RU486: polémique, en Italie, sur l’assouplissement de l’utilisation de la «pilule abortive»

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08/08/2020. Qui, en France, se souvient encore de la violente polémique sur le « RU486 » (mifépristone) cette « pilule abortive » ? Quatre décennies plus tard, dans une Europe que l’on présente comme unie, voici que la polémique émerge de l’autre côté des Alpes.

Le gouvernement italien a décidé d’assouplir ses conditions d’utilisation a annoncé samedi 8 août le quotidien (centre-gauche) La Repubblica. Selon cette information exclusive en une du journal de centre-gauche, les nouvelles recommandations du ministère de la Santé permettront aux femmes souhaitant avorter d’avoir recours à la pilule RU486 en ambulatoire – alors que jusqu’ici trois jours d’hospitalisation étaient recommandés.

Interrogé par La Repubblica (et cité par l’AFP) le ministre de la Santé Roberto Speranza a défendu son choix : «Les arguments scientifiques sont très clairs. Le Conseil supérieur de la Santé et les sociétés de gynécologie et d’obstétrique ont exprimé un avis favorable. Ces nouvelles recommandations représentent un progrès important».

En Italie, pays où la tradition catholique résiste, le recours à l’avortement, légalisé en 1978, est compliqué par le fait que 70% des gynécologues invoquent l’objection de conscience pour ne pas pratiquer d’IVG. « La pilule abortive représente actuellement 20% des avortements, la méthode chirurgicale étant la plus répandue. Cette décision permet aussi de mettre fin aux disparités entre régions, qui en Italie sont compétentes en matière de santé, résume l’AFP.  En juin, une polémique avait éclaté lorsque la présidente de la région Ombrie, Donatella Tesei, membre de la Ligue (extrême droite), avait interdit le recours à la pilule abortive sans hospitalisation. Cette décision, condamnée par les partis de gauche et des intellectuels comme Roberto Saviano, avait entraîné des manifestations de protestation de milliers de femmes. » 

Tradition catholique ? L’assouplissement du recours à la pilule abortive a suscité de nombreuses réactions. Le journal de la conférence épiscopale italienne Avvenire a dénoncé «une annonce surprise, dévoilée seulement à La Repubblica», qui «ouvre la voie à l’avortement pharmacologique à domicile».  Le Parti démocrate (PD, centre-gauche, au pouvoir) a salué une décision «juste» en faveur de «l’avortement pharmacologique, sûr et moins invasif que par voie chirurgicale», tandis que le parti Fratelli d’Italia (extrême droite) a fustigé «une décision absurde et dangereuse».

C’est ainsi qu’aujourd’hui, faute d’harmonie, qu’une Europe, cahin-caha, se construit.

A demain @jynau

Covid-19 et grossesse : le premier cas de transmission intra-utérine vient d’être démontré

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14/07/2020. S’inquiéter ? Des médecins français viennent de rapporter le premier cas confirmé de contamination intra-utérine au Covid-19, dans une étude publiée mardi 14 juillet par Nature Communications:  « Transplacental transmission of SARS-CoV-2 infection » 1. Le nouveau-né est né en mars et souffrait de symptômes neurologiques associés à la maladie. « Nous avons montré que la transmission de la mère au fœtus est possible via le placenta dans les dernières semaines de grossesse », a expliqué à l’Agence France Presse le Dr Daniele De Luca (hôpital Antoine-Béclère, Clamart, et principale auteure de l’étude avec le Pr Alexandra Benachi.

Des précédentes études avaient certes suggéré  la possibilité d’une transmission prénatale de la mère à son enfant  mais, assure-t-elle, cette nouvelle étude en apporte des preuves. « Il faut analyser le sang maternel, le liquide amniotique, le sang du nouveau-né, le placenta, etc. Réunir tous ces prélèvements pendant une épidémie avec des urgences dans tous les sens n’était pas simple, c’est pourquoi c’était suspecté, mais pas démontré », a-t-elle expliqué.

L’équipe de Béclère a conduit cette étude sur une femme âgée de 23 ans, hospitalisée début mars pour un syndrome infectieux à 35 semaines de grossesse. La naissance s’étant faite par césarienne, tous les prélèvements ont pu être menés sur les réservoirs potentiels du virus SARS-CoV-2, dont la charge la plus forte a été trouvée dans le placenta. « Il est passé de là à travers le cordon ombilical vers le bébé, où il s’est développé », précise le Dr De Luca.

Mauvaise et bonne nouvelles

Vingt-quatre heures après sa naissance, le nouveau-né, de sexe masculin (2540 grammes) avait présenté des symptômes sévères – dont une rigidité des membres et des lésions du système nerveux cérébral. Ces symptômes ont finalement disparu d’eux-mêmes, avant que les médecins ne tranchent quant à un traitement – et ce en l’absence de thérapeutique connue contre la Covid-19. 

Le suivi sur deux mois de vie a montré un examen neurologique amélioré (hypertonie améliorée, motricité normale) ainsi qu’une imagerie par résonance magnétique montrant une réduction des lésions de la substance blanche. La croissance et le reste de l’examen clinique étaient normaux.

« La mauvaise nouvelle, c’est que ça puisse se produire. La bonne nouvelle est que c’est rare – très rare même rapporté à la population », a commenté Daniele De Luca, toujours à l’AFP. S’inquiéter ? Ou, comme Marian Knight, professeure de santé maternelle et infantile à l’université d’Oxford (qui n’a pas participé à l’étude) rappeler que le principal message pour les femmes enceintes ne varie pas : prévenir le risque infectieux grâce aux « gestes barrière » – et au port du masque.

A demain @jynau

1 Vivanti, A.J., Vauloup-Fellous, C., Prevot, S. et al. Transplacental transmission of SARS-CoV-2 infection. Nat Commun 11, 3572 (2020). https://doi.org/10.1038/s41467-020-17436-6

Avortement à domicile: Olivier Véran va l’autoriser jusqu’à neuf semaines d’aménorrhée

Bonjour

11/04/2020. C’est l’une des conséquences les moins attendues de l’épidémie : saisie le 7 avril par Olivier Véran, ministre des Solidarités et de la Santé, la Haute Autorité de Santé (HAS) a, trois jours plus tard, validé la possibilité de proposer aux femmes une interruption volontaire de grossesse (IVG) médicamenteuse à domicile « jusqu’à 9 semaines d’aménorrhée ». 

Ainsi donc, comme on pouvait l’espérer, Olivier Véran avait entendu une partie des demandes formulées dans une courte et forte tribune collective, médicale et politique, publiée dans Le Monde du 31 mars : Près de deux cents spécialistes pratiquant des IVG appelaient à des mesures d’urgence du fait des mesures de confinement  se disaient prêts à défier la loi 1.

Les signataires de la tribune et leurs soutiens souhaitaient notamment que les avortements puissent  être autorisés par voie médicamenteuse au domicile jusqu’à neuf semaines d’aménorrhée (soit sept semaines de grossesse). Cette mesure dérogatoire permettrait selon eux de réduire les sollicitations auxquelles doivent faire face les équipes hospitalières. Aucun danger, expliquaient-elles: cette option est validée par l’OMS et ne présente pas de danger particulier.

Aujourd’hui, en France, l’IVG médicamenteuse ne peut se pratiquer que jusqu’à la fin de la cinquième semaine de grossesse (soit au maximum sept semaines après le début des dernières règles). Cette date limite peut être prolongée jusqu’à sept semaines de grossesse (soit neuf semaines après le début des dernières règles) mais uniquement dans le cas d’une hospitalisation dans un établissement de santé. Les conditions de conservation des médicaments utilisés dans le protocole ad hoc (congélation) ne sont en effet pas adaptées à une prise à charge à domicile.

Dans une « Réponse rapide », la HAS décrit les modalités de cette extension qui  « répond à la nécessité de garantir le droit des femmes à l’IVG durant la période d’épidémie de COVID-19 en évitant autant que faire se peut d’aller en établissement ». 

Changer la loi ou pas ?

La HAS définit ainsi deux nouveaux protocoles médicamenteux. Ils reposent sur l’association d’une antiprogestérone (mifépristone), suivie d’une prostaglandine (misoprostol). Les séquences de traitement recommandées sont une prise de 200 mg de mifépristone par voie orale suivie, 24 à 48 h plus tard, de 800 μg de misoprostol par voie orale, sub-linguale ou jugale ; OU une prise de 600 mg de mifépristone par voie orale suivie 24 à 48 h plus tard, de 800 μg de misoprostol par voie orale, sub-linguale ou jugale.

Ces deux protocoles ont été validés en lien avec le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) – il faut en effet savoir que  l’utilisation de ces médicaments dans cette indication n’est pas prévue par leurs autorisations de mise sur le marché.  Où l’on observe que l’administration peut parfois, en temps de crise, utilement évoluer

La HAS insiste en outre sur deux nécessités : « prévenir la douleur en prescrivant du paracétamol associé à l’opium où à la codéine au lieu de l’ibuprofène ; et éviter, dans la mesure du possible, que la femme ne soit seule à domicile ». Elle rappelle, enfin, que l’administration de ces médicaments par voie vaginale est à proscrire puisqu’elle peut induire des chocs toxiques et septiques.

Et maintenant ? On peut raisonnablement imaginer que l’avis de la HAS sera suffisant pour permettre au ministre d’agir. «On nous a répondu qu’on ne pouvait pas changer la loi, que c’était compliqué, avait déclaré sur France Inter Ghada Hatem, gynécologue-obstétricienne et fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis au lendemain de la publication du Monde. Certains politiques, voire des collègues, nous ont même dit que c’était “ignoble” de vouloir profiter de la situation pour faire passer des revendications. On ne profite pas de la situation, on veut juste aider les femmes dans une période encore plus difficile que d’habitude.»

A demain @jynau

1 « Urgences et confinement: respecter ou pas la loi sur l’IVG ? » Slate.fr 6 avril 2020

Avortement : Olivier Véran refusera-t-il trois aménagements durant le confinement ?

Bonjour

01/03/2020. Où l’on découvre, une fois encore, que l’épidémie met douloureusement à l’épreuve notre système de santé dont il révèle les insuffisances, les failles, l’impréparation. Sans nullement ignorer le courage et la force des soignants, la haute conscience qu’ils ont de leur métier, de leur rôle dans leur métier.

C’est une courte et forte tribune collective, médicale et politique, publiée dans Le Monde : « Il faut ‘’protéger les droits des femmes et maintenir l’accès à l’avortement’’». Plus d’une centaine de professionnels de l’IVG 1 appellent, soutenue par des personnalités du monde politique et de la culture, à des mesures d’urgence et se disent prêts à défier la loi. Extraits :

« Nous, professionnelles de l’interruption volontaire de grossesse (IVG), avons dès le début de l’épidémie réorganisé la prise en charge des femmes afin de pouvoir répondre à toutes les demandes dans le délai le plus bref et en limitant au maximum tout déplacement. Il est essentiel de protéger les droits des femmes et de maintenir l’accès à l’avortement (…) Malgré cette organisation ultra-précoce et malgré notre investissement collectif, nous sommes confrontés aujourd’hui à trois problèmes dont les femmes sont les premières victimes »

« – Le premier est lié aux questions de ressources humaines avec des soignant(e)s également malades, ce qui met les équipes en tension. Pour limiter la sollicitation des équipes hospitalières, nous souhaitons que les avortements puissent être autorisés par voie médicamenteuse au domicile jusqu’à neuf semaines d’aménorrhée, soit sept semaines de grossesse. Cette option est validée par l’OMS et ne présente pas de danger particulier.

« – Le deuxième est la limitation des déplacements des femmes lors de leur IVG. Pour la respecter au mieux, nous demandons que les mineures soient dispensées du délai de quarante-huit heures qui leur est actuellement imposé avant leur IVG et puissent bénéficier d’une IVG dans la foulée de leur première consultation.

« – Enfin, le confinement aggrave les situations de violences et rend encore plus difficiles les possibilités de consultation pour les femmes qui vivent dans un environnement dangereux. Il s’ensuit des retards de diagnostic et des demandes hors délais. Ces situations donnent en général lieu à une prise en charge à l’étranger (Pays-Bas principalement) à condition que les patientes en aient les moyens, mais cette solution n’est même plus envisageable du fait de la fermeture des frontières (…)  Ces difficultés vont obliger nombre de femmes à conserver leur grossesse contre leur gré, mettant en danger leur autonomie et l’avenir des enfants nés dans ces conditions. Nous souhaitons pouvoir, à titre exceptionnel pendant la durée du confinement, réaliser des aspirations jusqu’à seize semaines d’aménorrhée, soit quatorze semaines de grossesse. »

Il s’agit, en d’autres termes, et pour une période limitée, que l’exécutif donne, au minimum, son feu vert de principe pour que la loi et le règlement ne soit pas toujours pleinement respectés – sans que les soignants puissent en être les victimes. Le gouvernement a prouvé qu’il pouvait prendre des mesures rapides dans la période épidémique que nous connaissons.

« On nous a répondu qu’on ne pouvait pas changer la loi, que c’était compliqué, vient de déclarer sur France Inter  Ghada Hatem, gynécologue-obstétricienne et fondatrice de la Maison des femmes de Saint-Denis, Certains politiques, voire des collègues, nous ont même dit que c’était “ignoble” de vouloir profiter de la situation pour faire passer des revendications. On ne profite pas de la situation, on veut juste aider les femmes dans une période encore plus difficile que d’habitude. »

Quatre anciennes ministres soutiennent ces demandes. Or on indique qu’Olivier Véran serait ici fermement opposé à tout changement. Vraiment ? Ce serait d’autant plus surprenant que le nouveau ministre de la Santé a démontré qu’il pouvait (dans le champ des addictions) prendre en urgence des mesures dérogatoires – et ce au nom de la réduction des risques. Et sans avoir besoin de saisir le Comité national d’éthique.

« La loi doit aligner les pratiques médicales sur les besoins sociaux concluent les signataires. Nous y sommes prêt(e)s, et sommes également prêt(e)s à nous mettre hors-la-loi pour appliquer ces trois mesures. » Le Dr Olivier Véran fera-t-il en sorte que l’on puisse ne pas en arriver là ?

A demain @jynau

1 Liste des premiers signataires : Docteur Laurence Danjou, gynécologue Paris ; Docteur Philippe Faucher, responsable CIVG hôpital Trousseau, président de REVHO (Réseau entre la ville et l’hôpital pour l’orthogénie) ; Docteur Danielle Gaudry, gynécologue-obstétricienne, CPEF Maison-Alfort ; Docteur Sophie Gaudu, responsable CIVG, hôpital du Kremlin-Bicêtre ; Docteur Maud Gelly, CIVG, hôpital Avicenne, Bobigny ; Docteur Danielle Hassoun, gynécologue obstétricienne, centre de santé du Square de la Mutualité ; Docteur Ghada Hatem, médecin chef de la Maison des femmes de Saint-Denis. Liste complète des signataires sur le site Internet IVG-Covid.

Ce texte a reçu le soutien de : Roselyne Bachelot, ancienne ministre de la santé ; Guillaume Gouffier-Cha, député du Val-de-Marne (LRM) ; Anne Hidalgo, maire de Paris, socialiste ; Laurence Rossignol, sénatrice socialiste, ancienne ministre des droits des femmes ; Yvette Roudy, ancienne ministre des droits des femmes ; Marisol Touraine, ancienne ministre de la santé ; Najat- Vallaud-Belkacem, ancienne ministre des droits des femmes. 

Liste complète des soutiens au texte sur le site IVG-Covid.

Utérus : polémique entre les partisans de l’ablation et tous les radiologues qui disent non

Bonjour

Hier matin, en exclusivité dans Le Parisien (Elsa Mari) : « Utérus : les radiologues interventionnels, en colère, dénoncent des ablations trop fréquentes alors qu’il existe une alternative, l’embolisation, qui guérit en conservant les organes ». Et le quotidien de relayer « toute une profession qui unit ses voix pour crier sa colère » (sic). Entendre les « radiologues interventionnels » ces « chirurgiens sans scalpels », qui « opèrent, guidés par l’imagerie, et suivent les artères, veines, pour soigner un organe, une tumeur ». Tous « montent ensemble au créneau » (re-sic) pour dénoncer le fait qu’on « enlève trop d’utérus, de prostates dans l’Hexagone ». Selon leur estimation, « 20 000 à 25 000 femmes se font retirer l’utérus chaque année alors que cela pourrait être évité ».

On connaît l’existence, la fréquence et le pronostic habituel du « fibrome utérin ». « Certaines n’ont aucun symptôme, d’autres vivent un calvaire : règles interminables, éprouvantes, anémie, maux de ventre, grande fatigue, rappelle Le Parisien. Alors leur gynécologue leur propose une hystérectomie, une ablation de l’utérus, au moins en partie. » Or ce que ces femmes ne sauraient pas, c’est qu’il existe une alternative, validée depuis quinze ans.

Le bien beau concept de confraternité

« On utilise une autre technique, l’embolisation, qui permet de guérir tout en conservant l’utérus, explique le Pr. Marc Sapoval, chef du service de radiologie interventionnelle à l’Hôpital européen Georges-Pompidou, à Paris (XVe). Le risque de complications majeures est divisé par deux, l’arrêt de travail est d’une semaine contre deux mois. »

Problème : il esxiste, depuis 2011,  des recommandations destinées aux gynécologues-obstétriciens, précisant qu’ils doivent informer les patients que l’embolisation existe. « C’est loin d’être le cas, affirme Le Parisien.  En France, elles ne sont que 3 % à en bénéficier. « Cela me scandalise, tempête le Pr. Sapoval. On a tout essayé, on est présent dans tous les congrès ! Ce problème est tellement grave qu’on est en train de créer un site internet avec l’Agence régionale de santé d’Ile-de-France. »

La Fédération nationale des collèges de gynécologie (médicale) l’admet : « On ne pense pas assez à l’embolisation alors qu’on devrait » reconnaît sa présidente la Dr Pia de Reilhac. Comment expliquer tant de résistance ? Certains évoquent « le culture des gynécologues » qui serait, naturellement, d’opérer. D’autres (ou les mêmes) posent l’hypothèse de la rentabilité, sinon de l’esprit de lucre. « Tout le monde est payé à l’acte, alors ils n’ont pas envie qu’on leur pique leur marché, affirme ainsi, dans Le Parisien et sans ciller, le Dr Jean-Philippe Masson, président de la Fédération nationale des médecins radiologues (FNMR). Pourtant, une embolisation coûte quatre fois moins cher à la Sécurité sociale !»

Où l’on prend ainsi, une nouvelle fois et publiquement, la mesure des limites auquel est confronté le bien beau concept de confraternité.

A demain @jynau

Alerte au Nexplanon®, implant contraceptif qui peut migrer dans les vaisseaux sanguins

 Bonjour

Trois ans plus tard, nouvelle et peu banale alerte : l’Agence du médicament (ANSM) met à nouveau en garde « les professionnels de santé » : risque de « lésions neuro-vasculaires au site d’insertion et de migration de l’implant contraceptif Nexplanon® dans les vaisseaux sanguins et dans le thorax ». Il s’agit ici d’un médicament contraceptif contenant de l’étonogestrel qui se présente sous la forme d’un petit bâtonnet inséré juste sous la peau vers l’intérieur du bras. L’affaire est d’importance : chaque année, environ 200 000 femmes ont recours à Nexplanon®, le seul implant contraceptif commercialisé en France – MSD-France remboursable à 65 % – Prix : 100,21 €

Cette alerte fait suite à la première lettre d’information diffusée en 2016 ainsi qu’à l’aboutissement de la procédure d’arbitrage européen lancée en juillet 2019 par l’ANSM, au regard de nouvelles « déclarations de migration ». L’heure est aujourd’hui au renforcement des mesures de réduction de ce risque et d’éclairer les professionnels sur la procédure d’insertion/retrait de l’implant et des femmes déjà porteuses – ou celles pour lesquelles la pose serait envisagée.

Dans les prochaines semaines, une lettre sera adressée aux professionnels pour rappeler l’existence d’un risque de lésions neuro-vasculaires au site d’insertion (pouvant se manifester par des fourmillements ou des troubles de la sensibilité dans la main) et de migration de l’implant notamment dans l’artère pulmonaire, potentiellement liés à une insertion profonde ou incorrecte de Nexplanon. Les femmes devront être informées de ces risques en amont de la consultation de pose. Les modalités de pose ou de retrait de l’implant seront alors également reprécisées.

« L’implant devra être inséré à la face interne du bras non dominant, juste sous la peau et le nouveau site d’insertion se situe en regard du triceps, à environ 8 à 10 cm de l’épicondyle médial de l’humérus et 3 à 5 cm postérieur sous le sillon qui sépare le biceps du triceps. Les femmes devront désormais recevoir remettre au moment de la pose de l’implant, une carte patiente complémentaire à la notice, les invitant à vérifier une à deux fois par mois la présence de l’implant et à contacter rapidement leur médecin ou leur sage-femme si elles ne le repèrent plus au toucher. »

Dès aujourd’hui l’ANSM invite toutes les femmes porteuses d’un implant contraceptif Nexplanon® à s’assurer par une palpation délicate qu’il est bien en place. Dans le cas contraire une consultation médicale doit être programmée. Et l’ANSM de recommande vivement aux professionnels de santé de se former en présentiel (sic) à la pose de ces implants.

Les premiers signalements de pharmacovigilance sur la migration de cet implant, notamment dans l’artère pulmonaire, datent de 2016. Ils avaient conduit à la mise en place de plusieurs mesures de réduction de ce risque au plan national et européen. Las, en  février 2019, deux enquêtes de pharmacovigilance montraient qu’en dépit de ces mesures le nombre de signalements de migration dans l’artère pulmonaire en 2017 était d’environ 3,17 pour 100 000 insertions. « Par ailleurs des informations issues des professionnels de santé ont fait apparaitre que le risque de migration de l’implant restait peu connu des professionnels concernés et des femmes, ajoute l’ANSM dans une forme a minima de mea culpa. A ce jour, 30 cas de migration d’implants Nexplanon® dans l’artère pulmonaire ont été signalés à l’ANSM. La cause exacte de ces migrations n’est pour l’instant pas identifiée.

A demain @jynau

Malaise hospitalier : Gérald Darmanin visé par les gynécologues et obstétriciens français

Bonjour

On attend toujours l’annonce hospitalière du gouvernement promise, depuis Epernay, par le président de la République. Et la mobilisation ne cesse de prendre de l’ampleur. Jusqu’où ? Aujourd’hui ce sont les internes qui se mettent en ordre de révolte – vieilles revendications, nouvelles énergies. Et il faut désormais y ajouter le Syndicat national des gynécologues et obstétricien français (SYNGOF). Le voici qui appelle « tous les Gynécologues Obstétriciens hospitaliers à se mobiliser le 30 novembre en se déclarant gréviste et en ajournant tous les soins non urgents ».

Les responsables de ce syndicat  soulignent « la mobilisation exceptionnelle des praticiens hospitaliers du 14 novembre dernier ». Une mobilisation, soulignent-ils, « à la mesure du sentiment de mépris que les médecins ressentent à leur égard depuis des décennies et de négation de leur formation, de leur engagement et de leurs responsabilités ».

A cette formulation inhabituellement forte ils ajoutent un angle personnel d’attaque. Lisons :

« Massivement les gynécologues obstétriciens fuient les hôpitaux. C’est une réalité que ne peut ignorer le Ministre de l’Action et des Comptes Publics, Gérald Darmanin, alors que la maternité de sa ville de Tourcoing (1800 accouchements par an) a dû suspendre les accouchements et transférer les parturientes, prenant acte du profond malaise de nos collègues qui, faute d’écoute, ont craqué et ont été mis en arrêt de travail. »

Le SYNGOF en appelle ainsi au gouvernement : Restaurer l’attractivité de l’exercice hospitalier par des mesures fortes ! Remédicaliser le management ! Réviser la grille salariale et la rémunération des gardes ! On attend, à Bercy et non à Tourcoing, ce que leur dira, ou pas, Gérald Darmanin.

A demain @jynau

Papillomavirus : quand Mme Buzyn imposera-t-elle la vaccination de tous les petits garçons?

Bonjour

On attend la réaction de Michèle Rivasi et des anti-vaccination : la Haute Autorité de santé (HAS) souhaite étendre aux garçons la recommmandation vaccinale contre les papillomavirus humains (HPV) responsables de plusieurs types de cancers – dont celui du col de l’utérus. Etendre cette vaccination à  « tous les garçons de 11 à 14 ans, avec un rattrapage possible pour tous les adolescents et jeunes adultes de 15 à 19 ans révolus » 1.

En France, la vaccination est aujourd’hui recommandée et remboursée pour toutes les jeunes filles de 11 à 14 ans et entre 15 et 19 ans en cas de rattrapage. Elle est aussi recommandée jusqu’à l’âge de 26 ans chez les hommes ayant des relations sexuelles avec d’autres hommes (HSH) et chez des patients immunodéprimés. Or c’est un échec considérable : une couverture vaccinale inférieure à 20%  à rapprocher de l’objectif de 60 % du plan cancer 2014-2019.

Certains pays, comme les Etats-Unis, recommandent déjà que tous les préadolescents soient vaccinés contre les HPV avant d’y être exposés, à l’âge de 11 ou 12 ans. L’Académie nationale française de médecine ainsi qu’une cinquantaine de sociétés savantes et de syndicats médicaux se sont déjà récemment prononcés en faveur d’une extension de la vaccination aux garçons – sans craindre parfois d’être accusés de conflits d’intérêts.

Etendre la vaccination aux garçons ?

La HAS avait été saisie par Agnès Buzyn. Sa commission technique des vaccinations (CTV) élabore sur ce sujet une « recommandation vaccinale ».

« Cette recommandation vise à réévaluer le bien-fondé d’élargir aux garçons la vaccination contre les papillomavirus humains, alors que la couverture vaccinale des populations actuellement ciblées (jeunes filles et hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes) par cette vaccination reste insuffisante en France. Elle a été élaborée avec l’appui d’un groupe préparatoire multidisciplinaire à l’issue d’une revue de la littérature. »

En pratique nous sommes au stade de la « consultation publique » ; l’une des dernières étapes de l’élaboration de cette recommandation avant la délibération du Collège de la HAS. « La HAS met ainsi en œuvre une réflexion concertée permettant d’établir un processus d’élaboration de recommandation vaccinale associant rigueur scientifique, transparence et concertation avec l’ensemble des acteurs de la vaccination » dit la HAS qui ne craint pas de vanter son travail. .

 Au travers de cette consultation publique, la HAS souhaite : recueillir l’expression des avis, y compris divergents, sur le projet de recommandation ; confronter les réflexions des experts réunis par la HAS aux opinions et aux pratiques des patients, usagers ou professionnels ; apprécier la lisibilité de la recommandation.

A qui s’adresse la consultation publique ? La démocratie sanitaire a ses limites :

« Tous les acteurs concernés par la politique vaccinale sont invités à donner leur avis : associations agréées ou non de patients et d’usagers du système de santé, collèges nationaux professionnels et sociétés savantes, institutions publiques, agences sanitaires, syndicats, industriels, centres de vaccination (centres de protection maternelle et infantile, centres de vaccination) et autres structures de santé publique, … »

« Un seul avis par organisme, association ou institution est attendu et sera pris en compte. Les particuliers ne peuvent pas répondre à titre individuel et sont donc invités à se rapprocher de leurs organisations associatives ou professionnelles. Tous les avis recueillis serviront à aboutir à la version finale de la recommandation. La consultation publique se déroule du 30 octobre 2019 au 27 novembre 2019. Les réponses ne seront pas prises en compte si elles parviennent à la HAS après la date limite du 27 novembre 2019. »

Démocratie ? A dire vrai tout indique que les jeux sont déjà faits. La HAS appuie ainsi sa recommandation sur des arguments médicaux, soulignant que « les premières données disponibles sont en faveur d’une possible efficacité des vaccins dans la prévention des cancers de la sphère ORL ». Mais elle soulève aussi le fait que « la vaccination contre les HPV limitée aux filles et aux HSH pose des questions d’éthique, d’égalité d’accès à la vaccination et de stigmatisation liée à l’orientation sexuelle et au non-respect de la vie privée ».

Les coûts en santé des infections aux HPV en France représentent plus de 500 millions d’euros par an, insistait  l’Académie de médecine dans un rapport publié fin septembre et  déplorant que la vaccination des filles – inférieure à 20 % –, soit « la plus basse d’Europe ». 

Où l’on en vient à cette interrogation : quand Agnès Buzyn imposera-t-elle la vaccination de toutes les petites filles et de tous les petits garçons ? Pourquoi, en d’autres termes en rester à la recommandation quand on impose, déjà, onze vaccinations ? La HAS répondra-t-elle à cette question essentielle ? Si tel ne devait pas être le cas, on attendra les explications de la ministre des Solidarités et de la Santé.

A demain @jynau

1 Sur ce thème : Nau J-Y : « Papillomavirus et vaccination : l’heure a-t-elle sonne pour les garçons ? » Rev Med Suisse 2019; volume 15. 406-407

Accouchement et transparence: à quand la liste des maternités françaises «malveillantes» ?

Bonjour

La quête de la transparence et la volonté de classement sont désormais sans limites. Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) n’est pas épargné. Il vient, rapporte l’AFP, de présenter un nouveau « label » : il sera attribué aux maternités «qui s’engagent à mettre la bienveillance au centre» de leurs activités et «qui acceptent la transparence» sur leurs pratiques.

Cette initiative, dont le projet avait été annoncé fin 2017, est l’une des réponses de la profession aux récentes, récurrentes et troublantes accusations de «violences obstétricales», gestes médicaux « inappropriés » ou « pratiqués sans consentement » – accusations qui s’étaient multipliées sur les réseaux sociaux et dans différents médias généralistes.   

Les maternités labellisées «CNGOF» s’engagent à respecter douze critères (possibilité pour les patientes de «vivre un accouchement démédicalisé» en l’absence de facteur de risque ; amélioration de l’information des femmes enceintes ;  transparence sur les taux d’épisiotomie, d’accouchements déclenchés et de césariennes etc). Le mécanisme a été expliqué pat le Pr Israël Nisand, président du CNGOF au cours d’une conférence de presse. L’évaluation du respect de ces critères ? Elle sera en partie confiée «aux femmes elles-mêmes», avec un questionnaire «trois jours, puis trois mois après leur accouchement».

Appel politique à Agnès Buzyn et à Marlène Schiappa.

 «Nous sommes la première spécialité médicale à procéder ainsi et chaque établissement labellisé disposera d’un précieux baromètre de qualité», souligne le Collège. Une soixantaine d’établissements ont d’ores et déjà demandé à en bénéficier et une dizaine sont déjà labellisés de façon provisoire – sur la base de leurs statistiques d’activité actuelles et de leur engagement à respecter cette démarche de «bientraitance». Par la suite le respect des critères sera ensuite vérifié tous les ans pour prolonger ou retirer le label.

Mieux encore : l’amélioration de l’information des patientes s’appuie sur le site internet Maternys (vidéos thématiques et infographies en 3D illustrant le suivi de la grossesse, le déroulement de l’accouchement et la prise en charge post-natale) – son coût (5 euros par patiente) sera pris en charge par les maternités labellisées. Cette plateforme servira également de support pour recueillir la satisfaction des femmes sur leur suivi de grossesse et le déroulement de leur accouchement.

Pour mieux diffuser cet outil, le Pr Nisand demande publiquement un « soutien politique » à la ministre de la Santé Agnès Buzyn et à la secrétaire d’Etat à l’Egalité entre les femmes et les hommes Marlène Schiappa. Il semble d’ores et déjà acquis que cette dernière répondra.

A demain @jynau

 

Ethique et argent : faut-il interdire à tout prix les banques privées de cellules sexuelles ?

Bonjour

Comment comprendre ? Car c’est bien là, de fait, l’une de ces « discriminations » contre lesquelles la loi de la « PMA pour toutes » cherche à lutter. Au lendemain de l’adoption en première lecture par l’Assemblée nationale du projet de loi relatif à la bioéthique, le CCP (Collectif de Centres Privés en AMP) dénonce un manquement à l’équité : aux termes de la future loi ces centres ne pourraient pas pratiquer l’autoconservation des spermatozoïdes et des ovocytes.

« Voilà un quart de siècle que les praticiens libéraux, prennent en charge des couples infertiles, les conseillent et mettent en œuvre les techniques les plus élaborées d’aide à la procréation, jusqu’à l’autoconservation des ovocytes lorsque le contexte clinique le demande, fait valoi le CCP. Cette activité médicale est des plus encadrée. Tous les centres de PMA, publics comme privés, sont soumis à une même démarche qualité, très exigeante, mise en place depuis de nombreuses années, à une même Certification ISO, et aux mêmes visites d’inspections de l’ARS. »

Les Centres privés de Procréation Médicalement Assistée sont (comme leurs homologues publics) tenus de soumettre régulièrement leurs résultats à l’évaluation de l’Agence de Biomédecine. Rien ne distingue les acteurs de PMA sous statut public ou privé, ni le niveau d’expertise professionnelle, ni le dispositif réglementaire qui encadre leur exercice. Dès lors pourquoi cette discrimination dénoncée par le Pr Israël Nisand et le Collège des Gynécologues Obstétriciens Français (CNGOF) ?  

En marche vers des « contrées plus accueillantes » 

« Les débats parlementaires ont, hélas, vu resurgir chez certains élus, de vieux stéréotypes marqués d’un dogmatisme archaïque qui voudrait que l’exercice honnête de la médecine soit l’apanage exclusif d’un secteur public immaculé et nimbé de toutes les vertus » souligne le CCP. Le législateur souhaiterait ainsi confier l’exclusivité de la pratique de l’auto-conservation des gamètes aux laboratoires publics « afin d’éviter la naissance d’un marché des gamètes ouvert aux appétits financiers des praticiens libéraux ». Une accusation de carence éthique pour rappeler que « les spermatozoïdes et les ovocytes ne sont pas des marchandises comme les autres ».  

Questions de ces libéraux en colère : Qu’en sera-t-il demain pour celles qui souhaiteront recourir à une auto-conservation de leurs ovocytes ? Pourront-elles choisir librement leurs praticiens et le lieu de leur prise en charge ? « La réponse est évidemment négative, expliquent-ils. Interdire aux praticiens libéraux de pratiquer l’auto-conservation des gamètes signifiera un report de toute la patientèle vers un nombre nécessairement limité de structures d’accueil avec, pour effet induit, une ségrégation d’accès aux soins selon l’origine géographique des patients. »

On assistera ainsi rapidement, selon eux, à un allongement des délais de prise en charge « qui conduira nombre de patientes (parmi les plus fortunées) à reprendre la route vers des contrées plus accueillantes » (sic). « Le législateur dans sa volonté d’ouvrir un droit à une PMA pour tous va édicter une loi contre-productive qui refuse implicitement aux patientes l’exercice du libre choix de leur médecin, conclut le CCP. Plus encore, cette loi agira contre leur intérêt puisque, en interdisant aux centres privés de prendre en charge l’auto-conservation des gamètes, elle réduira leur chance de voir aboutir leur projet parental. »

Le secteur public français de la PMA est-il « immaculé et nimbé de toutes les vertus » ? Qu’en est-il du « secteur privé » ? Quelles sont donc ces « contrées plus accueillantes » évoquées par le secteur privé français ? Et, plus encore, quels seront les prix (qui seront à la charge des patient.e.s) pratiqués par le public ? Et quels seraient ceux, s’ils le pouvaient, des banques privées ?

A demain @jynau