Coronavirus. 24 février 2020, Paris : nouvel «urgent» de la Direction Générale de la Santé

Bonjour

24/02/2020. Bloguer c’est, aussi, parfois, simplement, relayer. Pour aider, pour prendre date. Nous publions ci-dessous, in extenso le nouveau document « urgent » de la Direction Générale de la Santé.

« L’évolution rapide de la situation internationale doit nous inciter à renforcer les mesures d’endiguement afin d’être prêt à réagir à tout moment à la prise en charge d’une chaine de transmission sur notre territoire. Les zones d’exposition à risque sont désormais élargies à la Corée de Sud et aux régions de la Lombardie et la Vénétie au Nord de l’Italie. La liste des zones d’exposition à risque, actualisée régulièrement, est disponible sur le site de Santé publique France https://www.santepubliquefrance.fr/maladies-et-traumatismes/maladies-et-infections-respiratoires/infection-a-coronavirus/articles/infection-au-nouveau-coronavirus-sars-cov-2-covid-19-france-et-monde

« Les personnes de retour des zones listées dans la définition de cas doivent faire l’objet des recommandations suivantes : Surveiller sa température 2 fois par jour, porter un masque chirurgical en présence de son entourage et en dehors du domicile, réduire les activités non indispensables (cinéma, restaurant, soirées…) et la fréquentation de lieux où se trouvent des personnes fragiles (hôpitaux, maternités, établissements d’hébergement pour personnes âgées…), se laver les mains régulièrement. En cas de fièvre ou sensation de fièvre, toux ou de difficultés à respirer, contacter rapidement le SAMU centre 15 en signalant son voyage.

« Une deuxième ligne d’établissements de santé a été identifiée incluant les établissements de santé sièges de SAMU pour disposer dans chaque département d’au moins un établissement pour assurer la prise en charge de patients COVID-19. En parallèle, les capacités de diagnostic dans les laboratoires dédiés sont augmentées pour permettre de réaliser des RT-PCR COVID-19 en tout point du territoire.

« Tous les professionnels de santé sont susceptibles de prendre en charge un cas suspect de COVID-19 et doivent donc se préparer à cette éventualité. L’appel au SAMU-Centre 15 devant tout cas suspect doit être systématique pour organiser le classement du cas et sa prise en charge. Les équipements nécessaires à la mise en place des mesures d’hygiène pour la prise en charge d’un cas suspect de COVID-19 sont ceux recommandés pour la prise en charge d’un cas suspect de maladie à transmission respiratoire :

« Pour le professionnel de santé : appareil de protection respiratoire (APR) de type FFP2, solution hydro-alcoolique (SHA) pour désinfecter les mains avant et après le soin et dès le retrait des gants, gants non stériles à usage unique, lunette de protection en plus de l’APR FFP2 pendant un soin exposant, thermomètre sans contact ou à usage unique pour la vérification de la température du patient. Pour le patient : SHA pour désinfecter les mains, masque chirurgical.

« Le ministère des Solidarités et de la Santé met à jour les recommandations pour les professionnels de santé sur son site internet : https://solidarites-sante.gouv.fr/soins-et-maladies/maladies/maladies-infectieuses/coronavirus/coronavirus-PS Vous trouverez les recommandations actualisées de la mission nationale de coordination opérationnelle risque épidémique et biologique (COREB) sur son site internet : https://www.coreb.infectiologie.com/fr/alertes-infos/covid-19_-n.html. Vous trouverez les différentes recommandations et vidéos pédagogiques mises à disposition par la société française d’hygiène hospitalière : https://www.sf2h.net/publications/coronavirus-2019-ncov. »

A demain

Sous la Dépakine®, le Plavix® : Sanofi refuse 116 millions d’euros à l’Assurance-maladie !

Bonjour

Rebondissement médiatique dans l’affaire de la Dépakine® : le groupe pharmaceutique Sanofi a annoncé lundi 3 février sa mise en examen pour « tromperie aggravée » et « blessures involontaires » dans l’affaire de la commercialisation de ce médicament anti-époleptique de référence. Sanofi fait valoir que cette mise en examen lui permettrait « de faire valoir tous ses moyens de défense et sera l’occasion de démontrer qu’il a respecté son obligation d’information et fait preuve de transparence ».

Le géant pharmaceutique français a par ailleurs assuré qu’il « continuera de coopérer pleinement avec les autorités judiciaires et a toute confiance dans les suites de la procédure ». Aurait-il un instant songé à ne pas pleinement coopérer avec la justice de son pays ?

Ce rebondissement s’inscrit dans le cadre d’une enquête ouverte en 2016 et qui vise  à établir s’il y avait eu « tromperie sur les risques inhérents à l’utilisation du produit et les précautions à prendre ayant eu pour conséquence de rendre son utilisation dangereuse pour la santé de l’être humain » et couvrait la période allant de 1990 à avril 2015.

Un demi-siècle de commercialisation

Le valproate de sodium est commercialisée depuis plus d’un demi-siècle sous la marque Dépakine® par Sanofi. Cette enquête fait suite à une procédure lancée en mai 2016 par l’Association d’aide aux parents d’enfants souffrant du syndrome de l’anticonvulsivant (Apesac), qui représente 4 000 personnes, pour moitié des enfants malades, et s’appuyant sur quatorze cas de mères ayant reçu de la Dépakine lors de leur grossesse.

Rappel : il y a un an précisément on apprenait que Sanofi avait refusé de donner suite aux premières demandes d’indemnisation des victimes de Dépakine®. En d’autres termes il rejettait sur les autorités sanitaires française l’entière responsabilité de ce qui était désormais médiatiquement présenté comme un « scandale sanitaire ». Le Monde précisait alors que la Dépakine® était accusée d’avoir provoqué des malformations et des retards de développement chez des milliers d’enfants dont la mère prenait cet antiépileptique (principe actif : acide valproïque) durant sa  grossesse.

Selon les estimations de l’Assurance-maladie et de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé, la Dépakine®  et ses dérivés sont directement responsable (depuis 1967) de malformations (entre 2 150 et 4 100 cas suspectés) et de troubles du neuro-développement (entre 16 600 et 30 400 cas). Les risques de malformations liées au valproate de sodium ont été mis en lumière par des études scientifiques dès les années 1980 et  les risques neuro-développementaux l’ont été à partir du début des années 2000.

Quand le géant Sanofi osait dénigrer ses concurrents

Voilà pour la Dépakine®. Passons au dossier (moins connu des médias généralistes)  du Plavix® (clopidogrel) dont on imagine qu’il figure en bonne place sur le bureau de Nicolas Revel, directeur général de l’Assurance Maladie. Et ce accompagné d’une croustillant exclusivité des Echos (Yann Duvert @yann-duvert) « Comment l’Assurance-maladie a raté l’occasion de se faire rembourser des millions par Sanofi ». Un petit bijou de papier, un rideau à moitié sur un spectacle financé par des deniers publics mais qui, trop souvent, nous échappe. Une affaire que nous avions pour notre part évoqué fin 2016 : « Sanofi n’aurait pas du dénigrer les génériques pour faire la promotion de son Plavix®».

La Cour de cassation avait alors confirmé une amende de 40,6 millions d’euros infligée à Sanofi en 2013 par l’Autorité de la concurrence, pour avoir mené une campagne de dénigrement des génériques concurrents de son célébrissime antiagrégant plaquettaire. Elle confirmait un jugement de la cour d’appel de Paris de décembre 2014, qui avait « caractérisé une pratique de dénigrement » mise en œuvre pendant cinq mois (entre 2009 et 2010) par le géant français. « La position dominante » de Sanofi avec le Plavix®  et son générique maison, Clopidrogel Winthrop ® , a eu pour effet « de limiter l’entrée de ses concurrents sur le marché français » jugeait la Cour.

Trois ans plus tard, extraits des Echos :

« Parfois, mieux vaut ne pas trop tergiverser, surtout si des millions sont en jeu. La Caisse nationale d’assurancemaladie des travailleurs salariés (CNAMTS) en a fait l’amère expérience, dans le cadre du litige qui l’oppose au laboratoire Sanofi. Alors qu’elle réclamait plus de 115 millions d’euros au géant de la pharmacie, le tribunal de commerce de Paris vient de rejeter sa demande, au motif que l’action engagée était prescrite.

Après la condamnation de l’Autorité de la concurrence et l’amende de 40,6 millions d’euros pour abus de position dominant certains concurrents de Sanofi ont tenté de se faire rembourser le préjudice subi.

« Selon nos informations, Teva, qui a attaqué Sanofi en justice et lui réclamait 30 millions d’euros, a finalement trouvé un accord à l’amiable avec son concurrent. Idem du côté de Sandoz, une filiale de Novartis, qui évaluait son préjudice à 15 millions d’euros environ. Le laboratoire allemand Salutas et le slovène Lek, qui réclamaient respectivement 2 millions et 2,6 millions d’euros, ont fait de même. »

« En revanche, aucun accord n’a été conclu entre Sanofi et la CNAMTS, gestionnaire du régime général de l’assurance-maladie, et par conséquent amenée à rembourser le Plavix aux patients. La Caisse a attaqué le laboratoire devant le tribunal de commerce de Paris, lui réclamant 115,9 millions d’euros. Mais pour une raison inexpliquée, la procédure n’a été lancée qu’en 2017.

« Le tribunal a estimé en octobre dernier que le délai de prescription de cinq ans avait été dépassé. Selon la jurisprudence, ce délai démarre au moment où la CNAMTS a eu connaissance des agissements anticoncurrentiels de Sanofi. Soit selon la justice dès 2011, lorsqu’elle a témoigné auprès du gendarme de la concurrence sur les pratiques du laboratoire. ‘’Dans cette affaire, c’est clairement l’inertie de la CNAM qui a été sanctionnée, d’autant qu’elle aurait pu agir avant la décision de l’Autorité de la concurrence en déposant une assignation, quitte à compléter le dossier ensuite’’, s’étonne un expert. »

Qui a fauté ? Où est la morale ? Contactée par Les Echos la CNAM n’a pas souhaité s’exprimer. Le géant Sanofi, de son côté, n’a pas souhaité faire de commentaires. Nul ne sait où sont les 115,9 millions d’euros en question. Ni ce qu’ils deviendront.

A demain @jynau

Christophe Castaner et la «PMA pour toutes»: les préfets sont priés de ne pas «diverger»

Bonjour

Silence de marbre dans les rangs de la préfectorale. C’est une affaire à bien des égards édifiante. Où l’on apprend que Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur, vient de convoquerle préfet des Pays de la Loire pour le rappeler à « ses obligations » après des propos critiques sur l’ouverture de la PMA « à toutes les femmes ». Une affaire rapportée dans le détail par Médiacités.  (Anthony Torzec). Extraits :

« La réputation de Claude D’Harcourt n’est plus à faire. Le préfet de Loire-Atlantique et des Pays de la Loire est connu pour son style direct. « Cash », même. Trop ? C’est la question qui se posait, hier soir, à l’issue de son discours de vœux prononcé devant les responsables des services de l’État, les élus locaux, parlementaires, représentants des religions et des associations. Au milieu d’un portrait bien sombre de l’année 2019 – année « de fractures, de violences » qui lui « laisse un sentiment de lassitude, d’impuissance » -, le représentant de l’État dans la Région sort soudain de son devoir de réserve pour exprimer ses doutes à propos du projet de loi du gouvernement sur l’ouverture de la procréation médicalement assistée à toutes les femmes. « Le projet de loi bioéthique porte une rupture anthropologique majeure », lâche-t-il, reprenant l’expression employée par l’Académie de médecine en septembre dernier. Un avis « un peu daté » avait jugé, à l’époque, la ministre de la Santé Agnès Buzyn. « A titre personnel, je ne suis pas sûr que cette loi favorise les repères auxquels aspirent nos concitoyens », poursuit le préfet. »

Puis le préfet d’Harcourt poursuit son discours centré autour des malaises de la société française, citant notamment « L’archipel français », récent ouvrage du politologuecentré autour du malaise de notre société, les travaux du philosophe et historien Marcel Gauchet ou encore François Mauriac (1885-1970). Où l’on comprend qu’un préfet peut aussi lire, penser et partager ses idées.

Mais Médiacités de s’interroger. Simple usage de sa liberté d’expression ou entorse à la loyauté dû par le représentant de l’Etat au Gouvernement ? « Le principe de neutralité du service public interdit au fonctionnaire de faire de sa fonction l’instrument d’une propagande quelconque », indique le site fonction-publique.gouv.fr. Cette « obligation de réserve est particulièrement forte pour les titulaires de hautes fonctions administratives en tant qu’ils sont directement concernés par l’exécution de la politique gouvernementale ».      

« Les avis divergents ne sont pas les bienvenus au sein de la fonction publique ».

Médiacités n’en resetra pas là :  « Si personne ne bronche dans le salon de la préfecture aux dorures XVIIIe, chacun a bien retenu la sortie préfectorale. Un élu en particulier ne cache pas sa satisfaction : le vice-président (Les Républicains) du conseil régional des Pays de la Loire Sébastien Pilard. Tout juste rentré de la manifestation parisienne de dimanche « contre la PMA pour toutes », il juge le préfet « courageux » avant d’expliquer à Mediacités qu’il aimerait « que certains politiques aient le même courage ».

«La députée macroniste et candidate à la mairie de Nantes Valérie Oppelt exprime pour sa part sa « surprise ». « Peut-être que le préfet devrait rencontrer les acteurs de ce sujet », conseille-t-elle, en précisant qu’elle a voté cette loi en première lecture. D’habitude si prompt à monter au créneau sur ces questions de société, le président du conseil départemental de Loire-Atlantique, Philippe Grosvalet, préfère « ne pas faire de commentaire ».

Puis voici que le préfet d’Harcourt est convoqué en urgence à Paris, par le ministère de l’Intérieur, mercredi 22 janvier. Pour Christophe Castaner, ces propos constituent une « faute ». Le ministre « a demandé au préfet d’Harcourt de réagir dans la journée », voulant « lui rappeler ses obligations ». « Les avis divergents ne sont pas les bienvenus au sein de la fonction publique ».

A l’issue de cet entretien, le préfet des Pays de la Loire faisait paraître un communiqué dans lequel « il reconnaît que son expression, même s’il a précisé qu’il s’agissait de son opinion personnelle, dès lors qu’elle était publique, était inadéquate (…). Il a eu ce matin l’occasion de fournir ces explications au ministre de l’Intérieur, qui lui a rappelé ses obligations ».

Pour le sénateur socialiste Jean-Pierre Sueur, un préfet « a tout à fait le droit d’avoir sa conception, mais lorsqu’il exerce une mission officielle, il se doit de représenter le gouvernement. Il ne peut pas dire le contraire de ce que disent Nicole Belloubet ou Agnès Buzyn dans le même temps devant le Sénat ». Où comment inciter à faire durablement silence dans les rangs de la vieille préfectorale.

A demain @jynau

«PMA pour toutes» : est-il éthique de vouloir la faire rembourser par la collectivité ?

Bonjour

C’est fait : l’accès aux techniques de PMA « à toutes les femmes » a franchi une étape supplémentaire. Le Sénat, en dépit de l’opposition d’une partie de la droite, a voté cette « disposition-phare ». «L’article 1 a été ‘sauvé’», s’est aussitôt réjouie la sénatrice PS Laurence Rossignol sur Twitter. Tout en exprimant un vif regret :

L’article 1 a été « sauvé » mais nous avons échoué, face à la droite, à conserver le remboursement de la #PMAPourToutes par la sécurité sociale. #DirectSenat

C’est que le Sénat se rangera à la version du texte adoptée en commission : il réserve la prise en charge par l’assurance maladie « aux demandes fondées sur un critère médical ». La gauche a mené bataille sans succès pour rétablir le remboursement pour toutes les femmes (également défendu par le gouvernement). C’est un amendement présenté par la sénatrice LR et rapporteuse du projet de loi, Muriel Jourda, qui a modifie la prise en charge de la PMA par la sécurité sociale : contrairement à ce qu’avaient voté les députés, l’assistance à la procréation médicale ne serait remboursée que dans les cas d’infertilité biologique.

On peut le dire autrement : pour le Sénat seuls les couples hétérosexuels infertiles pourraient bénéficierd’une prise en charge. « Les femmes célibataires ou en couple avec une femme devront quant à elles s’acquitter de la facture, résume France Inter.   » Il ne s’agit pas d’une mesure punitive à l’égard des couples homosexuels », a fait valoir Muriel Jourda pendant les débats, invoquant le texte fondateur de l’assurance maladie. « La solidarité nationale prend en charge la maladie, et pas le type d’acte dont nous sommes en train de discuter », a-t-elle lancé.

On aimerait ici les lumières du directeur général de la CNAM, Nicolas Revel. Le sujet est essentiel : il avait déjà provoqué d’âpres discussions au moment de l’examen du texte par les députés. Les Républicains s’étaient particulièrement opposés à un remboursement universel. « Que la société s’organise pour que les principes de la Sécurité sociale soient dévoyés, c’est un vrai problème« , avait fustigé la députée Valérie Boyer. 

Sur les bancs de la gauche, on dénonce à l’inverse une « rupture d’égalité » entre les couples hétérosexuels d’un côté, et de l’autre les couples homosexuels et les femmes célibataires. Plusieurs amendements ont été déposés afin de revenir à la version initiale du texte. Sans remboursement universel, « on ouvre un droit formel, pas un droit réel », soulignait également l’été dernier la ministre de la Santé Agnès Buzyn sur France Inter, soulignant le faible impact économique de la mesure. 

L’économique et le symbolique

Faible impact économique, peut-être, mais forte dimension symbolique. Actuellement, comme le précise Le Mondele coût total moyen d’une fécondation in vitro s’élève, pour les pouvoirs publics, à près de 5 000 euros, en incluant les traitements, la ponction d’ovocytes, l’hospitalisation, les arrêts de travail. 

C’est dans ce contexte que Jean-François Delfraissy, président du Comité consultatif national d’éthique, s’est exprimé sur RTL. Il a rappelé que ce Comité « avait laissé la porte ouverte mais qu’il était globalement favorable à un remboursement » parce que « ne pas rembourser c’est créer aussi une certaine forme d’inéquité » (sic). Ce qui est un résumé un peu trop rapide de l’avis du Comité qu’il préside 1. Inéquité ou inquité ? Iniquité !

« Iniquité » :  Caractère de ce qui est inique, injuste; injustice grave. 1.  Comportement contraire à l’équité, à la justice.  2. Ce qui est inique; acte commis contrairement à la justice, à l’équité. Suprême iniquité. Commettre une iniquité, des iniquités (Ac. 1835-1935). Mirabeau et l’abbé Grégoire (…) ont surtout défendu les victimes d’iniquités indignes d’une époque de lumières (Weill, Judaïsme,1931, p. 36)

A demain @jynau

1 Extrait de l’avis n°129 du CCNE : « Un autre point à mentionner, apparu dans les États généraux de la bioéthique, est la question de la prise en charge et du remboursement en cas d’ouverture pour les demandes d’AMP pour les couples de femmes et femmes seules et de confronter ce projet aux responsabilités et aux priorités éthiques dans le cadre de la réduction des inégalités en santé. Cette question fait partie intégrante des aspects éthiques du sujet et la solution adoptée (prise en charge complète, ou différenciée sous conditions de ressources quel que soit le type de demande, financement par les mutuelles, ou autres) devra être soigneusement étudiée au regard des critères de justice. »

Nos sénateurs et députés vont-ils autoriser la création d’embryons humains transformés ?

Bonjour

Les médias en ont-ils beaucoup « trop fait » sur l’extension à « toutes les femmes » de l’accès aux techniques de PMA ? Au lendemain de la manifestation parisienne contre ce projet gouvernemental c’est ce que pensent, dans les colonnes de Libération,  Philippe Meirieu, professeur émérite en sciences de l’éducation à l’université Lumière-Lyon II et Hélène Le Gardeur , formatrice en bioéthique .  Ils développent leur (dérangeant) propos dans une tribune intitulée « PMA, un (bel) arbre qui cache la forêt… ». Et rejoignent ici, peu ou prou, les voix de José Bové, Jacques Testart, Dominique Bourg ou Sylviane Agacinski.

Sans remettre en question le bien-fondé de la promesse présidentielle de l’extension des techniques de PMA « à toutes les femmes qui forment le projet d’avoir et d’élever un enfant », M. Meirieu et Mme Le Gardeur  rappellent une donnée malheureusement trop oubliée des médias généralistes  : la loi dite de «bioéthique», actuellement en débat entre l’Assemblée nationale et le Sénat, comporte trente-quatre articles dont trente traitent de sujets sur lesquels le débat public a été largement escamoté.

« Qui sait que cette loi, dans son article 14 (25-26), autorise l’implantation d’embryons humains dans un animal à des fins de gestation ? Qui a compris toutes les conséquences de la suppression de l’actuel article 17 du code de la santé publique («la création d’embryons transgéniques ou chimériques est interdite») et de son remplacement par un nouvel article qui autorise, de fait, la création d’embryons humains génétiquement modifiés avec la technique dite des «ciseaux ADN» ? Qui a vu l’impact de la possibilité (ouverte par l’amendement posé par le Sénat sur l’article 2) donnée à des structures à but lucratif de conserver et de commercialiser des gamètes, des ovocytes et des embryons ? »

Bienvenue chez Frankenstein et à Gattaca

Pour les deux auteurs de cette tribune, ce qui est en train de se décider sous nos yeux « change radicalement le rapport anthropologique de l’humain à la procréation ». « Même si la loi réserve pour le moment – mais pour combien de temps ? – cette possibilité à la recherche, il s’agit bien de pouvoir enlever tel ou tel gène ou d’en remplacer un par un autre pour modifier des embryons humains : rien d’autre que la possibilité de ‘’fabriquer’’ des enfants en manipulant les données génétiques selon notre bon vouloir » ajoutent-ils. Ce n’est pas tout.

« Il n’est plus seulement question de permettre aux femmes de choisir le moment de leur grossesse, il sera possible, dès maintenant et grâce à la congélation d’ovocytes (autorisée à l’article 2), d’améliorer la «performance» des femmes au travail et d’ouvrir la porte à leurs employeurs pour qu’ils décident à leur place de leur maternité. Il n’est plus seulement question de conserver dans des banques de sperme publiques les moyens offerts aux femmes et aux couples infertiles de procréer, il s’agit d’organiser un véritable marché des spermatozoïdes où les officines privées feront sans doute miroiter, moyennant finance, des enfants de meilleure qualité. »

Où l’on en revient, immanquablement, aux marchands et à l’entrée dans Gattaca.

« Comment ne pas voir qu’il s’agit là, tout simplement, de la marchandisation du vivant ? Comment ne pas déceler, dans les interlignes d’une loi qui s’avance masquée sous le vœu légitime de «la PMA pour toutes», la vieille songerie du docteur Frankenstein ? Comment ne pas s’inquiéter des risques d’eugénisme que font courir les techniques légitimées par cette loi : à quand l’élimination systématique des embryons qui ne correspondraient pas exactement à nos vœux ? Et comment ne pas imaginer que nous ouvrons la porte, grâce au recueil systématique des données génétiques (auquel la loi fait référence à de nombreuses reprises), à la mise en place de fichiers dont l’usage par un pouvoir politique ou par des «industries de l’humain» pourrait s’avérer terrifiant ? »

Pour M. Meirieu et Mme Le Gardeur, cette loi dite de «bioéthique» n’est «ni faite ni à faire», le débat sur la bioéthique « a été confisqué ». Entreprises capitalistes et laboratoires de biotechnologie « y trouveront leur compte ». Et « sans un sursaut de démocratie » c’est « l’humain même, dans sa précieuse spécificité, qui est menacé ». Résumons : les sénateurs et les députés français vont-ils, demain, autoriser la création d’embryons humains transformés ?

A demain @jynau

Jacques Testart retrouve José Bové pour dénoncer une humanité génétiquement modifiée

Bonjour

Bloguer c’est, parfois, relayer le contenu des bouteilles lancée dans la mer médiatique. Ainsi cette tribune lancée dans les colonnes du dernier journal vespéral de la capitale : « Nous ne voulons pas d’une humanité génétiquement modifiée ! ». Comme un radeau de la Méduse – esquif essentiel, visible sur tous les écrans mais dont le monde entier se désintéresserait.  Cinq signataires seulement où l’on retrouve l’alliance (moins étonnante qu’il n’y paraît) entre José Bové, éleveur et Jacques Testart, biologiste-essayiste – les deux ici en compagnie de Dominique Bourg, philosophe. Sans oublier Elena Pasca, philosophe, administratrice de la fondation Sciences citoyennes et Michèle Rivasi, députée européenne (EELV).

On attendait Greta Thunberg. Elle n’y est pas. Voici le contenu de leur bouteille :

« La nouvelle loi de bioéthique est en cours d’examen au Sénat. Tandis qu’elle ouvre la PMA aux femmes seules ou en couple, ce texte approfondit en catimini le droit à la modification génétique d’embryons humains à des fins proclamées de recherche. La naissance d’enfants issus de tels embryons, aujourd’hui prohibée, pourrait être la prochaine étape des glissements progressifs validés au fil des ans par le Parlement.

En effet, la loi de bioéthique de 1994 interdisait les expérimentations sur les embryons humains. A partir de 2004, une dérogation était donnée aux chercheurs pouvant prouver qu’ils contribuaient au progrès médical. Puis ce critère a été supprimé en 2013. En octobre 2018, un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques (OPECST) recommandait que les laboratoires se contentent simplement de déclarer leurs travaux.

L’article 17 de la loi en préparation monte d’un cran dans la possibilité de manipuler l’embryon humain. Il supprime, avec le soutien du gouvernement, l’un des fondements de la bioéthique dans l’actuel code de la santé publique : ‘’La création d’embryons transgéniques ou chimériques est interdite.’’  Il remplace ce texte par : ‘’ La modification d’un embryon humain par adjonction de cellules provenant d’autres espèces est interdite.’’ Pourquoi lever l’interdiction absolue de la transgenèse et des chimères ?

La réponse à cette question porte un nom : Crispr-Cas9.

Cette technique d’édition du génome a récemment bouleversé le monde de la recherche. Elle permet de mettre en œuvre, au niveau de la cellule, des ciseaux génétiques à base de protéines qui font automatiquement muter des séquences d’ADN, sans injection d’ADN extérieur. Les ciseaux génétiques créent des mutations facilement et à un coût dérisoire par rapport aux anciennes techniques. Leur usage pourrait à terme devenir massif dans les laboratoires, même si tous leurs effets biologiques sont loin d’être maîtrisés.

Nous connaissons bien cette technique. Monsanto en possède une licence d’utilisation pour créer des semences génétiquement modifiées. Fin 2018, en Chine, elle a permis la naissance de ‘’bébés OGM’’, censés être immunisés contre le virus du sida, hors de tout cadre légal. Avec la levée de l’interdit chimérique et transgénique, Crispr-Cas9 passerait officiellement de la semence agricole à l’humain. La nouvelle loi pourrait donc ouvrir la voie à l’industrialisation de la modification génétique des embryons humains à une vitesse encore jamais atteinte.

Mais le désastre ne s’arrête pas là. Dans son article 15, la loi autoriserait la fabrication de gamètes artificiels à partir de cellules banales de chaque patient. Potentiellement innombrables, ces gamètes, au génome éventuellement modifié, pourraient créer de très nombreux embryons parmi lesquels on choisirait le plus convenable, sans imposer aux patientes les épreuves liées à la fécondation in vitro. Qui refuserait alors, dans le futur, la promesse d’un bébé « zéro défaut » ?

Le risque est grand d’orienter le génome de notre espèce à la suite de choix d’« amélioration » des enfants partout identiques, sous le prétexte qu’une technique est déjà disponible et qu’il est inutile de l’interdire. Le projet nous semble clairement eugéniste.

Les sénateurs et sénatrices sont par conséquent face à l’enjeu anthropologique de permettre à la technologie de modifier notre espèce de façon irréversible. L’usage des ciseaux génétiques et la possibilité de créer des embryons avec des gamètes artificiels doivent les inciter à revenir sur leurs pas : il faut refuser toute modification génétique des embryons humains ou leur sélection génétique massive. Les parlementaires, loin de faire preuve d’un zèle technophobe quelconque, ne feraient que rejoindre d’autres pays comme l’Allemagne et l’Irlande, qui ont déjà fait ce choix.

La naissance de la brebis Dolly en 1996 avait imposé un interdit mondial aux recherches sur le clonage humain. Mais c’était avant que la compétitivité technologique ne régule la bioéthique… Avec les ciseaux génétiques et la possibilité de créer des gamètes artificiels, la ruine de l’âme frappe aux portes du Parlement. Qui s’y trouvera pour les maintenir closes ? »

Mais qui, en janvier 2020, se souvient de la brebis Dolly, premier mammifère créé par clonage ? Qui comprend une phrase évoquant on ne sait quelle « ruine de l’âme » frappant aux portes d’un Parlement français, laïque et républicain ? Qui oserait raisonnablement imaginer, en l’an de grâce 2020, que les modifications génétiques des plantes et des animaux ne précéderont pas celles de l’humain ? 

A demain @jynau

Quel sera le vrai coût de la «PMA pour toutes» ? La Croix contredit gravement le gouvernement

 Bonjour

Quand l’économique rejoint la bioéthique. C’est une enquête menée par La Croix (Loup Besmond de Senneville). Un travail aux conclusions dérangeantes quant aux conséquences pratiques de l’extension à « toutes les femmes » des techniques de procréation médicalement assistée. Résumons le sujet.

Selon le quotidien catholique on compterait, au moins, « 2 400 femmes lesbiennes en couple ou célibataires se rendent chaque année en Belgique et en Espagne pour recourir à une PMA ». Une évaluation qui laisse présager une demande bien supérieure à celle estimée par le gouvernement lorsque la loi de bioéthique permettra la « PMA pour toutes ».

Jusqu’à présent on estimait – sans grande précision – entre 2 000 et 3 000  le nombre des femmes qui pourraient chaque année demander à recourir à une PMA « étendue ».  Et c’est sur cette estimation que s’est fondée l’étude d’impact du gouvernement pour chiffrer le coût d’extension de la PMA : entre 10 et 15 millions d’euros.

Conviction renforcée par les chiffres

Pour établir ce chiffre, le gouvernement s’est fondé sur la seule étude quantitative sur la question : les travaux du chercheur belge Guido Pennings qui s’était penché sur la période 2005-2007, estimant à 760 par an le nombre de femmes françaises allant en Belgique à cette fin.

Pour y voir plus clair, La Croix a tenté d’établir ses propres chiffres, en s’intéressant aux deux pays qui accueillent le plus de Françaises dans leurs cliniques et hôpitaux de procréation médicalement assistée : la Belgique et l’Espagne. On lira la méthode de l’enquête centrée sur les Françaises ayant recours à un don de sperme.

« Impossible de savoir avec certitude, dès aujourd’hui, combien de femmes célibataires ou en couple lesbien recourront à la PMA en France si celle-ci leur est ouverte. Mais tous les professionnels de la procréation anticipent une hausse des demandes. Une conviction renforcée par nos chiffres » explique le quotidien catholique.

« On peut raisonnablement penser que les femmes qui vont à l’étranger représentent 30 % de celles qui en ont les moyens ou osent le faire, analyse Nelly Frydman, pharmacienne-biologiste et responsable du laboratoire de FIV à l’hôpital Antoine-Béclère à Clamart. Est-ce que le nombre de femmes qui vont demander à accéder à la PMA va être multiplié par deux ? Par trois ? ». Que penser, dès lors, de l’étude d’impact gouvernementale, qui estimait le nombre de nouvelles demandes à une fourchette comprise entre 2 000 et 3 000 ? « Ce chiffre est évidemment totalement en dessous de la réalité », répond Nelly Frydman. Pour sa part, Nathalie Rives, présidente de la Fédération française des Cecos, anticipe une multiplication de la demande actuelle par 2,5 ou 3 – et ce en s’appuyant sur le cas du Royaume-Uni, qui a « étendu » la PMA en 2008.

La commercialisation des cellules sexuelles humaines

« Pour ces deux spécialistes, les centres français de PMA pourraient être confrontés à une demande de 3 000 à 7 000 femmes supplémentaires. Une fourchette à comparer aux 1 812 couples hétérosexuels à s’être inscrits pour bénéficier d’un don de sperme en 2017, souligne La Croix. Dans ce cas, le coût de l’extension ne s’élèverait alors plus à 10 à 15 millions comme l’indique l’étude d’impact du gouvernement, mais plutôt à une fourchette comprise entre 20 et 50 millions d’euros. Dans tous les scénarios, le schéma belge pourrait se reproduire : dans ce pays, près de 88 % des PMA avec tiers donneur bénéficient à des couples de femmes ou à des femmes célibataires. »

Conséquence pratique immédiate : le manque de dons de sperme – et ce alors qu’avec 404 donneurs en 2017, l’offre couvre actuellement tout juste la demande. « La demande va forcément dépasser l’offre », prévoit Nelly Frydman, qui demande que les pouvoirs publics organisent rapidement des campagnes pour recruter de nouveaux donneurs. « Sans cela, les gens continueront à aller à l’étranger ».  Dès lors, autre menace : l’appel aux banques (commerciales) de sperme étrangères – comme c’est le cas en Belgique ou au Royaume-Uni.  

« Le risque de marchandisation existe, prévient Nathalie Rives, qui appelle aussi à intensifier les campagnes de recrutement. Sans quoi, nos principes éthiques risquent fortement d’être bousculés. Et pourquoi avoir passé autant de mois à réfléchir sur la révision des lois de bioéthique si c’est pour les abandonner ? » Comment mieux prévenir ?

A demain @jynau

Noël 2019. Haro moral sur les foies gras, insémination artificielle de la femelle panda

Bonjour

Noël et sa crèche. Jésus, Marie, Joseph, le bœuf (qui aurait réchauffé le nouveau-né de son souffle), l’âne (qui a transporté Marie enceinte) et les agneaux des fidèles bergers, premiers informés par les anges.

Noël 2019 dans une France où l’animal (sa place, ses perceptions, son statut) soulève chaque jour de nouvelles questions – à commencer par celle de sa consommation. L’affaire est traitée aujourd’hui dans un « Libé des animaux ». Editorial de Matthieu Ecoiffier :

« Notre événement s’ouvre sur ces «maîtres» qui (mal) traitent leurs animaux de compagnie en les considérant comme des mini-humains. Et propose un petit guide pour éviter de tomber dans la «décanisation» de son chien. Une maltraitance plus light, certes, mais une forme de violence. A l’autre extrémité du spectre, notre enquête met en lumière les dérives de la recherche agronomique qui usine des animaux d’élevage génétiquement modifiés. Jusqu’à créer des porcs ou des poulets qui ne tiennent plus debout.

Face à ces monstruosités, une prise de conscience a lieu, aussi via les réseaux et les vidéos. En mars, le Parti animaliste compte se faire entendre aux municipales. Et nombreux sont ceux qui interrogent leurs propres pratiques. Comme le patron du zoo de Montaigu-la-Brisette. A quoi servent les répliques de grenouilles rares qu’un savant, au milieu des Andes, recrée dans son labo ? Qu’est-ce que pensent les dindes à Noël ? Il n’est pas, en la matière, de réponse toute faite, mais se le demander, c’est déjà sortir de l’illusion anthropocentrique. Car le porc, c’est moi. Les porcs, c’est nous. »

Noël 2019. L’Agence France Presse nous apprend que Huan Huan, la célébrissime femelle panda prêtée à la France par la Chine au Zoo de Beauval (Loir-et-Cher), a été inséminée artificiellement. Cela s’est passé dans la soirée du lundi 23 décembre soir. Une opération décidée après cinq « mises en contact » (sic) manquées avec le mâle Yuan Zi. Une autre insémination pourrait être pratiquée afin de « multiplier les chances » d’obtenir une grossesse, a précisé le chef vétérinaire du zoo, Baptiste Mulot.

Le Monde nous rappelle que le 4 août 2017, Huan Huan (désormais âgée de 11 ans) avait donné naissance à Yuan Meng, premier panda né en France (baptisé par Brigitte Macron) était (déjà) le fruit d’une insémination artificielle. Le jeune mâle, qui doit s’installer en Chine en 2020, a été séparé de sa mère en septembre. Le sevrage et l’indépendance de son premier enfant permettaient à Huan Huan d’être prête pour une nouvelle gestation.

 « Les chaleurs peuvent avoir lieu toute l’année, mais c’est préférentiellement en février et mars. Là, les soigneurs ont constaté des changements dans son comportement , a expliqué M. Mulot. Nous avons procédé à cinq mises en contact, mais il n’y a pas eu d’accouplement réussi. Le mâle manquait d’expérience et n’a pas réussi ». Il faut ici savoir que la période de fertilité ne durant que 48 heures. C’est ainsi que dans le Loir-et-Cher l’équipe du zoo, épaulée par un scientifique chinois, a décidé de procéder à une insémination artificielle. Yuan Zi a été endormi quarante-cinq minutes pour un prélèvement de sperme, avant que Huan Huan ne soit anesthésiée trente minutes pour l’insémination. « Ils se sont réveillés normalement. A priori, cela ne les a pas perturbés », a assuré M. Mulot ; 50 % de chances de succès.

La réussite de l’insémination pratiquée dans la nuit de lundi à mardi ne pourra être évaluée que dans quelques mois : les femelles pandas ont en effet la faculté (rarissime dans le règne animal) d’arrêter le développement du fœtus si elles estiment que la période est « peu favorable ». L’homme parle ici de « diapause ».

Noël 2019. Le Parisien (Émilie Torgemen) se consacre au foie gras (de canard et/ou d’oie). Question : peut-on encore manger un aliment dont l’obtention est jugé barbare par les défenseurs des animaux ? Un délice gustatif qui va bientôt être interdit à New York ? « Entre le gastronome qui se fait une joie de préparer chaque année son foie gras à l’armagnac, et l’ado qui refuse catégoriquement d’en avaler la moindre bouchée, il y a tout un nuancier de Français qui culpabilisent désormais en dégustant leur toast » peut-on lire dans Le Parisien. Qui ajoute toutefois que selon un sondage commandé par le Comité interprofessionnel du foie gras (Cifog), près de huit Français sur dix (77 %) prévoient d’en manger (en terrine ou poêlé) pendant les fêtes.

Il faut toutefois compter avec la publication, le 11 décembre, d’une vidéo sur les maltraitances subies par les canards à gaver. « Diffusées par l’association de défense des animaux L214, les images indigestes ont été tournées au domaine de la Peyrousse, en Dordogne dont le foie gras a reçu la médaille d’or au concours général agricole cette année, ne craint pas d’écrire Le Parisien. On y voit notamment des canetons femelles abandonnés dans une benne jusqu’à ce que mort s’ensuive parce qu’on ne conserve que les mâles au foie plus gros et moins innervés. Les tuer est légal à condition de les broyer ou de les gazer immédiatement. L’association a porté plainte pour cette infraction et réclame des « sanctions exemplaires ».

« Les membres de L214 sont des marchands de peur, leur stratégie, c’est le sensationnalisme et la théâtralisation pour interdire l’élevage ! » défend la directrice du Cifog, Marie-Pierre Pé, qui met en cause la véracité des images d’oisons agonisant dans les bacs équarrissage. Il n’en reste pas moins vrai que vingt pays de l’Union européenne ont interdit le « gavage-stéatose » – ainsi que la Flandre et la région de Bruxelles. Seuls quatre le pratiquent encore : France, Espagne, Hongrie, Bulgarie – sans oublier la Wallonie.

Marie-Pierre Pé : « Il ne faut pas tout mélanger, les canards ne sont pas des humains, ils ne souffrent pas quand on les gave, leur gosier est extensible comme des bas en nylon (sic). Les dirigeants de L214 sont des pros de la communication qui font semblant d’ignorer que le sort des canards s’est bien amélioré depuis trente ans. »

Noël 2019. On lira, dans Libé (Catherine Calvet) le dérangeant entretien  avec l’éthologue Fabienne Delfour 1 : «Tous les animaux s’expriment, ont des émotions et même des jugements moraux». Est-ce dire que les animaux jugeraient les humains qui, après une halte devant la crèche, consomment des foies de volatiles gavés ?

A demain @jynau

1 Fabienne Delfour Que pensent les dindes de Noël ? Oser se mettre à la place de l’animal Tana, 252 pp., 18,90 €.

Combien de temps la France pourra-t-elle interdire le transfert d’embryons post mortem ?

Bonjour

C’est une décision toujours  bien difficile à accepter – elle deviendra sous peu impossible à justifier. 

Le tribunal administratif de Rennes vient de rejeter la demande d’une femme qui souhaitait le transfert en Espagne d’embryons conçus de son vivant avec son époux décédé. Cette femme avait saisi le tribunal en référé pour obtenir la suspension d’une décision du CHU  de Brest lui rappelant  que «le transfert d’embryons post-mortem n’était pas autorisé» en France. La femme demandait que ce transfert soit effectué vers un centre de reproduction assistée à Barcelone.

Le couple avait eu un premier enfant en 2014, puis un deuxième, cette fois par PMA en 2018, après que l’époux soit tombé gravement malade en 2017. Le CHU de Brest conservait pour sa part quatre embryons par congélation. Le couple avait alors émis le souhait d’avoir «au moins» un troisième enfant, a fait valoir l’avocate de la requérante, mais l’homme est décédé en avril dernier.

Contrairement à la loi française, la loi espagnole autorise la procréation post-mortem dans les douze mois suivant le décès du mari – soit, dans ce cas,  jusqu’en avril prochain. «Le projet de transfert d’embryon à l’étranger poursuivi» par l’épouse «a pour effet de contourner les dispositions législatives françaises qui font obstacle à sa réalisation», ont considéré les trois juges rennais qui ont statué sur cette affaire. «Cette décision de refus ne porte donc pas une atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale», contrairement à ce qu’affirme la plaignante, peut-on lire dans la décision du tribunal dont l’AFP a eu connaissance.

«C’est une décision très dure», a commenté l’avocate de la plaignante, Me Catherine Logéat. Accepter la PMA pour les personnes seules implique de se poser la question sur le cas des couples dont l’époux est décédé». De fait l’Assemblée nationale a adopté en octobre un projet de loi bioéthique qui prévoit notamment l’ouverture de la PMA à toutes les femmes, qu’il s’agisse de femmes célibataires ou de couples de lesbiennes – mais qui, à la demande d’Agnès Buzyn,  refuse la PMA pratiquée post mortem

Ici les quatre embryons conservés par le CHU de Brest ne peuvent plus, selon la loi en vigueur, qu’être donnés, utilisés à des fins de recherche ou détruits. C’est une décision qui, une fois la loi de bioéthique promulguée, sera difficile à justifier.

Le sujet avait été  traité il y a un an par le Comité national d’éthique :

« Le Comité, dans l’avis 113, publié en février 2011, avait analysé ce type de demande, en distinguant clairement le transfert d’embryon après le décès du membre du couple de l’utilisation post mortem du sperme congelé. Concernant l’utilisation post mortem du sperme cryoconservé, il ne semblait pas opportun à la majorité des membres du CCNE de revenir sur son interdiction, notamment parce que le caractère du consentement du futur géniteur au moment même de la procréation est alors difficilement vérifiable.

« En revanche, le Comité considérait que les couples engagés dans une procédure d’assistance médicale à la procréation ayant donné lieu à la cryoconservation d’embryons dits ‘’surnuméraires’’ avaient seuls le pouvoir de décider du sort de ces embryons. Si l’homme décède, c’est à la femme qu’il revient de prendre toute décision sur le devenir de l’embryon cryoconservé sauf, paradoxalement, celle de demander son transfert in utero dans l’espoir de mener à bien une grossesse, la loi lui interdisant, en effet, de poursuivre le projet parental dans lequel elle s’était engagée avec son conjoint décédé. La majorité des membres du Comité  avait considéré et considère toujours que le transfert in utero d’un embryon après le décès de l’homme faisant partie du couple devrait pouvoir être autorisé (…) ».

Le législateur entendra-t-il la voix de l’éthique ?

A demain @jynau

GPA : en France, maintenant, deux hommes pourront être légalement les deux parents…

Bonjour

Suspension-commentaire. Car quoique soutiendront les juristes c’est bien une nouvelle étape vers l’acceptation, en France, d’une pratique aujourd’hui prohibée, celle des « mères porteuses » (GPA). Depuis le 18 décembre 2019 deux membres d’un couple d’hommes (et non plus le seul « père biologique ») peuvent être « intégralement reconnus en France comme parents d’un enfant né à l’étranger au terme d’une GPA ». Ainsi a statué la Cour de cassation dans deux arrêts.

La Cour a ainsi élargi sa jurisprudence concernant la filiation des enfants nés par mère porteuse  en validant l’entière transcription à l’état civil des actes de naissance dans le cas de deux couples d’hommes. Les explications (nous soulignons) :

Les faits

« Deux couples d’hommes, l’un marié, l’autre pas, ont recours à la gestation pour autrui en Californie et au Nevada, où la GPA est légale. Les enfants naissent en 2014. Leurs actes de naissance sont établis aux Etats-Unis, conformément au droit local. Ces actes de naissance réguliers désignent le père biologique et son époux ou compagnon comme « parent ». Dans l’un des couples, les deux hommes sont de nationalité française, dans l’autre, l’un est français, l’autre belge. Dans les deux cas, les enfants vivent au foyer des intéressés depuis leur naissance. »

La procédure

« Le ministère public s’oppose à la transcription des actes de naissance sur les registres de l’état civil français. En 2017, le tribunal de grande instance de Nantes admet la transcription intégrale des actes de naissance en France. En 2018, la cour d’appel admet la transcription partielle des actes en ce qu’ils désignent le père biologique mais refuse cette transcription en ce qu’ils désignent le « père d’intention » ».

 La question posée à la Cour de cassation

L’acte de naissance étranger d’un enfant désignant un homme en qualité de père et un autre en qualité de parent peut-il être transcrit sur les registres de l’état civil français ?

La réponse de la Cour de cassation

« En droit français, les conventions de GPA sont interdites. Toutefois, au regard de l’intérêt supérieur de l’enfant (art. 3§1 de la Convention de New York sur les droits de l’enfant) et pour ne pas porter une atteinte disproportionnée au respect de sa vie privée (art. 8 de la Convention EDH), une GPA réalisée à l’étranger ne peut faire, à elle seule, obstacle à la reconnaissance en France d’un lien de filiation avec la mère d’intention. Cette reconnaissance doit avoir lieu au plus tard lorsque le lien entre l’enfant et la mère d’intention s’est concrétisé. Cette solution a été consacrée dans un arrêt de la Cour de cassation du 4 octobre 2019, qui a ordonné la transcription d’un acte de naissance désignant le père biologique et son épouse. »

« Dans ses deux arrêts du 18 décembre 2019, la Cour de cassation étend cette solution en ordonnant la transcription d’un acte de naissance désignant le père biologique et son compagnon ou son époux, dès lors que celui-ci est probant au sens de l’article 47 du code civil. Elle considère en effet qu’en présence d’une demande de transcription, ni la circonstance que l’enfant soit né à l’issue d’une GPA ni la circonstance que l’acte désigne le père biologique de l’enfant et un deuxième homme comme père ou parent ne constituent des obstacles à la transcription, à condition toutefois que l’acte étranger soit régulier, exempt de fraude et conforme au droit de l’Etat dans lequel il a été établi. »

La haute juridiction étend ainsi aux couples d’hommes sa jurisprudence d’octobre s’agissant de la « mère d’intention » dans les couples hétérosexuels, celle qui a désiré et élevé l’enfant mais n’en a pas accouché.

« La Cour de cassation dit, pour la première fois, que les actes d’état civil étrangers doivent être transcrits dès lors qu’ils sont réguliers. C’est capital, a commenté Me Françoise Thouin-Palat, avocate des couples concernés. La Cour s’est indéniablement distanciée d’une conception purement biologique de la filiation et, avec elle, de l’affirmation selon laquelle la vérité de la maternité serait dans l’accouchement. »

Quoiqu’en diront les juristes c’est bien une nouvelle étape vers l’acceptation, en France de la GPA – une pratique explicitement interdite depuis un quart de siècle – et ce « au nom du respect du corps humain » – Loi n° 94-653 du 29 juillet 1994 (François Mitterrand, Edouard Balladur, Simone Veil, Charles Pasqua, Pierre Méhaignerie, François Léotard, Françpis Fillon, Dominique Perben, Philippe Douste-Blazy).

« Cette loi inscrit dans le code civil le principe de la primauté de la personne et pose l’interdiction de toute atteinte à la dignité de celle-ci. Elle affirme la garantie du respect de l’être humain dès le commencement de sa vie et prévoit qu’il ne peut être porté atteinte à l’intégrité du corps humain qu’en cas de nécessité thérapeutique pour la personne. Elle consacre également le principe de l’intégrité de l’espèce humaine. Par ailleurs cette loi encadre l’étude génétique des caractéristiques d’une personne et l’identification d’une personne par ses empreintes génétiques. »

Depuis un quart de siècle, certes. Et, maintenant, jusqu’à quand ?

A demain @jynau