Bonjour
08/07/2020. Point n’est besoin, aujourd’hui, d’être dans les petits et grands secrets du Palais de l’Elysée. La décision spectaculaire (courageuse et à très haut risque) prise hier par le gouvernement italien sera au cœur, en début de soirée, du nouveau Conseil de défense réuni autour d’Emmanuel Macron. Avec une question centrale : le pouvoir exécutif français pourrait-il, le cas échéant, prendre une décision équivalente – une mesure drastique qui conduirait, schématiquement, à placer en quarantaine l’Est du pays, une fraction des Hauts-de-France voire d’une fraction de la Bretagne ? Le tout pendant la tenue des élections municipales. On imagine sans mal la somme des inconnues associées à une telle équation sanitaire, économique, sociétale, diplomatique – éminemment politique.
C’est par la presse que les seize millions d’habitants d’une douzaine de provinces italiennes, dont la Lombardie et la Vénétie ont appris, nier qu’ils seraient mis en quarantaine dès aujourd’hui et jusqu’au 3 avril. Début de panique. Avant même la confirmation des autorités – par la voix du Premier ministre Giuseppe Conte – la panique s’est emparée de centaines de Milanais « en fuite », qui se sont rués à la gare centrale, rapporte Il Tempo. « On a assisté à un assaut des trains de nuit en direction de Rome et du sud ». Sans surprise, lors d’une conférence de presse, tard dans la soirée, M. Conte a dénoncé l’irresponsabilité des médias, qui ont publié son projet de décret avant sa finalisation – pour autant il a confirmé les mesures draconiennes instaurées ce week-end, notamment les strictes limitations pour entrer et sortir des régions concernées.
« Les discothèques, les salles de sport, les piscines, les musées et les stations de ski seront fermés, précise la BBC, citée par Courrier International. Les compétitions sportives se joueront à huis clos et le président du syndicat des footballeurs a demandé l’arrêt du championnat italien »
« Etre responsable, ne pas faire les malins »
Avec près de 6 000 cas et 233 morts, l’Italie est le troisième pays le plus touché au niveau mondial. Les vingt-et-une régions sont toutes concernées, mais l’essentiel des cas est concentré dans le Nord, en Lombardie, en Emilie-Romagne et en Vénétie. Le pays a enregistré trente-six nouveaux morts liés au coronavirus en vingt-quatre heures, tandis que le nombre de cas est monté à 5 883 (+ 1 247) – bilan officiel publié le 7 mars.
L’objectif de ces mesures est à la fois de « contenir la propagation du virus, et d’agir pour éviter l’engorgement des structures hospitalières » explique le Premier ministre italien, cité par Il Corriere della Sera. Ces mesures entraîneront des désagréments, mais c’est le moment d’être responsables, pas de faire les malins ». Etre responsable ? Ne pas faire les malins ? Emmanuel Macron ou Edouard Philippe tiendront-ils, demain, des propos équivalents ?
Selon le texte publié sur le site du gouvernement italien, les déplacements dans une vaste et riche zone du nord du pays (qui englobe Milan et Venise) devront être limités à « des impératifs professionnels dûment vérifiés et à des situations d’urgence, pour des raisons de santé ». Pour éviter les déplacements à caractère professionnel, les entreprises, publiques et privées, sont invitées à mettre leur personnel en vacances.
Rome a également ordonné la fermeture des cinémas, théâtres, musées, pubs, salles de jeux, écoles de danse, discothèques et autres lieux similaires, sur l’ensemble du territoire national. Il sera en revanche toujours possible de faire ses courses, les jours de semaine, ou d’aller dans un bar ou un restaurant – à condition toutefois de respecter la distance de sécurité d’au moins un mètre entre les clients.
La dynamique virale croissante est en place
Tous les événements et compétitions sportives, quelque qu’en soit la nature, sont suspendus. Seules les compétitions ou entraînements des sportifs professionnels participant aux Jeux Olympiques ou à des manifestations nationales ou internationales sont autorisés, à condition qu’ils aient lieu à guichets fermés. Toute personne dont la contamination au coronavirus aura été confirmée sera obligatoirement assignée à résidence.
A l’évidence la France n’est pas dans la situation italienne (près de mille cas et seize décès recensés) et rien, en l’état de la situation épidémiologique de justifierait de prendre de telles mesures de confinement géant. Pour autant la dynamique virale croissante est en place. En dépit des mesures prises l’agent pathogène venu de Chine circule, à plus ou moins bas bruit sur des zones élargies du territoire national 1 et le pouvoir exécutif fait, comme il s’y était engagé toute la transparence sur la situation et son évolution – ce qu, paradoxalement peut ne pas être sans effets anxiogènes.
C’est dire l’importance, dans la soirée, des conclusions qu’annoncera, au regard des décisions prises par Rome, le Palais de l’Elysée.
A demain @jynau
1 Caractère évangéliste. A titre de précaution le préfet de Seine-Saint-Denis a interdit « un rassemblement à caractère évangéliste » ce week-end au Blanc-Mesnil, « susceptible de réunir jusqu’à 2 000 personnes provenant de plusieurs départements ». On sait qu’une rencontre similaire organisée fin février à Mulhouse (Haut-Rhin) a généré des dizaines de contaminations en différents endroits du territoire national , jusqu’en Guyane. Sur ce thème, dans Le Monde (Patricia Jolly) : « Coronavirus : à Mulhouse, l’église évangélique La Porte ouverte identifiée comme un foyer important de contamination Plus de 2 000 personnes – dont environ 300 enfants –, venues de toute la France et de pays limitrophes, s’y sont réunies en février dans le cadre d’une semaine de jeûne et de prière. »