«Violences conjugales» : fallait-il vraiment faire une nouvelle exception au secret médical ?

Bonjour

22/07/2020. Un vote que l’on aurait jadis qualifié de soviétique. Unanimité absolue, trop belle pour ne pas interroger. Dans un dernier votre au Sénat, le Parlement a adopté définitivement, mardi 22 juillet, la proposition de loi destinée à mieux « protéger les victimes de violences conjugales »– et ce en introduisant notamment une exception au secret médical en cas de « danger immédiat ». Déjà approuvée la semaine dernière par l’Assemblée nationale ce texte de loi autorise dorénavant le médecin ou tout autre professionnel de santé à déroger au secret professionnel – et ce lorsqu’il « estime en conscience » que les violences mettent la vie de la victime « en danger immédiat » et qu’il y a situation d’emprise.

Contexte 1 : cette loi  constitue le deuxième volet législatif, en quelques mois, d’un arsenal ouvertement offensif et qui a fait l’objet d’un accord sans difficultés majeures entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire (quand bien même des élus comme des associations souhaiteraient aller plus loin). Il fait suite au «  Grenelle des violences conjugales » piloté à l’automne 2019 par Marlène Schiappa, alors secrétaire d’Etat à l’égalité femmes-hommes et à la lutte contre les discriminations.

Le texte alourdit d’autre part les peines en cas de harcèlement au sein du couple, les portant à dix ans d’emprisonnement lorsque le harcèlement a conduit la victime à se suicider ou à tenter de se suicider. Il réprime la géolocalisation d’une personne sans son consentement et crée une circonstance aggravante en cas de violation du secret des correspondances par un conjoint ou ex-conjoint, pour mieux lutter contre les « cyberviolences conjugales ».

Contexte 2 : cette adoption définitive du 2e volet législatif s’inscrit dans un contexte polémique après la double nomination comme ministre de l’Intérieur de Gérald Darmanin, visé par une plainte pour viol 1, et d’Eric Dupond-Moretti, très critique envers le mouvement #metoo, à la justice. C’est ainsi que dans la « bronca des féministes », la sénatrice PS Laurence Rossignol (ex-ministre des droits des femmes) a dénoncé « une grande claque lancée à toutes les femmes et à toutes les victimes de violences sexuelles et sexistes ». Cette « claque » sera-t-elle suivie de plaintes ?

Y avait-il un danger à modifier les dispositions relatives au secret médical et à sa possible levée ? Etrangement l’Ordre des médecins ne le pense pas qui a donné son feu vert au Parlement. Pour autant il faut sur ce sujet lire la tribune publiée (un peu tard) dans Le Monde et signé par Anne-Marie Curat, présidente du Conseil national de l’Ordre des sages-femmes : « Violences conjugales : ‘’Lever le secret médical sans accord contribuerait à la perte d’autonomie de la patiente’’ ». « Cette mesure, prévue pour les cas d’emprise et de danger immédiat, revient à positionner le soignant en sauveur alors qu’il doit éclairer le consentement de la victime » dénonce-t-elle.

« Rompre le lien de confiance et ne pas respecter le choix des femmes »

Sur le constat, aucune divergence :  les violences conjugales sont un fléau. Chaque année, en France, plus de 120 femmes meurent sous les coups de leurs conjoints. La lutte contre les violences conjugales est une question sociétale et de santé publique qui appelle une réponse politique cohérente. Et la place des professionnels de santé est déterminante au quotidien pour dépister et accompagner ces femmes.

« Mais peuvent-ils agir à leur place, interroge Mme Curat. Cette question est essentielle : elle définit la relation de soin et l’autonomie des femmes. Or, la proposition de loi visant à protéger les victimes de violences conjugalesremet en cause cet équilibre fragile. ‘’Il n’y a pas de soins sans confidences, de confidences sans confiance, de confiance sans secret’’, affirme Bernard Hœrni, professeur émérite de cancérologie à l’université de Bordeaux et auteur de plusieurs ouvrages sur l’éthique médicale. »

Faudrait-il encore rappeler que le secret médical est un droit fondamental « pour les patients », et un fondement essentiel du soin qui permet d’établir la confiance entre le patient et le professionnel de santé ? Et que sa levée (aujourd’hui strictement définie) doit donc absolument rester strictement encadrée et limitée.

« La relation patient-soignant doit être équilibrée et fondée sur la confiance. Le professionnel de santé ne doit pas décider pour le patient en omniscient, mais éclairer le consentement du patient et le conseiller sans jugement, écrit encore Mme Curat. Laloi Kouchner du 4 mars 2002, sur ce sujet, a été une avancée majeure. Ne retombons pas dans un modèle paternaliste du soin. Maintenir le secret médical est essentiel pour que les femmes puissent continuer à se confier aux soignants, mais aussi à consulter les professionnels de santé. »

Mme Curat le dit autrement : « Lever le secret médical en cas de violences conjugales sans accord de la patiente, c’est donc rompre le lien de confiance et ne pas respecter le choix des femmes. C’est considérer la femme comme incapable et positionner le soignant en sauveur. Une telle mesure contribue à la perte d’estime de soi et d’autonomie de la femme, alors que c’est notamment là l’objectif de l’homme violent. »

De plus la levée du secret médical sans le consentement peut être dangereuse : aujourd’hui, après un signalement effectué au procureur, si la femme nie les faits, le dossier est classé. Cette dernière se retrouve ainsi sans protection, tandis que l’auteur des violences est, lui, alerté et pourra se retourner contre la femme. C’est pourquoi le Conseil national de l’ordre des sages-femmes s’opposait à la proposition de loi actuellement étudiée au Sénatde lever le secret médical « en cas d’emprise et de danger immédiat ».  Le Parlement, nourri de clichés et de bonnes intentions, en a décidé autrement. Au grand bénéfice des hommes devenus (pourquoi ?) violents…

A demain @jynau

1 Sur ce thème on lira non sans délectation un échange journalistique d’une violence toute masculine : « Je ne soutiens pas Monsieur Darmanin, quoi qu’en écrive Monsieur Schneidermann » de Claude Askolovitch (Slate.fr,  21 juillet 2020) – mais seulement après avoir pris connaissance de « Gérald Darmanin et ses soutiens » de Daniel Schneidermann (Libération 19 juillet 2020).

Circulation et politique: cinq enfants meurent ; limitation à 80 km/h toujours en question

Bonjour

21/07/2020. La fatalité et la politique entremêlées dans deux dépêches de l’AFP. Un accident de la circulation d’une particulière gravité a frappé, lundi 20 juillet au soir, sur l’A7, neuf membres d’une même famille. Leur monospace a pris feu avant d’effectuer une sortie de route dans le département de la Drôme, provoquant la mort de cinq enfants de 3 à 14 ans qui se trouvaient à bord.

Les quatre autres passagers, trois adultes et un enfant âgé de 7 ans, ont été transférés à l’hôpital, a précisé à la presse le procureur de Valence Alex Perrin, précisant que le pronostic vital était engagé pour l’enfant et deux adultes. Toutes les victimes appartiennent à une même famille originaire de Vénissieux, dans la banlieue lyonnaise.

C’était en début de soirée à hauteur d’Albon, dans le sens Sud-Nord. Selon le procureur, le monospace prévu pour sept personnes, de type « Renault Grand Scénic » (prévu pour accueillir sept personnes), a « manifestement » pris feu, le conducteur en a perdu le contrôle et il est « parti en tonneaux ». Les corps des cinq enfants décédés ont été « brûlés à un niveau important », ce qui complique leur identification, a ajouté M. Perrin. Avant de perdre connaissance, le conducteur aurait déclaré à des témoins avoir rencontré un problème de freinage, a précisé le procureur de Valence.

Affaire politique. Les ministres de l’intérieur, Gérald Darmanin et des transports, Jean-Baptiste Djebbari se sont rendus sur place après minuit. « Cinq enfants décédés dans des conditions particulièrement atroces et un enfant qui lutte pour la vie en ce moment même, on pense à ces familles particulièrement endeuillées », a commenté M. Darmanin lors d’un bref point de presse. C’est par milliers que l’on compte les morts sur les routes, particulièrement en période estivale, il faut donc encourager les Françaises et les Français à faire attention, singulièrement lorsqu’ils ont des enfants à bord. » « Je partage la douleur immense des proches des victimes. Mes pensées accompagnent aussi les blessés et tous ceux mobilisés à leurs côtés », a tweeté  le président Emmanuel Macron.

« Je ne sais pas s’il y a eu défaillance humaine ou mécanique. Mais neuf personnes se sont entassées dans un véhicule de sept places. Pour cette erreur, cinq gosses ont payé le prix fort. La vie de leurs parents est détruite. Malgré tous les messages de prévention, la mort sur la route reste encore un cauchemar quotidien », a regretté Jehanne Collard, avocate spécialisée dans la défense des victimes de la circulation routière.

Le courage politique d’Edouard Philippe

Le nombre de personnes tuées sur les routes a baissé de 29,1 % en juin, en France métropolitaine, selon les chiffres de la Sécurité routière publiés lundi 20 juillet dans un contexte de reprise limitée des déplacements, notamment des trajets professionnels, à la sortie du confinement imposé par la pandémie

Et puis cette autre information datée au 28 février dernier afin de ne pas être perturbée par la crise sanitaire, l’estimation. L’abaissement de la limitation de vitesse à 80 km/h sur le réseau secondaire a permis d’épargner 349 vies hors agglomération et hors autoroute en France métropolitaine depuis son entrée en vigueur le 1er juillet 2018, par rapport à la moyenne des années 2013 à 2017. Chiffres donnés le lundi 20 juillet par la nouvelle déléguée interministérielle à la Sécurité routière (DISR) Marie Gautier-Melleray. 

La DISR a écarté pour le moment tout rehaussement de cette limitation de la vitesse, indiquant que la mesure avait « démontré son efficacité ». Interrogée lors d’un point-presse sur le fait de savoir si, dès lors, les 80 km/h étaient définitivement entérinés, la DISR a répondu qu’il ne lui « appartenait pas de (se) prononcer sur l’avenir » et que « la mesure (figurait) dans le Code de la route ». Les départements ont toutefois, depuis fin décembre 2019, la possibilité de repasser à la limitation à 90km/h.

L’estimation du nombre de vies épargnées grâce à cette réforme est issue du rapport rendu par le Cerema (Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement), qui avait été missionné par le Premier ministre d’alors, Edouard Philippe, pour effectuer une évaluation au bout de deux ans.

Selon le Cerema, le passage à 80 km/h a par ailleurs fait perdre aux conducteurs en moyenne une seconde par kilomètre sur un trajet quotidien, et la mesure est désormais bien plus acceptée qu’il y a deux ans : 48% des Français y sont favorables (30% en avril 2018), et 20% tout à fait opposés (39,8%).

« On est dans une tendance qu’on avait déjà pu observer pour d’autres mesures très emblématiques de la Sécurité routière, où dans un premier temps il y a une résistance à ce qui est perçu comme étant une atteinte à une liberté. Et le temps passant on se rend compte que finalement la contrainte n’était pas aussi élevée que ce qu’on avait craint (…) », a commenté Marie Gautier-Melleray, en référence au port obligatoire de la ceinture ou au permis à points.

Edouard Philippe avait ici, fait preuve d’un incontestable courage politique au service de la réduction des risques. On attend ce qui décidera, sur le sujet, Jean Castex, autopromu héraut des « territoires ».

A demain @jynau

Ouverture d’une enquête historique de police judiciaire sur la gestion de la crise sanitaire

Bonjour

09/06/2020. C’est sans précédent dans ce qu’il est convenu d’appeler les « affaires (scandales) sanitaires ». Le procureur de Paris, Rémy Heitz, a annoncé à l’Agence France-Presse l’ouverture lundi 8 juin d’une vaste « enquête préliminaire » sur la gestion critiquée de la crise du Covid-19 en France. Elle vise principalement les délits de « mise en danger de la vie d’autrui », d’« homicides et blessures involontaires » et de « non-assistance à personne en péril ».

Sans précédent car dans toutes les affaires précédentes plusieurs années séparaient les faits des premières enquêtes de police judiciaire. Or ici l’enquête préliminaire est ouverte alors même que la crise dont la gestion est visée n’est pas, loin s’en faut, terminée. Cette enquête est une première réponse judiciaire à une quarantaine de plaintes reçues par le parquet de Paris pendant le confinement. Elles ont été déposées par des proches de victimes, des organisations professionnelles ou encore, dans une « démarche pétitionnaire », via des plaintes-types publiées sur le site internet plaintecovid.fr

L’AFP précise que ces plaintes contre X ciblent parfois nommément des responsables de l’administration, notamment l’actuel Directeur général de la santé, le Pr Jérôme Salomon, ou encore Santé publique France. Sont également visés l’administration pénitentiaire et le ministère du travail. Les investigations seront confiées à l’Office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique (Oclaesp). Elles portent sur les principaux griefs et accusations émis depuis le début de l’épidémie : protection au travail, mise à disposition de masques et de tests, etc. Les Ehpad ne sont pas concernés.

Mettre au jour d’éventuelles infractions pénales 

Attention : « Cette enquête n’est pas là pour définir des responsabilités politiques ou administratives, a expliqué Rémy Heitz,  mais pour mettre au jour d’éventuelles infractions pénales de décideurs nationaux. » A l’exception du chef de l’Etat (irresponsable pénalement) et des membres du gouvernement – dont la responsabilité relève de la Cour de la justice de la République saisie de quatre-vingts plaintes et, peut-être, d’une supplémentaire 1.

Déjà le procureur prévient les citoyens de la suite probable de l’affaire. « S’il y a des fautes pénales, ce seront très probablement – c’est une hypothèse – des fautes non intentionnelles. Or la loi fixe des conditions précises pour établir ces délits : elle exige la preuve d’une “faute qualifiée” qui n’est pas une simple imprudence ou négligence », a détaillé le procureur. Selon lui regrouper ces enquêtes permettra  d’établir un fonds documentaire commun sur l’état des connaissances scientifiques. « Pour ce type d’infractions, le code pénal dit bien qu’il faut apprécier les responsabilités [des décideurs] au regard des moyens et des connaissances dont ils disposaient au moment des décisions », a-t-il souligné.

Le procureur de Paris anticipe d’ores et déjà un travail « considérable », dans une « situation historique » puisque « c’est la première fois que des plaintes sont déposées alors que la crise bat son plein ». Le procureur ne dit pas si son travail, considérable, en sera facilité.

A demain @jynau

1 Le Quotidien du Médecin (Marie Foult) annonce que quarante médecins libéraux et hospitaliers s’apprêtent à porter plainte devant la Cour de justice de la République contre l’ancienne et l’actuel ministre de la Santé, Agnès Buzyn et Olivier Véran, le Premier ministre Édouard Philippe et le directeur général de la Santé, Jérôme Salomon. Distribution des masques, des tests, du matériel, des médicaments indispensables, mais aussi « ingérence » et « injonctions » de l’État… : cette action en justice reprend plusieurs arguments développés dans une tribune publiée fin mars, intitulée « Le gouvernement fait-il vraiment la guerre au coronavirus ? », signée par plus d’une centaine de médecins. Qualifiée « d’exceptionnelle » par ses auteurs, la plainte sera déposée d’ici à la fin de semaine pour « abus de droit » contre les ministres concernés mais aussi « abstention volontaire de combattre un sinistre, homicide involontaire » et « mise en danger délibérée de la vie d’autrui » (contre le DGS).

Le cou sous le genou d’un policier pendant 8’ 46’’: mais de quoi George Flyod est-il mort ?

Bonjour

02/06/2020. Un effet connexe de la pandémie ? Les Etats-Unis et quelques capitales dans le monde s’embrasent après la mort filmée de George Floyd, Afro-Américain de 46 ans, il y a une semaine à Minneapolis. Les conclusions de l’autopsie officielle, lundi 1er juin font suite à une étude indépendante et établissent que la victime est morte asphyxiée en raison d’une «pression exercée sur son cou». On apprend dans le même temps que George Flyod présentait des traces de fentanyl et de méthamphétamine. Quel rapport avec les causes premières de la mort ?

Résumons : George Floyd, 46 ans, est mort le 27 mai à Minneapolis après qu’un policier blanc a plaqué son genou sur son cou pendant 8 minutes et 46 secondes – selon les éléments de la plainte criminelle contre l’agent impliqué.

La première autopsie officielle (avant l’indépendante)  concluait que Georges Floyd n’était pas mort de strangulation ou par asphyxie, mais du fait de sa contention au sol, « combinée avec ses problèmes de santé et une intoxication potentielle. » Floyd était atteint d’une pathologie cardiovasculaire. Les premières conclusions indiquaient qu’aucune constatation physique ne permet d’étayer un diagnostic d’asphyxie ou d’étranglement traumatique.

« Homicide involontaire avec circonstances atténuantes »

Puis une autopsie indépendante était arrivée à la conclusion d’une « mort par asphyxie » en raison d’une «pression forte et prolongée», selon l’avocat de la famille de la victime. «Des médecins indépendants ayant mené une autopsie sur M. Floyd ont conclu que le décès avait résulté d’une asphyxie par pression prolongée», a déclaré l’avocat, Ben Crump. Cette pression prolongée «sur son cou a coupé le flot sanguin allant vers son cerveau et la pression sur son dos a entravé sa capacité à gonfler ses poumons».

«Les preuves soutiennent l’asphyxie comme cause du décès et l’homicide comme circonstance de la mort», vient de souligner  lors d’une conférence de presse le Dr Allecia Wilson, médecin légiste de l’université du Michigan, qui a pu examiner le corps de la victime.

«L’effet combiné de l’arrestation et de l’immobilisation de M. Floyd par la police, ses antécédents médicaux et la présence potentielle de substance psychoactive dans son corps ont probablement contribué à sa mort», indiquent les résultats de l’autopsie officielle des autorités locales. L’ancien policier Derek Chauvin, 44 ans, a été arrêté et inculpé «d’homicide involontaire». Il devait comparaître lundi devant un tribunal, mais cette première audience a été reportée au 8 juin.

S’oriente-t-on vers un « homicide involontaire avec circonstance atténuantes » ? Ce serait là un parfait condensé, en somme, de l’Amérique de Donald Trump.

A demain @jynau

C’est voté: on peut traiter des données de santé sans le consentement de l’intéressé

Bonjour

09/05/2020. C’est fait : l’article 6 du projet de loi prorogeant l’état d’urgence sanitaire vient d’être adopté en commission mixte paritaire (CMP) – composée de sept députés et sept sénateurs. Objet, on le sait : la création d’un système d’information pour identifier les personnes infectées par le coronavirus et leurs contacts. Avec, en toile de fond, toutes craintes relatives à la violation du secret médical et aux atteintes à la vie privée.

Le texte finalement élaboré prévoit que « des données à caractère personnel 1 concernant la santé relatives aux personnes atteintes par ce virus et aux personnes ayant été en contact avec elles peuvent être traitées et partagées, le cas échéant sans le consentement des personnes intéressées, dans le cadre d’un système d’information créé par décret en Conseil d’Etat et mis en œuvre par le ministre chargé de la santé ».

Ces mesures dérogatoires s’appliqueront, au maximum, pour une durée de six mois « à compter de la fin de l’état d’urgence sanitaire ». Les données ne pourront quant à elles être conservées plus de trois mois après leur collecte. La mise en œuvre de ce système est partagée entre le ministre de la santé, Santé publique France, l’Assurance-maladie et les Agences régionales de santé. « Un décret en Conseil d’Etat précisera les droits d’accès, d’information, d’opposition et de rectification des personnes concernées, atteintes par le virus ou en contact avec ces dernières, lorsque leurs données personnelles ont été collectées » précise Le Monde (Patrick Roger).

Point important : les données d’identification des « personnes infectées » ne peuvent être communiquées, sauf accord exprès, aux « personnes ayant été en contact avec elles » … On imagine les dilemmes.

« Le service de santé des armées, les communautés professionnelles territoriales de santé, les établissements de santé, sociaux et médico‑sociaux, les maisons de santé, les centres de santé, les services de santé au travail, les médecins prenant en charge les personnes concernées, les pharmaciens ainsi que les laboratoires et services autorisés à réaliser les examens de biologie ou d’imagerie médicale participent à la mise en œuvre de ces systèmes d’information et peuvent avoir accès aux seules données nécessaires à leur intervention » ajoute Le Monde.

De même les organismes qui assurent l’accompagnement social des intéressés dans le cadre de la lutte contre la propagation de l’épidémie peuvent également recevoir les données strictement nécessaires à l’exercice de leur mission. Toutes les personnes ayant accès à ces données sont soumises au « secret professionnel ». On attend les commentaires éthiques du Conseil national de l’Ordre des médecins.

A demain @jynau

1 Données portant « uniquement » (sic) sur le statut virologique et le diagnostic

Coronavirus: vingt cas français en 24 heures, l’OMS exhorte le monde entier à «endiguer»

Bonjour

27/02/2020. Désormais chaque messe télévisée du 20 heures est longuement consacrée à l’épi-pandémie. Aujourd’hui la prévision matinale d’Emmanuel Macron dans le temple de la Pitié-Salpêtrière s’est réalisée. Quelques heures plus tard Olivier Véran, ministre de la Santé révélait que trente-huit cas de Covid-19 avaient été diagnostiqués en France – soit vingt nouveaux patients positifs repérés en 24 heures. Cela représente une «augmentation sensible du nombre de cas», a indiqué le ministre qui se refuse toujours à parler d’«épidémie ».

Douze des nouveaux cas ont été diagnostiqués dans le département de l’Oise – dont trois dans une base militaire de Creil. Parmi ces nouveaux cas, deux personnes «âgées» sont hospitalisées dans un état grave. Elles revenaient d’un voyage en groupe en Egypte. Plusieurs investigations « toujours en cours » sont « susceptibles de faire évoluer ce bilan », a ajouté le ministre. Sur les trente-huit cas identifiés, douze patients ont guéris, deux sont décédés et vingt-quatre sont hospitalisés. L’identification des chaînes de transmission est toujours en cours. « L’objectif est de remonter au patient 0, c’est une enquête lourde, qui va nous prendre plusieurs jours ».

Quelques heures plus tôt le directeur général de l’OMS a estimé que l’épidémie avait atteint un « point décisif ». Il appele les pays à agir « rapidement » pour « endiguer ce virus très dangereux ». La Chine était jusqu’à peu l’unique foyer de coronavirus. Mais la propagation géographique du virus s’est considérablement accrue avec l’émergence de nouveaux « pays sources », comme la Corée du Sud, l’Italie et l’Iran. Désormais, le nombre de nouveaux cas quotidiens de Covid-19 enregistrés hors du territoire chinois (plus de 3 470 dans 44 pays) dépasse ceux recensés en Chine (plus de 78 600 personnes contaminées, dont plus de 2 700 sont mortes), où le virus est apparu en décembre.

Tout s’inverse. Pékin, qui confine plus de cinquante millions de personnes dans la province du Hubei, épicentre de l’épidémie, s’inquiète désormais de cas « importés » d’autres pays. Le régime communiste a ainsi été annoncé que les personnes arrivant en provenance d’Etats « gravement touchés » par le coronavirus devraient désormais se placer en quarantaine pendant quatorze jours. Au cours des dernières vingt-quatre heures, sept pays, dont le Brésil et la Norvège, ont enregistré un premier cas. Les digues vont-elle lâcher ?

A Paris un nouveau point presse se tiendra, juste avant les messes du 20 heures.

A demain @jynau

Urgent-DGS

« Au 27 février 2020, 18 cas ont été confirmés sur le territoire national. Il n’y a pas de chaine de transmission active en France. La stratégie de réponse mise en œuvre au niveau national vise à freiner l’introduction et la propagation du virus sur le territoire. Elle implique pour cela la détection et la prise en charge précoce des cas et des personnes contacts. Les évolutions épidémiologiques constatées concernant l’émergence du nouveau coronavirus Covid-19 ont conduit Santé publique France à élaborer une nouvelle définition des cas : https://www.santepubliquefrance.fr/media/files/01-maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/definition-de-cas-26-02-20

Outre l’actualisation des zones géographiques (Iran et région italienne d’Émilie-Romagne), la définition des cas a évolué en incluant toute personne présentant des signes de syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) pour laquelle aucune étiologie n’a pu être identifiée, sans notion de voyage/séjour dans une zone d’exposition à risque ou de contact étroit avec un cas confirmé de COVID-19. Par ailleurs la définition d’un contact étroit inclut désormais tout contact à partir de 24 heures précédant l’apparition des symptômes d’un cas confirmé de COVID-19.

Il est rappelé à tout professionnel de santé prenant en charge un patient suspect d’infection COVID-19 de prendre contact avec le Samu-Centre 15 pour analyse, classement en lien avec l’infectiologue référent et mise en place des premières mesures de prise en charge. En cas de difficulté de classement, le Samu-Centre 15 pourra se rapprocher de l’ARS qui mobilisera en tant que de besoin l’expertise de Santé publique France.

Vous trouverez sur le site internet du ministère plusieurs documents utiles, dont des informations concernant les voyageurs de retour des zones d’exposition à risque: https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/coronavirus/article/informations-voyageurs-coronavirus« 

Suite à la mort de l’infirmière poignardée, le cri du «Printemps de la psychiatrie»

Bonjour

14 février 2020. Depuis l’aube les médias généralistes bruissent à l’unisson des ravages politiques induits par des « vidéos-intimes-à-caractère-sexuel-postées-sur-les réseaux-sociaux » 1. On trouve néanmoins quelques échos de la mort, le 13 février,  d’une infirmière, âgée de 30 ans mortellement poignardée à l’arme blanche par un patient d’une unité psychiatrique à Thouars, dans les Deux-Sèvres. Cette infirmière, mère de deux enfants, a été agressée par un patient, âgé de 20 ans, qui cherchait à quitter cette unité psychiatrique du Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres. Il lui a porté un coup de couteau au thorax, manquant de blesser également une autre infirmière. Héliportée au CHU de Poitiers, la jeune femme est morte peu après.

Il y a quelques heures Le Monde renvoyait à « La psychiatrie ‘’au bord de l’implosion’’ en France » (18 septembre 2019). Il faut aussi, désormais, compter avec un texte du « Printemps de la psychiatrie » 2. Un exercice difficile puisque ses auteurs reconnaissent ne pas avoit les détails de l’enchaînement des faits, sur l’effectif du service, sur les conditions d’hospitalisation, sur l’état clinique de ce patient, sur l’état de saturation du service de l’hôpital … ce qui « les invite à la prudence ».

Pour autant ce texte (nous soulignons):

« Cette situation est inacceptable. Il est inacceptable qu’une professionnelle de santé meurt dans l’exercice de ses fonctions. Il est inacceptable qu’une personne hospitalisée pour des soins recourt à un tel acte de violence. Il est également inacceptable que toute cette horreur se produisent dans le climat de destruction de l’hôpital public et de la psychiatrie publique en particulier (…)

« Ce que nous savons, de manière générale, c’est que depuis 2008 l’augmentation des moyens en psychiatrie finance exclusivement du sécuritaire (chambres d’isolement, caméras de surveillance, renforcement de la hauteur des murs…). Aucun investissement dans des moyens humains n’a été fait sauf à créer des unités pour malades difficiles et des unités d’hospitalisation spécialement aménagées (UHSA) pour les détenus.

«  Douze ans plus tard, après des mois de lutte, les soignants sont toujours dans la rue pour dénoncer la honte quotidienne dans l’exercice de leur travail, l’indignité des conditions d’accueil et de soins des patients, les tensions régnantes à l’hôpital tant avec l’administration, entre collègues, avec les usagers etc.

«  Depuis plus d’une dizaine d’années, les rapports du contrôleur général des lieux de privation de liberté indiquent la déshumanisation globale qui règne dans la psychiatrie publique, le sous-effectif, le manque de formation, les maltraitances ordinaires…

« Quand allons-nous arrêter ces politiques criminelles qui sont un terrain propice à ce que le pire surgisse ? Politiques de santé qui non seulement n’arrangent rien mais aggravent encore plus la situation et sa brutalité. »

Sanctuaire couvert par la dissuasion nucléaire

S’ils ne savent rien des causes précises du drame deThouars, il connaissent bien, en revanche,  « la catastrophe qui sévit dans l’hôpital public dans son ensemble et dans les secteurs de psychiatrie en particulier ».  « Nous vivons au quotidien des drames : des personnes qui se suicident, des professionnels en burn-out, des usagers attachés et enfermés quand ils ne sont pas mis à la rue faute de structures ambulatoires, des familles qui ne sont pas entendues ni écoutées… »

Ils observent encore, depuis leur spécialité, que « la violence de la société s’infiltre dans tous les espaces de la société » et que « le monde du soin n’y échappe pas ».

Pour que des drames de la sorte ne puissent pas se répéter facilement, il faudrait, selon eux, « pouvoir prendre le temps de soigner, prendre le temps d’écouter et d’apaiser, avoir le temps de se soigner, créer un climat de confiance entre toutes les personnes présentes dans les lieux de soins… ». Il faudrait, au minimum, « sanctuariser les secteurs du lien humain et d’arrêter d’appliquer des logiques comptables, gestionnaires et déshumanisants qui renforcent toujours plus le terreau favorable au pire ».

Comment traduit-on, dans la novlangue managériale de l’hôpital décrite par le Pr Stéphane Velut 3 , le terme « sanctuariser » (Donner à un territoire le caractère d’un sanctuaire couvert par la dissuasion nucléaire) ?

A demain @jynau

1 Une affaire sordide autant que tristement éclairante quant au poids des « réseaux sociaux » dans le champ politique – une affaire dans laquelle réapparaît l’omniprésent et toujours inquiétant Dr Laurent Alexandre.

2 Voir ici le texte et les signataires du  manifeste « Pour un renouveau des soins psychiques »

3 Velut S,  L’hôpital une nouvelle industrie. Le langage comme symptôme  Editions Gallimard. Collection Tracts. 3,90 euros

Hypnovel® et fin de vie: Agnès Buzyn osera-t-elle en finir avec l’hypocrisie nationale ?

Bonjour

C’est une nouvelle étape dans la maîtrise raisonnée des pratiques médicales dites « de fin de vie ». Une étape à laquelle les médias seraient restés insensibles sans l’affaire qui voit deux médecins normands interdits d’exercice et poursuivis par la justice. Une affaire qui a suscité un mouvement sans précédent au sein du corps des médecins généralistes 1. Un mouvement mené, non sans courage, par le Dr Jean-Paul Hamon, président de la Fédération des médecins de France via une pétition de soutien.

Dans ce texte, les signataires reconnaissent avoir elles et eux aussi, «au cours de leur vie professionnelle, accompagné des patients en fin de vie pour les aider à partir dignement sans souffrance, parfois au prix d’entorses aux règlements en cours».

Document à forte teneur politique

Cette nouvelle étape, majeure, a aujourd’hui la forme d’un simple communiqué de presse de la Haute Autorité de Santé (HAS) : « Patient en fin de vie hospitalisé ou à domicile : quels médicaments et comment les utiliser ? ». C’est là une « recommandation sur les modalités d’utilisation des médicaments – y compris hors AMM – nécessaires pour accompagner les patients en fin de vie par une sédation ». Que cette sédation soit « proportionnée, profonde, transitoire ou maintenue jusqu’au décès ».

C’est aussi et surtout un document à forte teneur politique puisque la HAS « demande aux pouvoirs publics, sur la base de cette recommandation, de permettre la dispensation effective de ces médicaments aux médecins qui prennent en charge des patients en fin de vie à leur domicile ». On peut le dire autrement : la HAS demande à Agnès Buzyn, ministre des Solidarités et de la Santé (qui présida cette même HAS) de modifier la réglementation pharmaceutique pour permettre aux médecins généralistes de pouvoir utiliser le midazolam (Hypnovel®) dans le cadre d’un processus de sédation terminale. Une révolution.
 

« Tous les médecins sont confrontés à l’accompagnement de patients en fin de vie, dont beaucoup demandent à pouvoir rester chez eux, reconnaît (enfin) la HAS. Ce sont toujours des situations singulières et complexes. » Dans le contexte de mise en œuvre de la loi Clayes-Leonetti du 2 février 2016 créant un droit à la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès, la HAS a réfléchi : comment aider les professionnels de santé à prendre en charge ces patients dans les conditions les plus humaines et les moins douloureuses possibles. Elle a ainsi publié, en 2018, le guide parcours de soins « Comment mettre en œuvre une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès ? ». Il s’agissait de « proposer des outils pour aider à la décision et à la mise en œuvre de cette sédation ». On y « évoquait » l’ensemble des médicaments utilisables en fin de vie pour réaliser une sédation profonde et continue, maintenue jusqu’au décès.

Désert médicamenteux français

Poursuite pragmatique du travail. Où l’on apprend qu’aucun médicament en France n’a aujourd’hui d’AMM pour la sédation profonde, continue et maintenue jusqu’au décès. Corollaire : les médicaments qui peuvent être utilisés sont hors AMM. Conséquence : aucune information n’est disponible sur leurs modalités d’utilisation dans cette situation.

Recommandations pratiques de la HAS : « Le midazolam injectable – qui dispose en France d’une AMM pour les anesthésies – est le médicament de première intention pour la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès. S’il s’avère non-adapté à la situation ou au patient, viennent en seconde intention la chlorpromazine et la lévomépromazine (des antipsychotiques). » Dans la recommandation les posologies et modalités d’administration de ces médicaments sont détaillées pour une utilisation en ville comme à l’hôpital. L’objectif est de guider les professionnels de santé en réponse à la demande des patients et de leurs familles de pouvoir choisir de mourir chez soi.

Une précision de taille toutefois : la HAS rappelle que, conformément à la réglementation, la mise en place d’une sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès doit impérativement reposer sur une décision collégiale, quel que soit le lieu de prise en charge.

Et une question politique de première importance : Agnès Buzyn osera-t-elle (aura-t-elle l’autorisation de) modifier la réglementation pharmaceutique pour permettre désormais à tous les médecins, de ville comme hospitaliers, de mettre en place une sédation proportionnée ou profonde et continue comme le prévoit désormais la loi ?

A demain @jynau

1 Lire « Les généralistes veulent assumer leur rôle dans l’aide médicale à mourir » Slate.fr (20 janvier 2020)

Affaire Vincent Lambert : comme annoncé, son médecin aura été relaxé. Clap de fin ?

Bonjour

Le tribunal correctionnel de Reims (Marne) a, le 28 janvier, relaxé le Dr Vincent Sanchez (CHU de Reims). Ce dernier était poursuivi pour « non assistance à personne en danger » par les parents de Vincent Lambert , décédé le 11 juillet 2019 – à la suite de la décision du Dr Sanchez de procéder à l’arrêt de la nutrition et des soins qui étaient prodigués à son patient depuis onze ans.

Le tribunal de Reims a (sans surprise) totalement suivi les réquisitions du procureur. Comme lui, il estime que le chef du service de soins palliatifs et de l’unité des cérébrolésés du CHU de Reims a « parfaitement respecté ses obligations légales ». Selon le tribunal, la procédure collégiale qui a amené à l’arrêt des soins prodigués à Vincent Lambert n’a pas porté atteinte à l’intégrité du patient qui était dans le coma (état pauci-relationnel) depuis 2008.

Le tribunal a observé par ailleurs (point souligné par l’AFP) que l’action des parents de Vincent Lambert n’avait pas d’autres « motifs que de s’opposer à la loi Leonetti-Claeys [créant de nouveaux droits en faveur des malades et des personnes en fin de vie] ». Où l’on voit les frontières devant exister, en démocratie, entre le pouvoir judiciaire et le pouvoir législatif.

Clap de fin ? Rien n’est certain. « Il est très probable que nous relèverons appel de cette décision », a déclaré Me Jean Paillot, l’un des avocats de Viviane et Pierre Lambert , à l’issue de l’audience. 

A demain @jynau

Cannabis au volant : les tests de dépistage actuels sont-ils fiables ou contestables ?

Bonjour

Fumer ou conduire ? Pourquoi choisir ?Voici ce qu’on peut lire sur Slate.fr (Robert Tutenge) : « Avec l’alcootest, c’est facile. Vous avez trop bu, vous vous risquez à prendre le volant, vous êtes arrêté·e, vous soufflez dans le ballon, vous êtes dans de beaux draps. Quand il s’agit de cannabis, c’est tout de suite plus compliqué ». Un sujet pré-traité par CNN (Alicia Wallace). On y apprend que la légalisation croissante du cannabis sur le sol des Etats-Unis ne change rien au fait que sa consommation – au même titre que certaines quantités d’alcool – est incompatible avec la conduite d’un véhicule.  

« Mais à l’heure actuelle, aucun outil ne permet à la police de mesurer de façon fiable si la personne est complètement stone et dans l’incapacité de conduire. Certes, il est tout à fait possible de savoir si quelqu’un a consommé du cannabis dans les jours précédents, ce qui n’est pas illégal dans ces États. Il est en revanche difficile de savoir si on a fumé un pétard il y a une heure ou dans la journée, ce qui affectera de façon complètement différente les performances motrices. C’est là qu’est toute la nuance. »

« Start-ups, scientifiques et universitaires se succèdent pour être en première ligne à proposer ce qui pourrait ressembler à un alcootest du cannabis, qui mesurerait l’état de défonce. Quand certain·es cherchent à développer une application sur smartphone pour tester si les facultés sont affaiblies par cette consommation récente, d’autres imaginent utiliser la réalité virtuelle pour mettre en place un test de sobriété basé sur l’analyse des mouvements oculaires. Mais au vu des dernières recherches, on se rapprocherait plutôt d’un testeur qui passerait au crible les minuscules particules de THC dans l’haleine, où elles peuvent être présentes pendant deux à trois heures. C’est le cas de l’appareil inventé par Hound Labs, une société en passe de créer le premier alcootest à alcool et THC. »

Et selon CNN, des scientifiques américain·es appelleraient à ce que ces technologies ne détectent pas seulement si la personne est positive à la marijuana, mais également si elle est en état, ou non, de prendre le volant. Ils font observer qu’au sein du corps humain le THC ne se comporte pas comme l’alcool. «Sous l’influence du cannabis, les signes (yeux rouges, pouls élevé, etc.) ne sont pas nécessairement la preuve d’une déficience, expliquait David Randall Peterman, analyste des transports du Service de recherche du Congrès, dans un rapport de mai 2019 sur la consommation de cannabis et la conduite. Sur la base des connaissances actuelles, il n’est pas possible de déterminer un taux limite de marijuana correspondant à la capacité d’une personne à prendre le volant.»

Tests urinaires, tests sanguins, voire tests sur les cheveux

Et en France ? Pour tout savoir des tests et des pratiques on se reportera au éclairages et précisions du Dr Marie-Thérèse Giorgio : « Conduite de véhicule et consommation de cannabis ou autres stupéfiants ». Un arrêté du 13 décembre 2016 : il fixe les modalités du dépistage des substances témoignant de l’usage de stupéfiants, et des analyses et examens prévus par le code de la route. Les techniques de dépistage des stupétiants chez les conducteurs sont désormais les mêmes conditions de dépistage que pour l’alcool, mais lors du contrôle on ne donne pas de taux en bord de route pour les stupéfiants puisque par définition le taux doit être négatif, la consommation de stupéfiants étant purement et simplement interdite en France.

Ce dépistage est soit salivaire, soit urinaire (par un médecin). Il doit nécessairement être confirmé soit à partir d’un prélèvement salivaire (c’est ce qui se pratique le plus souvent, le test est envoyé au labo et confirme ou non la présence de stupéfiant) soit à partir prélèvement sanguin (réalisé par un médecin). Le contrevenant peut demander une contre-expertise dans le sang : il dispose de cinq  jours pour demander cette contre-expertise et donc ce prélèvement sanguin.

Usager suivi pendant deux ans

Seuils minima de détection que doivent respecter les tests utilisés. Recueil salivaire : 9-tétrahydrocannabinol (THC) : 15 ng/ml de salive. Recueil urinaire : acide carboxylique du tétrahydrocannabinol (9 THCCOOH) : 50 ng/ml d’urine ;

Quid de la visite à la commission médicale des permis suite à la conduite sous l’emprise de cannabis ? Suivant les cas, le permis de conduire est suspendu ou annulé : une visite médicale à la commission médicale des permis de la préfecture est nécessaire ( la visite médicale ne peut pas être réalisée auprès d’un médecin agréé pour les permis de conduire qui exerce hors commission). La réglementation prévoit un suivi par la commission médicale des permis de conduire pendant deux ans, comme le prévoit l’arrêté du 21 décembre 2005 (modifié à plusieurs reprises).

L’usager ayant commis une infraction bénéficie ainsi d’un suivi pendant deux ans par la commission médicale des permis de conduire de la préfecture. Les médecins des commissions médicales ont à disposition des tests salivaires qui peuvent être réalisés lors de la visite médicale, ils demandent également des examens complémentaires à réaliser en laboratoire (tests urinaires, tests sanguins, voire tests capillaires). Contestable ?

A demain @jynau