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6/07/2020. On sait que la maladie de Huntington est une maladie neurologique génétique qui apparaît généralement à l’âge adulte. Des chercheurs français viennent d’annoncer dans Science avoir découvert l’existence d’anomalies cérébrales dans des cerveaux d’embryons humains porteurs de la mutation responsable de cette pathologie 1. Les auteurs sont des chercheurs et des cliniciens de l’Inserm, de l’Université Grenoble Alpes, de Sorbonne Université, du CNRS et de l’AP-HP, du Grenoble Institut des neurosciences et de l’Institut du cerveau. Ces travaux explique l’Inserm « interrogent sur les mécanismes de progression silencieuse de la maladie et sur le moment et la façon de traiter les patients dans le futur ».
Maladie de Huntington : maladie génétique du système nerveux central, rare et héréditaire ; se manifeste habituellement entre les âges de 30 et 50 ans par des troubles psychiatriques, cognitifs et moteurs qui s’aggravent progressivement ; est due à la mutation du gène codant pour une protéine nommée « huntingtine » ; se transmet sur un mode dit « autosomique dominant » : hériter d’une seule copie pathologique est suffisant pour développer la maladie ; environ 18 000 personnes sont concernées en France : 6 000 présentent déjà des symptômes et on estime que près de 12 000 présentent le gène porteur de la mutation mais sont asymptomatiques.
Les équipes de Sandrine Humbert (Grenoble Institut des neurosciences) et de la Pr Alexandra Durr, (Sorbonne Université, Pitié Salpêtrière, Institut du cerveau) s’intéressent aux stades précoces de la maladie de Huntington et à la longue période qui précède l’apparition des symptômes. elles se sont ici penchées sur le moment auquel pourraient survenir les anomalies cérébrales.
Espérer
Les équipes ont étudié des cerveaux d’embryons humains de treize semaines – « issus de dons des parents suite à une interruption médicale de grossesse ». Elles ont observé plusieurs différences entre des embryons porteurs de la mutation du gène codant pour la huntingtine et d’autres non porteurs.
« Chez les premiers, la protéine huntingtine pathologique est anormalement localisée dans les cellules progénitrices à l’origine des neurones du cortex. Cette localisation anormale est associée, entre autres, à des problèmes de localisation de protéines de jonction dans ces cellules et à des altérations de taille, de densité et d’orientation du cil, un organite essentiel au fonctionnement de ces cellules. » Les chercheurs ont renouvelé l’expérience avec un modèle de souris de la maladie de Huntington à un stade équivalent de développement embryonnaire et ont retrouvé les mêmes anomalies, explique l’Inserm. Ce travail leur a ainsi permis de valider ce modèle animal pour poursuivre l’exploration des mécanismes précoces de la maladie à d’autres stades du développement embryonnaire ou après la naissance.
« C’est la première fois que des anomalies du développement cérébral sont mises en évidence dans cette maladie. De plus, celles-ci sont relativement importantes et étendues bien que nous ne soyons pas encore capables de déterminer leurs conséquences directes », expliquent les auteurs.
Question : pourquoi les porteurs de la mutation ne manifestent-ils alors aucun symptôme avant un âge avancé ? « À ce stade, nous posons l’hypothèse que le cerveau met très tôt en place des mécanismes de compensation qui permettent un fonctionnement normal. Il se pourrait d’ailleurs qu’il en soit de même chez les personnes porteuses de mutations associées à d’autres types de dégénérescence comme la maladie d’Alzheimer ou la sclérose latérale amyotrophique », répondent Mmes Humbert et Durr.
Selon elles cette découverte aura des conséquences importantes sur la façon et le stade auxquels les traitements qui modifient le cours de la maladie doivent désormais être envisagés. Comment, dans le désert de la thérapeutique, ne pas l’espérer ?
A demain @jynau
1 Barnat M, Capizzi M, Aparicio E et al Huntington disease alters human neurodevelopment https://science.sciencemag.org/cgi/doi/10.1126/science.aax3338