Faux certificats de virginité, gaz hilarants, stupéfiants : le nouveau plan du gouvernement

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07/09/2020. L’heure politico-médiatique est donc à la « lutte contre l’insécurité ». Et deux membres du gouvernement s’y emploient à merveille. En témoigne un entretien fleuve donné au Parisien (Olivier Beaumont et Jean-Michel Décugis) par un tandem idéologiquement contre nature : le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin  et sa ministre déléguée à la Citoyenneté, Marlène Schiappa. Ce duo révèle les grandes lignes de la feuille de route qu’ils présenteront mercredi 9 septembre lors du séminaire gouvernemental de rentrée. Quelques extraits suffiront pour prendre la mesure et les limites de l’entreprise.

1 La lutte contre la drogue, priorité des priorités. « La lutte contre les stupéfiants doit être l’alpha et l’oméga de toutes nos interventions. A travers ce sujet, il y a la lutte contre le crime organisé, avec la traite des êtres humains et le financement du terrorisme, mais aussi une grande mesure de santé publique. Et, bien sûr, un lien avec la lutte contre l’insécurité du quotidien. Quand on voit qu’aujourd’hui un gamin de 14 ans peut gagner plus que son père en faisant le « chouf » (le guet), il ne faut pas s’étonner qu’il y ait une crise d’autorité dans notre pays.

« Il faut s’occuper de tous les trafics. Des gros réseaux jusqu’au bout de la chaîne, c’est-à-dire le consommateur. Il faut sanctionner tout le monde, y compris dans les beaux quartiers de Paris. Grâce à l’action de mon prédécesseur, nous avons tout de même saisi 34 tonnes de cannabis depuis le début de l’année, 6 tonnes de cocaïne. On doit pouvoir encore augmenter ces chiffres (…) Je n’ai pas l’esprit de capitulation. La drogue, c’est de la merde, ça finance le crime organisé, ça tue la vie de milliers de personnes et ça peut concerner toutes les familles de France. Le rôle d’un responsable politique, ce n’est pas d’accompagner tout doucement la mort d’une société.

2 L’interdiction des gaz hilarants. «  J’ai demandé à mon administration de me proposer des dispositions pour interdire purement et simplement l’utilisation des cartouches ou capsules de protoxyde d’azote. Je suis élu local, je sais que cela cause des nuisances et que cela pourrit le quotidien de nombreux Français.

3 Les certificats médicaux de virginité. « Nous allons aussi nous attaquer aux ‘’certificats de virginité’’. Certains médecins osent encore certifier qu’une femme est vierge pour permettre un mariage religieux, malgré la condamnation de ces pratiques par le Conseil de l’Ordre des médecins 1. On va non seulement l’interdire formellement, mais proposer la pénalisation. On va également mettre clairement dans la loi qu’aucun élu ne pourra prendre de dispositions pour favoriser l’inégalité entre les femmes et les hommes pour mettre en place des pratiques communautaires, comme réserver des horaires de piscine à un sexe plutôt qu’un autre.

4 « Ensauvagement » ? Oui, en dépit des interdits du Premier ministre, Gérald Darmanin continuera à employer ce terme. « Oui, je continue à penser qu’il y a des actes de sauvagerie, et un ensauvagement d’une partie de la société. J’ai mes propres mots, ma propre sensibilité, et j’utilise les mots de mes concitoyens de Tourcoing. Mais je respecte la sensibilité de chacun, et celle en particulier du garde des Sceaux. »

Or Eric Dupond-Moretti estime pourtant que c’est ici reprendre la sémantique du Rassemblement national… Marlène Schiappa : « Si Marine Le Pen dit que le ciel est bleu, je ne vais pas dire qu’il pleut pour me différencier (sic). Je ne fais pas de politique en fonction du RN, mais pour les gens. J’assume l’utilisation de ce terme d’ensauvagement, et personne ne peut me soupçonner d’appartenir à la droite dure. Je viens de la gauche républicaine. Marine Le Pen n’est pas notre boussole (re-sic). Tout notre combat au ministère de l’Intérieur est aussi d’empêcher sa progression. »

A quel prix ? Marlène Schiappa le sait-elle ? Si oui, elle ne le dit pas.

A demain @jynau

1 « Certificats de virginité » : ce que tout médecin se devrait de savoir quant au respect de l’intimité, Journalisme et santé publique, 3 mars 2019

Contraception féminine : savez-vous à partir de quel âge elle est désormais gratuite ?

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29/08/2020. Jadis l’affaire aurait déclenché l’une de ces polémiques qui , depuis la loi Neuwith (1968), opposait partisans et adversaire du droit des femmes à pouvoir dissocier la sexualité de la procréation (« Un enfant quand je le veux ! »).

Aujourd’hui, dans les médias généralistes, ce sont à peine quelques lignes glissées sous mille et un papiers traitant de la pandémie, de la fonte des pôles et de l’interdiction de la chasse à la glu. Un demi-siècle plus tard, la polémique est épuisée. Qui s’en plaindrait ?

Jusqu’à présent, en France, seules les jeunes filles âgées de 15 ans et plus pouvaient bénéficier d’une contraception intégralement prise en charge par la collectivité. Désormais le frais liés à la contraception des jeunes filles de moins de 15 ans seront désormais également pris en charge à 100 % par l’Assurance-maladie, selon un décret publié jeudi 27 août au Journal officiel.

Cette mesure était certes inscrite dans le budget de la Sécurité sociale pour 2020 – mais elle restait suspendue à la parution de ce décret. Les mineures de moins de 15 ans n’auront désormais plus à s’acquitter du « ticket modérateur » pour les consultations de médecins ou sages-femmes, les examens biologiques, les médicaments et les dispositifs contraceptifs.

Gratuité du préservatif ignorée

Pourquoi une telle extension de la prise en charge ? Le gouvernement avait fait savoir fin 2019 que « chaque année, près de 1 000 jeunes filles de 12 à 14 ans sont enceintes en France » et que « parmi ces grossesses, 770 se concluent par une IVG ». Or il apparaît que pour les jeunes filles âgées de 15 à 18 ans le taux de recours à l’IVG a nettement baissé depuis qu’elles ont accès à une contraception gratuite, passant de 9,5 à 6 pour 1 000 entre 2012 et 2018.

Comment dès lors justifier que celle âgées de moins de 15 ans devaient supporter financièrement  le coût des contraceptifs, des consultations médicales et des éventuels examens biologiques ? On observera, en amont, que la question de la gratuité du préservatif (apparue il y quarante ans avec l’émergence du sida) n’a jamais été véritablement posée. Et que le fait qu’il ne le soit pas permet à certains de justifier qu’il en aille de même pour les masques scolaires … Du détournement de la logique à des fins politiques …

« Dans les années 1940, la moitié des femmes avaient connu une première expérience sexuelle à 22 ans, contre 18 ans pour les hommes, soit quatre années d’écart, dit l’Ined à ceux et celles qui l’ont oublié.. Dans les années 1960 et 1970, l’âge médian au premier rapport sexuel a baissé, en particulier chez les jeunes femmes : l’écart avec les garçons s’est réduit. Une stabilisation a été observée dans les années 1980 et 1990. Dans les années 2000, une nouvelle baisse s’est amorcée. »

A demain @jynau

Covid et GPA : et voici pourquoi le Pr Didier Raoult se serait, enfin, montré sur BFM-TV

Bonjour

24/08/2020. Visite-express dans les sombres coulisses des médias. Interrogé dans l’émission «L’Instant M» sur France Inter lundi 24 août, Marc-Olivier Fogiel, directeur général du groupe BFMTV, a fait une révélation (un « scoop »). Il a enfin dit pourquoi le Pr Didier Raoult, microbiologiste, figure médiatique et polémique dans la crise du Covid-19, avait fini par accepter de venir sur le plateau de la chaîne télévisée qu’il dirige. Une venue qui avait suscité de larges audiences et continué à alimenter les polémiques.

Selon Marc-Olivier Fogiel, c’est en découvrant que ce dernier avait eu deux petites filles nées par mères porteuses (GPA, une pratique interdites en France) que le Pr. Raoult se serait décidé. «Il m’a dit, ‘vous savez pourquoi je suis venu ? (…) je ne vous connais pas (…) je vous ai ‘googlisé’ (…) vous avez deux petites filles par GPA (…) je trouve qu’il faut du courage face à un système qui y est opposé quand on est médiatique, de finalement enfreindre les règles. Vous l’avez fait. Puis, la GPA finalement, c’est la vie, c’était la force de la vie, et moi en tant que médecin, c’est ce qui m’anime.’»

Marc-Olivier Fogiel précise que le professeur marseillais est venu trois fois sur la chaîne, après qu’il l’ait «harcelé». «Je suis venu parce que j’en avais marre», lui aurait aussi glissé Raoult. Les autres dirigeants de chaînes télévisées savent désormais comment procéder s’ils souhaitent faire de l’audience. Sauf à imaginer que le Pr Didier Raoult, qui a beaucoup parlé, ne susciterait plus aujourd’hui le même intérêt de la collectivité. Ce qui reste encore, médiatiquement, à démontrer.

A demain @jynau

RU486: polémique, en Italie, sur l’assouplissement de l’utilisation de la «pilule abortive»

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08/08/2020. Qui, en France, se souvient encore de la violente polémique sur le « RU486 » (mifépristone) cette « pilule abortive » ? Quatre décennies plus tard, dans une Europe que l’on présente comme unie, voici que la polémique émerge de l’autre côté des Alpes.

Le gouvernement italien a décidé d’assouplir ses conditions d’utilisation a annoncé samedi 8 août le quotidien (centre-gauche) La Repubblica. Selon cette information exclusive en une du journal de centre-gauche, les nouvelles recommandations du ministère de la Santé permettront aux femmes souhaitant avorter d’avoir recours à la pilule RU486 en ambulatoire – alors que jusqu’ici trois jours d’hospitalisation étaient recommandés.

Interrogé par La Repubblica (et cité par l’AFP) le ministre de la Santé Roberto Speranza a défendu son choix : «Les arguments scientifiques sont très clairs. Le Conseil supérieur de la Santé et les sociétés de gynécologie et d’obstétrique ont exprimé un avis favorable. Ces nouvelles recommandations représentent un progrès important».

En Italie, pays où la tradition catholique résiste, le recours à l’avortement, légalisé en 1978, est compliqué par le fait que 70% des gynécologues invoquent l’objection de conscience pour ne pas pratiquer d’IVG. « La pilule abortive représente actuellement 20% des avortements, la méthode chirurgicale étant la plus répandue. Cette décision permet aussi de mettre fin aux disparités entre régions, qui en Italie sont compétentes en matière de santé, résume l’AFP.  En juin, une polémique avait éclaté lorsque la présidente de la région Ombrie, Donatella Tesei, membre de la Ligue (extrême droite), avait interdit le recours à la pilule abortive sans hospitalisation. Cette décision, condamnée par les partis de gauche et des intellectuels comme Roberto Saviano, avait entraîné des manifestations de protestation de milliers de femmes. » 

Tradition catholique ? L’assouplissement du recours à la pilule abortive a suscité de nombreuses réactions. Le journal de la conférence épiscopale italienne Avvenire a dénoncé «une annonce surprise, dévoilée seulement à La Repubblica», qui «ouvre la voie à l’avortement pharmacologique à domicile».  Le Parti démocrate (PD, centre-gauche, au pouvoir) a salué une décision «juste» en faveur de «l’avortement pharmacologique, sûr et moins invasif que par voie chirurgicale», tandis que le parti Fratelli d’Italia (extrême droite) a fustigé «une décision absurde et dangereuse».

C’est ainsi qu’aujourd’hui, faute d’harmonie, qu’une Europe, cahin-caha, se construit.

A demain @jynau

Idéologie et PMA : mais pourquoi diable le gouvernement refuse-t-il d’autoriser la «ROPA»?

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27/07/020. « Le grand projet sociétal du quinquennat » est de retour. Neuf mois (sic) après son adoption en première lecture à l’Assemblée nationale, bioéthique et PMA pour toutes sont aujourd’hui de retour dans l’Hémicycle. Idéologies, références à la religion catholique et noms d’oiseaux garantis.

On se souvient de la clef de voûte du projet de loi : l’ouverture des techniques de la procréation médicalement assistée (PMA) aux couples de lesbiennes et aux femmes seules. Au choix, une dangereuse régression anthropologique ou, à l’inverse, le droit enfin offert aux femmes fécondes qui souhaitent pouvoir procréer sans devoir avoir recours à des relations sexuelles avec un homme. Jusqu’ici, en France, au nom de la médecine et de la thérapeutique  seuls les couples hétérosexuels stériles (ou hypofertiles) pouvaient avoir accès à ces techniques.

A dire vrai « le grand projet sociétal du quinquennat » aurait pu attendre ; après la crise sanitaire liée au Covid-19, la mobilisation de plusieurs députés de la majorité et de la gauche aura été nécessaire pour que le projet de loi soit inscrit à l’agenda parlementaire avant l’été. Désormais, après le départ d’Agnès Buzyn vers d’autres cieux et le remaniement gouvernemental on retrouvera, pour défendre la position du gouvernement, les ministres de la Santé Olivier Véran, de la Justice Eric Dupond-Moretti et de l’Enseignement supérieur et de la recherche Frédérique Vidal.

Prise en charge intégrale des actes par la Sécurité sociale

Le texte a déjà bourlingué : voté par l’Assemblée nationale en première lecture le 15 octobre 2019, il a ensuite été discuté et nettement amendé par les sénateurs, qui l’ont adopté le 4 février. « Lors des travaux en commission qui ont eu lieu début juillet, les députés ont sans surprise rétabli dans les grandes lignes leur version, et ont ajouté quelques modifications, résume Le Monde (Solène Cordier). Ainsi, sur la PMA, ils ont réintroduit la prise en charge intégrale des actes par la Sécurité sociale, quel que soit le profil des patientes, contrairement aux sénateurs qui l’avaient limitée aux cas relevant d’une infertilité pathologique –  ce qui excluait de fait les nouvelles candidates (femmes seules et couples de lesbiennes) (…) Au cours des trente-sept heures de discussion, l’examen d’amendements sur l’ouverture de la PMA aux personnes transgenres, et la PMA post-mortem, avec les gamètes d’un conjoint décédé, a aussi occasionné de vifs débats. Ils ont finalement été rejetés. »

Mais il y a aussi, plus troublant : les députés se sont montrés favorables (et ce contre l’avis du gouvernement) à l’acceptation de la méthode « ROPA » (réception d’ovocytes de la partenaire) ; ce procédé, autorisé notamment en Espagne, consiste à permettre qu’au sein d’un couple de femmes, l’une mène une grossesse en portant l’ovocyte fécondé de l’autre. La pratique croisée peut aussi être réalisée.

On sait que plusieurs associations LGBT voient là une manière de partager la conception de l’enfant. Le gouvernement, et notamment Olivier Véran, défavorable au procédé, devrait tenter de le faire supprimer en séance 1. Pour sa part le dérangeant Pr Israël Nisand, président du Collège national des gynécologues et obstétriciens,  trouve que la « ROPA » est « légitime », comme il vient de le déclarer sur France Inter. Il sera du plus grand intérêt de savoir quelles sont les raisons de fond, idéologiques, de l’opposition du gouvernement ; et qui, finalement, l’emportera.

A demain @jynau

1 La précédente ministre « Agnès Buzyn était contre et le gouvernement est contre également cette question-là », déclarait début juillet Olivier Véran sur BFMTV/RMC. La technique implique « une stimulation hormonale et des ponctions d’ovocytes qui ne sont pas des gestes neutres, à une femme qui n’en relève pas forcément », c’est à dire, qui ne souffre pas elle-même de problèmes de fertilité, a-t-il dit. Sur un « sujet complexe, c’est la santé qui doit primer », a-t-il insisté.

« Il y a un acte invasif. Est-ce que la situation justifie d’aller faire un acte invasif ? D’un point de vue éthique la question est extrêmement complexe. La position du gouvernement restera défavorable, même si par ailleurs je peux être moi favorable à certaines évolutions dans le texte, parce qu’on peut avoir des désaccords sur des questions éthiques », a encore déclaré le ministre que l’on retrouve ici étrangement en phase avec les associations opposées à la PMA. La Manif pour tous voit notamment dans cette technique « l’antichambre de la GPA ».

Covid-19 et grossesse : le premier cas de transmission intra-utérine vient d’être démontré

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14/07/2020. S’inquiéter ? Des médecins français viennent de rapporter le premier cas confirmé de contamination intra-utérine au Covid-19, dans une étude publiée mardi 14 juillet par Nature Communications:  « Transplacental transmission of SARS-CoV-2 infection » 1. Le nouveau-né est né en mars et souffrait de symptômes neurologiques associés à la maladie. « Nous avons montré que la transmission de la mère au fœtus est possible via le placenta dans les dernières semaines de grossesse », a expliqué à l’Agence France Presse le Dr Daniele De Luca (hôpital Antoine-Béclère, Clamart, et principale auteure de l’étude avec le Pr Alexandra Benachi.

Des précédentes études avaient certes suggéré  la possibilité d’une transmission prénatale de la mère à son enfant  mais, assure-t-elle, cette nouvelle étude en apporte des preuves. « Il faut analyser le sang maternel, le liquide amniotique, le sang du nouveau-né, le placenta, etc. Réunir tous ces prélèvements pendant une épidémie avec des urgences dans tous les sens n’était pas simple, c’est pourquoi c’était suspecté, mais pas démontré », a-t-elle expliqué.

L’équipe de Béclère a conduit cette étude sur une femme âgée de 23 ans, hospitalisée début mars pour un syndrome infectieux à 35 semaines de grossesse. La naissance s’étant faite par césarienne, tous les prélèvements ont pu être menés sur les réservoirs potentiels du virus SARS-CoV-2, dont la charge la plus forte a été trouvée dans le placenta. « Il est passé de là à travers le cordon ombilical vers le bébé, où il s’est développé », précise le Dr De Luca.

Mauvaise et bonne nouvelles

Vingt-quatre heures après sa naissance, le nouveau-né, de sexe masculin (2540 grammes) avait présenté des symptômes sévères – dont une rigidité des membres et des lésions du système nerveux cérébral. Ces symptômes ont finalement disparu d’eux-mêmes, avant que les médecins ne tranchent quant à un traitement – et ce en l’absence de thérapeutique connue contre la Covid-19. 

Le suivi sur deux mois de vie a montré un examen neurologique amélioré (hypertonie améliorée, motricité normale) ainsi qu’une imagerie par résonance magnétique montrant une réduction des lésions de la substance blanche. La croissance et le reste de l’examen clinique étaient normaux.

« La mauvaise nouvelle, c’est que ça puisse se produire. La bonne nouvelle est que c’est rare – très rare même rapporté à la population », a commenté Daniele De Luca, toujours à l’AFP. S’inquiéter ? Ou, comme Marian Knight, professeure de santé maternelle et infantile à l’université d’Oxford (qui n’a pas participé à l’étude) rappeler que le principal message pour les femmes enceintes ne varie pas : prévenir le risque infectieux grâce aux « gestes barrière » – et au port du masque.

A demain @jynau

1 Vivanti, A.J., Vauloup-Fellous, C., Prevot, S. et al. Transplacental transmission of SARS-CoV-2 infection. Nat Commun 11, 3572 (2020). https://doi.org/10.1038/s41467-020-17436-6

Emmanuel Macron et la «PMA pour toutes» : promesse tenue avant la fin du quinquennat ?

Bonjour

31/05/2020. Voilà un bel exemple de question politique par temps pandémique. Elle concerne un sujet que les médias n’ont cessé de traiter depuis des années : l’élargissement à « toutes les femmes » de l’accès aux techniques de procréation médicalement assistée (la « PMA pour toutes »).

On sait que l’agenda parlementaire français a été totalement bouleversé par les conséquences politiques de l’épidémie – ce qui a empêché les élus d’examiner en deuxième lecture le texte de révision de la loi de bioéthique au sein duquel figure cette disposition. Le 21 mai Gilles Le Gendre, président du groupe des députés LREM, jugeait, sur LCI, qu’il était « impossible » d’adopter cette loi avant « l’été » – du fait de la crise sanitaire et de l’encombrement du calendrier parlementaire.

Gilles Le Gendre n’est pas seul de cet avis.  Dans un message publié sur twitter , le ministre de la santé, Olivier Véran, confirmait l’information : « La loi bioéthique porte de nombreuses, belles et réelles avancées sociétales. Le débat parlementaire n’est pas achevé, et si la priorité donnée à la crise sanitaire rend difficile son adoption avant l’été hélas, elle le sera dans les tout prochains mois ! »

C’était faire bien peu de cas des forces toujours en présence. Quarante-cinq députés de tous bords plaident pour un retour dès le mois de septembre du projet de loi. Ils le font  savoir dans une tribune au Journal du Dimanche. En tête de tribune :  Guillaume Chiche, ex-député LREM (Deux-Sèvres) passé depuis peu au groupe Ecologie Démocratie Solidarité. A leurs côtés des responsables de l’Association des Parents et futurs parents Gays et Lesbiens (APGL), de l’Association des Familles Homoparentales (ADFH), du Planning Familial et de l’Inter-LGBT – ainsi que le candidat à la mairie de Paris Cédric Villani (ex-LREM) de la sociologue Irène Théry et du gynécologue-obstétricien  Israël Nisand.

« La crise que nous traversons a mis en péril de nombreux projets parentaux, écrivent-ils. Nous ne pouvons pas nous résigner à ce que la crise sanitaire soit le réceptacle de nouvelles discriminations et le théâtre d’un énième report d’une loi, promesse du candidat Emmanuel Macron (…). Inexorablement, chaque jour qui passe est une déchirure de plus pour toutes ces femmes discriminées dans l’accès à cette pratique médicale. Chaque jour qui passe est une chance en moins de pouvoir mettre au monde un enfant et de lui transmettre son amour. »

Une telle supplique peut-elle être aujourd’hui entendue par les responsables de la majorité, par le ministre de la Santé, par le président de la République ? Une belle équation politique.

A demain @jynau
 

Emmanuel Macron osera-t-il ne pas promulguer la «PMA pour toutes» durant ce quinquennat ?

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22/05/2020. Gilles Le Gendre aime parler, se faire entendre. Président controversé du groupe des députés LRM, il a jugé, jeudi 21 mai sur LCI, qu’il était « impossible » d’adopter la loi de bioéthique autorisant la « PMA pour toutes » avant « l’été ». Pourquoi ? Tout simplement en raison de la crise sanitaire et du calendrier parlementaire.

Gilles Le Gendre n’est pas seul dans son camp.  Dans un message publié sur twitter jeudi, le ministre de la santé, Olivier Véran, a semblé confirmer l’information : « La loi bioéthique porte de nombreuses, belles et réelles avancées sociétales. Le débat parlementaire n’est pas achevé, et si la priorité donnée à la crise sanitaire rend difficile son adoption avant l’été hélas, elle le sera dans les tout prochains mois ! »

De « belles et réelles avancées sociétales » peuvent bien patienter quelques mois ou quelques années. On se souvient peut-être qu’adopté en première lecture en octobre 2019 à l’Assemblée nationale, puis en février dernier par le Sénat, ce projet de loi aurait dû être examiné en deuxième lecture au printemps 2020 au Parlement, pour une adoption avant l’été. C’est raté.

Et Gilles Le Gendre de remuer le couteau législatif dans la plaie sociétale.

« J’espère que nous pourrons adopter la PMA d’ici à la fin du quinquennat. Avant l’été c’est impossible, pour deux raisons : pour une raison de calendrier, nous n’avons plus beaucoup de temps et nous avons des textes importants très liés à la situation économique d’urgence, et par ailleurs les Hémicycles, Sénat comme Assemblée, travaillent à effectif réduit pour respecter les règles sanitaires. »

« Sur une loi aussi importante, que l’ensemble des forces politiques ne puissent pas être présentes dans l’Hémicycle, ça pose un vrai problème de principe », a-t-il argumenté, tout en souhaitant que « dans le quinquennat, c’est-à-dire durant les deux ans qui restent, nous puissions aller au bout d’une loi essentielle ».

Variable d’ajustement

Ce nouvel obstacle inattendu dans un processus politique de près d’une décennie ne pouvait pas ne pas faire réagir la majorité que préside M. Le Gendre et dont est issu M. Véran. : « Pour nombre de couples et de femmes, la PMA est bel et bien une urgence. Les députés de la majorité sont attachés à ce que cette promesse de campagne soit réalisée le plus tôt possible », a twitté le député LRM Sacha Houlié.

Et, toujours sur Twitter, la députée LRM Coralie Dubost : « Non seulement la loi de bioéthique porte la PMA, enjeu de vie privée et familiale absolument fondamental pour de nombreuses personnes, mais au surplus elle cadre les rapports entre sciences et société. Comment imaginer reporter à date inconnue ce sujet brûlant d’actualité ? ». 

D’autres voix de la majorité s’élèvent. Et d’autres dans l’opposition : ainsi le sénateur PS de Paris Rémi Féraud : « Il va falloir trouver mieux que cet argument bidon de Gilles Le Gendre pour justifier l’abandon de la loi bioéthique et de la PMA pour toutes ». Sans oublier le monde militant et associatif. « Il y a des femmes derrière vos décisions de calendrier. Des personnes humaines. Votre mépris est sidérant », a répondu pour sa part Caroline de Haas, du collectif Nous Toutes. « On utilise ce projet de loi comme une variable d’ajustement du calendrier parlementaire en méprisant toutes ces femmes lesbiennes et célibataires qui espéraient débuter un parcours de PMA cette année ou au début de l’année prochaine », a aussi déploré l’Association des familles homoparentales dans un communiqué.

On imagine que le Palais de l’Elysée n’était pas fermé en ce jour de l’Ascension. Et on se souvient des engagements d’Emmanuel Macron sur un tel sujet sociétal, un thème de nature à marquer un quinquennat « Aucun doute, a twitté en fin de journée Gilles Le Gendre, la loi bioéthique, dont le vote est retardé par le Covid-19, sera adoptée au plus vite, dès que les circonstances le permettront. » M. Le Gendre aime entretenir le suspense.

A demain @jynau

Confinement : la France gèle toutes les activités de procréation médicalement assistée

Bonjour

25/03/2020. Le monde se ferme sur lui-même. Hier encore on ne parlait que d’en élargir le périmètre « à toutes les femmes ». Aujourd’hui toutes les activités de PMA sont gelées pour une durée indéterminée –  comme l’indiquent, rendues publiques aujourd’hui,  les « Recommandations mises à jour concernant les activités d’assistance médicale à la procréation durant l’épidémie de SARS-CoV-2 » de l’Agence de la biomédecine ».

Dans le contexte actuel d’évolution de l’épidémie du virus SARS-CoV-2 responsable du Covid-19, cette Agence annonce une mise à jour de ses recommandations relatives aux activités d’assistance médicale à la procréation (AMP). Définies avec les sociétés savantes concernées 1 ces recommandations sont destinées à tous les patients concernés par une technique d’AMP, qu’ils soient ou non infectés par ce virus. 

Les données scientifiques ne permettent pas, à l’heure actuelle, de connaître l’impact du SARS-CoV-2 sur la grossesse au stade précoce. La Société Européenne de Reproduction Humaine et d’Embryologie (ESHRE) préconise dans ce contexte une attitude de prudence. Du fait de la circulation très importante du SARS-CoV-2 sur le territoire national, majorant ainsi le risque de contamination lors des déplacements des patients, le ratio bénéfice-risque conduit à émettre les recommandations suivantes :

  1. Il est conseillé de reporter les activités cliniques et biologiques d’AMP, quelle que soit la technique (fécondation in vitro, transfert d’embryon congelé, insémination artificielle, don de gamètes, préservation de la fertilité non urgente).
  2. Il est préconisé, dans le contexte actuel, de ne pas regarder l’âge et la diminution de la réserve ovarienne comme une urgence imposant la réalisation d’un AMP, quand bien même ils constituent habituellement des conditions de prise en charge rapide.
  3. Pour la préservation de la fertilité urgente (pour raison oncologique) : Concernant la conservation d’ovocytes et de tissus germinaux, l’évaluation actuelle du ratio bénéfice/risque n’est pas en faveur de la poursuite de cette activité ; il est donc recommandé, sauf cas très particulier, de ne pas la conduire. Concernant la conservation des spermatozoïdes, le ratio bénéfice/risque, spécifique à chaque patient, établissement et contexte épidémiologique, peut conduire à renoncer à une prise en charge.

Le monde se ferme sur lui-même. D’une part on fait le décompte de ceux que l’on n’a pu sauver. De l’autre on programme la réduction du nombre des naissances désirées.

A demain @jynau

1 Recommandations établies en collaboration avec les sociétés professionnelles suivantes : Fédération nationale des biologistes des laboratoires d’étude de la fécondation et de la conservation de l’œuf (BLEFCO) ; Fédération nationale des centres d’étude et de conservation des œufs et du sperme humains (Fédération des CECOS) ; Collège national des gynécologues et obstétriciens de France (CNGOF) ; Fédération nationale des collèges de gynécologie médicale (FNCGM) ; Groupe d’étude pour le don d’ovocytes (GEDO) ; Groupe d’études sur la fécondation in vitro en France (GEFF) ; Groupe de recherche et d’études sur la cryoconservation ovarienne et testiculaire (GRECOT) ;Société de médecine de la reproduction (SMR).

Après l’hommage du chef de l’Etat, la superbe réponse des «héros en blouses blanches»

Bonjour

13/03/2020. Ainsi donc le président de la République eut ces mots solennels, adressés hier à la France entière :

« Durant plusieurs semaines, nous avons préparé, agi. Les personnels des hôpitaux, médecins, infirmiers, ambulanciers, les agents des Samu et de nos hôpitaux, les médecins de ville, l’ensemble des personnels du service public de la santé en France sont engagés avec dévouement et efficacité. Si nous avons pu retarder la propagation du virus et limiter les cas sévères, c’est grâce à eux parce que tous ont répondu présents.

« Tous ont accepté de prendre du temps sur leur vie personnelle, familiale, pour notre santé. C’est pourquoi, en votre nom, je tiens avant toute chose à exprimer ce soir la reconnaissance de la Nation à ces héros en blouse blanche, ces milliers de femmes et d’hommes admirables qui n’ont d’autre boussole que le soin, d’autre préoccupation que l’humain, notre bien-être, notre vie, tout simplement. »

Le retour n’a guère tardé. Dès le lendemain les « blouses blanches » ont remercié le chef de l’État pour son « soutien » et « ses paroles ». Mais elles exigent désormais « des moyens en urgence ». « Ces héros de l’hôpital sont épuisés et à bout », écrivent dans un communiqué commun les collectifs inter-hôpitaux (CIH) et inter-urgences (CIU). Cette crise intervient alors que l’hôpital public connaît depuis un an une mobilisation sans précédent. Des soignants, « quittent l’hôpital par centaines et des lits continuent d’être fermés alors que la crise explose », alertent les deux structures.

Pour lutter contre l’épidémie, CIH et CIU demandent à Emmanuel Macron de « débloquer en urgence les moyens financiers » nécessaires pour accueillir l’ensemble des patients qui en ont besoin et « éviter que la prise en charge des malades du coronavirus ne se fasse au détriment de tous les autres ». Ils appellent aussi vigoureusement le chef de l’exécutif à permettre le recrutement et la rémunération des personnels « à la hauteur de leurs missions, pas seulement aujourd’hui en temps de crise mais de façon pérenne ».

Prenant exemple sur l’Espagne et l’Italie, les deux collectifs estiment à plusieurs milliards d’euros la somme nécessaire pour faire face au virus. « Le gouvernement mobilisera tous les moyens financiers nécessaires pour porter assistance, pour prendre en charge les malades, pour sauver des vies quoi qu’il en coûte », a déclaré hier Emmanuel Macron. « Les Français peuvent compter sur nous mais c’est maintenant qu’il faut agir », lui répondent aujourd’hui les héros en blouse blanche.

Héros brossés dans le sens du poil

Le Quotidien du Médecin observe qu’à l’appel du CIH, des soignants de toute la France s’affichent depuis sur les réseaux sociaux arborant des pancartes sur lesquelles on peut lire « Oui, monsieur le président vous pouvez compter sur nous, mais l’inverse reste à prouver ! » Une référence appuyée à la réplique d’un neurologue lors d’une récente et déjà célèbre visite d’Emmanuel Macron à La Pitié-Salpêtrière @EmmanuelMacron #EnsembleSauvonslHopital#ComptezSurNous

Pour sa part le président du CIU Hugo Huon a déclaré à la presse  « Nous n’avons pas besoin d’être brossés dans le sens du poil, nous ferons comme toujours notre travail », regrettant un discours présidentiel « désincarné » et n’apportant « aucune donnée chiffrée » sur les enveloppes qui seront allouées à l’hôpital public.

Des chiffres ? Il faut écouter, sur France Culture, le Pr André Grimaldi, grand « historique » de la défense de l’hôpital public. Extraits:

« Les soignants en ont un peu assez qu’on leur dise qu’ils sont des gens admirables et qu’en conséquence, ils peuvent débuter à 1 600 euros brut par mois. Si on veut mobiliser les soignants, si on dit que les valeurs suprêmes ce n’est pas le premier de cordée, ce ne sont pas les milliardaires, ce sont les gens qui se dévouent à la cause commune, alors, il faut faire un rectificatif budgétaire pour l’hôpital. On prendra les mesures nécessaires pour que les soignants soient correctement payés, que les infirmières soient embauchées et évidemment les hôpitaux seront payés pour le bien qu’ils rendent à la nation et non dans un calcul comptable, comme s’ils étaient une entreprise commerciale. Ce qui est actuellement toujours le cas. 

« Il s’agit donc de mettre des milliards sur la table. Oui, des milliards sont nécessaires pour que l’hôpital puisse tenir (…)  5% des patients infectés vont en réanimation. Alors si nous avons un million de personnes infectées, cela fait 50 000 personnes en réanimation : notre système de santé sera débordé. Et si cela ce produit, le Président n’en a pas parlé mais il faudra faire comme l’Italie. On sera amené à faire des choix et à les assumer. Pas des choix médicaux mais des choix de l’ordre : il a 45 ans ou 50 ans, je le prends. S’il a 60 ans ou 70 ans, je ne le prends pas. Ce n’est jamais arrivé encore. Donc, la priorité absolue est d’ouvrir des lits de réanimation. 

« Mais il faudra des infirmières, des infirmières formées présentes 24h/24 heures. Donc, on va payer aussi dix ans d’une politique, et qui a continué encore ces trois dernières années malgré nos alertes ! Cette épidémie montre l’absurdité du système hospitalier actuel. Il n’est pas adapté aux urgences, à la réanimation, aux maladies chroniques. On le dit depuis dix ans. On l’a dit à madame Buzyn qui en avait convenu, mais qui n’en a rien fait. Du point de vue de l’hôpital, les mots ne suffiront pas. »

Agnès Buzyn n’est plus là. Reste les mots du chef de l’Etat.

A demain @jynau