N° d’appel médico-pychologique le « 19 » : le gouvernement entendra-t-il Xavier Bertrand ?

Bonjour

24/03/2020. C’est un ancien ministre de la Santé, toujours homme politique (LR), qui n’a rien oublié de ses dossiers Xavier Bertrand, aujourd’hui président d’une région, les Hauts-de-France, qui fut l’une des premières touchées par l’épidémie. Invité, le 23 mars, sur France Inter, il a abordé un sujet qui n’est pas encore devenu pleinement d’actualité, les conséquences médico-psychologiques liées aux mesures de confinement et à leur durée.

L’ancien ministre de la Santé rappelle que « le confinement, c’est pas une option, c’est pas fait pour embêter les gens : c’est tout simplement que tant que vous n’avez pas de vaccin ou de traitement, le confinement est le meilleur moyen de freiner et de stopper l’épidémie. Il n’y a pas d’autre solution, il faut le respecter et ceux qui s’amusent à le braver doivent être punis pour comprendre. Ils se mettent en danger eux-mêmes et mettent en danger ceux qu’ils aiment. »

« La semaine qui commence va être plus dure que la précédente, explique-t-il. C’est une épreuve collective et individuelle, et nous devons anticiper ce que vont vivre des millions de nos concitoyens. » C’est pourquoi il souhaite  la mise en place d’«un numéro d’appel national, dès cette fin de semaine, qui pourrait être le ’19’». «Il permettrait à chaque personne de pouvoir être en contact avec quelqu’un qui lui répond. Ça peut être des conseils, de l’aide, un soutien médico-psychologique», a-t-il proposé, assurant que «chaque foyer est comme une cocotte-minute».

Pour n’être pas nouvelle, la métaphore de la cocotte-minute est ici parfaitement adaptée. Nous devrions apprendre sous peu la prolongation de la durée de l’actuel confinement auquel la France est soumise. Il n’est pas trop tard pour que l’exécutif commence à traduire dans les faits la suggestion de Xavier Bertrand. Ce dernier propose, d’ores et déjà, un nom pour un tel projet : le Dr Xavier Emmanuelli.

A demain @jynau

Coronavirus: «Respiration démocratique», les municipales ne seront pas reportées

Bonjour

09/03/2020. L’inconscient politique est-il, lui aussi, « structuré comme un langage » ? A six jours du premier tour des élections municipales le Premie ministre Edouard Philippe a écrit aux élus locaux. « Les élections constituent, dans la vie de nos territoires, un moment de respiration démocratique essentiel. Il n’est donc aucunement question de les reporter », a fait savoir le premier ministre dans une lettre que Le Monde est parvenu à se procurer.

Des mesures seront donc mises en place pour assurer la bonne tenue du scrutin. Les « mesures barrières » (ne pas se faire la bise, ne pas se serrer la main, éternuer dans son coude etc.) seront rappelées sur tout le territoire national par de petites affichettes dans les bureaux de vote. Les files d’attente devront être « gérées » afin de « limiter les situations de promiscuité prolongée ».

Gants et Gels

« D’autres questions, relatives aux surfaces de contact que constituent les bulletins de vote, les stylos utilisés pour l’émargement, le nettoyage régulier, le cas échéant, des machines à voter, et le nettoyage des bureaux de vote, pourront faire l’objet de recommandations complémentaires », poursuit le Premier ministre français.

Enfin, « une attention particulière sera apportée aux procurations », pour les personnes dans l’incapacité de se déplacer « en particulier pour des raisons liées à la situation sanitaire », comme les personnes âgées vivant en Etablissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (Ehpad) ou des personnes rendues vulnérables par des maladies du système immunitaire.

Indépendamment de cette missive, l’exécutif a fait savoir qu’à Mulhouse, foyer majeur du coronavirus, des gants chirurgicaux et du gel hydroalcoolique seront mis à disposition des électeurs. On peut raisonnablement imaginer, à J-6, que gants et gels seront, dimanche, disponibles un peu partout en France.

A demain @jynau

Coronavirus: après l’Italie, la France pourrait-elle décréter, demain, une «quarantaine géante» ?

Bonjour

08/07/2020. Point n’est besoin, aujourd’hui, d’être dans les petits et grands secrets du Palais de l’Elysée. La décision spectaculaire (courageuse et à très haut risque) prise hier par le gouvernement italien sera au cœur, en début de soirée, du nouveau Conseil de défense réuni autour d’Emmanuel Macron. Avec une question centrale : le pouvoir exécutif français pourrait-il, le cas échéant, prendre une décision équivalente – une mesure drastique qui conduirait, schématiquement, à placer en quarantaine l’Est du pays, une fraction des Hauts-de-France voire d’une fraction de la Bretagne ? Le tout pendant la tenue des élections municipales. On imagine sans mal la somme des inconnues associées à une telle équation sanitaire, économique, sociétale, diplomatique – éminemment politique.

C’est par la presse que les seize millions d’habitants d’une douzaine de provinces italiennes, dont la Lombardie et la Vénétie ont appris, nier qu’ils seraient mis en quarantaine dès aujourd’hui et jusqu’au 3 avril. Début de panique.  Avant même la confirmation des autorités – par la voix du Premier ministre Giuseppe Conte – la panique s’est emparée de centaines de Milanais « en fuite », qui se sont rués à la gare centrale, rapporte Il Tempo. « On a assisté à un assaut des trains de nuit en direction de Rome et du sud ». Sans surprise, lors d’une conférence de presse, tard dans la soirée, M. Conte a dénoncé l’irresponsabilité des médias, qui ont publié son projet de décret avant sa finalisation – pour autant il a confirmé les mesures draconiennes instaurées ce week-end, notamment les strictes limitations pour entrer et sortir des régions concernées.

« Les discothèques, les salles de sport, les piscines, les musées et les stations de ski seront fermés, précise la BBC, citée par Courrier International. Les compétitions sportives se joueront à huis clos et le président du syndicat des footballeurs a demandé l’arrêt du championnat italien »

« Etre responsable, ne pas faire les malins »

Avec près de 6 000 cas et 233 morts, l’Italie est le troisième pays le plus touché au niveau mondial. Les vingt-et-une régions sont toutes concernées, mais l’essentiel des cas est concentré dans le Nord, en Lombardie, en Emilie-Romagne et en Vénétie. Le pays a enregistré trente-six nouveaux morts liés au coronavirus en vingt-quatre heures, tandis que le nombre de cas est monté à 5 883 (+ 1 247) – bilan officiel publié le 7 mars.

L’objectif de ces mesures est à la fois de « contenir la propagation du virus, et d’agir pour éviter l’engorgement des structures hospitalières » explique le Premier ministre italien, cité par Il Corriere della Sera. Ces mesures entraîneront des désagréments, mais c’est le moment d’être responsables, pas de faire les malins ». Etre responsable ? Ne pas faire les malins ? Emmanuel Macron ou Edouard Philippe tiendront-ils, demain, des propos équivalents ?

Selon le texte publié sur le site du gouvernement italien, les déplacements dans une vaste et riche zone du nord du pays (qui englobe Milan et Venise) devront être limités à « des impératifs professionnels dûment vérifiés et à des situations d’urgence, pour des raisons de santé ». Pour éviter les déplacements à caractère professionnel, les entreprises, publiques et privées, sont invitées à mettre leur personnel en vacances.

Rome a également ordonné la fermeture des cinémas, théâtres, musées, pubs, salles de jeux, écoles de danse, discothèques et autres lieux similaires, sur l’ensemble du territoire national. Il sera en revanche toujours possible de faire ses courses, les jours de semaine, ou d’aller dans un bar ou un restaurant – à condition toutefois de respecter la distance de sécurité d’au moins un mètre entre les clients.

La dynamique virale croissante est en place

Tous les événements et compétitions sportives, quelque qu’en soit la nature, sont suspendus. Seules les compétitions ou entraînements des sportifs professionnels participant aux Jeux Olympiques ou à des manifestations nationales ou internationales sont autorisés, à condition qu’ils aient lieu à guichets fermés. Toute personne dont la contamination au coronavirus aura été confirmée sera obligatoirement assignée à résidence.

A l’évidence la France n’est pas dans la situation italienne (près de mille cas et seize décès recensés) et rien, en l’état de la situation épidémiologique de justifierait de prendre de telles mesures de confinement géant. Pour autant la dynamique virale croissante est en place. En dépit des mesures prises l’agent pathogène venu de Chine circule, à plus ou moins bas bruit sur des zones élargies du territoire national 1 et le pouvoir exécutif fait, comme il s’y était engagé toute la transparence sur la situation et son évolution – ce qu, paradoxalement peut ne pas être sans effets anxiogènes.

C’est dire l’importance, dans la soirée, des conclusions qu’annoncera, au regard des décisions prises par Rome, le Palais de l’Elysée.

A demain @jynau

1 Caractère évangéliste. A titre de précaution le préfet de Seine-Saint-Denis a interdit « un rassemblement à caractère évangéliste » ce week-end au Blanc-Mesnil, « susceptible de réunir jusqu’à 2 000 personnes provenant de plusieurs départements ». On sait qu’une rencontre similaire organisée fin février à Mulhouse (Haut-Rhin) a généré des dizaines de contaminations en différents endroits du territoire national , jusqu’en Guyane. Sur ce thème, dans Le Monde (Patricia Jolly) : « Coronavirus : à Mulhouse, l’église évangélique La Porte ouverte identifiée comme un foyer important de contamination Plus de 2 000 personnes – dont environ 300 enfants –, venues de toute la France et de pays limitrophes, s’y sont réunies en février dans le cadre d’une semaine de jeûne et de prière. »

Débat politique : MM Christophe Castaner et Olivier Faure se font la guerre sur France Inter

Bonjour

19 février 2020. Jusqu’où descendra-t-on sous la ligne de flottaison ? Les citoyens-auditeurs de France Inter ont, ce matin, dressé l’oreille à la fin de l’échange entre les journalistes et Christophe Castaner, ministre de l’Intérieur. Tout avait été presque parfait : le ministre expliquait ce qu’avait dit la veille le Président sur les mosquées, l’islam, la laïcité menacée …. Colères et menaces rentrées… Puis, soudain, la fin, explosive, quand on aborda l’affaire Griveaux des vidéos-intimes-à-caractère-sexuel-mises-sur-les-réseaux-sociaux. Politique et morale, morale personnelle et vie publique, intimité et liberté … Erreur ou faute …  Et puis, soudain, cette sortie ministérielle concernant Olivier Faure, premier secrétaire du Part socialiste :

 « Les politiques doivent rester des femmes et des hommes, sinon ils se coupent de la réalité. Je suis un père de famile. (…) J’ai été surpris d’entendre à votre micro Olivier Faure, que je connais bien et que j’ai accompagné dans ses divorces, dans ses séparations … J’ai été assez étonné de ses leçons de morale. ».

Rappel, sur cette même antenne, début février, M. Faure s’était tristement illustré en comparant certains de ses anciens amis politiques socialistes à des « alcooliques anonymes ». Ce n’est pas cette comparaison qui avait semble-t-il heurté l’actuel ministre de l’Intérieur. Mais celle-ci, au même micro matinal, le 17 février, à propos de la vidéo de l’ancien candidat à la mairie de Paris :

« Quand vous êtes un décideur public, un ministre, vous devez prendre toutes les précautions d’usage, pour ne jamais être à portée des maîtres chanteurs. Imaginez une vidéo qui ne serait pas diffusée, et un maître chanteur qui en permanence revient vous voir pour vous faire prendre des décisions sous menace de la diffuser. Il ne faut jamais se rendre vulnérable. »  

Rancœur et ligne de flottaison

Olivier Faure avait alors précisé toutefois qu’il ne souhaiterait pas une telle mésaventure « à son pire ennemi ». Et aussitôt, ce matin, M. Faure de convoquer une conférence de presse pour réagir à la saillie de Christophe Castaner. « L’affaire est trop grave », fait-on remarquer au cabinet du premier secrétaire du Parti socialiste. « Le député de Seine-et-Marne estime qu’une attaque sur la vie privée d’un opposant mérite une riposte et veut ainsi rappeler solennellement quelques principes du débat public » rapporte Le Monde (Sylvia Zappi). Et notre consœur de se souvenir :

« MM. Castaner et Faure se connaissent bien. Avec Benoît Hamon, ils ont tous les deux fait leurs classes chez les jeunes rocardiens et sont restés longtemps proches au sein du PS. Membres des mêmes courants et partageant la même approche sociale-démocrate. Jusqu’à ce que le maire de Forcalquier rompe avec le PS et rejoigne le mouvement En marche d’Emmanuel Macron. Depuis, la rancœur s’est installée. »

Christophe Castaner avait été ciblé par M. Faure après le « moment de détente » que le ministre de l’Intérieur s’était octroyé dans une boîte de nuit parisienne en mars 2019, en plein mouvement des « gilets jaunes ». « Quand on est ministre de l’intérieur, on est 24 heures sur 24 au service de la République. Imaginez qu’à l’heure où il était en boîte de nuit, il y ait eu un attentat. Imaginez qu’on l’ait retrouvé à moitié saoul. Il y a quand même une dignité à assumer jour et nuit », avait-il déclaré.

Aujourd’hui M. Castaner rappelle qu’il a passé la dernière nuit de la Saint-Sylvestre avec les gendarmes, les pompiers et les policiers. Depuis quelques heures de nombreuses personnalités ont critiqué les propos de Christophe Castaner. « Ministre de l’intérieur de la cour de recréation. Franchement, on savait que ça volait pas très haut, mais là on atteint un niveau… », a tweeté Raphaël Glucksmann, député européen élu apparenté PS. « On savait que c’était un mauvais ministre, c’est aussi un mauvais pote ! Et puis sur la morale d’un autre siècle », a enchaîné Elsa Faucillon, députée PCF des Hauts-de-Seine.

Jusqu’à la droite où la saillie a choqué. Bruno Retailleau, président du groupe LR au Sénat.

 « Olivier Faure a rappelé une évidence : Benjamin Griveaux a manqué de prudence et a commis une faute. En attaquant Olivier Faure sur sa vie privée, Christophe Castaner fait la preuve de la bassesse dont est capable ce pouvoir qui dégrade chaque jour davantage le climat politique ».

Pour sa part Olivier Faure a tenu une conférence presse le même jour à l’Assemblée nationale. «Christophe Castaner a commis une faute grave, a-t-il dénoncé. Dès lors, il appartient au président de la République, garant de nos institutions, de convoquer le ministre de l’Intérieur dans les meilleurs délais et d’en tirer les conséquences.»

Est-ce une nouvelle menace ? Qui nous dira où se situe la ligne de flottaison ? Et qui, le moment venu, écopera ?

A demain @jynau

Quand Benjamin Griveaux annonçait, à Paris, les maison de santé et le «droit au répit»

Bonjour

On ne devrait jamais, le lendemain, relire un quotidien. Le 13 février on pouvait découvrir ceci dans les colonnes du Quotidien du Médecin (Stéphane Long) :

 « Le candidat de LREM (La République en marche) aux municipales de Paris a dévoilé son programme ce jeudi 13 février. En matière de santé, Benjamin Griveaux veut mettre fin aux problèmes d’accès aux soins de premier recours dans la capitale. Sa recette ? Développer un réseau de maisons de santé, ouverts 7 jours sur 7, de 7 heures du matin à minuit. Soixante-dix de ces structures seraient ainsi créées à Paris d’ici à 2026, selon les propos de l’équipe du candidat, recueillis par France Info.

Objectif : que chaque Parisien soit à dix minutes maximum en transport en commun de ces cabinets.La mairie fournirait gratuitement les locaux aux médecins candidats à l’installation contre un engagement de leur part à ne pas pratiquer de dépassements d’honoraires. Si cela ne suffisait pas, elle n’écarte pas la possibilité de salarier des professionnels. »

On apprenait encore que Benjamin Griveaux souhaitait également permettre aux personnes âgées de rester chez elles le plus longtemps possible en développant « des programmes d’EHPAD à domicile ». Pour que les aînés ne soient pas contraints de quitter la ville, il faut également « lancer un plan massif de sécurisation, d’accessibilité et rénovation des trottoirs », a assuré le candidat. Autre mesure, cette fois à destination des aidants : le « droit au répit » offrant aux aidants familiaux la possibilité de se reposer dix jours par an grâce à la prise en charge de la personne aidée par des établissements spécialisés.  

On connaît la suite, et la mise en abyme du sordide. On ne devrait jamais relire un quotidien.

A demain @jynau

Suite à la mort de l’infirmière poignardée, le cri du «Printemps de la psychiatrie»

Bonjour

14 février 2020. Depuis l’aube les médias généralistes bruissent à l’unisson des ravages politiques induits par des « vidéos-intimes-à-caractère-sexuel-postées-sur-les réseaux-sociaux » 1. On trouve néanmoins quelques échos de la mort, le 13 février,  d’une infirmière, âgée de 30 ans mortellement poignardée à l’arme blanche par un patient d’une unité psychiatrique à Thouars, dans les Deux-Sèvres. Cette infirmière, mère de deux enfants, a été agressée par un patient, âgé de 20 ans, qui cherchait à quitter cette unité psychiatrique du Centre hospitalier Nord Deux-Sèvres. Il lui a porté un coup de couteau au thorax, manquant de blesser également une autre infirmière. Héliportée au CHU de Poitiers, la jeune femme est morte peu après.

Il y a quelques heures Le Monde renvoyait à « La psychiatrie ‘’au bord de l’implosion’’ en France » (18 septembre 2019). Il faut aussi, désormais, compter avec un texte du « Printemps de la psychiatrie » 2. Un exercice difficile puisque ses auteurs reconnaissent ne pas avoit les détails de l’enchaînement des faits, sur l’effectif du service, sur les conditions d’hospitalisation, sur l’état clinique de ce patient, sur l’état de saturation du service de l’hôpital … ce qui « les invite à la prudence ».

Pour autant ce texte (nous soulignons):

« Cette situation est inacceptable. Il est inacceptable qu’une professionnelle de santé meurt dans l’exercice de ses fonctions. Il est inacceptable qu’une personne hospitalisée pour des soins recourt à un tel acte de violence. Il est également inacceptable que toute cette horreur se produisent dans le climat de destruction de l’hôpital public et de la psychiatrie publique en particulier (…)

« Ce que nous savons, de manière générale, c’est que depuis 2008 l’augmentation des moyens en psychiatrie finance exclusivement du sécuritaire (chambres d’isolement, caméras de surveillance, renforcement de la hauteur des murs…). Aucun investissement dans des moyens humains n’a été fait sauf à créer des unités pour malades difficiles et des unités d’hospitalisation spécialement aménagées (UHSA) pour les détenus.

«  Douze ans plus tard, après des mois de lutte, les soignants sont toujours dans la rue pour dénoncer la honte quotidienne dans l’exercice de leur travail, l’indignité des conditions d’accueil et de soins des patients, les tensions régnantes à l’hôpital tant avec l’administration, entre collègues, avec les usagers etc.

«  Depuis plus d’une dizaine d’années, les rapports du contrôleur général des lieux de privation de liberté indiquent la déshumanisation globale qui règne dans la psychiatrie publique, le sous-effectif, le manque de formation, les maltraitances ordinaires…

« Quand allons-nous arrêter ces politiques criminelles qui sont un terrain propice à ce que le pire surgisse ? Politiques de santé qui non seulement n’arrangent rien mais aggravent encore plus la situation et sa brutalité. »

Sanctuaire couvert par la dissuasion nucléaire

S’ils ne savent rien des causes précises du drame deThouars, il connaissent bien, en revanche,  « la catastrophe qui sévit dans l’hôpital public dans son ensemble et dans les secteurs de psychiatrie en particulier ».  « Nous vivons au quotidien des drames : des personnes qui se suicident, des professionnels en burn-out, des usagers attachés et enfermés quand ils ne sont pas mis à la rue faute de structures ambulatoires, des familles qui ne sont pas entendues ni écoutées… »

Ils observent encore, depuis leur spécialité, que « la violence de la société s’infiltre dans tous les espaces de la société » et que « le monde du soin n’y échappe pas ».

Pour que des drames de la sorte ne puissent pas se répéter facilement, il faudrait, selon eux, « pouvoir prendre le temps de soigner, prendre le temps d’écouter et d’apaiser, avoir le temps de se soigner, créer un climat de confiance entre toutes les personnes présentes dans les lieux de soins… ». Il faudrait, au minimum, « sanctuariser les secteurs du lien humain et d’arrêter d’appliquer des logiques comptables, gestionnaires et déshumanisants qui renforcent toujours plus le terreau favorable au pire ».

Comment traduit-on, dans la novlangue managériale de l’hôpital décrite par le Pr Stéphane Velut 3 , le terme « sanctuariser » (Donner à un territoire le caractère d’un sanctuaire couvert par la dissuasion nucléaire) ?

A demain @jynau

1 Une affaire sordide autant que tristement éclairante quant au poids des « réseaux sociaux » dans le champ politique – une affaire dans laquelle réapparaît l’omniprésent et toujours inquiétant Dr Laurent Alexandre.

2 Voir ici le texte et les signataires du  manifeste « Pour un renouveau des soins psychiques »

3 Velut S,  L’hôpital une nouvelle industrie. Le langage comme symptôme  Editions Gallimard. Collection Tracts. 3,90 euros

Stress post-traumatique: nouvelles lumières cérébrales sur les «résurgences intempestives»

Bonjour

Voici, plus de cinq ans après les « attentats de Paris et Saint-Denis », une publication de Science . Un travail dirigé par Francis Eustache et Pierre Gagnepain (université de Caen/Normandie, CHU de Caen, GIP Cyceron, Neuropsychologie et Imagerie de la Mémoire Humaine). Une recherche dont les fruits ne seront pas simples à vulgariser par les médias généralistes – en dépit du travail effectué par le service de presse de l’Inserm.

Ce dernier nous rappelle que les attentats du 13 novembre 2015 « ont laissé des marques durables, non seulement sur les survivants et leurs proches, mais aussi sur la société française dans son ensemble ».  Fut alors mis en place le « Projet 13-Novembre » : un programme de recherche transdisciplinaire porté par HESAM Université, le CNRS et l’Inserm. Co-direction assurée par le neuropsychologue Francis Eustache et l’historien Denis Peschanski, directeur de recherche au CNRS.

Objectif : étudier la construction et l’évolution de la mémoire après les attentats du 13 novembre 2015, et en particulier l’articulation entre mémoire individuelle et mémoire collective de ces événements traumatiques – et plus généralement mieux comprendre les facteurs protégeant les individus du stress post-traumatique.

Dans ce cadre, une étude d’imagerie cérébrale intitulée « Remember » s’intéresse aux réseaux cérébraux impliqués dans le Trouble de stress post-traumatique. Ce sot ces travaux qui donnent lieu aujourd’hui à une publication dans la revue Science, le 14 février 2020. Les auteurs se sont penchés sur le phénomène de la résurgence intempestive des images et pensées intrusives chez les patients atteints de stress post-traumatique. Cette résurgence est généralement attribuée à une « défaillance de la mémoire ». Selon les chercheurs français elle serait également liée à un « dysfonctionnement des réseaux cérébraux qui la contrôlent ».

Eclairer en amont, se rapprocher au plus près de la réalité cellulaire sinon moléculaire. De manière, en suivant cette piste à mieux comprendre le substrat de certaines souffrances. Et espérer identifier ainsi de nouvelles pistes de traitement. Plus de cinq ans après l’horreur du 13 novembre.

A demain @jynau

1 Mary A, Dayan J, Leonne G et al, Resilience after trauma: the role of memory suppression, Science, 14 février 2020

Perversité ou pas, le pédophile tourangeau restera emprisonné loin des Philippines

Bonjour

Loin du Flore et de la littérature, c’est une scène de la justice ordinaire. Mandé depuis la chambre de l’instruction de la cour d’appel d’Orléans le papier est publié dans La Nouvelle République du Centre Ouest (Vincent Baranger). « Il avait filmé ses « ébats » avec une philippine de 9 ans » Pied de page 4, édition d’Indre-et-Loire.

L’affaire trouve ses racines antipodiques dans une cyber-enquête de la police australienne qui, en 2017 avait permis de remonter à deux hôtels ayant servi de lieu de tournage à des scènes de viol sur mineur. Sur une vidéo filmée avec un portable, les enquêteurs sont parvenus à identifier « un quadragénaire tourangeau ayant des relations sexuelles avec une fillette des Philippines, âgée de 9 ans ».

« Aujourd’hui âgé de 48 ans, l’homme soutient avoir accepté cette proposition d’exploitation sexuelle d’une mineure… par un souteneur, qui serait l’oncle de la victime, moyennant de l’argent ‘’pour subvenir aux besoins de la famille’’, rapporte le quotidien régional. Il ne conteste pas les faits mais les relativise :‘’J’étais attaché à cette jeune fille.’’ » On peut voir là un grand classique du déni.

Jusqu’ici jamais condamné, l’homme a subi deux expertises psychiatriques. On apprend que la première le présente comme « un déviant, un pervers », qui exploite sexuellement des mineurs vulnérables car défavorisés.  Quant à la seconde, plus nuancée, elle observe  « des tendances pédophiles mais pas de dangerosité psychiatrique ». Là encore, un grand classique pour qui s’intéresse à la définition de la perversité 1 et aux divergences idéologiques des experts de la psychiatrie médico-légale.

Pour la défense :  Me Louise Thome, assure que son client « a un sentiment de honte » et souligne que « l’incarcération actuelle n’est pas le seul moyen de réinsérer son client ». Et d’insister sur la nécessité de « soins plus poussés » en contrôle judiciaire. Il faut aussi tenir compte de son projet de sortie :un hébergement à La Riche (Indre-et-Loire), chez sa nouvelle compagne ; une promesse d’embauche. Ajoutons une caution de 30.000 € est proposée pour appuyer ses garanties de représentation et la remise de son passeport. 

Pour la partie civile : Me Emmanuelle Descot, conseil de la partie civile administrateur ad hoc « France Victimes 37 » craint une reprise de contact du suspect avec Internet « qu’il maîtrise ».

Pour l’avocat général : Alexandra Pethieu, s’oppose à la libération. Il entend prévenir « un renouvellement de l’infraction ». Il évoque une déviance pédophile « ancienne » (admise par le Tourangeau et par les deux experts psychiatriques) « déviance » qui s’est accentuée au fil du temps. Quant à la caution proposée, la magistrate aimerait détenir des garanties sur la situation financière. De plus, dans cette belle région de « tourisme sexuel » des Philippines, la dimension internationale de trouble à l’ordre public subsiste : « L’inconcevable a été réalisé ! » Elle requiert une confirmation de l’ordonnance de refus de liberté.

Le détenu : il clame sa volonté de rester en France et de ne pas récidiver, indiquant qu’« aux Philippines, c’est un contexte de prostitution ».

Loin des Philippines, du Flore, des médias nationaux et de toute forme de littérature la cour d’appel d’Orléans a rejeté la demande de mise en liberté.

A demain @jynau

1 Perversité(psychopathologie) : « Anormalité de la conduite générale et spécialement des comportements à l’égard d’autrui et de la Société conduisant à des actes asociaux et inhumains accomplis avec indifférence affective à l’égard de la souffrance d’autrui, absence complète de culpabilité et satisfaction personnelle » (Mucch. Psychol. 1969). « Il n’y a perversité véritable que dans une indifférence morale rebelle prolongée: il ne faut donc pas confondre avec les pervers, les impulsifs ou les nonchalants moraux » (Mounier, Traité caract.,1946, p.728).

− P. méton., rare. Action, pratique immorale ou contre nature d’une telle personne. « L’une des perversités (…) en usage au commencement de ce siècle, était le luxe des rats. Un rat, mot déjà vieilli, s’appliquait à un enfant de dix à onze ans, comparse à quelque théâtre, (…) que les débauchés formaient pour le vice et l’infamie » (Balzac, Splend. et mis., 1844, p.18).

Affaire-scandale du Mediator®: Prescrire soulève soudain deux questions bien dérangeantes

Bonjour

 Il faut lire l’éditorial, remarquable, du dernier Prescrire (février) : « Des rumeurs qui tuent ». « La rumeur n’épargne pas le domaine de la santé et y prospère même fort bien, écrit le mensuel toujours indépendant de l’industrie pharmaceutique. Ainsi en 2020, le vaccin rougeoleoreillons-rubéole (ROR) reste soupçonné par certains d’être une cause d’autisme, alors même que l’étude mentionnant ce lien, publiée en 1998 dans la revue The Lancet, a été rétractée en 2010 après révélation de multiples fraudes ».

On lira ici, dans ce numéro « Vaccin ROR : pas de lien avec l’autisme » (pages 114-116). « Dix ans plus tard, l’auteur de cette fraude continue de répandre la rumeur dans le monde entier, ajoute l’éditorialiste. Cette rumeur tue, à chaque fois qu’un enfant meurt de la rougeole parce que ses parents ont refusé de le vacciner par crainte de l’autisme, alors que cette crainte est infondée selon de nombreuses études fiables. »

Trente-trois ans de prescriptions

Avec le Mediator® (benfluorex), la rumeur fut d’un autre ordre, se souvient Prescrire. Elle entretenait son usage hors indications officielles. Au procès Mediator®, selon des responsables de la firme Servier et de l’Agence française du médicament, le benfluorex (ex-Mediator°) n’était pas un coupe-faim et n’était ni autorisé ni promu comme tel. Dès lors deux questions bien dérangeantes et jamais (ou presque) posées aussi clairement concernant des prescriptions qui ont duré trente-trois ans :

1 Sur quoi des médecins se sont-ils basés pour prescrire Mediator® comme coupe-faim sans danger ?

2 Sur quoi les patients qui l’ont pris (et parfois demandé pour cela) se sont-ils appuyés ?

« Pas sur les indications officielles de ce médicament, pas sur des résultats d’essais cliniques, répond Prescrire. Plutôt sur une rumeur qui, là aussi, a tué. Une rumeur colportée par qui ? » « Rumeur ». Le mensuel ne répond pas aux dérangeantes  questions qu’il pose.

A demain @jynau

Deuil d’un enfant : Emmanuel Macron en vient à dénoncer l’«inhumanité» de son gouvernement

Bonjour

Chaque année en France, 4 500 enfants meurent avant d’avoir atteint la majorité. Et, en France, la majorité des députés a osé rejeter une proposition de loi visant à porter de cinq à douze jours le congé accordé aux parents après le décès d’un de leur enfant.Comment le politique peut-il en arriver à une telle extrémité ? Comment une majorité tenue pour éclairée, en marche, peut-elle ainsi se discréditer – au point que le président de la République en personne fasse savoir, via son Palais de l’Elysée, qu’il avait demandé à ses godillots et à son gouvernement de « faire preuve d’humanité » ?

Résumons. La proposition de loi émanait de l’Union des démocrates et indépendants (UDI)-Agir. Lors du vote, jeudi 30 janvier, son rapporteur, Guy Bricout  (UDI-Agir, Nord) avait expliqué que les cinq jours donnés actuellement ne sont « pas à la hauteur » pour « reprendre pied suite à la mort d’un enfant ». On use des mots que l’on peut pour exprimer les douleurs indicibles.

En réponse, la députée Sereine Mauborgne (La République en marche, Sarthe), ancienne infirmière libérale, avait défendu la « possibilité pour l’employeur de créer un compte de don » de RTT par les collègues du salarié endeuillé. Il fallut aussi entendre Muriel Pénicaud, ministre macronienne du Travail , ancienne dirigeante d’entreprise, expliquer que le texte tel qu’il était rédigé ne reposait pas sur la solidarité nationale, mais sur un congé « payé à 100 % par l’entreprise ». Entendre qu’il ne revenait pas à l’entreprise de supporter cette nouvelle charge. Proposition de loi retoquée.

Faute majeure de la ministre Pénicaud : dès le lendemain le président du Medef lui-même, Geoffroy Roux de Bézieux, demandait un nouveau vote en faveur des douze jours. « C’est une évidence et c’est lancé », a-t-il répondu dans un tweet à l’ancienne présidente de l’organisation patronale Laurence Parisot, qui avait estimé un peu plus tôt que « le Medef s’honorerait à demander un nouveau vote de cette proposition ».

« En coulisses, les ‘’échanges ont été houleux’’ avec Muriel Pénicaud »

Dans l’intervalle les propos minstériels avaient soulevé l’indignation dans l’hémicycle. « On parle de la tragédie des tragédies », lança François Ruffin, dénonçant une majorité « mesquine ».Un  député (apparenté LR) des Ardennes dénonçait une « honte ». Et depuis le Sénat Bruno Retailleau, patron des LR annoçait qu’il proposerait « à l’ensemble des groupes politiques du Sénat de déposer en commun et de voter cette proposition de loi ». « Une question d’humanité » 

Il fallut finalement attendre le samedi 1er février, deux jours après le vote, pour que le président de la République Emmanuel Macron se manifeste sur le thème de l’humanité face à ces morts prématurées. Le même jour la ministre du Travail Muriel Pénicaud reconaissait que le gouvernement avait fait « une erreur » en s’opposant à cette proposition. « Face au deuil, il faut du soutien psychologique et nous allons le renforcer. Mais il faut aussi un temps de répit », a-t-elle ajouté, s’engageant « à trouver dans les prochains jours les solutions pour un passage à douze jours ».

 Manquait la voix de Marlène Schiappa. « Plus que choquée, j’ai trouvé que certains débats n’étaient pas dignes. Répondre avec des arguments financiers à un deuil d’enfant n’est pas audible », a confié la secrétaire d’Etat chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes. Selon Le Parisien  « elle aurait même mis sa démission dans la balance ».

« Dès jeudi soir et tout au long de la journée de vendredi, les boucles WhatsApp du gouvernement chauffent, raconte Le Parisien (David Doukhan et Alexandre Sulzer). Une autre ministre envoie un message directement au président de la République et au Premier ministre. « On a un problème… », alerte-t-elle directement. Les deux exigent aussitôt de le « traiter ».  Voyant la polémique monter, un membre du gouvernement alerte en parallèle le secrétaire général de l’Elysée, Alexis Kohler et Brigitte Macron, souvent confrontée, par sa position de première dame, à des enfants gravement malades. En coulisses, les « échanges ont été houleux » avec Muriel Pénicaud, témoigne une source interne. »

Muriel Pénicaud ? Sur BFMTV  elle s’est dit « blessée » par les critiques sur le manque d’humanité du gouvernement. Les citoyens électeurs apprécieront. Chaque année en France, 4 500 enfants meurent avant d’avoir atteint la majorité.

A demain @jynau