L’OMS dénonce les dangers et les effets pervers des futurs «passeports immunitaires »

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25/04/2020. C’est un rebondissement qui va amplement compliquer la tâche des autorités sanitaires. L’OMS  estime que la délivrance de futurs « passeports immunitaires » aurait comme possible effet de favoriser la propagation de la pandémie. L’OMS le dit autrement : « Il n’y a actuellement aucune preuve que les personnes qui se sont remises du Covid-19 et qui ont des anticorps soient prémunies contre une seconde infection », a indiqué l’Organisation mondiale de la santé dans une brève communication. A la date du 24 avril 2020, aucune étude n’a évalué si la présence d’anticorps au SARS-CoV-2 confère une immunité contre une future infection par ce virus chez les humains. »

« La plupart des études montrent que les personnes qui ont guéri [du Covid-19] ont développé des anticorps », écrit l’OMS. « Mais certaines de ces personnes ont des niveaux très faibles d’anticorps dans le sang. (…) Aucune étude n’a permis d’établir si la présence d’anticorps est suffisante pour empêcher une nouvelle infection. »En d’autres termes il n’existe pas selon l’OMS de preuve que les personnes testées positives au nouveau coronavirus soient immunisées et protégées contre une réinfection 1.

C’est là un sujet d’une importance considérable, autant sanitaire que politique, économique et diplomatique. « On peut notamment observer que si le fait d’avoir été infecté (puisque immunisé) devenait un avantage, alors les politiques ultérieures d’éducation à la prévention contre l’épidémie deviendraient encore plus compliquées à mettre en œuvre et à maintenir..) observe, fort justement le Pr Antoine Flahault, directeur de l’Institut de santé globale (université de Genève).

On sait que certaines autorités sanitaires nationales (en France notamment) ou municipales (comme Anne Hidalgo à Paris) ont d’ores et déjà émis l’idée de délivrer des documents (« passeports » ou «crtificats ») attestant l’immunité des personnes – et ce sur la base de tests sérologiques révélant la présence d’anticorps dans le sang – une procédure qui permettrait de déconfiner plus sûrement -et de permettre peu à peu leur retour au travail et la reprise de l’activité économique.

L’étrange métaphore du passeport

C’était parier sur le caractère « protecteur » de ces anticorps, seul garant de la valeur de ce passeport. C’était ne pas compter sur la mise en garde officielle de l’OMS : « Les personnes qui pensent être immunisées contre une seconde infection parce qu’elles ont été testées positives pourraient ignorer les recommandations de santé publique. Le recours à ce genre de certificats pourrait en conséquence augmenter les risques que la transmission continue », insiste-t-elle.

Plus précisément l’OMS estime par ailleurs que les tests sérologiques actuellement utilisés « ont besoin d’une validation supplémentaire pour déterminer leur exactitude et leur fiabilité ». Ils devront notamment faire la distinction entre la réponse immunitaire au nouveau coronavirus et celles vis-à-vis des anticorps produits à l’occasion d’une infection par un autre des six coronavirus humains connus, dont quatre sont largement répandus, provoquant des rhumes bénins. Or, souligne l’OMS, « les personnes infectées par l’un ou l’autre de ces virus sont susceptibles de produire des anticorps qui interagissent avec des anticorps produits en réponse à l’infection provoquée par le SARS-CoV-2 », et il est donc impératif de pouvoir les identifier.

Où l’on retrouve l’étrange métaphore du passeport 2. Le 12 mars, dans son « Adresse aux Français » Emmanuel Macron, appelant à « éviter l’écueil du repli nationaliste », avait déclaré :  « Ce virus n’a pas de passeport ». On apprend aujourd’hui qu’il sera plus compliqué qu’imaginé de s’en procurer un contre lui.

A demain @jynau

1 Sur ce thème : « Quelle immunité après une infection par le SARS-CoV-2 ? » Inserm. Texte préparé avec la collaboration de Marie-Paule Kieny, directrice de recherche Inserm et membre du Comité analyse recherche et expertise (Care). 

2 « Passeport » :  a) Document autrefois exigé pour quitter le canton de son domicile (décret du 18 décembre 1807) et dont la suppression résulte d’un projet de loi du 5 septembre 1931. b) Pièce d’identité délivrée par un État à ses ressortissants et exigible au passage des frontières.

Face à la pandémie l’espoir, onusien et papal, d’un possible «cessez-le-feu» mondial

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29/03/2020. Si elle n’évite pas le danger la peur actuelle pourra-t-elle engendrer des miracles ? Le pape François s’est, dimanche 29 mars, associé à l’appel lancé par l’ONU en faveur d’un « cessez-le-feu immédiat et mondial » afin de préserver, face au coronavirus, les « civils les plus vulnérables » dans les pays en conflit.

 «Chers frères et soeurs, le secrétaire général de l’ONU a lancé ces jours-ci un appel en faveur d’un cessez-le-feu global et immédiat partout dans le monde en raison de la crise actuelle due au Covid-19, qui ne connaît pas de frontières», a déclaré le pape à l’issue de sa prière dominicale de l’Angélus. Il rejoint ainsi à Antonio Guterres, secrétaire général de l’ONU, qui a lancé lundi 23 mars, un appel «à un cessez-le-feu immédiat, partout dans le monde» afin de préserver les civils face à la «furie» du Covid-19.

«Je m’associe à tous ceux qui ont accueilli cet appel et j’invite tous à le suivre en cessant toute forme d’hostilité, en favorisant la création de couloirs pour l’aide humanitaire, l’ouverture à la diplomatie et l’attention envers ceux qui se trouvent dans une situation de grande vulnérabilité», a ajouté François, qui s’exprimait par vidéo depuis la bibliothèque du palais apostolique et non depuis le balcon surplombant la place Saint-Pierre.

Le chef des catholiques a aussi formulé  l’espoir «que l’engagement commun contre la pandémie puisse porter tout le monde à reconnaître notre besoin de renforcer les liens fraternels en tant que membres d’une unique famille». Et d’ajouter : «Les conflits ne peuvent pas être résolus à travers la guerre. Il est nécessaire de surmonter les divergences et les antagonismes à travers le dialogue et une recherche constructive de la paix».

L’AFP précise que le pape argentin s’est dit proche des personnes contraintes de vivre en groupes, comme dans les maisons de retraite ou les casernes, et d’une manière plus spéciale des détenus. Il a dénoncé «le risque d’une tragédie» dans les prisons en raison de la combinaison du Covid-19 et de la surpopulation carcérale, demandant aux autorités d’être «sensibles» à ce problème, sans citer un pays particulier.

La droite, la gauche et la Fédération de l’hospitalisation privée

En France on perçoit aussi, toutes proportions gardées, des échos semblables. « La désunion nationale serait la pire des choses» face à l’épidémie du coronavirus, a déclaré le même jour le président (LR) du Sénat Gérard Larcher, tandis que le socialiste Olivier Faure souligne ne pas vouloir «affaiblir le gouvernement».

 «La priorité c’est d’être rassemblés, la désunion nationale serait la pire des choses», affirme Gérard Larcher dans un entretien au Parisien, alors que le bilan des victimes de l’épidémie s’alourdit de jour en jour. «Face à cette crise sanitaire, je suis aux côtés du président de la République et du Premier ministre. L’heure n’est pas à la polémique. Elle est à l’action» quand bien même «viendra le temps des réponses aux questions qui sont légitimement posées aujourd’hui», ajoute-t-il.

Le premier secrétaire du Parti socialiste, Olivier Faure a quant à lui, calme et mesuré, souhaité, sur France Inter, ne «pas […] affaiblir le gouvernement», être «solidaire et en même temps utile». Il ne faut «pas chercher les polémiques inutiles, mais aussi alerter à chaque fois que c’est utile».

l’œcuménisme règne, ou presque. C’est ainsi, toujours en France, que la Fédération de l’hospitalisation privée (FHP) vient de lancer « un appel à une solidarité nationale et interprofessionnelle afin de répondre aux besoins des structures publiques et privées qui doivent renforcer leurs équipes (infirmiers de réanimation, médecins réanimateurs) et les équipements matériels indispensables. Les demandes et modalités de participation à ces appels à solidarité sont consultables sur le site Internet de la FHP : https://www.fhp.fr/1-fhp/841-/841-/16670-appels-a-la.aspx

« La vague du Covid-19 qui frappe notre pays met à rude épreuve notre système de santé dont les besoins en personnels et matériel sont de plus en plus impérieux dans certaines régions, particulièrement en Ile de France, dans les  Hauts de France et  le Grand Est, souligne la FHP. Pour y faire face, la réponse sanitaire appelle une coordination et une coopération nationale entre toutes les structures hospitalières publiques et privées.

 « J’appelle les professionnels de santé encore disponibles, dans les cliniques privées et ailleurs, à répondre au plus vite aux demandes de solidarité lancées par les régions les plus en difficulté. alerte Lamine Gharbi, le président de la FHP. Une mobilisation totale, qui dépasse les statuts ou les modes d’exercice professionnels, est plus que jamais indispensable ! »

Sinon des miracles, sinon la paix, du moins le sens, enfin retrouvé de la solidarité, de la fraternité.

A demain @jynau

Pandémie : la France et l’Union européenne en viendront-elles à fermer leurs frontières ?

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14/03/2020. C’est fait : l’Europe est désormais l’« épicentre » de la pandémie vient de faire savoir, depuis Genève, le directeur général de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il explique que, en excluant la Chine (où l’épidémie régresse), le Vieux continent avait fait état de plus de cas et de morts que partout ailleurs dans le monde. Tedros Adhanom Ghebreyesus n’a pas commenté ce qui constitue la démonstration absolue du peu de poids de son organisation quant aux mesures prises aux échelons nationaux. Alors que l’OMS recommande, depuis le début de l’épidémie, de ne pas interrompre les échanges internationaux on observe désormais un phénomène massif de fermeture des frontières aériennes et terrestre. Y compris dans l’Union européenne.

Dernières  données disponibles (1) : le Danemark vient d’annoncer la fermeture de ses frontières aux étrangers à partir de samedi midi. La Pologne a pris une mesure similaire, ainsi que Chypre, la Slovaquie et la République Tchèque, qui va fermer à partir du 16 mars ses frontières tant aux étrangers voulant entrer dans le pays qu’aux Tchèques voulant le quitter. Et ce alors que la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen vient de rappeler que « les interdictions de voyage générales ne sont pas considérées comme très efficaces par l’Organisation mondiale de la santé ». Où l’on voit, après celui de l’OMS, le peu de poids des institutions européennes.

Hors UE, outre la décision radicale de Donald Trump, l’Ukraine a annoncé suspendre tous ses vols réguliers, et la Russie réduira à partir du 16 mars le nombre de ses liaisons aériennes avec l’UE.Singapour va interdire l’entrée et le transit aux voyageurs qui sont passés au cours des quatorze derniers jours par l’Italie, la France, l’Espagne et l’Allemagne. L’Australie et le Canada ont appelé leurs ressortissants à reconsidérer leurs projets de voyage à l’étranger.

Ajoutons que les vols vers et depuis l’Europe ont été suspendus dans de nombreux pays d’Amérique latine. La Colombie va fermer sa frontière avec le Venezuela et restreindre les entrées d’étrangers ayant voyagé en Europe ou en Asie au cours des quatorze derniers jours. En Nouvelle-Zélande, la Première ministre annonce que tous les nouveaux arrivants à la frontière, même les citoyens néo-zélandais, devront se mettre en quarantaine durant 14 jours. Quant à l’Arabie saoudite (86 cas officiels de contamination) elle suspend les vols internationaux pour deux semaines.

Illusion de prévention

Où l’on voit que les décisions politiques ne se fondent en rien sur la somme des arguments épidémiologiques démontrant que ces fermetures, du moins à ce stade du développement de l’épidémie, ne sont qu’une illusion de prévention. La métaphore qui veut que le virus « n’a pas de passeport » (à dire vrai il les a tous…) ne pèse nullement face à ce que l’exécutif perçoit comme une angoisse collective montante.

C’est dans ce contexte qu’il faut resituer les propos d’Emmanuel Macron dans son « Adresse aux Français » :

« Ce virus n’a pas de passeport. Il nous faut unir nos forces, coordonner nos réponses, coopérer. La France est à pied d’œuvre. La coordination européenne est essentielle, et j’y veillerai. Nous aurons sans doute des mesures à prendre, mais il faut les prendre pour réduire les échanges entre les zones qui sont touchées et celles qui ne le sont pas. Ce ne sont pas forcément les frontières nationales. Il ne faut céder là à aucune facilité, aucune panique.

«  Nous aurons sans doute des mesures de contrôle, des fermetures de frontières à prendre, mais il faudra les prendre quand elles seront pertinentes et il faudra les prendre en Européens, à l’échelle européenne, car c’est à cette échelle-là que nous avons construit nos libertés et nos protections. »

Qui décidera, ici, de la « pertinence » ? A quelle échelle ? Sur quelles bases rationnelles ?  Et comment l’ « épicentre » de la pandémie pourrait-elle, ici, se justifier ?

A demain @jynau

(1) Lire, de notre confrère Jean-Pierre Stroobants « Face au Covid-19, l’espace Schengen de libre circulation menacé d’implosion » (Le Monde du 14 mars 2020)

Donald Trump ferme ses frontières à l’Europe: que lui répondra Emmanuel Macron ?

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12/03/20. Nouvelle étape, majeure, dans la crise désormais planétaire. Elle survient quelques heures avant l’allocution solennelle que doit prononcer aujourd’hui, à 20 heures, Emmanuel Macron. Et cette nouvelle étape vient brutalement compliquer un peu plus la tâche du président de la République française, comme celle de l’ensemble des gouvernants des pays du Vieux Continent.

Ce fut peu après la décision de l’OMS de qualifier de « pandémie » ce qui, à ces yeux, était encore une « épidémie ». Le président américain, Donald Trump, a provoqué un coup de tonnerre diplomatique. Il a annoncé la suspension « pour trente jours et à partir du 13 mars »  de tous les voyages d’étrangers depuis l’Europe vers les Etats-Unis. Objectif affiché : endiguer l’épidémie due au coronavirus, qui a fait 38 morts et plus de 1 200 cas de contaminations dans son pays.

« J’ai décidé de prendre des actions fortes mais nécessaires pour protéger la santé et le bien-être de tous les Américains, a annoncé le président des Etas-Unis lors d’une allocution solennelle depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche. Pour empêcher de nouveaux cas de pénétrer dans notre pays, je vais suspendre tous les voyages en provenance d’Europe vers les Etats-Unis pour les 30 prochains jours », a-t-il ajouté, déplorant que l’Union européenne n’ait pas pris « les mêmes précautions » que les Etats-Unis face à la propagation du virus.

« L’Europe, c’est la nouvelle Chine »

Cette nouvelle mesure entrera en vigueur vendredi 13 à minuit aux Etats-Unis. Elle s’applique à l’espace Schengen et, Brexit aidant, elle « ne concerne pas le Royaume-Uni ». Plusieurs des ingrédients, explosifs, du populisme sont ici présents.  Au cours de son allocution de dix minutes, le président de la première puissance mondiale a ainsi qualifié le Covid-19 de « virus étranger ». Il y a quelques jours le chef de la diplomatie américaine, Mike Pompeo, avait volontairement ou pas, provoqué l’ire de Pékin, en parlant de « virus de Wuhan ».

A la différence notable d’Emmanuel Macron en France, Donald Trump est accusé par nombre de ses opposants politiques de vouloir minimiser à tout prix l’ampleur de la crise sanitaire à venir ; accusé aussi d’envoyer des messages confus, souvent contradictoires quant à la réalité de la situation et à son évolution.  Plus grave peut-être encore, quelques heures avant l’allocution présidentielle, le directeur des prestigieux Centres américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC), Robert Redfield, avait estimé que le principal risque de propagation de l’épidémie pour les Etats-Unis venait d’Europe : « C’est de là qu’arrivent les cas. Pour dire les choses clairement, l’Europe est la nouvelle Chine. » Mesurait-il alors le poids de son propos ?

Les Etats-Unis ont par ailleurs publié dans la soirée un avertissement aux voyageurs sans précédent, exhortant les Américains à éviter tout voyage à l’étranger en raison du nouveau coronavirus. « Le département d’Etat recommande aux ressortissants américains d’éviter de voyager à l’étranger en raison de l’impact mondial du Covid-19 », écrit-il dans un communiqué, étendant le niveau de mise en garde déjà adopté pour l’Italie ou la Corée du Sud à l’ensemble de la planète.

Dans un tel contexte, sans précédent dans l’histoire de la lutte contre les épidémies, on attend le message d’Emmanuel Macron. Message destiné aux Français bien évidemment. Mais aussi – et la tâche est ardue émanant d’une Union européenne en grande peine  – message du Vieux Continent exhortant à la solidarité plus qu’à l’enfermement de chacun derrière ses frontières.

A demain @jynau

Coronavirus: après l’Italie, la France pourrait-elle décréter, demain, une «quarantaine géante» ?

Bonjour

08/07/2020. Point n’est besoin, aujourd’hui, d’être dans les petits et grands secrets du Palais de l’Elysée. La décision spectaculaire (courageuse et à très haut risque) prise hier par le gouvernement italien sera au cœur, en début de soirée, du nouveau Conseil de défense réuni autour d’Emmanuel Macron. Avec une question centrale : le pouvoir exécutif français pourrait-il, le cas échéant, prendre une décision équivalente – une mesure drastique qui conduirait, schématiquement, à placer en quarantaine l’Est du pays, une fraction des Hauts-de-France voire d’une fraction de la Bretagne ? Le tout pendant la tenue des élections municipales. On imagine sans mal la somme des inconnues associées à une telle équation sanitaire, économique, sociétale, diplomatique – éminemment politique.

C’est par la presse que les seize millions d’habitants d’une douzaine de provinces italiennes, dont la Lombardie et la Vénétie ont appris, nier qu’ils seraient mis en quarantaine dès aujourd’hui et jusqu’au 3 avril. Début de panique.  Avant même la confirmation des autorités – par la voix du Premier ministre Giuseppe Conte – la panique s’est emparée de centaines de Milanais « en fuite », qui se sont rués à la gare centrale, rapporte Il Tempo. « On a assisté à un assaut des trains de nuit en direction de Rome et du sud ». Sans surprise, lors d’une conférence de presse, tard dans la soirée, M. Conte a dénoncé l’irresponsabilité des médias, qui ont publié son projet de décret avant sa finalisation – pour autant il a confirmé les mesures draconiennes instaurées ce week-end, notamment les strictes limitations pour entrer et sortir des régions concernées.

« Les discothèques, les salles de sport, les piscines, les musées et les stations de ski seront fermés, précise la BBC, citée par Courrier International. Les compétitions sportives se joueront à huis clos et le président du syndicat des footballeurs a demandé l’arrêt du championnat italien »

« Etre responsable, ne pas faire les malins »

Avec près de 6 000 cas et 233 morts, l’Italie est le troisième pays le plus touché au niveau mondial. Les vingt-et-une régions sont toutes concernées, mais l’essentiel des cas est concentré dans le Nord, en Lombardie, en Emilie-Romagne et en Vénétie. Le pays a enregistré trente-six nouveaux morts liés au coronavirus en vingt-quatre heures, tandis que le nombre de cas est monté à 5 883 (+ 1 247) – bilan officiel publié le 7 mars.

L’objectif de ces mesures est à la fois de « contenir la propagation du virus, et d’agir pour éviter l’engorgement des structures hospitalières » explique le Premier ministre italien, cité par Il Corriere della Sera. Ces mesures entraîneront des désagréments, mais c’est le moment d’être responsables, pas de faire les malins ». Etre responsable ? Ne pas faire les malins ? Emmanuel Macron ou Edouard Philippe tiendront-ils, demain, des propos équivalents ?

Selon le texte publié sur le site du gouvernement italien, les déplacements dans une vaste et riche zone du nord du pays (qui englobe Milan et Venise) devront être limités à « des impératifs professionnels dûment vérifiés et à des situations d’urgence, pour des raisons de santé ». Pour éviter les déplacements à caractère professionnel, les entreprises, publiques et privées, sont invitées à mettre leur personnel en vacances.

Rome a également ordonné la fermeture des cinémas, théâtres, musées, pubs, salles de jeux, écoles de danse, discothèques et autres lieux similaires, sur l’ensemble du territoire national. Il sera en revanche toujours possible de faire ses courses, les jours de semaine, ou d’aller dans un bar ou un restaurant – à condition toutefois de respecter la distance de sécurité d’au moins un mètre entre les clients.

La dynamique virale croissante est en place

Tous les événements et compétitions sportives, quelque qu’en soit la nature, sont suspendus. Seules les compétitions ou entraînements des sportifs professionnels participant aux Jeux Olympiques ou à des manifestations nationales ou internationales sont autorisés, à condition qu’ils aient lieu à guichets fermés. Toute personne dont la contamination au coronavirus aura été confirmée sera obligatoirement assignée à résidence.

A l’évidence la France n’est pas dans la situation italienne (près de mille cas et seize décès recensés) et rien, en l’état de la situation épidémiologique de justifierait de prendre de telles mesures de confinement géant. Pour autant la dynamique virale croissante est en place. En dépit des mesures prises l’agent pathogène venu de Chine circule, à plus ou moins bas bruit sur des zones élargies du territoire national 1 et le pouvoir exécutif fait, comme il s’y était engagé toute la transparence sur la situation et son évolution – ce qu, paradoxalement peut ne pas être sans effets anxiogènes.

C’est dire l’importance, dans la soirée, des conclusions qu’annoncera, au regard des décisions prises par Rome, le Palais de l’Elysée.

A demain @jynau

1 Caractère évangéliste. A titre de précaution le préfet de Seine-Saint-Denis a interdit « un rassemblement à caractère évangéliste » ce week-end au Blanc-Mesnil, « susceptible de réunir jusqu’à 2 000 personnes provenant de plusieurs départements ». On sait qu’une rencontre similaire organisée fin février à Mulhouse (Haut-Rhin) a généré des dizaines de contaminations en différents endroits du territoire national , jusqu’en Guyane. Sur ce thème, dans Le Monde (Patricia Jolly) : « Coronavirus : à Mulhouse, l’église évangélique La Porte ouverte identifiée comme un foyer important de contamination Plus de 2 000 personnes – dont environ 300 enfants –, venues de toute la France et de pays limitrophes, s’y sont réunies en février dans le cadre d’une semaine de jeûne et de prière. »

Le coronavirus est maintenant présent sur tous les continents – à l’exception de l’Antarctique

Bonjour

04/03/2020. Chaque jour qui passe le fait mieux comprendre : tout va toujours plus vite, certes, mais l’épidémie due au coronavirus s’installe dans la durée. Plusieurs semaines voire plusieurs mois a déjà laissé entendre Emamnuel Macron. Et des habitudes, déjà, s’installent – à commencer par la conférence de presse assurée en fin de journée par le Directeur général de la Santé un homme ignoré du grand public sous les ministères précédents (qui se souvient  des Prs Didier Houssin ou Benoît Vallet). Depuis deux ans c’est le Pr Jérôme Salomon, un proche d’Emanuel Macron et d’Agnès Buzyn que certains comparent déjà à François Molins, ancien procureur de la République de Paris. 

Il vient d’égrener les derniers chiffres de Santé publique France :  73 nouveaux cas de personnes infectées, portant leur nombre à 285 dans 13 régions touchéeset la Guyane a rapporté ses premiers cas. Sept régions rapportent au moins dix cas : l’Auvergne-Rhône-Alpes, la Bourgogne-Franche-Comté, la Bretagne, le Grand Est, l’Ile-de-France et les Hauts-de-France. Le bilan des décès est toujours de quatre. Quinze personnes sont en réanimation.

La France est désormais l’un des principaux foyers en Europe, avec l’Italie et l’Allemagne. Elle est toujours « au stade 2 » de l’épidémie ; mais il est désormais acquis qu’elle n’échappera pas, sous peu, au stade 3 si l’on en croit la porte-parole du gouvernement, Sibeth Ndiaye. Le Palais de Elysée a annoncé qu’Emmanuel Macron participera, jeudi 5 mars à une réunion avec les principaux acteurs de la recherche publique et privée – une trentaine de médecins, scientifiques et responsables de laboratoire.

Miscellanées épidémiques en chaîne

Au-delà des Alpes la situation évolue à grande vitesse. Le gouvernement italien a décidé de fermer les écoles et universités dans tout le pays, à partir de jeudi 5 mars et ce jusqu’au 15 mars. Cette option avait été envisagée au cours d’un conseil des ministres réuni à Rome autour du président du conseil, Giuseppe Conte, et a été confirmée par les autorités italiennes en fin de journée – contre l’avis des conseillers médicaux et scientifiques de l’exécutif . Polémique à suivre.

En pratique c’est l’extension à l’ensemble du pays d’une mesure qui visait déjà depuis une dizaine de jours les régions les plus affectées par l’épidémie, dans le nord de l’Italie. Deux « zones rouges » avaient parallèlement été mises en quarantaine, l’une englobant dix localités en Lombardie, l’autre, plus restreinte, en Vénétie. Ces dispositions n’ont toutefois pas empêché le virus de se propager — il est désormais présent dans dix-neuf des vingt régions italiennes. L’agence italienne de protection civile fait état de 107 décès contre 79 la veille ; et 3 089 cas contre 2 502 la veille. étaient recensés. Interrogé sur le fait de savoir si, le cas échéant, la France fermerait ses écoles le Pr Jérôme Salomon a botté en touche.

Pourquoi l’OMS ne parle-t-elle toujours pas de pandémie ? Puisque le virus est dorénavant présent tous les continents, sauf l’Antarctique, et qu’il perturbe la vie quotidienne dans un nombre croissant de pays. Avec des miscellanées nationales épidémiques en chaîne.

En Arabie saoudite, l’oumra (« petit pèlerinage » qui peut être entrepris tout au long de l’année par les musulmans) a été suspendue « temporairement » pour les « citoyens [saoudiens] et les [résidents] étrangers » afin d’« assurer la sécurité des foules », selon l’agence officielle. La mesure concerne les deux villes saintes de La Mecque et Médine. La Tunisie, où un seul cas a été enregistré à ce jour,a annoncé la suspension des liaisons maritimes entre Tunis et le nord de l’Italie, afin de limiter la propagation de l’épidémie. En Israël, les autorités ont annoncé mercredi soir l’interdiction pour les Français et les ressortissants de plusieurs autres pays européens d’entrer sur leur territoire.  L’Allemagne interdit l’exportation de matériel médical de protection (masques, gants, combinaisons, etc.) et parle désormais de pandémie. L’Egypte a décidé d’interdire l’accès au territoire aux ressortissants du Qatar – qui a pris des mesures similaires pour toutes les personnes provenant d’Egypte, y compris les résidents sur le sol qatari. Depuis le début de l’épidémie, l’Egypte, pays de 100 millions d’habitants, a enregistré deux cas, dont un a été déclaré guéri le 27 février, contre huit dans l’émirat du Qatar.

La croissance mondiale sera inférieure en 2020 à celle de 2019 à cause de l’impact de l’épidémie de nouveau coronavirus, mais il est « difficile de prédire de combien », prévient Kristalina Georgieva, directrice générale du Fonds monétaire international (FMI). Selon elle une « réponse mondiale » est nécessaire pour limiter la contagion. Réponse mondiale ? Créer une Organisation Mondiale de la Santé ?

A demain @jynau

Coronavirus : faut-il désormais commencer à évoquer l’inéluctabilité de la pandémie ?

Bonjour

25/02/2020. Où en sommes-nous ?  Le Monde use, dans l’un des titres dont il a conservé le secret, des infinies richesses de la langue française « Covid-19 : la pandémie mondiale paraît inéluctable » (Paul Benkimoun). Où l’on apprend que, selon l’OMS, l’épidémie continue de décliner en Chine, mais que le risque d’une extension sur le reste de la planète s’accroît avec le développement de trois foyers actifs en Corée du Sud, en Iran et en Italie. Le chaud et le froid de l’épidémiologie virale dans un environnement médiatique, politique, économique de plus en plus instable.

Lors du point de presse désormais quotidien de l’institution onusienne le directeur général de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus a, le 24 février, avancé quelques chiffres. Pékin avait alors notifié à l’OMS un total de 77 362 cas de Covid-19, dont 2 618 mortels. Par ailleurs 2 074 cas, dont trois mortels, étaient dénombrés dans vingt-huit autres pays.

Le Monde rapporte que les conclusions de mission internationale envoyée en Chine par l’OMS seront publiées le 25 février. Les scientifiques de cette mission ont considéré que « l’épidémie a atteint son pic et suivi une courbe en plateau entre le 23 janvier et le 2 février et a régulièrement décru depuis. Ils ont constaté qu’il n’y avait pas eu de changement significatif dans le génome du virus. Ils ont noté que le taux de létalité se situe entre 2 et 4 % à Wuhan et 0,7 % hors de cette ville », qui a été l’épicentre de l’épidémie, a résumé le Dr Tedros. Qui ajoute que la mission a appris que « pour les personnes ayant une forme bénigne de la maladie, le temps de guérison est d’environ deux semaines, tandis que celles ayant une forme sévère ou critique guérissent en trois à six semaines ».

Autre point marquant de la déclaration du directeur général de l’OMS : 

« Notre décision d’utiliser ou nom le mot pandémie pour qualifier une épidémie est fondé sur une évaluation continue de la propagation géographique du virus, de la sévérité de la maladie qu’il provoque et de l’impact qu’il a sur l’ensemble de la société. Pour le moment, nous n’assistons pas à une propagation mondiale débridée du virus et nous ne voyons pas une maladie grave ou des décès à grande échelle. Est-ce que ce virus possède un potentiel pandémique ? Absolument, il l’a. En sommes-nous là ? D’après notre évaluation, pas encore. »

Question : quand ? Peut-on, doit-on, désormais songer non pas au hasard, mais bien à la fatalité qui se cache derrière l’inéluctabilité ?

A demain @jynau

« Inéluctable » : Qui ne peut être évité; à quoi on ne peut se soustraire. « Toujours il avait adoré l’inéluctable, qui le dispensait de vouloir » (Montherl., Célibataires,1934, p. 776)

Coronavirus, souvenirs et taxonomie : COVID-19, facile à prononcer, diplomatiquement correct

Bonjour

La diplomatie est l’un des chapitres méconnu du grand livre des épidémies. L’origine (toujours étrangère) de l’agent pathogène, ses  conséquences nationales et bilatérales, sanitaires et économiques, les frayeurs contagieuses qu’il génère, tout cela alimentent au plus haut point le travail des ambassades, remplissent les valises diplomatiques.

L’épidémie du nouveau coronavirus en témoigne à l’envi – qui plus est dans un monde hyperconnecté comme jamais. On y observe la résurgence d’une forme de racisme occidental vers les populations asiatiques et, en Asie, une forme de racisme vis-à-vis des populations chinoises (comme en témoignent nos confrères du Monde). Un triste et grand classique. On y observe aussi une OMS, institution onusienne, tenter de jouer les diplomates multilatéraux et, autant que faire se peut, calmer l’ire du plus que puissant membre chinois.  

On observe aussi, dans le même temps, un régime (pour partie) communiste reconnaître qu’il est en état de guerre contre un ennemi intérieur invisible, un virus apparu au sein du vieil empire et qui contamine le reste de la planète. Une situation qui, compte-tenu notamment du confinement imposé à des dizaines de millions de citoyens ayant par ailleurs accès à des réseaux sociaux, pourrait rapidement justifier le recours à la métaphore occidentale de la cocotte-minute.  

Exoplanète et discrimination

C’est dans ce contexte que l’on apprend que l’OMS a, unilatéralement décidé de débaptiser l’agent pathogène : le « 2019-nCoV » n’existe plus, seul comptera désormais le « COVID-19 ». Une décision annoncé par le Dr Tedros Adhanom Ghebreyesus, directeur général de l’OMS. « I’ll spell it: C-O-V-I-D hyphen one nine – COVID-19″ –@DrTedros #COVID19 »

Cette nouvelle dénomination a été choisie de manière à être «facile à prononcer», tout en restant sans référence «stigmatisante» à un pays, un animal ou une population particulière, a souligné Tedros Adhanom Ghebreyesus : « Under international guidelines, the W.H.O. “had to find a name that did not refer to a geographical location, an animal, an individual or group of people, and which is also pronounceable and related to the disease,” he said on Twitter. »

Pourquoi tant d’explications ? « La Chine n’est pas en guerre (autre que commerciale) avec le reste du monde, mais son régime autoritaire et un brin susceptible pourrait s’opposer à toute tentative d’une taxonomie internationale qui viserait à désigner Wuhan ou « la Chine » comme l’épicentre d’un fléau qu’elle n’aura pas su endiguer, observe le Pr Antoine Flahault, directeur de l’Institut de Santé Globale (Faculté de médecine, Université de Genève).  Les premières atteintes discriminatoires vis-à-vis des personnes d’origine asiatique ont d’ailleurs pu trouver un écho empathique et opportun à cette exigence des autorités chinoises. »

Le Pr Flahault rappelle ici le triste souvenir de la discrimination insensée, au début des années 1980,  vis-à-vis des Haïtiens concernant une nouvelle maladie virale transmissible. Une maladie qui ne s’appelait pas encore le S.I.D.A. (avant de devenir le SIDA, puis le Sida et enfin sida). « Depuis quelques semaines on avait attribué un nom d’exoplanète au nouveau coronavirus (« 2019-nCoV »). Le « n » (pour « nouveau ») ne pouvait le rester éternellement. »

A demain @jynau

1 Sur ce thème, lire « Le coronavirus révèle la matrice totalitaire du régime chinois » (Le Monde du 12 février 2020) de la sinologue Chloé Froissart (maître de conférences en science politique au département d’études chinoises, université Rennes 2)

Coronavirus débaptisé : ne l’appelez plus jamais «2019-nCoV», c’était trop dur à prononcer !

Bonjour

Cela couvait, c’est éclos :  le nouveau coronavirus chinois s’appellera officiellement «Covid-19». L’annonce en a été faite mardi 11 février 2020 à Genève par le Dr Tedros

« I’ll spell it: C-O-V-I-D hyphen one nine – COVID-19″ @DrTedros #COVID19 »

Cette dénomination remplace celle de 2019-nCoV, décidée à titre provisoire après l’apparition de la maladie et l’identification du nouvel agent pathogène. La nouvelle dénomination a été choisie de manière à être «facile à prononcer», tout en restant sans référence «stigmatisante» à un pays ou une population particulière, a souligné Tedros Adhanom Ghebreyesus.

Comprendra qui pourra. Pour l’heure on saisit, une nouvelle fois, le souci premier du patron de l’OMS : ne pas, surtout pas, irriter Pékin.

A demain @jynau

Coronavirus et diplomatie : quand l’Institut Pasteur de Paris accuse Pékin de nous avoir menti

Bonjour

A quoi peut servir une radio de service public en période d’épidémie virale ? La réponse nous est donnée par Radio France où, fort opportunément, un mouvement de grève sans précédent a été suspendu. Deux exemples :

I France Culture avec, le 5 février, un remarquable opus de la non moins remarquable« Temps du débat » (par Emmanuel Laurentin) : « Coronavirus : la mondialisation réactive-t-elle les peurs ancestrales ? » (trente-neuf minutes avec notamment, le Dr Jean-Claude Manuguerra) :

«En France, en Australie, ou dans les pays limitrophes de la Chine, les brusques réactions de mise à distance, voire de racisme, vis-à-vis de population venant d’Asie se sont multipliées ces derniers jours. À Marseille, certains n’ont pas manqué de rappeler qu’en cette année de tricentenaire de la peste, l’arrivée, à proximité du grand port du Sud, de français venant de Wuhan avait réveillé une peur des épidémies constamment réactivée depuis trois siècles. La mondialisation des informations, des transports de marchandises et des voyageurs facilite-t-elle la multiplication des rumeurs, tout autant d’ailleurs que la résolution de ce type d’épidémie, par un échange d’informations plus rapide ? »

II France Inter ce 6 février avec son « grand entretien du 8h20 » (Léa SalaméNicolas Demorand) : aujourd’hui le Dr Arnaud Fontanet, épidémiologiste à l’Institut Pasteur de Paris. Où l’on entend, pour la première fois sous cette forme une accusation directe des autorités sanitaires et politiques chinoises : «Sur le plan scientifique, la réponse à ce nouveau virus a été très rapide. Mais sur le plan politique, jusqu’au 10 ou 15 janvier, on a voulu nous faire croire qu’il n’y avait que quarante patients à Wuhan, sans transmission interhumaine ni risque d’épidémie. Il y a eu un retard pris et qu’on paie très cher aujourd’hui. »

Tout laisse penser que le montant de la facture ne cessera de grimper. Et nul ne sait si Pékin sera disposé à la régler. Ni même s’il en aura les moyens.

A demain @jynau