Bonjour
25/04/2020. C’est un rebondissement qui va amplement compliquer la tâche des autorités sanitaires. L’OMS estime que la délivrance de futurs « passeports immunitaires » aurait comme possible effet de favoriser la propagation de la pandémie. L’OMS le dit autrement : « Il n’y a actuellement aucune preuve que les personnes qui se sont remises du Covid-19 et qui ont des anticorps soient prémunies contre une seconde infection », a indiqué l’Organisation mondiale de la santé dans une brève communication. A la date du 24 avril 2020, aucune étude n’a évalué si la présence d’anticorps au SARS-CoV-2 confère une immunité contre une future infection par ce virus chez les humains. »
« La plupart des études montrent que les personnes qui ont guéri [du Covid-19] ont développé des anticorps », écrit l’OMS. « Mais certaines de ces personnes ont des niveaux très faibles d’anticorps dans le sang. (…) Aucune étude n’a permis d’établir si la présence d’anticorps est suffisante pour empêcher une nouvelle infection. »En d’autres termes il n’existe pas selon l’OMS de preuve que les personnes testées positives au nouveau coronavirus soient immunisées et protégées contre une réinfection 1.
C’est là un sujet d’une importance considérable, autant sanitaire que politique, économique et diplomatique. « On peut notamment observer que si le fait d’avoir été infecté (puisque immunisé) devenait un avantage, alors les politiques ultérieures d’éducation à la prévention contre l’épidémie deviendraient encore plus compliquées à mettre en œuvre et à maintenir..) observe, fort justement le Pr Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale (université de Genève).
On sait que certaines autorités sanitaires nationales (en France notamment) ou municipales (comme Anne Hidalgo à Paris) ont d’ores et déjà émis l’idée de délivrer des documents (« passeports » ou «crtificats ») attestant l’immunité des personnes – et ce sur la base de tests sérologiques révélant la présence d’anticorps dans le sang – une procédure qui permettrait de déconfiner plus sûrement -et de permettre peu à peu leur retour au travail et la reprise de l’activité économique.
L’étrange métaphore du passeport
C’était parier sur le caractère « protecteur » de ces anticorps, seul garant de la valeur de ce passeport. C’était ne pas compter sur la mise en garde officielle de l’OMS : « Les personnes qui pensent être immunisées contre une seconde infection parce qu’elles ont été testées positives pourraient ignorer les recommandations de santé publique. Le recours à ce genre de certificats pourrait en conséquence augmenter les risques que la transmission continue », insiste-t-elle.
Plus précisément l’OMS estime par ailleurs que les tests sérologiques actuellement utilisés « ont besoin d’une validation supplémentaire pour déterminer leur exactitude et leur fiabilité ». Ils devront notamment faire la distinction entre la réponse immunitaire au nouveau coronavirus et celles vis-à-vis des anticorps produits à l’occasion d’une infection par un autre des six coronavirus humains connus, dont quatre sont largement répandus, provoquant des rhumes bénins. Or, souligne l’OMS, « les personnes infectées par l’un ou l’autre de ces virus sont susceptibles de produire des anticorps qui interagissent avec des anticorps produits en réponse à l’infection provoquée par le SARS-CoV-2 », et il est donc impératif de pouvoir les identifier.
Où l’on retrouve l’étrange métaphore du passeport 2. Le 12 mars, dans son « Adresse aux Français » Emmanuel Macron, appelant à « éviter l’écueil du repli nationaliste », avait déclaré : « Ce virus n’a pas de passeport ». On apprend aujourd’hui qu’il sera plus compliqué qu’imaginé de s’en procurer un contre lui.
A demain @jynau
1 Sur ce thème : « Quelle immunité après une infection par le SARS-CoV-2 ? » Inserm. Texte préparé avec la collaboration de Marie-Paule Kieny, directrice de recherche Inserm et membre du Comité analyse recherche et expertise (Care).
2 « Passeport » : a) Document autrefois exigé pour quitter le canton de son domicile (décret du 18 décembre 1807) et dont la suppression résulte d’un projet de loi du 5 septembre 1931. b) Pièce d’identité délivrée par un État à ses ressortissants et exigible au passage des frontières.