L’urgentiste de Vire est condamné à dix mois de prison: son jeune patient s’était suicidé

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Lu dans La Manche Libre du 22 janvier 2020 : « Un homme de 55 ans a été jugé pour non-assistance à personne en danger. Urgentiste à l’époque, il n’avait pas pris assez rapidement le patient suicidaire en charge. Le jeune homme s’est effectivement suicidé dans la nuit sans que sa fuite du centre hospitalier ne soit signalée.

Dans la nuit du 18 au 19 octobre 2012, un homme se présente aux urgences de l’hôpital de Vire, en faisant part de ses envies suicidaires. Le médecin urgentiste de garde choisit néanmoins de finir de remplir ses dossiers administratifs en cours. Lorsqu’il veut s’en occuper, le patient est parti de l’hôpital sans que sa fuite soit signalée à qui de droit. Il se suicidera en sautant sur les voies ferrées au passage d’un train. Le 17 décembre 2019, le tribunal correctionnel de Caen a traité cette affaire de non-assistance à personne en danger, et l’a mise en délibéré au 16 janvier 2020.

L’ancien urgentiste de 55 ans écope de dix mois de prison avec sursis, peine qui ne figurera pas sur son casier judiciaire B2. »

Il y a un an on pouvait retrouver l’hôpital de Vire dans La Voix-le-bocage : « Une page se tourne à l’hôpital de Vire Normandie. Cette fois, les choses sont claires, Vire Normandie (Calvados) n’a plus d’hôpital général. C’est la filière gériatrique qui va notamment se développer. » Un an plus tard, à lire son annuaire, il ne semble pas que ce soit vraiment le cas.

A demain @jynau

Christophe Castaner va-t-il en finir avec la pratique du plaquage ventral? (#JusticePourCédric)

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#JusticePourCédric. C’est une affaire de notre temps, édifiante. Un fait divers devenu en quelques jours une affaire majeure, l’affaire Cédric Chouviat, développée sur Wikipédia. Une affaire et une question : « Comment peut-on mourir d’asphyxie post-fracture du larynx après un contrôle de police ? ». Le parquet de Paris  a ouvert une information judiciaire pour « homicide involontaire ». Les proches de Cédric Chouviat seront reçus mardi par le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner. Ce dernier a estimé que les premiers éléments de l’enquête interrogeaient « gravement ».  Jusqu’au Défenseur des droits, Jacques Toubon, qui a annoncé « se saisir d’office et ouvrir une enquête ». 

Une semaine après sa mort à l’hôpital européen Georges-Pompidou, plusieurs centaines de personnes se sont rassemblées, dimanche 12 janvier à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine) en hommage à Cédric Chouviat. « Proches et anonymes, rose blanche à la main pour beaucoup, tee-shirts blancs ‘’Justice pour Cédric’’ pour certains, sont partis de la place de l’hôtel de ville pour une marche dans Levallois, ville dont il était originaire, rapporte l’Agence France Presse. Les marcheurs se sont rassemblés derrière la femme et les enfants de Cédric Chouviat. Ce dernier, père de famille de 42 ans travaillant comme livreur, a été victime d’un malaise cardiaque le 3 janvier aux abords de la tour Eiffel après avoir été plaqué au sol, casque sur la tête, par plusieurs policiers lors d’un contrôle routier tendu. »

Vidéos à l’appui (elles ont joué un rôle essentiel) la famille de Cécric Chouviat dénonce une « bavure policière » causée par des techniques d’interpellation « dangereuses » et réclame une requalification des faits en « violences volontaires ayant entraîné la mort », un crime passible des assises.

La nouvelle étape est d’ores et déjà connue. Tribune dans Le Journal du Dimanche : « Il faut interdire le plaquage ventral aux forces de l’ordre » signée de Me Yassine Bouzrou, avocat « engagée dans les affaires médiatisées ».

« Le décès de Cédric Chouviat, le 5 janvier, a remis sur le devant de la scène la question de la légitimité de certaines méthodes employées dans le cadre du maintien de l’ordre, et plus particulièrement la pratique du décubitus ventral, plus communément appelé le plaquage ventral, écrit-il. Ce procédé, consistant à maintenir au sol un individu considéré comme agité afin de le calmer et de faciliter son interpellation, est décrié après chaque drame. Les indignations et les beaux discours se sont à chaque fois succédé, mais rien n’a changé : le plaquage ventral est toujours autorisé et l’exécutif maintient sa posture. »

Interdite en Suisse, en Belgique, à New York et Los Angeles

En raison des risques inhérents à cette technique, plusieurs pays l’ont interdite, comme la Suisse et la Belgique – de même que les polices de New York et de Los Angeles. En France cette pratique, encadrée,  reste légale. Selon une note de la Direction générale de la police nationale elle « doit être la plus momentanée possible et relâchée dès que la personne est entravée par les moyens réglementaires ». « C’est une technique enseignée en école de police et qui fait partie de la formation continue pour pouvoir maîtriser une personne », a expliqué  à L’Express Pascal Jakowlew, secrétaire national « Investigation et Renseignement du syndicat Alternative Police-CFDT. » « Par contre, lorsque le plaquage au sol est fait, on ne doit pas se poser de tout son poids sur la partie haute du corps, car cela pourrait bloquer les poumons et provoquer l’asphyxie », précise-t-il. 

Pour sa part Me Bouzrou rappelle qu’interrogé il y a quelques jours Christophe Castaner affirmait que, s’il était démontré que le plaquage ventral (décubitus ventral, mise à plat ventre) était à l’origine de décès, la question de son autorisation serait étudiée. « Loin d’annoncer enfin ce qui est réclamé depuis plus de dix ans, le ministre de l’Intérieur soumet à condition l’introspection et l’examen des pratiques utilisées par ses effectifs, ajoute-t-il. Faisant fi des condamnations de la France par la Cour européenne des droits de l’homme, il confirme ainsi une inaction constante et une volonté assumée et maintenue de durcir les pratiques de maintien de l’ordre, au détriment des droits et libertés et en dépit du cadre légal. »

Le concept de réduction des risques est-il compatible avec le ministre en charge de la police ? On peut certes, comme dans le cas des armes LBD, évoquer l’efficacité de la méthode. Mais qui, demain osera parler d’efficacité lorsque, à la suite d’un simple contrôle routier, un plaquage ventral aura, une nouvelle fois, conduit à un décès ?

A demain @jynau

Le malade avait «fugué» de l’hôpital de Béziers. Un squelette retrouvé quinze mois après

Bonjour

Quand l’étrange le dispute à l’insupportable. Information signée Guilhem Richaud dans le Midi Libre. Information révélée par le parquet de Béziers. Où l’on apprend que dans la matinée du samadi 11 janvier les policiers biterrois ont été appelés pour intervenir sur le parking de l’hôpital, à La Devèze. Alors que des ouvriers intervenaient pour retirer une épaisse haie végétale, ils venait de mettre au jour un squelette humain « dissimulé dans une épaisse haie végétale ».

« Le procureur de la République de Béziers, la chef de la brigade de sûreté urbaine du commissariat de Béziers et le directeur du centre hospitalier se sont rapidement rendus sur place, en même temps qu’un médecin légiste de l’institut médico-légal de Montpellier » rapporte le quotidien régional.

Cold case

Et très rapidement les éléments trouvés sur place ont permis de faire un « rapprochement hautement probable » avec un homme né en 1965 et porté disparu depuis le 25 octobre 2018. Ce jour là il avait quitté, dès l’aube, un service où il était traité pour une « maladie grave ». À l’époque, l’hôpital avait signalé une « fugue » et une enquête avait été ouverte par le commissariat de Béziers pour une « disparition inquiétante ».

Or cet homme n’avait pas pu être localisé. Puis ’enquête avait été classée sans suite le 17 juin 2019. Et on avait oublié. Samedi 11 janvier 2020 Raphaël Balland, procureur de la République de Béziers, a confié l’enquête à la brigade de sûreté urbaine du commissariat de Béziers. « Il s’agira de connaître les causes de la mort de la victime, précise le Midi Libre. Une autopsie est programmée le mardi 14 janvier et des investigations complémentaires permettront probablement de confirmer l’identité du défunt dans les prochains jours. »

Et ensuite ? Faudra-t-il identifier les responsables, ou pencher pour la fatalité ?

A demain

Rebondissement vidéo dans l’affaire de Cédric C., 42 ans mort après un contrôle de police

Bonjour

Mourez, vous êtes filmé. Nous rapportions il y a peu l’affaire Cédric C. décédé à Paris dans la nuit de samedi 4 à dimanche 5 janvier, à la suite d’un « malaise cardiaque survenu lors d’un contrôle policier »  angle Suffren/Branly – annonce faire par l’avocat mandaté par sa famille : Me Arié Alimi.

Rappel : Vendredi 3 janvier, dans la matinée, roulant à scooter et téléphone à la main, ce père de cinq enfants est interpellé à l’angle de l’avenue de Suffren et du quai Branly. Selon BFMTV, qui cite des « sources policières », l’homme se serait alors montré «irrespectueux et agressif». « Nos confrères du Parisien évoquent, eux, des insultes et un policier repoussant le pilote, qui tentait de filmer son interpellation, rapportait Le Figaro.  C’est lorsque les policiers tentent de l’arrêter qu’ils se rendent compte que le visage de l’homme est ‘’bleu’’». Est-ce bien la vérité ?

Victime d’un malaise cardiaque, l’homme est pris en charge par les policiers, puis par les pompiers, avant d’être conduit à l’hôpital européen George Pompidou. Placé sous respirateur, il est finalement décédé dans la nuit, aux alentours de 3h30. «Il est probable que le cerveau de Cédric n’ait pas été suffisamment oxygéné pendant quelques minutes, a détaillé Me Alimi au Parisien, ce qui ouvre plusieurs hypothèses, comme un plaquage ventral, ou une clé d’étranglement. Nous avons toutes les raisons de croire, en tout cas, qu’il ne s’agit pas d’un arrêt cardiaque spontané, mais provoqué. L’autopsie qui va être pratiquée nous permettra d’en savoir plus, et notamment si les policiers sont à l’origine de ce drame. Cédric souffrait certes d’hypertension artérielle, mais il n’avait jamais eu le moindre malaise cardiaque de quelque nature que ce soit.»

  « Un appel à témoin citoyen »,

Mardi 7 janvier, rebondissement sur le site du Monde (Nicolas Chapuis) qui diffuse de troublantes images vidéos :

« Les images, filmées au smartphone, sont un peu lointaines, tremblotantes, mais elles éclairent d’un jour nouveau les circonstances de la mort de Cédric Chouviat. Diffusées depuis le siège de la Ligue des droits de l’homme par les avocats de la famille, elles donnent à voir les conditions très musclées dans lesquelles s’est déroulé, vendredi 3 janvier, à l’angle du quai Branly et de l’avenue de Suffren, à Paris, le contrôle routier au cours duquel l’homme de 42 ans a fait un malaise cardiaque. (…) Pour les avocats de la famille Chouviat, Me Arié Alimi, Me William Bourdon et Me Vincent Brengarth, les autorités ont tenté par leur communication de dissimuler une partie des faits, en niant tout lien de cause à effet entre la technique d’interpellation et le malaise cardiaque. »

Selon la Préfecture de police de Paris, les fonctionnaires ont contrôlé le conducteur de la moto parce qu’il téléphonait. Celui-ci se serait montré « irrespectueux et agressif », et aurait insulté l’équipage au moment où il partait. Les agents auraient alors procédé à l’interpellation pour outrage, à laquelle M. Chouviat aurait résisté, avant de faire un malaise cardiaque.

Le Monde commente : sur une première vidéo obtenue par les avocats à la suite d’« un appel à témoin citoyen », on voit d’abord Cédric Chouviat filmant de près les policiers, qui le repoussent. Sur une  deuxième vidéo, on aperçoit de loin plusieurs policiers en train de maîtriser l’homme au sol, avec la technique dite du « plaquage ventral », qui consiste à porter son poids sur le torse de l’individu. « Les jambes de Cédric Chouviat, en pantalon gris, s’agitent en vain, écrit Nicolas Chapuis. L’homme qui a filmé la scène assure, selon les avocats, que les policiers ont également pratiqué une clé d’étranglement. Enfin, sur une dernière séquence tournée une vingtaine de minutes plus tard, on aperçoit les policiers en train de prodiguer un massage cardiaque à la victime.

Pour le père de Cédric Chouviat, Christian, cité par Le Monde il s’agit d’un meurtre, ni plus ni moins, couvert par « un tissu de mensonges » : « Est-ce qu’on a le droit de faire ça ? Le mec, il se lève à 6 heures du matin, été comme hiver. Il va travailler, et d’un coup on a décidé de lui couper le sifflet. Ce sont des assassins. Il y a trois assassins. Je veux aller au jugement, je veux qu’ils ne dorment plus, ces gens-là ! »

De plus la famille accuse : elle estime que l’homme, coursier de profession et propriétaire d’un casque avec micro intégré, ne pouvait se servir de son téléphone au moment de l’interpellation. Sa femme assure que la première version que lui ont donnée les policiers parlait d’un contrôle routier à cause d’une plaque d’immatriculation sale. Et Cédric Chouviat ne souffrait par ailleurs d’aucune « insuffisance cardiaque connue » et avait été autorisé médicalement à pratiquer le sport dix mois auparavant. On évoquait toutefois l’existence d’une « hypertension artérielle ». Le rapport médical lu à la famille mentionne quant à lui « un arrêt cardiaque ».

Et maintenant ? Les avocats de la famille ont déposé lundi 6 janvier une plainte avec constitution de partie civile pour violences volontaires ayant entraîné la mort, afin d’obtenir l’ouverture d’une information judiciaire, confiée à un juge d’instruction. Selon eux, la justice a entre les mains plusieurs éléments qui pourraient permettre de faire rapidement la lumière sur l’ensemble des faits. Deux caméras de vidéosurveillance disposées sur le carrefour couvrent cette zone. Par ailleurs, M. Chouviat a lui-même filmé toute la scène avec son smartphone, actuellement placé sous scellés. Contactée par Le Monde, la Préfecture de police s’en est tenue à sa version initiale. Quant au parquet de Paris, il devait communiquer les suites judiciaires à donner à cette affaire dans le courant de la journée.

Attendons les suites.

A demain @jynau

Suicide d’une directrice d’école à Pantin : l’Education nationale reconnue responsable?

Bonjour

En matière de suicide des officiants la sphère scolaire est-elle équivalente à l’hospitalière ? La responsabilité de l’administration a été reconnue dans le suicide de Christine Renon, directrice d’école de Seine-Saint-Denis qui avait dénoncé dans une lettre ses conditions de travail avant de se donner la mort. Le 23 septembre dernier, son corps avait été retrouvé dans le hall de son école maternelle de Pantin. Dans un courrier adressé (deux jours avant son suicide) à de multiples destinataires, cette femme de 58 ans mettait en cause l’Education nationale et ses conditions de travail, détaillant «son épuisement», la solitude des directeurs, ou encore les réformes incessantes et contradictoires.

On apprend aujourd’hui, via un communiqué du Snuipp-FSU (premier syndicat du primaire) en Seine-Saint-Denis, que la direction des services départementaux de l’Education nationale avait reconnu, dans un courrier adressé à sa famille le 11 décembre, «l’imputabilité au service» pour son décès. «Cela veut dire que l’administration est reconnue responsable du décès de Christine Renon», a expliqué à l’AFP Marie-Hélène Plard, co-secrétaire départementale du syndicat. Tout ce qu’elle a dénoncé est reconnu: c’est la dégradation de ses conditions de travail qui l’ont poussée à mettre fin à ses jours. C’est extrêmement important pour les collègues et ça va nous permettre de nous battre pour que réellement on ait une amélioration».

Interrogé, le ministère de l’Education minimise : il a affirmé à l’AFP qu’il s’agissait d’une «décision coutumière de l’administration dans ce genre de circonstances, car elle permet d’assurer une protection maximale aux ayant-droits».

L’AFP ajoute que le rapport d’une enquête administrative de l’inspection générale de l’Education nationale, lancée après le suicide, doit être publié dans les prochain jours qui viennent. Selon une source proche de l’enquête, il semblerait que ce rapport ne retienne «pas uniquement à la responsabilité de l’employeur» mais qu’il  établisse «un faisceau de motifs» pour expliquer le suicide de Mme Renon.

Attendons.

A demain @jynau

Mediator® et larmes de crocodile : voici donc Servier sur un nouveau banc des accusés

Bonjour

Etranges cristallisation du temps, étranges aveuglements. Nous rapportions hier, grâce au mensuel Prescrire, les écrits prophétiques (1978) du Dr Henri Pradal quant à la nocivité potentielle de l’anorexigène devenu tristement célèbre. Quarante-deux ans plus tard voici une vague d’indignation émanant de sept associations d’usagers, de patients et de victimes du même Mediator® 1 – des associations participant au conseil d’orientation de l’ONIAM (Office national d’indemnisation des accidents médicaux).

Motif de cette indignation : la découverte d’un courrier adressé le 18 octobre 2019 par les avocats des Laboratoire Servier au directeur de l’ONIAM. Explications :

« Dans ce document, le laboratoire Servier conteste vigoureusement les outils d’évaluation du déficit fonctionnel des victimes du Mediator® opérées à cœur ouvert, établis par le collège d’experts Mediator®, fort de son expérience de plus de 9000 dossiers expertisés. Ces outils, actualisés à partir du barème indicatif du concours médical datant de 2003, et adaptés à cette situation hors norme de dommage sériel, sont indispensables pour éclairer l’examen au cas par cas des irréversibles conséquences découlant des blessures cardiaques causées par le Mediator et guider des prises de décisions harmonisées et cohérentes.

« Comble du cynisme, Servier estime notamment que les victimes ayant subi une chirurgie cardiaque, consistant en l’amputation des valves cardiaques remplacées par des prothèses palliatives, devraient se satisfaire de cette « réparation » et revoir leurs prétentions indemnitaires à la baisse ! Or, ces actes de chirurgie à cœur ouvert ne s’imposent que lorsque la vie du malade est en jeu à court terme car ils entrainent un handicap lourd et définitif pour ceux qui survivent à cette opération à haut risque. »

Pour ces sept associations, l’audition des souffrances des victimes du Mediator®, exprimées à l’audience depuis le 21 novembre dernier, constitue « un choc émotionnel ». « Beaucoup de ces victimes ont également témoigné de la violence procédurière de Servier dans le traitement de leurs demandes indemnitaires, ajoutent-elles.Or la négation de leurs souffrances ne fait que les aggraver. »

Entre contrition et empathie

Comment comprendre ? On avait imaginé une once de regret, un début de contrition sinon d’empathie. Le PDG de Servier, Olivier Laureau, avait publiquement réitéré, à l’ouverture du procès pénal historique du Mediator® le 23 septembre 2019, les regrets « sincères » de la firme vis-à-vis des personnes souffrant cruellement des conséquences d’une intoxication au Mediator et réaffirmé sa volonté d’indemnisation des victimes. Et la presse se souvient que les pugnaces avocats de Servier avaient présenté, lors des audiences du procès pénal,  les excuses du laboratoire  aux victimes, en concédant même leur caractère « très insuffisant ».

« Ce sont en réalité des larmes de crocodile qui sont versées tandis que, parallèlement à la tenue du procès, se poursuivent sans relâche contestations, minimisations et insinuations diverses de la part de la firme face aux demandes légitimes de réparation formulées par des milliers de victimes de ce coupe-faim mortel, maquillé en anodin adjuvant du diabète, observent les associations. Il est inacceptable que ces victimes doivent encore se battre pour juste se faire respecter lors de ces démarches. »

Ces associations, présentes aux côtés, tiennent à « faire connaître leur révolte face au double langage du laboratoire Servier et de ses dirigeants ». Elles espèrent que le procès pénal en cours « permettra de mettre enfin un terme à un déni sans fin ».

Comment les victimes du Mediator® pourraient-elles entendre des excuses verbales démenties par des actes ? Et comment comprendre la logique qui anime les dirigeants de cette firme ? Faudrait-il en conclure, ici et à cette heure, que jamais ces dirigeants ne parviendront à s’expliquer à la fois publiquement et sincèrement ?

A demain @jynau

1 Signataires : France Assos Santé, CADUS, HTaPFrance, AVIM, AAAVAM, Le Lien, UFC-Que Choisir

Pourquoi mourir, à 42 ans, peu après un contrôle de police avenue de Suffren /quai Branly ?

Bonjour

Il avait 42 ans. Cédric C. est décédé dans la nuit de samedi 4 à dimanche 5 janvier, à la suite d’un « malaise cardiaque survenu lors d’un contrôle policier » – annonce faire par l’avocat mandaté par sa famille : Me Arié Alimi. L’IGPN avait déjà annoncé ouvrir une enquête pour déterminer les circonstances du malaise survenu lors de son arrestation.

Que sait-on des faites ? Vendredi 3 janvier, dans la matinée, Paris. Roulant à scooter et téléphone à la main, ce père de cinq enfants aurait été interpellé à l’angle de l’avenue de Suffren et du quai Branly. Selon BFMTV, qui cite des sources policières, l’homme se serait alors montré «irrespectueux et agressif». « Nos confrères du Parisien évoquent, eux, des insultes et un policier repoussant le pilote, qui tentait de filmer son interpellation, rapporte Le Figaro.  C’est lorsque les policiers tentent de l’arrêter qu’ils se rendent compte que le visage de l’homme est ‘’bleu’’».

Plaquage ventral ou clé d’étranglement

« Victime d’un malaise cardiaque, l’homme est pris en charge par les policiers, puis par les pompiers, avant d’être conduit à l’hôpital George Pompidou. Placé sous respirateur, il est finalement décédé dans la nuit, aux alentours de 3h30 » a affirmé Me Arié Alimi sur Twitter. La veille, l’avocat avait lancé un appel à témoin sur le réseau social.

 «Il est probable que le cerveau de Cédric n’ait pas été suffisamment oxygéné pendant quelques minutes, a détaillé Me Alimi au Parisien, ce qui ouvre plusieurs hypothèses, comme un plaquage ventral, ou une clé d’étranglement. Nous avons toutes les raisons de croire, en tout cas, qu’il ne s’agit pas d’un arrêt cardiaque spontané, mais provoqué. L’autopsie qui va être pratiquée nous permettra d’en savoir plus, et notamment si les policiers sont à l’origine de ce drame. Cédric souffrait certes d’hypertension artérielle, mais il n’avait jamais eu le moindre malaise cardiaque de quelque nature que ce soit.»

Et ensuite ? En fonction des réponses à l’appel à témoins, la famille envisage de porter plainte pour «violences volontaires par personne dépositaire de l’autorité publique en réunion ayant entraîné la mort sans intention de la donner». Sans attendre les conclusions de la médecine légale ?

A demain @jynau

Alerter pour sauver les «bébés secoués» : l’affaire alimente une polémique sans précédent

Bonjour

On n’attaque pas sans risque la Haute Autorité de Santé (HAS). Il y a deux ans cette institution réactualisait ses recommandations pour lutter au mieux contre le syndrome du « bébé secoué » 1 : « Diagnostiquer les cas de bébé secoué et poursuivre la mobilisation contre les maltraitances infantiles ».

« Responsable de lésions cérébrales graves, parfois fatales, le syndrome du bébé secoué (SBS) survient lorsqu’un adulte secoue un bébé par exaspération ou épuisement face à des pleurs qu’il ne supporte plus. En raison de son démarrage précoce et de son caractère répétitif, le SBS constitue une des maltraitances infantiles les plus graves. Chaque année, plusieurs centaines d’enfants en sont victimes en France. Il touche en majorité des nourrissons, garçons, de moins de 1 an et le plus souvent de moins de 6 mois. Ne pas diagnostiquer cette maltraitance expose à un risque majeur de récidive et à des séquelles sévères à vie ou au décès. »

Ce syndrome est la principale cause de mortalité et de morbidité au cours de la maltraitance du jeune enfant. En l’absence d’observatoire national, l’incidence en France est estimée « à plusieurs centaines de cas » – et entre 14 et 56 cas pour 100 000 enfants de moins de douze mois/an selon les études étrangères.

Puis on apprenait, il y a quelques jours, qu’un avocat, Me Grégoire Etrillard, et une association de familles, Adikia (« Nos bébé sont malades, nous risquons la prison ») , avaient écrit à la Haute Autorité de santé (HAS) pour demander l’abrogation des recommandations relatives à ce « traumatisme cranio-cérébral non accidentel ». « Il est urgent que ces recommandations, beaucoup trop affirmatives, et sur certains points fausses, soient abrogées », résumait Me Etrillard, lors d’un point presse tenu le 2 décembre à Paris – propos rapportés par Le Monde (Sandrine Cabut). Dans son argumentaire de vingt-cinq pages, l’avocat, qui défend une cinquantaine de familles « faussement accusées », arguait que « les excessives certitudes exprimées par ces recommandations ont envahi la sphère judiciaire au point d’en être régulièrement le fondement unique ». Or, poursuivait-il, les conséquences sont dramatiques puisque cela aboutit, « à cause d’un diagnostic présenté comme “certain” et que nul ne peut remettre en cause, au placement d’enfants, à la séparation d’avec la famille et à la condamnation d’innocents à de lourdes peines ».

Emeline Hautcœur, vice-présidente de l’association Adikia, qui représente trois cents familles : « Ce sont des vies brisées, des couples qui se séparent, des personnes qui ont tenté de mettre fin à leurs jours. C’est un enfer, on apprend à vivre avec, mais on ne s’en remet pas ».

« Un diagnostic de secouement qui serait devenu trop systématique »

Le Monde rappellait aussi que le SBS (sujet très sensible en raison de sa gravité potentielle, et du contexte de protection de l’enfance) est au cœur d’une controverse scientifique qui dépasse largement la France. « Au Royaume-Uni, aux Etats-Unis, au Canada, ou encore en Suède, des médecins et des publications remettent en question la façon dont est porté le diagnostic de secouement, qui serait devenu trop systématique, sans tenir compte d’autres cause possibles des lésions observées.

Dans son courrier envoyé à la présidente de la HAS, Me Etrillard soulignait que les recommandations sur le SBS sortent de la compétence de cette autorité. « Présentées comme étant adressées aux praticiens dans le cadre de leur démarche de soins, elles sont en réalité une injonction de signalement et un manuel d’expertise à destination du monde judiciaire », écrit-il. L’avocat estime aussi que les recommandations « se montrent affirmatives sur de nombreux sujets non démontrés ou controversés, ne présentant ainsi pas les gages d’impartialité attendus d’une telle publication sur le plan scientifique ». Il souligne au passage qu’elles ont été éditées « par un groupe de travail dont ni la présidente ni les chargés de projet ne sont spécialistes en neurologie pédiatrique ».

Le Monde citait encore le Dr Jean-Claude Mselati, pédiatre, réanimateur, et expert agréé par la Cour de cassation. « Ces recommandations de la HAS s’appuient sur une large bibliographie, mais celle-ci est assez malhonnête, car elle occulte quasiment toute la littérature scientifique qui ne va pas dans le sens des rédacteurs, accusait-il.  Aujourd’hui, tout nourrisson avec un peu de sang autour du cerveau est considéré comme secoué par la dernière personne qui était avec lui quand les symptômes sont apparus. Il n’y a plus aucune réflexion ni nuance ».

Contester les recommandations c’est se tromper de sujet

Sollicitée par Le Monde, la HAS expliquait qu’elle allait se donner le temps d’étudier le document. Elle avait deux mois pour réagir à la demande d’abrogation. A défaut, Me Etrillard et l’association Adikia prévoyaient de porter le dossier devant le Conseil d’Etat.

Quinze jours auront suffit. Aujourd’hui la HAS publie une « mise au point » dont le ton en dit long sur l’irritation qui est la sienne : « La HAS réaffirme l’importance de sa recommandation sur le diagnostic de syndrome du bébé secoué. MISE AU POINT – Mis en ligne le 19 déc. 2019 ». Extraits (nous soulignons) :

« Interpellée sur sa recommandation sur le diagnostic du syndrome du bébé secoué, la HAS réaffirme, avec l’ensemble des organisations professionnelles et associations de patients qui ont été mobilisées pour les élaborer 2, l’importance de ses travaux et le rôle essentiel des professionnels de santé dans le repérage, le diagnostic et la prévention de ces maltraitances à enfant. Elles refusent de laisser sans réaction la mise en cause de la compétence et de la probité scientifique de leurs experts. (…)

« Aujourd’hui, avec l’ensemble des sociétés savantes et associations qui ont mené ce travail sur le syndrome du bébé secoué, la HAS tient à souligner la qualité de cette recommandation alors qu’elle fait l’objet de contestations de la compétence voire d’une remise en cause inacceptable de la probité scientifique des membres du groupe du travail. »

 Pour la HAS, tout bien pesé les choses sont assez simples : contester les recommandations c’est se tromper de sujet. On ne s’attaque pas impunément à la Haute Autorité de Santé.

A demain @jynau

1 Sur ce thème : Nau J.-Y. Au cœur des cerveaux des « bébés secoués » Rev Med Suisse 2019; volume 15. 1198-1199

2 Cette « mise au point » est signée des instititions et responsables suivants : Haute Autorité de Santé – Pr Dominique Le Guludec ; Société française de neurologie pédiatrique – Pr Stéphane Auvin ; Société française de neurochirurgie – Pr Emmanuel Gay ; Conseil national professionnel de neurochirurgie – Dr Thierry Faillot ; Conseil national professionnel de pédiatrie – Pr Brigitte Chabrol ; Société française de pédiatrie – Pr Christophe Delacourt ; Société francophone d’imagerie pédiatrique et prénatale – Dr Hervé Brisse ; Société française de radiologie – Pr Jean-François Meder ; Société française de médecine légale – Pr Valéry Hédouin ; Société française de médecine physique et de réadaptation – Pr Isabelle Laffont ; Conseil national professionnel de médecine d’urgence – Pr Dominique Pateron ; Conseil national professionnel de radiologie – Pr Louis Boyer ; Conseil national professionnel d’anesthésie-réanimation – Dr Laurent Heyer ; Conseil national professionnel de médecine légale et d’expertise médicale – Pr Sophie Gromb ; Collège infirmier français – Marie-Claude Gasté ; Conseil national professionnel d’ophtalmologie (Académie française de l’ophtalmologie) – Pr Béatrice Cochener ; Syndicat national des médecins de PMI – Dr Pierre Suesser ; Collège national des sages-femmes – Adrien Gantois ; Collège national pour la qualité des soins en psychiatrie (CNPP-CNQSP) – Dr Maurice Bensoussan ; Collège de la médecine générale – Pr Paul Frappé ; France traumatisme crânien – Dr Emmanuel Chevrillon ; Société française de pédiatrie médico-légale – Dr Martine Balençon ; Société Française de Neurochirurgie Pédiatrique – Pr Didier Scavarda.

Soupçonné de neuf empoisonnements mortels : non, le Dr Péchier ne passera pas Noël à Besançon

Bonjour

C’est un petit soubresaut dans une affaire dont les médias peinent à prendre la mesure ; l’affaire Frédéric Péchier, anesthésiste soupçonné de vingt-quatre empoisonnements dont neuf mortels. La cour d’appel de Besançon a, le 18 décembre, rejeté une requête du Dr Péchier qui demandait à passer Noël chez lui, près de Besançon.

La défense de l’anesthésiste avait plaidé devant la chambre de l’instruction de la cour d’appel la modification temporaire du contrôle judiciaire du praticien, interdit de séjour dans le secteur de Besançon, afin de lui permettre de passer une semaine avec sa famille pendant les fêtes de Noël, a précisé la même source.

 « C’est inadmissible qu’il demande ça, il faut respecter les familles », a déclaré à l’AFP le père du petit Teddy, l’une des victimes. Opéré des amygdales en 2016 alors qu’il avait 4 ans, l’enfant avait survécu à deux arrêts cardiaques. « Les neuf morts, on sait où ils passeront Noël », a ajouté le père.

« S’il existait la moindre preuve matérielle je ne serais pas là »

Le Dr Péchier a été mis en examen pour vingt-quatre empoisonnements de patients entre 2008 et fin 2016 – neuf sont décédés. Il est soupçonné d’avoir « pollué » les poches de perfusion de ces patients (âgés de 4 à 80 ans), pour provoquer des arrêts cardiaques puis démontrer ses talents de réanimateur et discréditer des collègues de cliniques de Besançon avec lesquels il était en conflit.  Ce qu’il « conteste farouchement ». L’anesthésiste a été maintenu en liberté sous contrôle judiciaire, avec obligation de quitter Besançon. Il réside désormais chez ses parents à Poitiers.

Il y a six mois il avait donné un entretien en exclusivité à La Nouvelle République (Emmanuel Coupaye). « Depuis deux ans, je clame mon innocence, et je la clame toujours, affirmait-t-il. Moi, je connais le fond du dossier, je ne suis donc pas surpris de cette situation. Mais je comprends que ça choque les gens avec toutes les accusations lancées contre moi. Ce que je retiens, c’est que le dossier n’est pas si clair que ça et qu’il n’y a pas de preuves de ma culpabilité. Vous pensez bien que sinon, je serais en détention. Sur les vingt-quatre cas que l’on me reproche, s’il existait la moindre preuve matérielle ou le moindre témoignage, je ne serais pas là. »

Son avenir ? « Il est catastrophique. Je sais que ma carrière est finie, disait-il. Je ne ferai plus d’anesthésie, c’est impossible. Comment voulez-vous que je sois serein en endormant un patient, vous allez repenser à tout, au moindre pépin, on va venir me voir. Ma vie professionnelle est foutue, quinze ans d’études pour rien. J’ai le bac en poche pour retravailler, voilà ! »

A demain @jynau

Meurtres de l’homme aux mains coupées et de l’infirmière de Montargis: misère et toxicomanie

Bonjour

L’affaire faisait songer au formidable Hary Hole inspecteur dans la police criminelle norvégienne. Hole, flic alcoolique, dépressif, en proie à des problèmes sexuels et conjugaux, cynique, en rupture de ban et commis d’office par sa hiérarchie dans des affaires à la lisière du surréalisme  – autant dire sympathique (Jo Nesbø). Une affaire qui aurait vu Hole dans le Gâtinais pauvre (quadrant nord-est du Loiret, France).

Rouvrons le dossier. Lundi 21 octobre, 7h15, les passants découvrent un cadavre en bordure d’un champ situé sur la commune de Pannes. C’est celui de Karine Foucher, infirmière libérale, 42 ans. Le corps a été lardée de plusieurs coups de couteau au thorax, au cou et au visage. Les mains sont attachées par un câble téléphonique. Son véhicule est retrouvé avec des traces de sang à l’intérieur, non loin des lieux du drame. L’autopsie menée le 22 octobre confirme l’origine de sa mort par arme blanche. Originaire de Ferrières-en-Gâtinais,  Karine Foucher effectuait sa tournée habituelle qu’elle commençait à 6h le matin.

Les gendarmes de Montargis sont alors alertés de la disparition de Jacques Samson, 84 ans, un habitant de Chalette-sur-Loing.  Il se rendent à son domicile, situé à 2 km de Pannes et découvrent son cadavre disposé en travers de son lit, caché par plusieurs couvertures. L’autopsie démontre qu’il est mort après avoir reçu plusieurs coups de poing à la tête. L’homme a d’autre part « été amputé des deux mains post-mortem ». Les deux mains n’ont pas été retrouvées précisera  Nicolas Bessone,  le procureur de la République d’Orléans.

Jacques Samson était l’un des patients de l’infirmière – et l’un des premiers à qui elle rendait visite le matin. Un chouchou et une pince à cheveux cassée appartenant à Karine Foucher ont été retrouvés au domicile de Jacques Samson. L’enquête se poursuit pour retrouver le ou les auteurs de ce double meurtre. Le mobile du double meurtre n’est donc pour l’heure pas établi. Rien ne semble avoir été  été volé au domicile de Jacques Samson mais des traces de fouilles ont été constatées. « Aucune hypothèse n’est écartée à ce stade de l’enquête » déclarait le procureur – sans préciser à quelles hypothèses il songeait.

S’adonne à la prostitution occasionnelle

Il aura fallu moins de trois semaines aux gendarmes section de recherches d’Orléans. Les deux suspects, Messaoud et Fazia M., selon Le Parisien,  (Jérémie Pham-Lê) nient leur implication, en «se rejetant partiellement la responsabilité des faits», a précisé le procureur de la République d’Orléans.  

La rumeur populaire dans le Gâtinais pauvre laissait déjà croire à la présence d’une forme de tueur sadique, « signant ses crimes par l’amputation ». Dans les faits : un frère et une sœur issus d’un milieu social plus que défavorisé. Après 48 heures de garde à vue, Fazia et Messaoud M., âgés de 40 et 33 ans, ont été mis en examen  pour « homicides aggravés » et « atteinte à l’intégrité physique d’un cadavre » avant d’être placés en détention provisoire. Ils sont soupçonnés d’avoir tué Jacques Samson et Karine Foucher.

La sœur et le frère vivaient à moins de 300 mètres du domicile de Jacques Samson. « Les investigations des gendarmes ont permis de les impliquer sur la foi d’éléments scientifiques, de téléphonie et des témoignages, a déclaré au Parisien  le procureur de la République d’Orléans, Nicolas Bessone. En garde à vue, ils ont nié toute implication. Il faut donc rester prudent sur le mobile, mais la piste crapuleuse apparaît privilégiée. »

« Mère de sept enfants, Fazia M. n’a aucun emploi et s’adonne à la prostitution occasionnelle, rapporte Le Parisien. Elle vit dans un pavillon d’un étage, décrit comme ‘’sale et désordonné’’. Son frère Messaoud, lui, est un toxicomane accro à l’héroïne et la cocaïne. Ce marginal loge chez sa sœur aînée depuis sa sortie de prison après avoir été condamné dans une affaire de stupéfiants. »

Ajoutons qu’un troisième suspect, Mehmet S., a été mis en examen pour non-dénonciation de crimes et écroué. Compagnon épisodique de Fazia M., ce quinquagénaire n’est pas soupçonné à ce stade d’avoir été présent lors des tueries. Cinq autres suspects interpellés, proches des M., ont tous été relâchés et mis hors de cause.

Très tôt, les gendarmes de la section de recherches d’Orléans ont eu la conviction que les deux meurtres étaient l’œuvre de locaux. « Le travail n’était pas professionnel et l’ensemble du périple meurtrier a eu lieu dans un rayon d’un kilomètre », confie un proche de l’enquête. Les gendarmes ont pu reconstituer le trajet des suspects grâce à l’iPhone de l’infirmière tuée, retrouvé dans une poubelle sur un parking de Pannes (Loiret).On peut reconstituer désormais les faits. Dans la matinée du 21 octobre, Fazia et Messaoud M. se seraient d’abord introduits chez Jacques Samson en vue de le cambrioler. Le vieil homme se serait débattu et aurait été roué de coups au visage jusqu’à en succomber. Les tueurs seraient ensuite tombés « fortuitement » sur Karine Foucher, venue administrer des soins à son patient diabétique.

« Ils auraient alors ligoté l’infirmière de 42 ans puis l’auraient transportée vivante dans son 4X4 jusqu’à un distributeur de Châlette afin d’y effectuer un retrait de 800 euros avec sa carte bancaire, ajoute Le Parisien. C’est à bord du véhicule qu’ils auraient ensuite mortellement poignardé la mère de famille avant de déposer son corps en lisière d’une route de Pannes. L’analyse du bornage du téléphone de l’infirmière révèle que les suspects seraient retournés chez Jacques Samson pour une raison indéterminée. Est-ce à ce moment-là qu’ils lui auraient tranché les mains ? S’agissait-il d’éliminer d’éventuelles traces ADN ? Toujours est-il que les bourreaux de l’octogénaire, visiblement paniqués, font même une halte… au domicile de Fazia M., ce qui signe les crimes. »

Un personnage de roman noir

Dernière étape : le 4X4 de Karine Foucher est garé sur un parking de Pannes, des traces de sang plein l’habitacle. Son téléphone est jeté. Les meurtriers présumés n’ont pas été assez prudents : l’ADN de Fazia M. a été relevé sur un mégot de cigarette et une boîte de boule Quiès chez Jacques Samson, ainsi que sur la portière du 4X4 et l’aisselle de Karine Foucher. Messaoud M., lui, a été identifié comme étant l’homme encapuchonné qui effectue le retrait d’argent et abandonne le véhicule de l’infirmière à Pannes. Les caméras ont filmé sa silhouette.

Appât du gain, sans doute. Mais les enquêteurs restent intrigués par le déchaînement de violences. Et rien n’a été dérobé chez Jacques Samson, ancien cheminot à la pension modeste. Fazia M., décrite comme « séductrice », connaissait le retraité. En 2017, elle avait effectué des tâches ménagères chez lui. Elle savait qu’il laissait son domicile ouvert. Pour ne rien simplifier elle avait été visée par une plainte de Jacques Samson pour une histoire de chèques falsifiés. Selon Fazia M., il s’agissait de « dédommagements » après des « comportements déplacés » du vieillard. Or selon des témoins « la victime aurait rémunéré la suspecte pour quelques caresses consenties ». La plainte de Jacques Samson avait été classée sans suite.

« Fazia M. est un personnage de roman noir, a confié un proche de l’enquête. Elle a un côté maléfique et une certaine emprise sur les hommes, qu’elle fréquentait en nombre. » Roman noir, grande misère et toxicomanie. A ce jour les mains du vieil homme n’ont pas été retrouvées.

A demain @jynau