première fois le pôle santé publique du parquet a, sur ce sujet, ouvert une enquête le 11 septembre pour « mise en danger de la personne d’autrui » et « infractions tenant à la réalisation de recherches impliquant la personne humaine », annonce le ministère public. Les investigations ont été confiées à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp).

Ainsi donc « certains médecins » prescriraient de médicaments en dehors de leurs autorisations de mise sur le marché (AMM) pour traiter des enfants atteints d’autisme. « Il s’agit, en particulier, de prescriptions de médicaments anti-infectieux (antibiotiques, antifongiques, antiparasitaires et antiviraux) sur des périodes longues de plusieurs mois mais également de médicaments destinés au traitement des intoxications aux métaux lourds (chélateurs) » précise l’ANSM. Qui ajoute :

« En l’absence de données cliniques, ces médicaments, utilisés en dehors de leur AMM, ne sont pas recommandés dans la prise en charge des troubles du spectre de l’autisme par la HAS. De plus, les anti-infectieux présentent des risques de survenue d’effets indésirables en particulier lors d’une exposition au long cours. Ils peuvent se caractériser, outre les effets digestifs, par des troubles cardiovasculaires, cutanés, ainsi que par d’autres troubles spécifiques à chaque antibiotique utilisé. Par ailleurs, l’utilisation d’antibiotiques sur une durée longue va contribuer à l’émergence d’une antibiorésistance qui diminuera l’efficacité du traitement en cas d’infection avérée. »

Selon Olivia Cattan, présidente de l’Association SOS Autisme (qui s’apprête à publier un livre sur ces pratiques) une cinquantaine de médecins seraient concernés, dans la mouvance de l’association Chronimed, fondée par le controversé Pr Luc Montagnier ; des médecins qui auraient ainsi traité quelque 5 000 enfants depuis 2012. Ces recherches illégales se seraient tenues dans un institut médico-éducatif situé dans le département des Hauts-de-Seine. « On voudrait vraiment que ça aille en justice et que ces médecins soient radiés » déclare Olivia Cattan.

En 2012 le Luc Montagnier, prix Nobel 2008 de médecine pour avoir co-découvert le du virus du sida, défendait l’idée d’une « piste infectieuse » pour expliquer l’autisme. Il affirmait, vidéos à l’appui, que les antibiotiques pouvaient améliorer l’état de la majorité des enfants concernés. Dans un communiqué, SOS Autisme fait part de sa consternation, et juge « impensable qu’aujourd’hui, cet établissement n’ait été l’objet d’aucun contrôle de la part des autorités concernées ».

A demain @jynau

Covid reconnue maladie professionnelle ? Le gouvernement accusé de trahir la parole donnée

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6/09/2020. C’est une nouvelle étape dans une affaire qui apparaîtra à beaucoup comme un scandale – si le non-respect de la parole donnée par l’exécutif en est un. Nous parlons ici des conditions dans lesquelles la Covid-19 pourra/pourrait, en France, être ou non reconnu comme une maladie professionnelle.

Rappel. Nous étions le 23 mars – six mois déjà. Et  nous évoquions l’incompréhensible, l’inacceptable situation faisant que le Covid-19 n’était pas, en France, reconnue maladie professionnelle chez les soignants. C’est alors qu’Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé prit la parole :

«  Hier, deux nouveaux médecins, un médecin généraliste et un médecin gynécologue, ont trouvé la mort en faisant leur métier. Ils ont trouvé la mort parce qu’il était médecin. Pour ses deux confrères, j’ai une pensée particulière, qui éclaire d’une lumière dramatique la hauteur de l’engagement des soignants au service de leurs malades. Nous ne les oublierons. Nous ne les oublierons jamais.

D’autres médecins, soignants, personnes portant assistance aux plus fragiles contractent le virus chaque jour dans nos hôpitaux, dans leurs cabinets ou au domicile de leurs patients. Pour tous ces soignants qui tombent malades, je le dis : le coronavirus sera systématiquement et automatiquement reconnu comme une maladie professionnelle. C’est la moindre des choses. Il n’y a aucun débat là-dessus. » 

Trois semaines plus tard, rien, en pratique, ne semblait avoir avancé et Le Monde (Bertrand Bissuel) soulevait la question au-delà des seuls soignants : toutes les personnes qui ont été atteintes par la Covid-19 en exerçant leur métier pourront-elles bénéficier d’une prise en charge spécifique par la Sécurité sociale ? « Oui, mais pas toutes : le gouvernement semble, en effet, vouloir réserver un tel dispositif à certaines catégories, évoluant dans le monde de la santé » croyait savoir le quotidien. Or plusieurs associations et organisations syndicales plaidaient, elles, pour une approche beaucoup plus large, pour l’ensemble des salariés touchés.

 Christophe Castaner, avait ainsi exprimé le souhait qu’un traitement analogue aux soignants soit réservé aux policiers. L’Académie de médecine s’était également dite aussi favorable à ce qu’elle ne bénéficie pas qu’aux seuls personnels de santé mais aussi à ceux qui travaillent pour « le fonctionnement indispensable du pays ».

Nous sommes le 16 septembre : la Covid-19 pourra être reconnue comme une maladie professionnelle, selon un décret publié, mardi 15 septembre, au Journal officiel. Mais à des conditions beaucoup trop restrictives, selon les syndicats et plusieurs associations. Estimant ne pas avoir été entendues lorsqu’elles furent consultées, début juillet, sur le projet de texte, ces organisations accusent le gouvernement de manquer à sa parole. La CFDT est « très en colère », a menacé son numéro un, Laurent Berger, mercredi 16 septembre sur RTL. Il dénonce « une trahison par rapport à la parole publique » des ministres sur le sujet.

Résumons. En cas d’infection par le SARS-CoV-2, le système de la reconnaissance automatique s’appliquera au « personnel de soins et assimilé », ainsi qu’à d’autres catégories d’actifs (employés de laboratoire, d’entretien, etc.). Il faudra qu’ils aient travaillé « en milieu d’hospitalisation à domicile ou au sein des établissements et services » dont la liste limitative est énumérée dans le décret. Sont aussi concernés les personnes occupant des « activités de soins et de prévention » dans des « établissements d’enseignement » et ceux qui transportent des malades, « dans des véhicules affectés à cet usage ». Ils pourront bénéficier de la mesure – mais uniquement s’ils ont été touchés par une forme sévère de la maladie, « ayant nécessité une oxygénothérapie ou toute autre forme d’assistance ventilatoire ».

« Regard bienveillant pour les maladies pendant le confinement »

« Au ministère de la santé, on répond qu’il n’est pas toujours évident d’identifier la pathologie, surtout quand un test PCR n’a pas pu être réalisé au début de l’épidémie (sic), nous apprend Le Monde (Bertrand Bissuel et Raphaëlle Besse Desmoulières). En revanche, si la personne est arrivée ‘’au stade de l’oxygénothérapie, il n’y a plus vraiment de doute ‘’.»

Mais qu’en sera-t-il des autres travailleurs, salariés ou pas, qui ne relèvent pas de la reconnaissance automatique, leur requête sera examinée par un comité d’experts indépendants. Toujours au ministère de la santé, on précise « qu’un regard bienveillant sera porté pour les maladies contractées pendant la période du confinement ». Mais pour beaucoup d’associations et syndicats, la procédure s’apparentera à un véritable « parcours du combattant » conduisant à des recours en justice pour établir que les problèmes de santé résultent bien du Covid-19

Cité par Le Monde Pierre-Yves Montéléon (CFTC) évoque notamment le sort réservé aux non-soignants qui sont « au contact du public ou de produits – par exemple, ceux qui collectent des déchets ». Laurent Berger : « On est loin de ces paroles extrêmement belles qui ont été dites au moment du confinement pour glorifier ces travailleurs ».

Des travailleurs que l’on disait alors « en première ligne ». C’était quand la France était, selon le président de la République, « en guerre » contre le virus. Aujourd’hui le pouvoir exécutif déclare qu’il nous faut apprendre « à vivre avec ».

A demain @jynau

Covid, 250 euros: face à la grève du dépistage, le gouvernement va-t-il envoyer la police ?

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16/09/2020. L’affaire restait médiatiquement régionale. Elle prend soudain une ampleur nationale et risque de diffuser – plaçant brutalementle pouvoir exécutif devant ses responsabilités. Reprenons ce que nous en dit l’AFP ? La grève dans les vingt laboratoires d’analyse biologiques Biofusion du Tarn-et-Garonne, Haute-Garonne et Lot a été reconduite ce mercredi 16 septembre. Les salariés grévistes protestent notamment contre une «prime Covid» jugée insuffisante, a-t-on appris auprès de FO.

Or les départements de Haute-Garonne et du Tarn-et-Garonne sont classés en «zone rouge» de circulation active duvirus de la Covid-19.

C’est là une grève-symptôme : l’un des premiers mouvements de blocage dans des laboratoires de biologie médicale depuis la multiplication des tests virologiques (PCR) en France -des tests dont le nombre dépasse désormais le million par semaine dans une cacophonie sans précédent face à laquelle les autorités sanitaires sont dépassées. Corollaire : cet objectif, fixé par le ministre de la Santé Olivier Véran, est synonyme de travail à la chaîne pour les laboratoires, dont les personnels commencent à fatiguer. Et retrouvent les réflexes habituels des salariés – avec toutes les conséquences que l’on peut imaginer.

Le 7 septembre, une cinquantaine de personnes s’étaient déjà rassemblées devant le siège sarthois des laboratoires Laborizon au Mans, dans le cadre d’un appel à la grève pour dénoncer les conditions de travail des salariés. Hier, soixante-dix salariés de Biofusion (entreprise membre du groupe Inovie) se sont rassemblés devant un site à Montauban, a constaté un correspondant de l’AFP. Une délégation a ensuite été reçue par la direction mais «rien de bon n’en est sorti et la grève est reconduite. Le mot d’ordre de grève a été lancé par FO, la CGT et la CFDT.

« L’entreprise avait indiqué sur son site internet être dans l’incapacité d’assurer la prise en charge des bilans de santé et des dépistages Covid-19, ‘’sur tous les sites et tous les drives’’, sauf un ‘’qui fonctionne sous réquisition de la préfecture’’ » précise l’AFP. La déléguée syndicale CFDT a quant à elle expliqué à la presse que tout était «parti de la petite prime reçue comme prime Covid», c’est «la goutte d’eau qui a fait déborder le vase». Cette prime d’un montant de 250 euros «est dérisoire comparée à l’investissement du personnel qu’ils soient coursiers, secrétaires, techniciens, infirmières», selon elle.

Explosion sociale

Les syndicats demandent le paiement d’une prime Covid de 1.000 euros «sans condition d’attribution» parce que «nous sommes, nous aussi, en première ligne». «On a demandé une augmentation de 10% de nos salaires ainsi qu’une amélioration de la qualité de vie au travail parce que nous avons des effectifs qui sont toujours limite. On travaille en surcharge pratiquement tout le temps, même hors période Covid», assure la CFDT.

Plus grave peut-être, symptôme de la cacophonie et des peurs ambiantes : il y a vraiment une peur de l’agression physique après les agressions verbales. Les coups de téléphone ont été multipliés par dix. Les gens s’inquiètent, demandent à recevoir leurs résultats. Certains paniquent. «Notre plateau technique est capable de faire 1.500 tests par jour et nous sommes à 5.000. D’où le retard et l’agressivité des patients qui s’inquiètent de ne pas avoir leurs résultats en temps et en heure. (…) Pour toutes les secrétaires ou techniciens, c’est lourd à porter et très stressant» expliquent les syndicats.

Début septembre, François Blanchecotte, président du Syndicat des biologistes (SDB), avait alerté sur un risque d’«explosion sociale, si les personnels de laboratoires privés décidaient de se mettre en grève», rappelant qu’ils n’avaient rien obtenu lors des accords du « Ségur de la santé ». Pourquoi ?

A demain @jynau

Politique. La «5G» au pays des Lumières, des Amish et des ascenseurs pornographiques

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16/09/2020 Sont-ce les toujours les médias qui rabaissent les débats ? Au lendemain de la publication, dans Le Journal du dimanche, d’une tribune d’élus écologistes et de gauche réclamant un moratoire sur le déploiement de la 5G en France, Emmanuel Macron a pris la parole. Cette tribune était signée par 70 élus de gauche et écologistes, dont le chef de file de La France insoumise Jean-Luc Mélenchon et le député européen (Europe Ecologie-Les Verts) Yannick Jadot.

Le Président de la République s’est insurgé, lundi 14 septembre, contre des responsables qui « estiment qu’il faudrait relever la complexité des problèmes contemporains en revenant à la lampe à huile ». « Je ne crois pas au modèle Amish », a-t-il plaisanté. Les Amish, ces anabaptistes d’origine suisse apprécieront-ils cette méchante pique 1 ?

« La France est le pays des Lumières, c’est le pays de l’innovation. On va tordre le cou à toutes les fausses idées. » Le choix de la 5G, « c’est le tournant de l’innovation », a insisté le chef de l’Etat devant une centaine d’entrepreneurs de la « French Tech » réunis dans la salle des fêtes de l’Elysée. On appréciera le rapprochement que fait le président entre le « pays des Lumières » et le retour à la « lampe à huile » (pourtant en usage au temps de Voltaire).

En charge de développer la pensée présidentielle, Cédric O, le secrétaire d’Etat chargé de la transition numérique, a donné un entretien au Monde (Vincent Fagot). Il y soutient que la 5G est « indispensable à la France ». Extraits :

« Soyons très clair : il y a des interrogations chez certains de nos concitoyens. Elles sont légitimes et nous devons y répondre méthodiquement, en nous fondant sur ce que nous dit la science. Or, l’ensemble des agences sanitaires des pays du monde entier, dont l’Anses [l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail], ont toujours indiqué qu’il n’y avait pas à ce jour de raison de penser que la 5G représentait un risque supplémentaire par rapport à la 4G ou aux autres radiofréquences, pour lesquelles la France possède des normes de protection parmi les plus élevées du monde 2 .»

Que répond-il, le secrétaire d’Etat au maire hyper-écologiste de Grenoble, Eric Piolle, pour qui la 5G ne sert « qu’à regarder du porno dans les ascenseurs » ? « Ces propos reflètent une méconnaissance étonnante pour un ingénieur et un mépris des Français qui ne sert en rien l’environnement » estime Cédric O.

La question, complexe, aurait pourtant mérité de plus longs dégagements. Pourquoi les ascenseurs ? Sont-ce les médias qui rabaissent les débats ?

A demain

1 La première règle Amish est : « Tu ne te conformeras point à ce monde qui t’entoure ».

2 C’est à dire vrai un tout petit peu plus compliqué : Nau J-Y, « On peut être raisonnablement inquiet face à la « 5G ». Voici pourquoi », Revue Médicale Suisse 2020; volume 16. 380-381

Overdose mortelle : l’ « Uber Eats » de l’héroïne sera-t-il reconnu comme coupable ?

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15/09/2020. On connaît le cas où le responsable d’un débit de boissons alcooliques  est accusé d’avoir laissé trop boire un client en sachant qu’il se mettra bientôt à son volant. Doit-il être reconnu responsable, coupable, en cas d’accident de la circulation ?

C’est une question proche mais comme inversée qui est aujourd’hui soulevée à Besançon. Un jeune homme âgé de 23 ans a été mis en examen et écroué après avoir vendu de l’héroïne particulièrement pure à une femme de 48 ans décédée d’une overdose – annonce faite par le procureur de la République de Besançon.

Le suspect a été mis en examen pour «trafic de stupéfiants» et «homicide involontaire». Il «livrait à domicile entre 20 à 30 clients pas jours (…) une héroïne pure à 24 %, soit trois à quatre fois plus pure que ce qu’on trouve à Besançon», a expliqué le procureur, Etienne Manteaux, lors d’une conférence de presse. «C’était l’Uber Eats des stupéfiants, un phénomène qui monte», a-t-il ajouté. Unber Eats appréciera-t-il ? Engagera-t-il une action en justice ?

Déjà condamné pour trafic de stupéfiants, le jeune homme avait été interpellé par les enquêteurs de la sûreté départementale de Besançon qui ont saisi quelque 650 grammes d’héroïne, 182 grammes de cocaïne, quelques grammes d’ecstasy et 6.000 euros en numéraire. Un complice a également été interpellé et mis en examen pour «trafic de stupéfiants». Il a été placé sous contrôle judiciaire.

« Début novembre, une femme qui sortait d’une cure de désintoxication était décédée d’une overdose. L’amie qui se trouvait avec elle et qui avait prévenu les secours avait également été victime d’une overdose, mais avait survécu, rapporte l’AFP. Elles s’étaient faites livrer de l’héroïne à domicile pendant la soirée.

Les policiers de Besançon ont remonté leurs contacts téléphoniques. Ils ont «emmagasiné beaucoup de temps d’écoute» pour finalement identifier et interpeller «cet individu, qui n’aura plus la possibilité de fournir de la drogue à un très très grand nombre de clients», a relevé la commissaire Juliette Dupoux, cheffe de la sûreté départementale de Besançon. Jusqu’à quand ? Après l’action médicale et le travail policier, la justice devra se prononcer.

A demain @jynau

Castex: dégradation de la situation, quatorzaine divisée par deux. Tout reste à expliquer

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11/09/2020. Que se passe-t-il au sommet de l’Etat ? Le Premier ministre a tenu une courte allocution, aujourd’hui, à 17 heures pour rendre compte du conseil de défense qui s’est tenu plus tôt dans la matinée. Résumons. Jean Castex a annoncé une « dégradation manifeste » de la situation épidémiologique. Et le chef du gouvernement, une nouvelle fois, d’en appeler à la responsabilité de tous et de rappeler que rien n’est fini : « le virus est là pour quelques mois encore et nous devons réussir à vivre avec »

Parmi les principales annonces : une réduction du temps de la quatorzaine, qui est ramené de 14 à 7 jours et le classement de 14 nouveaux départements en « rouge », portant le total à 42. Aucune mesure de reconfinement n’a en revanche été annoncée. Le Premier ministre a demandé au préfet des régions de Bordeaux, Marseille et de la Guadeloupe de lui faire des propositions pour endiguer une « évolution préoccupante des contaminations »

Où l’on voit qu’un effort considérable de pédagogie nécessaire reste à faire par l’exécutif. Où l’on voit aussi que ce dernier n’a pas suivi les recommandations formulées par le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique chargé par Emmanuel Macron de conseiller le gouvernement. Le gouvernement « va être obligé de prendre un certain nombre de décisions difficiles », « dans les huit à dix jours maximum » avait, le 10 septembre, ainsi publiquement déclaré le Pr Jean-François Delfraissy – irritant de ce fait le président de la République.

Or aucune « décision difficile » n’a été annoncée ce 11 septembre par le chef du gouvernement. Il reste désormais entre sept et neuf jours. Si tel n’était pas le cas on aurait la démonstration que le Conseil scientifique n’est pas (n’est plus) pleinement entendu par le pouvoir politique.

A demain @jynau

Covid : la cacophonie, le bon sens et l’appel à la vigilance de SOS Médecins France

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11/09/2020. Interrogation montante. Dramatiser à l’excès ou prendre le risque de sous-estimer la réalité chiffrée et ses conséquences ? Dans les médias on n’en finit plus d’aborder l’équation du « sanitaire » qui serait opposée à l’ « économique ». Le tout, le plus souvent, dans la cacophonie, les invectives, l’inaudible. Et l’on observe dans le même temps les premiers affrontements ouverts entre le Conseil scientifique et le pouvoir exécutif.

C’est dans ce contexte qu’est publié un texte dont l’importance mérite d’être soulignée. A la suite du conseil d’administration de SOS Médecins France, réuni ce jeudi 10 septembre, ce texte fait un point sur l’épidémie de Covid et les réponses plus ou moins apportées.  

« Depuis le début de septembre et plus encore ces derniers jours, SOS Médecins constate sur l’ensemble de son réseau national une augmentation importante de ses actes pour suspicion Covid-19 (Passant de 482 cas journaliers le 1er septembre à 991 cas journaliers de suspicion Covid-19 le 9 septembre), précise-t-il. Cette augmentation frappe majoritairement des patients jeunes (moins de 40 ans) peu symptomatiques. Nous devons éviter que cela s’étende dans les prochains jours et semaines à des catégories plus âgées et aux patients fragiles. »

Ce n’est pas tout. Lors de leurs visites à domicile, les 1 300 médecins du groupe constatent que les Français les plus âgés et fragiles sont attentifs et sont pour certains « quasi-confinés ». Et ils précisent que les visites sont l’occasion d’évoquer avec les familles les meilleurs moyens de se protéger, d’épargner les aînés, et de faire face aux situations de cas contact.  

SOS Médecins observe également « une augmentation des consultations pour des enfants en âge scolaire, à la demande des établissements. » « Les familles ont besoin d’un avis médical et d’un certificat difficile à établir sans test PCR, ajoute-t-il. Au sujet des tests, ils observent un engorgement des laboratoires d’analyse et un rallongement des délais. Pour éviter l’augmentation des cas graves, il est impératif de prioriser les tests pour les personnes symptomatiques et les sujets contacts et d’accélérer l’arrivée des tests rapides. »

Au vu de tous ces éléments, sans dramatiser à l’excès mais sans minimiser Pierre-Henry Juan, président de SOS Médecins France, appelle à la vigilance « Si les mesures barrières ne sont pas appliquées, cela risque de générer une augmentation des cas graves. Nous avons tous le pouvoir de lutter contre cette épidémie, restons vigilants. Protégeons en particulier les aînés et les personnes à risque, en portant le masque, en se lavant les mains, et en gardant les distances. »

On attend désormais les futures mesures décidées, sous l’autorité du Président de la République au terme d’un nouveau « conseil de défense ». Mesure par définition marquées du sceau du pouvoir politique. « Sanitaire » versus « économique».

A demain @jynau

Vaccin-Covid: une «maladie inexpliquée» conduit AstraZeneca à suspendre ses essais cliniques

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09/09/09. Hier le fait aurait volontiers été durablement passé sous silence. Aujourd’hui l’information s’impose d’emblée, au nom d’une transparence imposée – et ce avec toutes les conséquences que l’on peut d’ores et déjà imaginer.

Le puissant groupe pharmaceutique AstraZeneca a annoncé mardi 8 septembre qu’il devait faire une « pause » dans les essais cliniques de son vaccin expérimental contre le Covid-19 – et ce à cause après l’apparition d’une «maladie potentiellement inexpliquée», (sans doute un effet secondaire grave) chez un participant. Transparence ou pas, aucune autre précision n’a encore été donnée.

« Nous avons déclenché une pause dans la vaccination dans le cadre de notre processus pour permettre l’examen des données de sécurité », a déclaré au Financial Times un porte-parole d’AstraZeneca. « Il s’agit d’un contrôle de routine qui doit se produire chaque fois qu’il existe une affection potentiellement inexpliquée dans l’un des essais afin de garantir le maintien de l’intégrité de nos essais. » Les données seront bientôt revues par un comité indépendant. cette pause affecte un test lancé à très large échelle, dans une procédure de phase 3.

L’annonce a, sans surprise, provoqué une chute de l’action AstraZeneca dans les échanges officieux après la clôture de Wall Street. La firme est le partenaire industriel de l’université britannique Oxford, et leur vaccin est l’un des projets occidentaux les plus avancés, testé sur des dizaines de milliers de volontaires au Royaume-Uni, au Brésil, en Afrique du Sud – ainsi, depuis le 31 août, qu’aux Etats-Unis.

Augmenter les craintes et autres rejets vis à vis de la vaccination

«C’est une action de routine qui est requise dès qu’une maladie potentiellement inexpliquée apparaît dans l’un des essais, pendant l’enquête, afin de maintenir l’intégrité des essais», a précisé le porte-parole de la firme.

On ignore donc la nature et la gravité de cet « événement » – qui selon certains (le site Statnews) pourrait ne pas être d’une gravité particulière. C’est la première suspension connue d’un essai clinique concernant un vaccin expérimental contre l’infection par le SARS-CoV-2. Selon la durée et le résultats des investigations, cette décision pourrait avoir un impact sur le calendrier excessivement serré du développement. Elle pourrait aussi être de nature à augmenter les craintes et autres rejets vis à vis de la vaccination contre cette infection.

La veille de cette annonce le ministre de la Santé britannique avait dit espérer des résultats des essais d’AstraZeneca d’ici la fin de l’année – ou pour le début de 2021. La firme a déjà pré-vendu des centaines de millions de doses à de multiples pays – dans le cas au cas où son vaccin prouverait à la fois son efficacité et son innocuité.

« Les laboratoires pharmaceutiques s’inquiètent de la politisation de la science, qui pourrait conduire à une mise sur le marché d’un vaccin ne répondant pas aux normes habituelles de la FDA et accentuer la défiance de la population américaine, observe pour sa part Le Monde (Arnaud Leparmentier).Celle-ci était habituellement réduite à des mouvements antivaccins puissants — les Etats-Unis ont été frappés eux aussi par la résurgence mondiale de rougeole en 2019 — mais elle est plus large, en raison des craintes de manipulations politiques. Selon le New Yorker, entre un tiers et la moitié des Américains pourraient refuser le vaccin contre le Covid-19. Le ministère de la santé compte lancer une campagne publicitaire en faveur de la vaccination d’ici à novembre, avec le soutien de célébrités américaines. »

Qu’en est-il au ministère français de la santé, alors même que la France est l’un des pays qui, d’ores et déjà, compte un taux élevé d’opposants à cette vaccination ?

A demain @jynau

Pourquoi va-t-on réduire la «quatorzaine» alors que la progression virale est «exponentielle» ?

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08/09/2020 Une fois de plus, la nécessité absolue d’une pédagogie destinée au plus grand nombre – un exercice que l’exécutif peine à mettre en place. Le gouvernement va très vraisemblablement réduire la période d’isolement des malades du Covid-19 et des cas contacts, jugeant que la durée actuelle de 14 jours est «trop longue». Mais comment justifier cette mesure alors que les indicateurs de l’épidémie continuent globalement de se détériorer ?

Olivier Véran, ce matin sur France Inter  au sujet de la réduction à venir du délai de quatorzaine en cas de suspicion de Covid-19. « Le Conseil scientifique m’a rendu ses conclusions sur cette question », précise-t-il. « Il est favorable à ce qu’on puisse réduire la période de mise à l’abri dans un certain nombre de situations, et de passer de 14 à 7 jours. On est davantage contagieux dans les 5 premiers jours, ensuite la contagiosité diminue de façon importante. Ce n’est pas à moi de prendre cette décision, elle sera prise vendredi lors du conseil de défense national. »

Dans le même temps on sait que l’incidence du Covid-19 dépasse désormais le seuil d’alerte – soit 50 cas pour 100 000 habitants – dans dix-neuf départements et le taux de positivité (proportion du nombre de personnes positives divisé par le nombre de personnes testées, sur les sept derniers jours) continue d’augmenter : il a atteint 4,9 % dimanche 6 septembre, contre 4,3 % en milieu de semaine.

Dans son dernier point de situation, Santé publique France (SpF) annonce constater une progression « exponentielle » de la circulation du virus et une dynamique de transmission « préoccupante ». Sept nouveaux départements ont été classés en zone rouge, portant le total à vingt-huit. « On a une croissance aujourd’hui de 30 % du nombre de cas par semaine, de 15 % du nombre d’hospitalisations. Si on continue avec ce même rythme, on arrivera sur une situation critique en décembre dans plusieurs régions de France », a averti dimanche l’épidémiologiste Arnaud Fontanet sur LCI.

« Grenade dégoupillée »

« Nous connaissons mieux le virus, et les données montrent que l’essentiel de la transmission a lieu dans les cinq premiers jours de l’infection », souligne Yazdan Yazdanpanah, infectiologue à l’hôpital Bichat et membre du Conseil scientifique, en soulignant qu’un raccourcissement de la quarantaine permettrait de la rendre plus « acceptable ». « Il faut aussi penser aux gens, à la vie, à l’économie du pays », plaide-t-il, cité par Le Monde. Où l’on perçoit la difficulté, y compris chez les membres du Conseil scientifique, à faite la part entre la « santé publique » et l’économique.

Même observation, plus compréhensible, chez les responsables politiques.Olivier Véran avait ainsi expliqué dès le 5 septembre avoir demandé «aux autorités scientifiques de donner un avis pour savoir si on ne peut pas réduire» la période d’isolement pour les cas contacts, la jugeant «sans doute trop longue». Le Monde rappelle que le ministre avait déjà évoqué cette hypothèse le 27 août, lors de la conférence de presse gouvernementale, indiquant avoir «saisi le Conseil scientifique en vue d’adapter si possible les conditions de cette mise à l’abri, et notamment sa durée», disant espérer «un feu vert pour réduire cette période».

Cet avis a été remis au gouvernement jeudi 3 septembre, mais n’a pas encore été rendu public, a indiqué le Conseil scientifique à l’AFP. «Il faut désormais être pragmatiques et efficaces», estimait il y a peu sur Twitter l’épidémiologiste Antoine Flahault. Les ‘’quatorzaines’’ doivent maintenant devenir des semaines de cinq jours. Au-delà de cinq jours, moins de 10% des porteurs de virus non symptomatiques sont contagieux». «Je pense que c’est une bonne idée, je pense qu’effectivement (…) la contagiosité est essentiellement lors des premiers jours, après l’infection, a déclaré lundi sur Europe 1 Rémi Salomon, président de la Commission médicale de l’AP-HP. Au delà du 7ème jour après les premiers signes, la charge virale et par conséquent le risque de transmettre le virus sont faibles», précise-t-il sur Twitter.

«Il vaut mieux huit jours bien respectés que 14 jours mal respectés», estimait lundi sur LCI Martin Hirsch, directeur général de l’AP-HP. Actuellement, «on a du mal à savoir si les Français respectent» les mesures d’isolement, car «on contrôle peu», mais les remontées de terrain montrent que «c’est compliqué». «Plus c’est court, plus c’est facile à observer, plus c’est efficace. On ne peut pas prétendre au risque zéro, mais la mesure serait mieux acceptée socialement», explique encore Antoine Flahaut, dans le Journal du Dimanche.

Mais même écourté, faire respecter l’isolement reste un défi, avertit toutefois Rémi Salomon. Le néphrologue pédiatrique appelle à réfléchir à «des mesures économiques, des indemnités» pour les populations précaires et les professions indépendantes, qui aujourd’hui refusent parfois d’aller «se faire tester par crainte d’être isolées, d’être obligées de s’arrêter» de travailler.

L’isolement, s’il est essentiel pour empêcher l’épidémie de se propager, entraîne en effet de lourdes conséquences pratiques et économiques, qu’il s’agisse d’un salarié renvoyé chez lui, d’un indépendant devant suspendre son activité ou d’un enfant que ses parents devront garder. Raccourcir sa durée pourrait donc en limiter l’impact, mais ce serait un mauvais calcul, selon l’épidémiologiste Catherine Hill. «Une stratégie qui consiste à laisser le virus circuler, c’est une grenade dégoupillée, qui coûtera bien plus cher que de bien faire les choses», déclare-t-elle. Si on veut alléger le fardeau des quarantaines, on fait les choses «dans le désordre», estime aussi Martin Blachier, médecin de santé publique interrogé par l’AFP. Il faudrait d’abord «trier» les bonnes et les mauvaises quatorzaines, car aujourd’hui «90% sont inutiles» selon lui, parce qu’elles concernent des cas contacts qui ne sont pas vraiment «à risque».

« Grenade dégoupillée » ? Où l’on perçoit une nouvelle fois, dans cette cacophonie des voix dissonantes et médiatisées, la difficulté de faire, ici, œuvre de pédagogie.

A demain @jynau

Faux certificats de virginité, gaz hilarants, stupéfiants : le nouveau plan du gouvernement

Bonjour

07/09/2020. L’heure politico-médiatique est donc à la « lutte contre l’insécurité ». Et deux membres du gouvernement s’y emploient à merveille. En témoigne un entretien fleuve donné au Parisien (Olivier Beaumont et Jean-Michel Décugis) par un tandem idéologiquement contre nature : le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin  et sa ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa. Ce duo révèle les grandes lignes de la feuille de route qu’ils présenteront mercredi 9 septembre lors du séminaire gouvernemental de rentrée. Quelques extraits suffiront pour prendre la mesure et les limites de l’entreprise.

1 La lutte contre la drogue, priorité des priorités. « La lutte contre les stupéfiants doit être l’alpha et l’oméga de toutes nos interventions. A travers ce sujet, il y a la lutte contre le crime organisé, avec la traite des êtres humains et le financement du terrorisme, mais aussi une grande mesure de santé publique. Et, bien sûr, un lien avec la lutte contre l’insécurité du quotidien. Quand on voit qu’aujourd’hui un gamin de 14 ans peut gagner plus que son père en faisant le « chouf » (le guet), il ne faut pas s’étonner qu’il y ait une crise d’autorité dans notre pays.

« Il faut s’occuper de tous les trafics. Des gros réseaux jusqu’au bout de la chaîne, c’est-à-dire le consommateur. Il faut sanctionner tout le monde, y compris dans les beaux quartiers de Paris. Grâce à l’action de mon prédécesseur, nous avons tout de même saisi 34 tonnes de cannabis depuis le début de l’année, 6 tonnes de cocaïne. On doit pouvoir encore augmenter ces chiffres (…) Je n’ai pas l’esprit de capitulation. La drogue, c’est de la merde, ça finance le crime organisé, ça tue la vie de milliers de personnes et ça peut concerner toutes les familles de France. Le rôle d’un responsable politique, ce n’est pas d’accompagner tout doucement la mort d’une société.

2 L’interdiction des gaz hilarants. «  J’ai demandé à mon administration de me proposer des dispositions pour interdire purement et simplement l’utilisation des cartouches ou capsules de protoxyde d’azote. Je suis élu local, je sais que cela cause des nuisances et que cela pourrit le quotidien de nombreux Français.

3 Les certificats médicaux de virginité. « Nous allons aussi nous attaquer aux ‘’certificats de virginité’’. Certains médecins osent encore certifier qu’une femme est vierge pour permettre un mariage religieux, malgré la condamnation de ces pratiques par le Conseil de l’Ordre des médecins 1. On va non seulement l’interdire formellement, mais proposer la pénalisation. On va également mettre clairement dans la loi qu’aucun élu ne pourra prendre de dispositions pour favoriser l’inégalité entre les femmes et les hommes pour mettre en place des pratiques communautaires, comme réserver des horaires de piscine à un sexe plutôt qu’un autre.

4 « Ensauvagement » ? Oui, en dépit des interdits du Premier ministre, Gérald Darmanin continuera à employer ce terme. « Oui, je continue à penser qu’il y a des actes de sauvagerie, et un ensauvagement d’une partie de la société. J’ai mes propres mots, ma propre sensibilité, et j’utilise les mots de mes concitoyens de Tourcoing. Mais je respecte la sensibilité de chacun, et celle en particulier du garde des Sceaux. »

Or Eric Dupond-Moretti estime pourtant que c’est ici reprendre la sémantique du Rassemblement national… Marlène Schiappa : « Si Marine Le Pen dit que le ciel est bleu, je ne vais pas dire qu’il pleut pour me différencier (sic). Je ne fais pas de politique en fonction du RN, mais pour les gens. J’assume l’utilisation de ce terme d’ensauvagement, et personne ne peut me soupçonner d’appartenir à la droite dure. Je viens de la gauche républicaine. Marine Le Pen n’est pas notre boussole (re-sic). Tout notre combat au ministère de l’Intérieur est aussi d’empêcher sa progression. »

A quel prix ? Marlène Schiappa le sait-elle ? Si oui, elle ne le dit pas.

A demain @jynau

1 « Certificats de virginité » : ce que tout médecin se devrait de savoir quant au respect de l’intimité, Journalisme et santé publique, 3 mars 2019