Bonjour
22/05/2020. Que répondra-t-il ? C’est une publication d’importance que vient de diffuser, sans embargo, The Lancet : « Hydroxychloroquine or chloroquine with or without a macrolide for treatment of COVID-19: a multinational registry analysis ». Elle est co-signée par les Drs Mandeep R. Mehra (Brigham and Women’s Hospital Center for Advanced Heart Disease, Boston) et Frank Ruschitzka (Centre de cardiologie de l’hôpital universitaire de Zurich).
Ce travail établit, en substance, qu’aucune preuve ne peut être apportée quant aux bénéfices de l’usage de la chloroquine ou de l’hydroxychloroquine chez les patients souffrant de COVID-19. Et souligne que « des essais randomisés urgents sont nécessaires » – le tout dans un contexte hautement problématique puisque l’utilisation aujourd’hui à large échelle de chloroquine ou d’hydroxychloroquine est selon eux associée « à une augmentation des taux de mortalité et des arythmies cardiaques chez les patients hospitalisés atteints de COVID-19 ».
Les auteurs de cette vaste étude observationnelle ont analysé les données de 96032 patients hospitalisés entre le 20 décembre 2019 et le 14 avril 2020 avec une infection au SRAS-CoV-2 confirmée en laboratoire – et ce dans 671 hôpitaux. Tous les patients inclus dans l’étude étaient sortis ou étaient décédés au 21 avril 2020. Les patients atteints de COVID-19 recevaient une combinaison de l’un des quatre schémas thérapeutiques actuellement utilisés à travers le monde.
Comparaison des taux de mortalité
L’équipe a ainsi comparé les résultats des patients traités par chloroquine seule (1868), hydroxychloroquine seule (3016), chloroquine en association avec un macrolide (3783) ou hydroxychloroquine avec un macrolide (6221). Les patients de ces quatre groupes ont été comparés au groupe témoin de 81 144 patients.
« À la fin de la période d’étude, environ un patient sur onze dans le groupe témoin était décédé à l’hôpital (9,3%, 7 530/81 144), résume The Lancet. Les quatre traitements étaient associés à un risque plus élevé de mourir à l’hôpital. Parmi ceux traités par la chloroquine ou l’hydroxychloroquine seule, environ un patient sur six est décédé (16,4%, 307/1 868 chloroquine et 18,0%, 543/3 016 hydroxychloroquine). Lorsque les médicaments étaient utilisés en association avec un macrolide, le taux de mortalité atteignait plus d’un sur cinq pour la chloroquine (22,2%, 839/3783) et près d’un sur quatre pour l’hydroxychloroquine (23,8%, 1479/6221). »
Dr Mandeep R. Mehra :
«Il s’agit de la première étude à grande échelle à trouver des preuves statistiquement solides que le traitement à la chloroquine ou l’hydroxychloroquine ne bénéficie pas aux patients atteints de COVID-19. Au lieu de cela, nos résultats suggèrent qu’il peut être associé à un risque accru de problèmes cardiaques graves et à un risque accru de décès. Les essais cliniques randomisés sont essentiels pour confirmer tout préjudice ou bénéfice associé à ces agents. En attendant, nous suggérons que ces médicaments ne devraient pas être utilisés comme traitements pour COVID-19 en dehors des essais cliniques. »
Dr Frank Ruschitzka :
«Plusieurs pays ont préconisé l’utilisation de la chloroquine et de l’hydroxychloroquine, seules ou en combinaison, comme traitements potentiels pour le COVID-19. La justification de la réutilisation de ces médicaments de cette manière repose sur un petit nombre d’expériences anecdotiques qui suggèrent qu’elles peuvent avoir des effets bénéfiques pour les personnes infectées par le virus du SRAS-CoV-2. Cependant, des études antérieures à petite échelle n’ont pas réussi à identifier des preuves solides d’un avantage et de plus grands essais contrôlés randomisés ne sont pas encore terminés. Cependant, nous savons maintenant grâce à notre étude que la probabilité que ces médicaments améliorent les résultats de COVID-19 est assez faible. »
On trouve aussi, dans The Lancet, un commentaire du Pr Christian Funck-Brentano et du Dr Joe-Elie Salem (service de pharmacologie médicale, Pitié-Salpêtrière, Inserm) : «Cette étude observationnelle bien menée s’ajoute aux rapports préliminaires suggérant que la chloroquine, l’hydroxychloroquine, seul ou avec de l’azithromycine n’est pas utile et peut être nocif chez les patients COVID-19 hospitalisés. »
C’est peu dire que l’on attend, désormais, l’analyse détaillée que fera de ces données mondialisées le Pr Didier Raoult, en son IHU Méditerranée Infection.
A demain @jynau