Bonjour
On se souvient d’avoir interrogé le service de presse de la SNCF. C’était bien avant la remis en cause du statut des cheminots. Nous souhaitions en savoir plus sur les défibrillateurs des TGV – des appareils « utilisables par toute personne » répétaient les contrôleurs. Combien d’appareils embarqués ? Pour quel coût ? Quels taux d’utilisation ? Aucune réponse de ce service que l’on dit pléthorique. On insiste. « Ces chiffres doivent exister mais nous ne savons pas où les trouver ! ». Puis on raccrocha.
Mars 2018. Ce sont de dérangeantes confidences faites au Quotidien du Médecin (Damien Coulomb). A commencer par celles du Pr Pierre-Yves Gueugniaud, chef du pôle urgences et réanimation médicale Edouard Herriot des Hospices Civils de Lyon, président de la Société Française de Médecine d’Urgence. Des accusations graves distillées lors du séminaire organisé par l’Association pour le recensement et la localisation des défibrillateurs Arlod.
« Ce désintérêt des pouvoirs publics dénoncé par le Pr Gueugniaud, et d’autres participants, trouve son illustration dans la gestion, ou plutôt l’absence de gestion, de la problématique des défibrillateurs automatiques externes (DAE) mis à disposition du public depuis 2007, résume Le Quotidien. Il n’est possible, à l’heure actuelle, de connaître ni le nombre, ni la localisation de ces appareils dont la maintenance est très aléatoire. Une évaluation menée par le fabricant Schiller et le distributeur Matecir estime que 30 à 40 % des 180 000 DAE en accès public ne sont pas fonctionnels. »
On avancera que ces chiffres ne sont pas retrouvés dans les données du Registre électronique des arrêts cardiaques (RéAC) – selon elles 0,6 % seulement des tentatives d’utilisation de DAE se heurent à des problèmes techniques. « Il y a un biais, prévient le Pr Gueugniaud. Les défibrillateurs installés dans les lieux très fréquentés qui servent parfois plusieurs fois par an sont aussi ceux qui sont les mieux entretenus. ».
Actions en justice
L’affaire peut être grave et et conduire à des actions en justice. À plusieurs reprises, des DAE n’ont pas fonctionné lors de tentatives de réanimations. « Ce fut notamment le cas lors du malaise cardiaque d’un basketteur de 25 ans de Vannes, décédé en janvier 2012, rapporte Le Quotidien. Un réanimateur présent sur les lieux a réalisé trois cycles de massage cardiaque, avant de découvrir que la batterie du défibrillateur disponible est à plat. Plus récemment, une jeune sportive a connu le même destin dans un stade parisien. »
« Les petits distributeurs proposent des contrats de maintenance de 20 à 30 euros par an, confie le Dr Bruno Thomas-Lamotte, président de l’Arlod. Ils se contentent d’envoyer un mail et de passer un coup de fil. » Quand il a fondé cette Association pour le recensement et la localisation des défibrillateurs le Dr Thomas-Lamotte souhaitait établir une base de données géolocalisées, disponible sur le net. « Nous pensions que les pouvoirs publics prendraient rapidement le relais, mais cela fait maintenant 11 ans et nous sommes toujours là. »
« Avec un financement public de seulement 20 000 euros, et armé de la bonne volonté de bénévoles, Arlod recense désormais environ 25 000 dispositifs soit moins de 10 % du total, précise Le Quotidien. Cette base de données reste le seul outil d’envergure nationale permettant aux médecins régulateurs de signaler la présence d’un défibrillateur à proximité du lieu de l’appel. »
Quinze ans après
Le gouvernement ? Il ne semble guère intéressé par le sujet. Le législateur ? L’Assemblée nationale a voté, le 13 octobre 2016, une proposition de loi du député du Nord Jean-Pierre Decool, encadrant l’installation et l’entretien des défibrillateurs automatiques externes :
« Un décret en Conseil d’État détermine les types et catégories d’établissement recevant du public qui sont tenus de s’équiper d’un défibrillateur automatisé externe visible et facile d’accès, ainsi que les modalités d’application de cette obligation. »
« Il est créé une base de données nationale relative aux lieux d’implantation et à l’accessibilité des défibrillateurs automatisés externes sur l’ensemble du territoire, constituée au moyen des informations fournies par les exploitants de ces appareils à un organisme désigné par décret pour la gestion, l’exploitation et la mise à disposition de ces données. »
Ce texte n’a toujours pas été examiné par le Sénat… On annonce aussi une proposition de loi visant à la prévention de la mort subite (50 000 personnes par an en France) ainsi qu’une « Journée nationale annuelle de la lutte contre la mort subite ». Cette journée, ni fériée ni chômée, serait fixée au 26 juin, jour anniversaire de la mort, au stade Gerland de Lyon, du footballeur Marc-Vivien Foé. Il avait 28 ans. C’était il y a quinze ans.
A demain