Pas de « prime Covid » pour les soignants intérimaires : Olivier Véran face à l’injustice

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31/07/2020. Qui, dans les médias généralistes, hormis Le Monde (Bertrand Bissuel), s’intéresse encore à ce dossier bien ingrat : la « prime exceptionnelle » créé pour les personnels ayant accompagné les malades du Covid-19 ? C’est là une affaire qui a provoqué quelques remous depuis l’annonce, par Emmanuel Macron le 25 mars dernier, d’une gratification financière. Il s’agissait de faire un geste à l’égard de « nos soignants qui se battent aujourd’hui pour sauver des vies ». Des retards puis, progressivement, des mécanismes mis en place, en plusieurs étapes, prévoyant le versement de sommes pouvant aller jusqu’à 1 500 euros, dans les établissements publics et privés.

Le dernier remous ne tient à rien d’autre qu’à une véritable injustice : les soignants employés en intérim ont tout simplement été bannis de ce dispositif. « C’est, en substance, ce que dénoncent le patronat et les syndicats de la branche du travail temporaire, dans une ‘’ lettre paritaire’’ envoyée, mercredi 29 juillet, au ministère des Solidarités et de la Santé, rapporte Le Monde. A travers cette démarche – rarissime du fait de son caractère unanime –, les partenaires sociaux souhaitent obtenir la suppression d’une ‘’discrimination incompréhensible’’, synonyme de ‘’mépris’’ pour celles et ceux qui en sont victimes. » Les soignants intérimaires potentiellement éligibles à la prime représenteraient un effectif d’un peu moins de 13 000 équivalents temps plein.

Injustice

C’est le troisième projet de loi de finances rectificatives pour 2020, définitivement adopté par le Parlement le 23 juillet qui « a traduit en termes juridiques cette exclusion », a déclaré au quotidien Isabelle Eynaud-Chevalier, déléguée générale de Prism’emploi, organisation qui regroupe plusieurs centaines d’entreprises de travail temporaire.. « Une telle mesure entre en contradiction avec un principe fondamental, celui de l’égalité de traitement, inscrit dans le code du travail, ajoute-t-elle. C’est assez terrible, sur le plan symbolique, car les soignants, quel que soit leur statut, ont tous été actifs. Et le virus, lui, n’a fait aucune distinction. » 

Faudrait-il en effet rappeler que l’énergie déployée pour sauver des vies de même que les risques inhérents de contamination furent en effet les mêmes pour l’ensemble des personnels, titulaires ou non de leur poste ? Et Le Monde de citer un haut fonctionnaire anonymisé : le ministère de la santé ne voudrait pas payer notamment parce qu’il considère que « les intérimaires sont déjà bien rémunérés, surtout les médecins » 1.

Au ministère d’Olivier Véran on a d’autres explications à donner :  « La prime Covid a été mise en place pour que chaque établissement puisse valoriser l’engagement de ses soignants, médecins comme paramédicaux face à la crise  Elle couvre donc l’ensemble des professionnels de l’établissement, mais ne s’étend ni aux intérimaires salariés ni aux prestataires ». Qui pourrait imaginer un seul instant qu’Olivier Véran, hier encore soignant hospitalier, puisse accepter qu’une telle injustice soit commise ?

A demain @jynau

1 Commentaire du Collectif Inter-Hôpitaux: « Il y a effectivement une discussion sur certains intérimaires qui ont été beaucoup plus payés que les soignants en poste… La prime étant alors une sorte de « compensation » ».

Masques: une pauvre affaire d’entremetteur chez un ancien collaborateur d’Olivier Véran

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10/05/2020. Il est, parfois, des faits divers que l’on aimerait ne pas avoir à évoquer. Un ancien collaborateur du ministre des Solidarités et de la Santé Olivier Véran a tenté, en vain, de toucher une commission en cherchant à placer auprès du ministère une offre de masques FFP2. C’était à la mi-mars, alors que la France souffrait d’une pénurie massive de masques de protection contre l’épidémie de coronavirus. Une triste affaire qui vient d’être révélée samedi 9 mai Mediapart (MATTHIEU SUC et MARINE TURCHI).

Cet ancien collaborateur, Tewfik Derbal est ensuite devenu collaborateur d’une députée (LREM, Isère), Emilie Chalas. Il a «confirmé» à cette dernière les faits relatés par le site d’information – puis a démissionné de son poste précise dans un communiqué la députée. Elle ajoute qu’elle «ignorait tout» de ces «faits et comportements», qu’elle «condamne avec la plus grande fermeté».

De son côté, Olivier Véran a répondu au quotidien Le Dauphiné Libéré (Eve Moulinier) que «cette histoire» ne le «concerne pas». «Les premières semaines, le ministère a reçu des centaines d’offres de masques, par tous les canaux imaginables. À tel point que la cellule de crise a dédié une équipe à l’examen de ces offres. L’écrasante majorité était d’ailleurs hélas bidon. J’imagine que celle de Tewfik Derbal l’était aussi, vu qu’aucune suite n’y a été donnée», explique-t-il. Je n’en sais pas plus et j’avoue que j’ai vraiment d’autres choses à gérer dans la période. »

Interrogé par l’AFP, le ministère de la Santé n’a pas souhaité faire de commentaire.

Selon Mediapart, l’ancien assistant parlementaire d’Olivier Véran (ancien député de l’Isère de 2012 à 2015 et de 2017 à 2020) a cherché, à la mi-mars, à positionner une offre de masques FFP2 auprès du ministère de la Santé. Ces masques en grande quantité – au moins un million – étaient proposés par une société française d’import-export avec la Chine, auprès de qui «plusieurs pays» avaient manifesté leur intérêt, «sauf la France».

Selon des messages produits par Mediapart, la société est alors entrée en contact avec Tewfik Derbal, qui a affirmé être «en lien» avec le ministère de la Santé, et réclamé une commission en tant «qu’apporteur d’affaires»: un certain pourcentage du prix sur chaque masque vendu. Un contrat est signé entre les deux parties, mais «la transaction n’aura jamais lieu», et «Tewfik Derbal ne finalisera jamais la commande de l’Etat».

Une pauvre et sordide affaire. On pourrait ne pas en parler. Elle resurgira, le moment venu, quand seront conduites les différentes enquêtes officielles sur les causes véritables (et les conséquences) de la pénurie récurrente, en France, de masques de protection – l’une des failles politiques majeures de la lutte contre cette épidémie.

A demain @jynau

Ombre du Covid-19: la honte et le calvaire imposé à une habitante de Quiberon (Morbihan)

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28/04/2020. L’horreur au bras de la honte. Le tout raconté à la perfection par Le Télégramme (Mathieu Pelicart).  Nous sommes dans ce petit paradis qu’est Quiberon. Une habitante y témoigne de son calvaire depuis depuis son retour de l’hôpital pour une suspicion de Covid-19.  

« ‘’Dégage’’, ‘’Assassin’’, ‘’Suicide-toi’’ : ces doux mots fleurissent depuis le début du mois sur la porte d’un logement social de Quiberon. C’est dans cet appartement que résident, depuis cinq ans, Sophie (prénom d’emprunt) et son conjoint, rapporte Le Télégramme. Handicapée par un accident médical, cette ancienne salariée de l’hôtellerie, âgée de 36 ans, est aujourd’hui en incapacité totale de travail. »

 A la fin du mois de mars Sophie présenta quelques symptômes « légers » du Covid-19. Placée en quatorzaine par son médecin traitant, elle devait souffrir peu après de complications respiratoires. « Tous les médecins que j’ai consultés ont diagnostiqué une maladie chronique inflammatoire des bronches [une BPCO], qui pourrait avoir été déclenchée par le virus », explique-t-elle de sa voix éteinte par une laryngite persistante.

Et la Quiberonnaise de témoigner du harcèlement de certains voisins de son immeuble depuis le début du mois d’avril et son retour de l’hôpital. « J’ai passé deux jours au sein de la cellule Covid-19 du Centre hospitalier de Bretagne Atlantique (CHBA), à Vannes, explique-t-elle. Tous les voisins sont au courant, puisque j’ai été prise en charge à mon domicile par des ambulanciers habillés en cosmonautes ».

« Bons voisins » et calvaire breton

Trois jours après son retour à domicile, une affiche anonyme est placardée dans la cage d’escalier : « Puisque nous vivons en bons voisins, nous demandons aux personnes ayant une suspicion de Covid-19 ou l’ayant déclaré de ne pas toucher les poignées de porte et les rambardes ». « Impossible pour une personne handicapée comme moi », souligne Sophie, qui ne sort de chez elle que pour ses rendez-vous médicaux. Le Télégramme :

« Depuis, le couple découvre presque tous les jours de nouvelles insultes écrites sur des papiers glissés sous son paillasson ou taguées sur sa porte. ‘’Je le vis très mal. Des voisins me prennent en photo dès que je mets le nez dehors. Que vais-je dire à mes enfants, qui sont actuellement confinés chez leur père, quand ils vont découvrir toutes ces inscriptions sur notre porte ?’’ , s’inquiète Sophie, qui décrit un véritable calvaire. Elle subit de nouvelles attaques depuis qu’elle a effectué une préplainte par internet et que des gendarmes sont intervenus pour faire de la pédagogie auprès de ses voisins. Elle a aussi alerté son bailleur social, Bretagne Sud Habitat (BSH). Samedi matin, elle a découvert la portière de sa voiture rayée de ce qui ressemble à un pendu. »

Que pourra, ici, la police ? Que pourrait faire la justice ? Comment, désormais, songer à la beauté de Quiberon, au paradis de Belle-Ile, sans se souvenir de ce calvaire breton ?

A demain @jynau

Deuil d’un enfant: volte-face du gouvernement. Quel crédit accorder désormais à Mme Pénicaud ?

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Si l’affaire n’était pas symboliquement tragique, on en rirait peut-être. Nous écrivions ce matin qu’à la demande de Muriel Pénicaud, ministre macronienne du Travail le gouvernement et les députés godillots s’étaient opposés à l’allongement du congé qui suit la perte d’un enfant – tel que proposé par le groupe UDI à l’Assemblée nationale.

Muriel Pénicaud, ministre macronienne du Travail , ancienne dirigeante d’entreprise, expliquait alors que le texte tel qu’il était rédigé ne reposait pas sur la solidarité nationale, mais sur un congé « payé à 100 % par l’entreprise ». Entendre qu’il ne revenait pas à l’entreprise de supporter cette nouvelle charge. Et Mme Pénicaud de se dire « blessée » des mille et une critiques dont elle faisait l’objet.

Moins de douze heures plus tard (et à la suite d’un solide « recadrage » du président Emmanuel Macron dénonçant « l’inhumanité » de son gouvernement) notre ministre du Travail annonce dans Le Parisien (Bénédicte Alaniou)que la majorité va finalement défendre cette extension de cinq à douze jour de congé lors de la prochaine lecture du texte au Sénat :

« La décision prise collectivement n’était pas la bonne. Sur les bancs de l’hémicycle jeudi, tout le monde était concerné par ce sujet extrêmement grave et la nécessité d’améliorer les choses. Concrètement, l’allongement à douze jours va revenir au Sénat sous la forme d’un amendement gouvernemental. La date n’est pas encore fixée.

« Ce n’est pas une question d’argent mais de solidarité et de compassion de la Nation. La mesure pourra être financée par la solidarité nationale, autrement dit la Sécurité sociale. Est-ce que les entreprises en prendront une part ? Nous allons en parler, toutes les options sont possibles, mais cette mesure sera financée. Et on garde les mesures adoptées jeudi [30 janvier] qui permettent le don de RTT entre salariés et facilitent la prise de congés pour les milliers de parents concernés chaque année. Mais nous voulons aller plus loin :

« Après la perte d’un enfant, qui est le pire drame auquel on peut être confronté, on ne se reconstruit pas en quelques jours. Il faut des mois et des années. Actuellement, il existe des aides, notamment de la CAF, mais elles sont mal connues. Nous allons travailler à un accompagnement psychologique sur la durée. Nous voulons aussi regarder la question des frais d’obsèques qui ne doivent pas être un poids supplémentaire. Enfin, nous allons ouvrir ces mesures aux fonctionnaires. »

Chaque année en France, 4 500 enfants meurent avant d’avoir atteint leur majorité. Combien de temps Muriel Pénicaud restera-t-elle au sein du gouvernement ?

A demain @jynau

«Des centaines de corps entassés … ils vendaient des jambes, des bras, des têtes, des cœurs ! »

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L’indécence nourrit parfois le fantastique, aide à la résurgence de l’étrange.

Jardin de la France, 1er décembre 2019. Marché de la place François-Rabelais à Tours (Indre-et-Loire). Une ville calme, presque celle de Babar. Le confort, sinon l’opulence, sur les étals. Les municipales approchent : ancien journaliste le maire actuel, immobile est tout sourire. Son concurrent « en marche », un universitaire, est déjà ailleurs. Les innombrables bataillons fragmentés de la gauche et de l’écologie se font attendre.

Entre les pommes clochards de Vallères et les fromages de Sainte-Maure, la queue chez l’un des nouveaux bouchers de la place. Comme sur tous les marchés de France l’homme découpe, renseigne sur les durées de cuisson, tient le haut du pavé. Ici il commente l’actualité.  

« Vous avez vu, un truc de fou, une vraie bombe, à Paris, à Descartes … – Non  – Mais si, à l’hôpital Descartes, une bombe, des centaines de corps entassés…. Ne savaient plus où le mettre … ça débordait.. Partout… Dépassés .. Non, je n’ai pas vu …- Un truc de folie, allez sur internet et vous faites « Paris-Descartes » tout y est, on voit tout…une bombe … Oui, c’est vrai, moi je l’ai vu chez Jean-Pierre Bourdin … – ??? … – Bourdin, le journaliste du matin, à RMC … ils expliquaient tout ….

« – C’est pas tout… Des rats, des souris, l’odeur … Impensable… – Et encore … ils vendaient des jambes, des bras, des têtes, des cœurs … – Oui mais les journalistes … c’est pas possible … – Comme je vous le dis, allez-y, sur internet, tout y est, c’est des étudiants, ils ont tout filmé, tout y est raconté. C’est un truc de dingue, une vraie bombe  … – C’est vrai … Ils ont même, après la télé, été obligé de tout fermer … – On va regarder … Et puis il faudra le dire à te belle-sœur, elle qui voulait donner son corps à la science… »

Le maire et ses concurrents n’ont rien perçu, rien entendu. Qu’auraient-ils répondu ? Jardin de la France, 1er décembre 2019. Place François-Rabelais. A deux pas de la faculté de médecine du même nom. A moins d’une heure ferroviaire de Paris. A quelques lieux de la maison de naissance, intacte, de René Descartes devenu symbole mondial de la raison.

A demain @jynau

 

«Voyage aux confins de l’esprit» : le LSD, la conscience, les addictions et la dépression.

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Conseil de lecture (exempt de tout conflit d’intérêts) pour esprits curieux n’ayant pas froid aux yeux.

Titre : « Voyage aux confins de l’esprit. Ce que le LSD et la psilocybine nous apprennent sur nous-mêmes, la conscience, la mort, les addictions et la dépression ».

Auteur : Michael Pollan

Préface du Dr Bertrand Lebeau-Leibovici et de Vincent Verroust

Traduction de Leslie Talaga et Caroline Lee

Louanges : « Après avoir lu les premières pages vous ne pourrez plus vous arrêter ! » (The New York Times). « Convaincant et palpitant » (The Guardian).

Editions : Quanto. WWW.editionsquanto.com 440 pages 24,50 euros

Présentation de l’éditeur : « Le LSD et les champignons magiques, des reliques des années hippies? Détrompez-vous. Ces substances psychédéliques font aujourd’hui leur grand retour en recherche clinique et les perspectives qu’elles ouvrent sont extraordinaires. Elles révèlent les mécanismes de notre conscience grâce auxquels nous donnons du sens à notre vie et appréhendons les autres et le monde. Elles permettent le traitement de la dépression, des addictions (tabac, alcool) ou de notre anxiété à l’approche de la mort, dans des temps très courts et avec un taux de réussite remarquable.

« Afin de comprendre la réalité de cette révolution en cours, ce qu’elle peut nous apprendre sur nous-mêmes et la nature des expériences dont il est question, le journaliste et écrivain Michael Pollan a mené l’enquête, à la première personne. Au fil de ses rencontres avec des patients, des chamans modernes, des guides spirituels et la nouvelle génération de scientifiques qui cartographient notre cerveau, nous le suivons dans des lieux où il ne s’était jamais aventuré, parfois même jusqu’au plus profond de lui-même. Voyage aux confins de l’esprit est un succès mondial traduit en seize langues. Il est le témoignage fascinant de ce que nous sommes et de ce à quoi pourrait ressembler l’avenir de la conscience ».

Nous y reviendrons sous peu.

A demain @jynau

Veille de Toussaint: croisade monothéiste inédite contre l’euthanasie et le suicide assisté

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Assistons-nous à une forme inédite de radicalisation ? A la veille de la Toussaint de très hauts représentants des trois religions monothéistes – christianisme, judaïsme et islam – viennent de remettre au pape François un document dans lequel ils se prononcent fermement contre l’euthanasie et le suicide assisté  – des pratiques qui, selon eux, « sont intrinsèquement et moralement répréhensibles». Des pratiques qui doivent être «interdites sans exception». De même que  «toute pression ou action sur des patients pour les inciter à mettre fin à leur propre vie ».

Le Document sur la fin de vie des « religions abrahamiques monothéistes» a été paraphé solennellement au Vatican par un représentant de chaque religion dont le rabbin David Rosen, directeur des affaires religieuses de l’American Jewish Committee, Mgr Vincenzo Paglia, président de l’Académie pontificale pour la vie, un représentant du métropolite (orthodoxe) de Kiev, Hilarion, et le président du comité central de la Muhammadiyah indonésienne (association socio-culturelle musulmane), le Dr Samsul Anwar. L’idée de cette déclaration avait été proposée au pape par le rabbin Avraham Steinberg, co-président du Conseil national israélien de bioéthique.

Objection de conscience

Ce Document se prononce dans le même temps en faveur de l’objection de conscience pour le personnel sanitaire de tous les hôpitaux et cliniques :  «aucun opérateur sanitaire ne doit être contraint ou soumis à des pressions pour assister directement ou indirectement à la mort délibérée et intentionnelle d’un patient à travers le suicide assisté ou toute forme d’euthanasie». Ce droit qui doit être «universellement respecté», reste «valable même lorsque ce type d’actes ont été déclarés légaux au niveau local ou pour certaines catégories de personnes». L’Agence France Presse rappelle qu’en Italie, la Cour constitutionnelle a récemment dépénalisé le suicide assisté dans certaines conditions strictes tout en demandant au parlement de légiférer sur le vide juridique existant.

Les signataires du Document encouragent «une présence qualifiée et professionnelle dans les soins palliatifs, partout et accessible à tout le monde». «Même lorsque éloigner la mort est un poids difficile à supporter, nous sommes moralement et religieusement engagés à fournir un réconfort, un soulagement à la douleur, une proximité et une assistance spirituelle à la personne mourante et à sa famille», ajoutent les signataires.

Estimant que «la vie mérite d’être soutenue jusqu’à sa fin naturelle», les trois religions promettent de «soutenir les lois et politiques publiques qui protègent le droit et la dignité des patients en phase terminale pour éviter l’euthanasie et promouvoir les soins palliatifs». Elles s’engagent aussi à «utiliser la conscience et la recherche» pour fournir «un maximum d’informations et d’aide à ceux qui affrontent de graves maladies et la mort». Les trois religions prévoient de «sensibiliser l’opinion publique sur les soins palliatifs à travers une formation adéquate et la mise en œuvre de ressources pour le traitement de la souffrance et la mort». Elles promettent, enfin, outre «d’impliquer les autres religions et toutes les personnes de bonne volonté» dans ce combat.

Radicalisation ou simple rappel de l’essentiel ?

A demain @jynau

Dans des machines à sous des chercheurs français découvrent la source de notre créativité !

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Jusqu’où peut aller la liberté de chercher ? C’est une publication scientifique de  Nature Neuroscience  1 signée par des chercheurs de l’Inserm – un Inserm que l’on n’imaginait pas pouvoir vagabonder aussi loin de ses bases médicales. Rappelons que cet Institut a pour mission l’étude de la santé humaine avec pour vocation d’investir le champ de la recherche biomédicale fondamentale et appliquée. 

Le travail a été mené par une équipe du Laboratoire de Neurosciences Cognitives et Computationnelles, Inserm U960, Département d’Études Cognitives, École Normale Supérieure) dirigée par Valentin Wyart. Extrait du communiqué :

« Où aller dîner ce soir : choisir son restaurant favori ou essayer un nouvel endroit ? Pour quelle destination opter pour ses prochaines vacances : la maison familiale que l’on connait par cœur ou une location à l’autre bout du monde ? Lorsque nous devons faire un choix entre plusieurs options, nos décisions ne se dirigent pas toujours vers l’option la plus sûre en se fondant sur nos expériences passées. Cette variabilité caractéristique des décisions humaines est le plus souvent décrite comme de la curiosité : nos choix seraient le reflet d’un compromis entre exploiter des options connues et explorer d’autres options aux issues plus incertaines. La curiosité serait même un attribut de l’intelligence humaine, source de créativité et de découvertes inattendues. Cette interprétation repose sur une hypothèse très forte, quoique rarement mentionnée explicitement, selon laquelle nous évaluons nos options sans jamais faire d’erreur.

(…) Pour étayer leurs soupçons, les chercheurs ont étudié le comportement d’une centaine de personnes dans un jeu de machines à sous qui consistait à choisir entre deux symboles associés à des récompenses incertaines. Ils ont analysé le comportement des participants à l’aide d’un nouveau modèle théorique tenant compte d’erreurs d’évaluation des symboles développé par Charles Findling, post-doctorant dans l’équipe et co-premier signataire de l’article. Les chercheurs ont ainsi découvert que plus de la moitié des choix habituellement considérés comme relevant de la curiosité était en réalité due à des erreurs d’évaluation. »

Valentin Wyart, directeur de l’équipe : « Ce résultat est important, car il implique que de nombreux choix vers l’inconnu le sont à notre insu, sans que nous en ayons conscience. Nos participants ont l’impression de choisir le meilleur symbole et non pas le plus incertain, mais ils le font sur la base de mauvaises informations résultant d’erreurs de raisonnement. »

Christophe Colomb et Henri Becquerel

Résumons. Pour comprendre d’où viennent ces erreurs, les chercheurs ont enregistré l’activité cérébrale d’une partie des participants en imagerie par résonance magnétique fonctionnelle. Ils ont découvert que l’activité du cortex cingulaire antérieur, une région impliquée dans la prise de décision, fluctuait avec les erreurs d’évaluation des participants. L’Inserm le dit autrement : plus l’activité de cette région était grande au moment de l’évaluation des options, plus les erreurs d’évaluation étaient importantes. Pour Vasilisa Skvortsova, post-doctorante et co-première signataire de l’article, « ces erreurs d’évaluation pourraient être régulées via le cortex cingulaire antérieur par le système neuromodulateur de la noradrénaline, en contrôlant la précision des opérations mentales effectuées par le cerveau ». Autrement dit, notre cerveau utiliserait ses propres erreurs pour produire des choix vers l’inconnu, sans s’appuyer sur notre curiosité. « C’est une vision radicalement différente des théories actuelles qui considèrent ces erreurs comme négligeables », assure Valentin Wyart.

Fin du communiqué de l’Inserm : « Si ces résultats peuvent paraître surprenants, le sont-ils vraiment ? De nombreuses découvertes majeures sont le résultat d’erreurs de raisonnement : la découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, qui croit avoir atteint les « Indes orientales » – une erreur de navigation de 10 000 km. Mais aussi la découverte de la radioactivité par Henri Becquerel, qui pense initialement que les radiations émises par l’uranium sont dues à la réémission de l’énergie solaire, ou encore la découverte du pacemaker par John Hopps en essayant de traiter l’hypothermie à l’aide d’une fréquence radio. En allant plus loin, « l’évolution des espèces repose elle aussi sur des variations aléatoires du génome, autrement dit des erreurs génétiques, dont certaines sont conservées par sélection naturelle », rappelle Valentin Wyart.  

Serait-ce là, tout bien pesé, la base moléculaire de la sérendipité ? On peut le postuler. Et ne pas s’étonner de penser que notre cerveau tire parti de ses erreurs pour sortir des sentiers battus. Comme le font les chercheurs de l’Inserm.

A demain @jynau

1 Computational noise in reward-guided learning drives behavioral variability in volatile environments Charles Findling, Vasilisa Skvortsova, Rémi Dromnelle, Stefano Palminteri et Valentin Wyart

PMA : Nouvelle agression méchamment confraternelle contre l’Académie de médecine

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Qui veut ruiner une institution séculaire l’accuse d’être « datée ». Agnès Buzyn vient de le faire à propos de l’Académie nationale dé médecine coupable, à ses yeux, de ne pas soutenir la « PMA pour toutes » promise par le Président et voulue par le Gouvernement. Puis vint Laurent Joffrin et ses ‘’vieilles barbes burgraves’’. Dans le sillage ministériel et celui de Libération, aujourd’hui, le Pr Jean-Louis Touraine 1 co-rapporteur du projet de loi. L’ancien immunologiste socialiste devenu député (Rhône) macronien s’exprimait aujourd’hui 24 septembre 2019 sur les ondes de France Culture.

Extraits ciblés sur ses confrères de l’Académie qui voient là « une rupture anthropologique majeure » :

« L’Académie de médecine, très souvent, émet des avis très conservateurs. Elle était contre, en son temps, l’interruption volontaire de grossesse et contre les différentes avancées … Par contre ils font de très bons travaux, de très bonnes analyses, sur le plan médical. Quand ils s’égarent à donner des avis sur des sujets sociétaux, c’est plus incertain car ils ont de la peine à comprendre la société de notre temps (sic). Mais sur le plan médical, ils font des analyses formidables (re-sic).

« Donc je les exhorte à faire le travail auquel il sont habitués, auquel ils sont rompus et pour lequel ils travaillent avec une dextérité remarquable. Là leur avis est simplement une exception parmi tous les autres, comme ceux du comité d’éthique, du Conseil d’Etat ou celui de l’Ordre des médecins qui n’est pas pourtant le plus progressiste des organismes … »  

Et le Pr Touraine de tenter de faire un peu d’anthropologie mineure. Puis de ranger l’Académie nationale de médecine dans la même catégorie que la Conférence des évêques de France. La question est désormais posée : le député macronien du Rhône sera poursuivi pour double manquement à la confraternité ?

A demain @jynau

1 A lire, dans Libération (Eric Favereau) son portrait ripoliné : « Jean-Louis Touraine, médicalement assistant ». Médecin, ce député LREM, rapporteur de la loi de bioéthique défend la PMA, mais plaide aussi pour la GPA «éthique» et la fin de vie

«PMA pour toutes» : à l’Académie de médecine la messe est encore bien loin d’être dite

Bonjour

On ne l’attendait plus, la voici : Depuis la rue Bonaparte l’Académie nationale de médecine vient (enfin) de prendre une « position officielle » quant au projet de loi de révision de la loi de bioéthique 1. Et nous sommes bien loin du consentement béat que le gouvernement semblait espérer dans le paysage « apaisé » que souhaitait le président de la République.

Les griffes académiques portent sur le titre 1er, consacré au thème de l’Assistance Médicale à la Procréation et tout particulièrement sur le chapitre de la « PMA pour toutes ». Ainsi donc il y aurait extension de l’accès à l’assistance médicale à la procréation aux couples de femmes et aux femmes célibataires. Et le critère médical d’infertilité, qui aujourd’hui conditionne cet accès serait supprimé. Dans le même temps, la prise en charge par l’assurance maladie resterait identique et se trouverait étendue aux nouveaux publics éligibles. Voici la position (nous soulignons) de l’Académie nationale de médecine (ANM) : :

« L’extension de l’AMP aux couples de femmes et aux femmes seules relève davantage d’une loi sociétale s’inscrivant dans la suite des lois sur le Pacte civil de solidarité et du Mariage pour tous, que de la loi de bioéthique dans la mesure où les techniques utilisées sont anciennes et ne soulèvent pas de nouvelles questions d’ordre médical. S’agissant d’une mesure à caractère sociétal et au-delà des convictions de chacun, 1’ANM ne s’estime pas à même de donner un avis hors du champ de ses missions. En revanche, elle se sent impliquée et estime de son devoir de soulever un certain nombre de réserves liées à de possibles conséquences médicales.

« L’ANM reconnaît la légitimité du désir de maternité chez toute femme quelle que soit sa situation, mais elle veut souligner que si 1 ‘invocation de 1 ‘égalité des droits de toute femme devant la procréation est compréhensible, il faut aussi au titre de la même égalité des droits tenir compte du droit de tout enfant à avoir un père et une mère dans la mesure du possible. Sur ce point, il y a donc une rupture volontaire d’égalité entre les enfants.

« A ce titre, la conception délibérée d’un enfant privé de père constitue une rupture anthropologique majeure qui n’est pas sans risques pour le développement psychologique et l’épanouissement de l’enfant. L ‘argument régulièrement avancé pour rejeter le risque pour 1’enfant se fonde sur certaines évaluations, essentiellement dans quelques pays anglo-saxons et européens, faisant état de l’absence d’impact avéré sur le devenir de 1’enfant. L’ANM ne juge pas très convaincantes ces données au plan méthodologique, en nombre de cas et en durée d’observation sur des enfants n’ayant pas toujours atteint l’âgege des questions existentielles. Quoiqu’il en soit, 1’ANM rappelle que 1’incertitude persiste sur le risque de développement psychologique de ces enfants au regard du besoin souvent exprimé de connaître leurs origines.

« Cela conduit donc à souhaiter qu’il y ait des études en milieu pédopsychiatrique à partir d’enfants privés de pères, parmi lesquels ceux issus de 1’AMP pour des femmes seules ou en couples. Cela permettra d ‘évaluer le devenir de ces enfants au nom du principe de précaution si souvent évoqué pour des sujets d ‘importance moindre. II apparaît, à 1’ANM que cette disposition est contraire à la Convention internationale des droits de l’enfant de 1989, ratifiée par la France. Celle-ci mentionne le droit de l’enfant à connaître ses parents en insistant sur le « bien de l’enfant » comme sur son « intérêt supérieur ».

« De fait, on quitte le domaine de la vraisemblance puisque deux parents du même sexe ne suffisent pas pour donner vie à un enfant. Il s ‘agira pour la première fois de permettre à deux femmes d’être les deux mères d’un même enfant. Pourtant, l’existence de deux mots distincts, père et mère, signifie que l’un ne peut se substituer à 1’autre car le rôle des mères et des pères ne sont pas équivalents. L’ANM estime que, de plus en plus malmenée par les évolutions sociétales, la figure du père reste pourtant fondatrice pour la personnalité de l’enfant comme le rappellent des pédopsychiatres, pédiatres et psychologues qui demeurent dans leur majorité pour le moins réservés sur cette innovation radicale. A la différence notoire des situations subies par certaines familles monoparentales, des réserves médicales sont également exprimées sur 1’extension de la procréation volontaire aux femmes seules en raison de 1’observation d’une vulnérabilité, source d’anxiété et de fragilité maternelle avec des couples mère/enfant qui peuvent être pathologiques comme cela a été souligné lors des auditions par la commission spéciale à 1’Assemblée nationale. Dans tous les cas d’extension de 1’AMP, on ne peut méconnaître la question de l’altérité et celle de la différence homme-femme. »

Plus généralement l’Académie nationale de médecine veut encore souligner que la « PMA pour toutes » (comme celle de l’autoconservation des ovocytes par volonté personnelle) correspondent à des demandes sociétales pour des femmes qui ne souffrent d’aucune pathologie de la reproduction. « II ne s’agit aucunement d’indications médicales conformes à la mission de la médecine qui est de soigner, souligne-t-on rue Bonaparte. Ce changement de nature de l’acte médical n’est pas sans soulever de sérieuses questions de fond pour 1’avenir de la pratique médicale. » A n’en pas douter, ces questions seront soulevées. Les réponses risquent de nous parvenir un peu trop tard.

A demain @jynau

1 Le rapport est signé: Jean-François Mattei (rapporteur) au nom du Comité d’éthique de l’Académie nationale de médecine. Comité d’éthique de l’Académie nationale de médecine: Catherine Barthélémy, Marie-Germaine Bousser, Jacques Bringer, Jean Dubousset, Gilles Crépin, Elisabeth Eléfant, Claudine Esper, Jean-Noël Fiessinger, Dominique Lecomte, Yves Le Bouc, Jean-Roger Le Gall, Jean-François Mattei, Dominique Poitout, Paul Vert.

L’Académie dans sa séance du mardi 18 septembre 2019, a adopté le texte de ce rapport par 69 voix pour, 11 voix contre et 5 abstentions.